Paris – Condamné à deux mois de prison ferme avec un mandat de dépôt pour rébellion lors d’une manifestation dimanche soir, un jeune anti mariage homosexuel devait être écroué mercredi soir, une première qui a suscité l’indignation des opposants à la loi Taubira.
L’homme de 23 ans a été condamné à quatre mois de prison, dont deux mois ferme et 1.000 euros d’amende en comparution immédiate par le tribunal correctionnel de Paris, selon une source judiciaire.
Le jeune homme était présent dimanche avec quelque 1.500 opposants au mariage homosexuel devant les locaux de la chaîne de télévision M6, à Neuilly-sur-Seine (Hauts-de-Seine), où François Hollande participait à l’émission « Capital ».
Il a ensuite manifesté avec d’autres opposants au mariage homosexuel dans le XVIe arrondissement, où il a été interpellé, selon la source, aucune manifestation n’y ayant été déclarée.
Le jeune homme a refusé de se livrer à un prélèvement de ses empreintes ou à un prélèvement ADN, a-t-on ajouté.
« C’est scandaleux, monstrueux », a déclaré à l’AFP, Me Frédéric Pichon, avocat très impliqué dans la défense des opposants au mariage homosexuel, qui avait été désigné pour défendre le jeune homme, mais qui a été finalement substitué par l’un de ses confrères. Ce dernier n’a pu être joint par l’AFP.
« Ils ont voulu faire un exemple, il était dans le collimateur. Ils veulent que le mouvement s’arrête », a poursuivi Me Pichon, qui a affirmé que le jeune homme a fait appel.
Sur le réseau social Facebook, les réactions n’ont pas tardé. « Lamentable », « délirant », pouvait-on notamment lire dans des commentaires postés sur la page d’opposants au mariage homosexuel « Prisonnier politique ».
« Aujourd’hui, si on n’est plus d’accord avec le gouvernement et qu’on se rebelle, on va en prison, en prison! », a déclaré à l’AFP Béatrice Bourges, porte-parole du Printemps français.
Agissements arbitraires
« Les délinquants qui attaquent un RER et dévalisent les gens, ils n’ont que du sursis ou rien », a-t-elle ajouté en référence à l’attaque d’un RER à Grigny (Essonne), « et là parce qu’un jeune se rebelle, il a deux mois de prison ferme. Ce soir il est avec les délinquants, traité comme un délinquant dangereux. »
« La Manif pour tous est extrêmement émue, bouleversée de ce qui est arrivé à ce jeune homme », a déclaré de son côté Ludovine de la Rochère, présidente du mouvement, affirmant que le jeune homme était un « sympathisant ».
Les manifestations contre le mariage homosexuel ont été émaillées d’incidents parfois violents faisant plusieurs dizaines de blessés parmi les forces de l’ordre et donnant lieu à plusieurs centaines d’interpellations.
Cinquante parlementaires d’opposition, presque tous membres de l’UMP, ont écrit mardi à François Hollande pour dénoncer les « agissements arbitraires » des forces de l’ordre, dont sont victimes, selon eux, les opposants au mariage pour tous, selon le député UMP-PDC Jean-Frédéric Poisson.
Les parlementaires évoquent des « intimidations incessantes », « des arrestations ayant pour seul motif le port d’un t-shirt ou d’un drapeau », « des arrestations, séquestrations et gardes à vue arbitraires » ou « des pratiques disproportionnées en termes de maintien de l’ordre ».
« De très nombreuses plaintes sont ou seront déposées pour obtenir réparation de l’Etat », poursuivent les signataires, parmi lesquels le député de la Drome, Hervé Mariton, en pointe dans l’opposition au mariage homosexuel, le député des Alpes-Maritimes, Eric Ciotti, ou l’ex-ministre Valérie Pécresse.
Le 7 juin, des avocats ont déposé auprès du parquet de Paris plus de cent plaintes liées à des interpellations effectuées en marge de manifestations.
Les responsables de la Manif pour tous ont de leur côté rencontré mercredi soir 150 de leurs militants souhaitant également intenter une action en justice notamment contre l’Etat.
La loi ouvrant le mariage aux couples homosexuels a été promulguée le 18 mai par le président François Hollande au Journal officiel, au lendemain de la validation du texte par le Conseil constitutionnel.
Le veille, le chef de l’Etat avait demandé « que chacun prenne conscience de ses responsabilités ». « Des contestations ont eu lieu, mais aujourd’hui c’est la loi, et la loi de la République », avait-il déclaré.