Saisie mi-novembre par le ministère de la justice, la Cour suprême de Russie a ordonné, jeudi 30 novembre, de « reconnaître comme extrémistes le mouvement international LGBT et ses filiales, et d’interdire immédiatement leurs activités sur le territoire de la Fédération ».
L’affaire étant classée « secrète », l’audience s’est également déroulée à huis clos, avec un représentant du ministère russe de la justice mais sans défenseur, rapporte l’AFP, le « mouvement international LGBT » n’existant pas en Russie. Plusieurs organisations avaient néanmoins adressé un courrier la veille du vote au tribunal, qui a débouté les arguments de discrimination et violation de la constitution russe.
Membres, militants et alliés qui risquaient déjà de lourdes amendes (jusqu’à 160 000 euros), encourent donc désormais de lourdes peines de prison également.
« Nous sommes devenus des boucs émissaires pour détourner l’attention des véritables problèmes qui noient le pays », fulmine Olga Baranova, directrice d’un centre LGBT+ à Moscou.
Ian Dvorkine, fondateur en Russie de l’ONG Centre T, qui aide les personnes transgenres, dénonce pour sa part « un nouveau pic de folie », « tout le monde pouvant tomber sous cette accusation d’extrémisme ». D’ailleurs, « de plus en plus de personnes » demandent de l’aide pour quitter le pays, ajoute-t-il, lui-même ayant fui la Russie par crainte d’être emprisonné, pour avoir créé son association. « Travailler en Russie devient très incertain (…) On dirait que les militants LGBT+ qui survivront, vivront entièrement cachés ».
Rappelons qu’en 2013, Vladimir Poutine a promulgué une loi qui interdit la « propagande » de « relations sexuelles non traditionnelles » à l’adresse des mineurs, élargie fin 2022 à tous les publics, médias, Internet, dans les livres et les films. Et en juillet dernier, un autre texte est entré en vigueur, prohibant « toute intervention médicale » pour les réassignations de genre, notamment les opérations chirurgicales et les thérapies hormonales, ainsi que changement de la mention du sexe dans les documents d’identité et l’adoption d’enfants par les personnes transgenres.
Ce vendredi 1er décembre, un tribunal de Saint-Pétersbourg a ainsi condamné la chaîne musicale AIVA à une amende de 500 000 roubles, un peu plus de 5 000 euros, pour « propagande » LGBT, après la diffusion d’un clip, « Tak krassivo », (« si beau »), datant de 2017, montrant deux mains « se caressant » et qui pourraient appartenir à « deux personnes du même sexe ». Une interaction qui pourrait être perçue comme « sensuelle » et, ayant lieu entre des « personnes affichant leurs préférences homosexuelles », laisserait penser que ces « préférences » sont « acceptables » et « égales à l’union entre un homme et une femme », a expliqué le tribunal dans un communiqué. La chanson est interprétée par Sergueï Lazarev, une vedette en Russie qui a représenté deux fois son pays à l’Eurovision.