Mis au ban depuis vingt ans de l’Église de France, Mgr Jacques Gaillot a été récemment remis en selle par le pape François.
Le souverain pontife a reçu longuement et chaleureusement en tête à tête l’évêque iconoclaste des sans-papiers à la résidence Sainte-Marthe à Rome. Chaud partisan du réformateur François, l’évêque français va suivre avec beaucoup d’attention le grand synode sur la famille qui rassemblera à partir de dimanche, et jusqu’au 25 octobre, les évêques et cardinaux du monde entier. En espérant voir venir les réformes promises…
Qu’attendez-vous de ce synode sur la famille ?
Mgr Jacques Gaillot : C’est un temps très important pour l’Église. Il y a eu beaucoup de remontées depuis le dernier synode, la réflexion a mûri. Nous espérons que des décisions seront prises, que l’on ira vers davantage d’ouverture. Je sais qu’il y a des résistances fortes au sein de l’Église, mais il est important d’ouvrir de nouveaux chemins. Le rôle de l’Église est d’accompagner, de soulager et non pas d’imposer des fardeaux nouveaux. Nous ne sommes pas là pour édicter. Il faut pouvoir donner une chance à un second mariage. De même, la société a offert plus de place aux droits des homosexuels, c’est une belle évolution. Les homosexuels ne sont pas des pestiférés, ils ont droit de cité. Il y a parmi eux des chrétiens qui demandent une bénédiction. C’est important. C’est une reconnaissance. Deux êtres qui s’aiment, c’est cela le plus important. On ne peut pas aller contre.
Vous êtes pour donner le sacrement du mariage aux couples homosexuels ?
Ce n’est pas le mariage des homosexuels ou l’accueil des divorcés qui vont détruire la famille classique. Ce qui lamine les couples, c’est le chômage, la précarité, la prison. Le mariage homosexuel n’est pas une menace pour la famille traditionnelle.
Pensez-vous que ce synode va permettre au pape d’avancer les réformes ?
C’est un pape pour notre temps. Il va vers les gens, quels qu’ils soient, où qu’ils soient, même vers les traditionalistes, et je trouve cela bien. Celui qui exclut ne peut pas se réclamer de l’Évangile. Ce pape part des gens tels qu’ils sont. C’est pourquoi il essaie de tenir compte des différentes opinions au sein de l’Église. C’est un réformateur, mais il ne veut pas casser l’institution. Il sait qu’il y a des conservateurs, il leur donne des gages comme il l’a fait dernièrement sur la famille à Philadelphie. Il souhaite que tout le monde comprenne qu’il faut s’ouvrir, mais il ne veut pas brader. On sent bien que cela traîne un peu des pieds au sein de l’Église. La famille, c’est un point sensible. Mais Jésus n’est pas venu ni pour les bien-pensants ni pour les bien-portants.
Propos recueillis par Jérôme Cordelier