Les maires ne pourront pas légalement invoquer leur liberté de conscience pour refuser de célébrer des unions homosexuelles. Après avoir planché sur le sujet le 8 octobre dernier, le Conseil constitutionnel a tranché la question hautement polémique ce vendredi.
« Le Conseil a jugé qu’eu égard aux fonctions de l’officier de l’état civil dans la célébration du mariage, le législateur n’a pas porté atteinte à leur liberté de conscience (en n’incluant pas de clause de conscience dans la loi, ndlr). Il a jugé les dispositions contestées conformes à la Constitution », écrit le Conseil constitutionnel dans un communiqué diffusé sur son site internet. « En ne permettant pas aux officiers de l’état civil de se prévaloir de leur désaccord (…), le législateur a entendu assurer l’application de la loi par ses agents et garantir ainsi le bon fonctionnement et la neutralité du service public de l’état civil », écrivent aussi les Sages.
Sur la forme, la requête était simple: dans leur Question prioritaire de constitutionnalité (QPC), un collectif de maires (essentiellement de droite et d’extrême droite) demandait au Conseil si l’absence dans la loi de disposition garantissant la liberté de conscience des officiers d’état civil hostiles au mariage gay est conforme ou non à la Constitution.
Sur le plan légal, elle relevait toutefois du casse-tête juridique, sans parler de sa forte portée symbolique. « Le Conseil constitutionnel a l’opportunité de prendre une grande décision », avait indiqué à l’AFP l’avocat de ces maires, Geoffroy de Vries. « Va-t-il ouvrir la porte à une exception pour ceux qui sont opposés au mariage homosexuel? », demandait-il. En ce cas, pourquoi ne pas invoquer une exception pour les maires opposés au mariage tout court?
Si l’objection de conscience avait été reconnue cela « reviendrait à autoriser une discrimination » contraire à la loi entre les couples homosexuels et hétérosexuels, faisait valoir avant le rendu de la décision l’adjoint au secrétaire général du gouvernement Thierry Xavier Girardot.
57% des Français sont contre
Le refus de marier un couple, quel qu’en soit le motif, est un délit passible de poursuites. Dans une circulaire du 13 juin, le ministre de l’Intérieur, Manuel Valls, rappelait d’ailleurs aux maires les risques encourus s’ils refusent de célébrer un mariage homosexuel: jusqu’à cinq ans d’emprisonnement et 75.000 euros d’amende.
Les élus récalcitrants peuvent même faire l’objet de sanctions disciplinaires allant de la suspension temporaire jusqu’à la « révocation par décret en conseil des ministres ».
Une sévérité en phase avec l’opinion. Une majorité de Français (54%) est opposée au fait qu’un maire puisse s’opposer à l’application d’une loi sur la base d’une objection de conscience, selon un sondage YouGov pour Le HuffPost et iTélé parue il y a quinze jours.
Concernant le seul mariage des personnes de même sexe, le pourcentage de personnes favorables à la clause de conscience baisse encore d’un point (33%), contre 57% qui y sont hostiles (10% ne savent pas).
Avant la décision défavorable des Sages, les maires requérants avaient déjà annoncé qu’ils se tourneraient vers la Cour européenne des droits de l’Homme (CEDH) pour tenter d’obtenir satisfaction. Ludovine de la Rochère, présidente de la Manif pour tous, fer de lance des manifestations géantes contre le mariage homosexuel, a quant à elle promis qu’il y aurait alors motif à « manifester largement ».