Après que plusieurs journaux et ONG ont révélé des actes de tortures contre les homosexuels en Tchétchénie, république conservatrice du Caucase, Stop homophobie, Mousse et le Comité Idaho France ont déposé mardi 16 mai une plainte devant la Cour pénale internationale (CPI) contre le président tchétchène. Une enquête a été ouverte par le parquet général russe, qui assure toutefois n’avoir reçu « aucune plainte officielle » de victimes.
Etienne Deshoulières, avocat représentant les associations, a expliqué à Libération les objectifs de la procédure, qui peut entraîner un processus en trois étapes :
« La première consiste à vérifier de manière sommaire les faits. Ensuite, le parquet décide ou non de mener une enquête sur place. Cette procédure nécessite ainsi de conduire des entretiens. Une fois que les faits sont avérés, le procureur peut se saisir de la CPI. Dans ce cas, on peut imaginer que le président tchétchène Ramzan Kadyrov, au terme du procès, soit condamné à une peine d’emprisonnement. On n’en est pas là. Le système de justice international ne fonctionne pas rapidement. Pour l’instant, la plainte vient d’être déposée pour qu’il y ait des vérifications. »
Outre l’effet juridique, il s’agit également de pointer du doigt les indices graves et concordants, insiste Me Deshoulières : « Les associations que je représente souhaitent que les diplomaties française et européenne s’en saisissent. Un certain nombre de témoignages d’associations et de journaux locaux confirment ces persécutions ciblées contre les homosexuels et demandent une action ».
La Russie a demandé l’an dernier le retrait de sa signature de la Cour pénale internationale. Son départ sera effectif, d’après le statut de Rome, le traité fondateur de la CPI, un an après, soit en novembre 2017.
« Mais ce qui importe, c’est le moment où les actes sont commis : La Russie était signataire. La Cour pénale internationale ne peut pas laisser faire des actes contraires à l’objet de la convention. La situation se compare à celui d’un contrat d’assurance. Si un sinistre se passe pendant la durée d’un contrat, même s’il est résilié, l’assurance doit le prendre en compte. »
La plainte a été relayée partout dans le monde et surtout en Russie, où la presse est habituellement discrète sur la question, ce qui n’a pas manqué d’agiter l’opinion.
Réaction de Kadyrov : 1mn20
Rescapés réfugiés :
Merkel interpelle Poutine :
Sir Alan Duncan s’exprime sur les « purges » au Parlement britannique :
Marco Rubio au Sénat américain :
Mobilisations :
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— Dav Le Fou (@Davlefou) 20 mai 2017
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Une centaine de personnes ont par ailleurs manifesté ce 17 mai dans le centre de Saint-Pétersbourg, deuxième ville de Russie, pour dénoncer ces persécutions et appeler les pays étrangers à donner l’asile aux homosexuels tchétchènes. Une quarantaine a déjà été exfiltrée. Et deux nouveaux rescapés ont trouvé refuge en Lituanie, comme l’a confirmé mercredi Linas Linkevicius, ministre des Affaires étrangères de ce pays balte, membre de l’Otan et de l’UE. Une quinzaine devrait suivre vers la France, si nous parvenons à coordonner le voyage en toute discrétion. Nous sommes aussi en contact avec le réseau LGBT russe et d’autres groupes dédiés.
Jeudi, le Parlement européen a également demandé la « libération immédiate » de toutes les personnes détenues « illégalement » dans ce cadre, invitant la Russie et son gouvernement à prendre ses responsabilités pour « assurer la protection juridique et physique des victimes, ainsi que des défenseurs des droits de l’homme et des journalistes ». Condamnant toutes les déclarations des autorités de Tchétchénie « qui tolèrent et encouragent les violences à l’encontre des personnes LGBTI », les eurodéputés rappellent que « les traditions régionales, culturelles et religieuses ne sauraient servir d’excuse à des actes de discrimination, de violence ou de torture, en raison de l’orientation sexuelle des personnes visées. »
Mardi, la député européenne Karima Delli avait déjà appelé au « boycott de la Coupe du monde de football » organisée en 2018 en Russie. « Pendant que certains joueront au foot, d’autres seront massacrés », avait-elle dit.
Les autorités russes et tchétchènes doivent dire « haut et fort qu’être lesbienne, gay, bi, trans ou intersexe, ce n’est pas contre quelque tradition religieuse que ce soit, c’est quelque chose qui a toujours existé, partout sur la planète, à toutes les époques, dans toutes les religions et cultures », a plaidé lors du débat l’élue écologiste autrichienne Ulrike Lunacek.
Valentine Monceau
stophomophobie.com