Une femme transgenre de 28 ans, qui souhaitait modifier son état civil, avait été déboutée une première fois par le tribunal de grande instance de Montpellier en mars 2016, faute d’avoir pu justifier une « impossibilité définitive de procréer dans son sexe d’origine », seule à même « d’entraîner le caractère irréversible de la transformation exigé par la jurisprudence. »
Elle avait entamé un traitement hormonal depuis 5 ans, en plus de multiples opérations chirurgicales du visage, de la poitrine, de la pomme d’Adam, ainsi qu’une « féminisation de sa voix », mais sans chirurgie génitale.
« Mutiler une personne pour qu’elle obtienne des documents d’identité, est une aberration au XXIe siècle », s’était alors indignée son conseil, Me Magaly Lhotel, en annonçant que sa cliente interjetait appel.
Depuis novembre 2016, le fait de ne pas avoir subi des traitements médicaux, une opération chirurgicale ou une stérilisation ne peut plus désormais motiver le refus de faire droit à une demande de changement d’état civil. Selon l’amendement voté en effet par le Parlement dans la loi de modernisation de la « Justice du 21e siècle » : toute personne majeure ou mineure émancipée « qui démontre par une réunion suffisante de faits que la mention relative à son sexe à l’état civil ne correspond pas à celui dans lequel elle se présente et dans lequel elle est connue peut en obtenir la modification » devant un tribunal de grande instance.
La cour d’appel de Montpellier a finalement donné raison à Emilie, lui reconnaissant ainsi pleinement son droit de changer de sexe à l’état civil, sans être opérée. « Une première en France, qui fera donc jurisprudence », a souligné sur Francebleu son avocate. Le procureur général s’était prononcé contre. Mais le juge a considéré que « la reconnaissance sociale en tant que femme était prouvée par les témoignages de sa famille et ses amies, mais aussi avec Pôle Emploi où elle est inscrite sous son nom de femme, de billets SNCF ou de cartes de fidélité et qu’elle était donc considérée socialement comme une femme. »
Et ça va tout changer dans sa vie, « ne serait-ce que pour trouver un emploi car même si elle est inscrite sous son prénom féminin, ses documents d’identité ne correspondaient pas. Elle va pouvoir voyager sans se faire arrêter à la douane, réserver des vacances avec des amis », ajoute Me Lhotel.
Plusieurs associations, dont Acthé, (Association Commune Trans et Homo pour l’Egalité) qui avait déjà dénoncé dans cette affaire « une discrimination des institutions », plaident pour la suppression de la procédure en justice, obligatoire au changement d’état civil, pour une simple déclaration administrative.
Avec ces termes, la cour d’appel de Montpellier enterre les critères de la jurisprudence du 7 juin 2012 et du 13 février 2013 de la cour de Cassation, estime Acthé. Elle exprime clairement que la reconnaissance sociale est, conformément à la volonté du législateur, la seule condition pour obtenir un changement d’état civil.
Valentine Monceau
stophomophobie.com