La police et une ambulance ont été appelées mardi soir suite à une agression qualifiée d’homophobe. La victime n’a pu être entendue, mais différents témoignages accréditent cette thèse.
La Perle du Lac a-t-elle été le théâtre d’une agression homophobe dans la nuit de mardi à mercredi ? Oui, assurent des témoins. Possible, selon la police. Il est passé 2 heures du matin ce mardi quand la centrale reçoit la réquisition. Un homme aurait été roué de coups par une dizaine de jeunes dans le parc. Alerté par des cris, Chris* va recueillir le témoignage de la victime: «Il a été attaqué par derrière. Au sol, ils l’ont frappé à coups de pieds et de cannes orthopédiques tout en l’insultant.» Des insultes homophobes selon lui. «Salement amoché, il a été pris en charge par les ambulanciers.»
A l’arrivée de la police, la victime a quitté les lieux. «Il nous a expliqué être en situation irrégulière et craignait de témoigner, rapporte Chris. En état de choc, l’homme blessé est parti chercher son vélo, avant que l’un d’entre nous le ramène aux secouristes». Entre-temps, les agents ont pris le signalement des agresseurs, «un groupe de très jeunes hommes dont certains avaient des béquilles» et sont partis quadriller le parc et les alentours. En vain.
«La brigade cynophile a interrogé plusieurs groupes, mais aucun ne correspondait suffisamment au signalement. Les ambulanciers ont toutefois vu des individus qui correspondaient», déclare Silvain Guillaume-Gentil, porte-parole de la police genevoise. «Apparemment, ils se dispersent et se regroupent comme un nuage, ironise Marc*, un autre témoin. Là, ils cassent de l’homo, mais ça aurait pu être quelqu’un d’autre.»
La victime, elle, n’a pas été entendue et, pour l’heure, aucune plainte n’a été déposée. Une enquête a-t-elle été ouverte? «Non, mais un contact avec la victime sans une plainte formelle peut ouvrir une enquête s’il s’agit de lésions corporelle graves», précise l’officier de presse.
«Une victime homo sur deux se tait»
«On sait que ce type d’agression existe à Genève. Quelques bandes s’attaquent aux homos fréquentant les parcs. Ils les volent ou commettent des crimes de haine», explique Michael Häusemann, chargé de projet contre l’homophobie à Dialogai. Ces faits sont connus de la police genevoise qui ne tient toutefois pas de statistique. «De nombreuses personnes n’osent pas porter plainte, des chiffres ne seraient pas pertinents», note Silvain Guillaume-Gentil. «Environ une victime sur deux se tait», précise Dialogai. Des parcs sont ainsi sérieusement déconseillés à la communauté, tel que Geisendorf, réputé dangereux la nuit.
Une étude de l’association réalisée en collaboration avec l’Université de Zurich conclut que la violence homophobe n’a pas diminué ces dix dernières années à Genève. «Entre 80 et 85% des hommes gays et bis ont été victimes de violence dans leur vie, rapporte Dialogai. Parmi les «items» de la violence retenus pour notre enquête, les agressions verbales, physiques et le harcèlement sexuel sont ceux qui sont le plus clairement homophobes.» Pourquoi ces faits sont-ils si peu connus, tant des autorités que du public? Michael Häusermann avance deux raisons: «Il faut dévoiler son homosexualité lors d’un dépôt de plainte et le rapport de confiance entre la police et la communauté n’est pas évident. Il y a peu de temps, les forces de l’ordre fichaient encore les homos. Enfin, le procureur classe généralement ce type d’affaire sans véritable enquête.» L’association appelle de ses vœux une campagne de sensibilisation contre les crimes de haine organisée par la police.
*Identités connues de la rédaction (TDG.CH)