Je m’appelle Jérémy. J’ai 18 ans, et je suis étudiant en faculté de droit. Je tiens à témoigner sur mon homosexualité, car cela fait bien trop longtemps que je la cache. En réalité, cela fait très peu de temps que j’ai réussi à faire mon coming-out à un ami. Rien que l’idée de devoir le dire à quelqu’un en face me terrifiait. Il se trouve que je suis entouré de personnes assez homophobes, ou du moins, hypocrites.
Mais par où commencer…? Je me suis rendu compte de mon homosexualité vers l’âge de 14 ans. Je n’avais jamais eu de sentiments pour une fille, je ne me sentais pas comme un garçon de mon âge dit « normal ». Dès lors, je savais que j’étais différent. Que j’étais gay, et que je ne l’avais pas choisi. Et c’est à partir de ce moment-là que j’ai commis, je pense, une des plus grosses erreurs de ma vie : j’ai nié, j’ai tout refoulé… Depuis ce jour, j’ai vécu une véritable torture mentale. J’y pensais tout le temps. Et j’effectuais un énorme travail sur mon mental. Je me forçais à être hétérosexuel. Bien entendu, cela n’aboutissait pas.
Il y a eu toutefois un changement à ma rentrée en terminale. Je suis tombé amoureux d’un homme.
Malheureusement, cet amour était impossible. C’est pourquoi j’ai une fois de plus nié mon homosexualité. D’autant que les opinions des autres n’avaient pas changé. Les choses sont donc redevenues comme avant : travail sur moi-même le matin en me regardant dans la glace, et le soir dans mon lit. Mais tout avait changé : j’étais tombé amoureux d’un homme. Et cela avait tout fait changer. Je vivais ce refoulement de plus en plus en mal. Mais j’ai montré un certain « talent » à cacher ce mal-être : personne ne s’en est douté (et personne ne s’en doute encore…). Au fil des années, je me suis mis un véritable masque, et les autres n’y ont vu que du feu. Après le bac, je n’ai plus vu l’homme que j’aimais. Ce manque me rendait vraiment de plus en plus malheureux, dépressif. Mais comme toujours, je me cachais derrière ce masque de « Jérémy, garçon tout à fait banal ».
Puis vint ce jour… Le 12 août 2010. Le supplice rendait ma vie insupportable. Ainsi, pendant ces vacances d’été, dans la maison de famille, j’ai profité d’être seul pour m’enfermer dans la salle de bain, avec une lame de rasoir. J’allais le faire. J’allais mettre fin à mes jours. Mais un « miracle » est survenu : un cousin est arrivé. Immédiatement, je me suis ressaisi, et j’ai caché la lame, et fait comme si de rien n’était. Toutefois, ce travail mental a eu du mal à disparaître. Le masque était encore là.
Enfin, l’étape la plus importante de ma vie je pense : Noël 2010, lors du réveillon avec toute la famille. Mon frère aîné racontait l’anecdote d’un ami : ce dernier était allé en boîte de nuit et s’était fait draguer par un jeune gay. Il l’a tabassé. L’anecdote a fait rire toute la famille, tous pensaient que le pauvre gars avait mérité ce qui lui était arrivé. A ce moment précis, quelque chose s’est produit en moi : j’ai eu un énorme dégoût pour toute ma famille. Et c’est vraiment là que j’ai arrêté de nier : je suis Jérémy, et je suis gay. J’avais arrêté de me mentir à moi-même, même si je ne l’avais encore dit à personne. Mais étrangement, depuis ce réveillon, je me sens mieux : je m’accepte comme je suis. Je suis fier de ce que je suis.
J’étais tout de même tracassé de n’en avoir encore parlé à personne. Il se trouve que j’ai été élevé dans une famille plutôt chrétienne : mes proches sont, comme je l’ai dit plus tôt, homophobes, à différentes échelles. Et en particulier mes parents. Combien de fois ai-je entendu mon père dire qu’il détestait les homosexuels, que tous méritent la mort, que s’ils ne peuvent pas avoir d’enfants c’est pour une bonne raison, qu’ils tireraient une croix sur un de ses enfants si celui-ci était homosexuel… Et il y a aussi ma mère. Elle est moins extrémiste, mais dans ces propos, je vois clairement qu’elle serait capable de m’abattre sur place si je lui révélais mon homosexualité. De plus, la majorité de mes amis (pour ne pas dire tous) sont hétérosexuels, et je vois aussi clairement dans leurs propos qu’ils pourraient me lâcher s’ils apprenaient ce que je suis réellement, ce que je cache depuis trop longtemps.
Et puis un jour de mars 2011, deux mois environ s’étaient écoulés depuis cette scène de famille. Et je n’avais encore rien dit. Ce masque… Je le portais toujours. Et là j’ai pris ma décision. Dès lendemain, j’allais en parler à mon meilleur ami. Je verrais bien sa réaction. J’espérais pouvoir lui faire confiance…
J’ai effectivement dit les choses à mon meilleur ami, en face. Et sa réaction m’a fait un bien fou. Il souriait et m’a dit grosso modo : « Je suis très heureux pour toi. Heureux que tu arrives enfin à t’assumer, à aimer ce que tu es. » Il m’a aussi précisé que je restais son meilleur ami, qu’il trouvait l’homosexualité tout à fait normale. Ensuite, il a ajouté qu’il s’en doutait un petit peu. Apparemment, à chaque fois que l’on abordait un sujet sur l’homosexualité, j’avais l’air très tendu. Et il y avait surtout le fait que je n’ai jamais eu de copine. Puis il m’a posé plusieurs questions, si j’étais déjà tombé amoureux, comment j’ai découvert mon homosexualité… Bref, je ne m’attendais pas à une réaction aussi positive.
C’est fou comme en parler à quelqu’un est bénéfique. Après, je ne me sens pas encore prêt d’en parler à ma famille, mais j’imagine que l’occasion se présentera de façon idéale. Si j’avais un conseil à donner à d’autres personnes qui vivent une situation similaire à la mienne, ce serait de ne pas se rejeter. Il faut s’accepter tel que nous sommes. Et même s’il existe des personnes homophobes, dites-vous qu’il en existe aussi des très tolérantes, qui vous accepterons.
Je tiens donc à vous dire un grand merci. Vraiment. Votre facebook m’a vraiment fait réaliser qu’il fallait que ça se sache, et que je pouvais compter sur des personnes que j’estimais de confiance. J’espère de tout coeur que de nombreux autres homosexuels qui vivent dans la peur puissent voir votre page et qu’ils puissent réaliser que l’homosexualité n’est pas une honte. Donc Merci à « Vive les homosexuels » d’exister.
Jérémy, 18 ans.