En mai dernier, le président Enrique Pena Nieto avait annoncé qu’il comptait réformer la Constitution pour autoriser dans tout le pays le mariage et l’adoption pour les couples homosexuels.
La ville de Mexico a été, dès 2007, la première en Amérique latine à autoriser les unions civiles pour tous, avant d’ouvrir le mariage égalitaire en 2009. Il est depuis légal dans 9 des 32 États du Mexique et la Cour suprême a émis en 2015 un jugement qualifiant d’inconstitutionnel son interdiction. Mais aucune réforme n’a été votée au niveau fédéral. D’où cette initiative de « légalisation formelle », qui nécessite toutefois l’aval du Congrès. Et le parti au pouvoir, le PRI, qui contrôle les deux chambres, n’y semble pas particulièrement favorable, à l’instar de centaines d’organisations principalement religieuses, qui se sont unies au cours des dernières semaines sous la bannière du « Front pour la famille », pour appeler à lutter contre « l’empire gay ».
En réaction, les partisans de la loi ont également créé un regroupement appelé « Front orgueil national Mexique », rapporte La-Croix. Et ce samedi, entourés d’un impressionnant service d’ordre pour éviter les débordements, les deux camps ont manifesté sur la plus grande avenue de la capitale, avec d’un côté une marée blanche de quelque 18.000 à 20.000 personnes, selon les autorités (et 150.000 selon les organisateurs ), pour vanter la « famille naturelle ». De l’autre, des manifestants arborant les couleurs de l’arc-en-ciel, au nom des droits de l’homme et de la laïcité, ainsi qu’une poignée de jeunes qui brandissaient des pancartes proclamant « Je suis catholique et je suis gay. Je veux pratiquer avec toi! ». Aucun heurt n’a été signalé.
« Cette réforme va ouvrir les yeux de la société sur les différentes orientations sexuelles. Les catholiques pourront continuer à se marier entre hommes et femmes. Mais les gays pourront faire valoir leur droit comme individus à se marier et à adopter un enfant », soutient Cristian Galarza, l’un des porte-parole du regroupement qui a reçu l’appui de plusieurs organisations, syndicats et d’universités du pays.
Mais pour les opposants, « le discours laisse croire que le contenu des livres pédagogiques sera modifié pour y inclure cette question de diversité sexuelle. Le problème, c’est que l’on censure toutes les autres idées qui ne soutiennent pas cette idéologie des genres », s’insurge Andrés Chávez, coordinateur du Front pour la famille de Mexico.
« Ils vont changer la mentalité de nos enfants, ils vont leur dire qu’ils peuvent être ce qu’ils veulent, alors qu’à la naissance, on a déjà une identité : être un homme ou une femme », déplore une participante à la marche, évoquant le spectre de la fameuse « théorie du genre » dans les écoles mexicaines pour justifier son opposition à la loi. « Ils ne pourront jamais être égaux à nous, à la famille, c’est une question de nature ! Ils ne pourront jamais être ce que nous sommes, mon épouse, ma fille et moi », ajoute un autre.
Devant la discorde, le gouvernement a récemment affirmé que le projet ne constituait « pas un dossier prioritaire ».
Anne V. Besnard
stophomophobie.org