Les chercheurs qui participent actuellement à la conférence internationale sur le sida à Melbourne (Australie) accusent certains Etats de favoriser la propagation du sida en se dotant de lois stigmatisant l’homosexualité.
>> AIDS 2014 conference: Anger flares at homophobic laws : Nobel laureate Francoise Barre-Sinoussi, who co-discovered HIV, seized Sunday’s opening ceremony to criticize laws targeting minorities who bear a disproportionate share of the global pandemic
Les participants à la conférence internationale sur le sida ont exprimé leur colère à l’égard des pays dotés de lois qui stigmatisent l’homosexualité, les accusant de favoriser la propagation du virus, un sujet qui divise profondément pays riches et pays pauvres.
La question, qui mêle droits de l’Homme et santé publique, oppose les pays riches donateurs, où la discrimination à l’égard des homosexuels est interdite, aux pays plus pauvres dont plusieurs ont maintenu, ou adopté récemment, des lois homophobes.
Francoise Barre-Sinoussi, prix Nobel de médecine pour avoir codécouvert le virus du sida, a mis les points sur les i dès l’ouverture de la conférence, dont la 20e édition se déroule cette année à Melbourne.
«La cruelle réalité est que dans toutes les régions du monde, les stigmatisations et la discrimination continuent d’être les principales barrières à un accès efficace aux soins», a déclaré la chercheuse, qui copréside cette réunion des chercheurs du monde entier.
«Nous devons une nouvelle fois crier bien fort que nous n’allons pas rester immobiles lorsque les gouvernements, en violation de tous les principes des droits de l’Homme, mettent en place des lois monstrueuses qui ne font que marginaliser des populations déjà vulnérables», a-t-elle martelé.
Et les experts de rappeler l’expérience des débuts de l’épidémie, qui a tué 39 millions de personnes en 33 ans: le virus du sida, le VIH, s’est répandu lentement mais sûrement des minorités stigmatisées vers la population plus large. Et là, il a avancé à toute allure, à la manière d’un feu de brousse.
Si les homosexuels ou bisexuels sont menacés de prison ou de persécution, ils éviteront de se faire tester pour le virus ou de demander à être soignés s’ils sont infectés. Cette atmosphère toxique de silence et de peur est un terreau parfait pour la propagation du VIH.
Selon les spécialistes, le scénario est similaire pour les travailleurs sexuels et les drogués qui s’injectent leurs doses par intraveineuse.
Les 12.000 participants à la conférence sont encouragés à signer une «Déclaration de Melbourne», qui souligne que tous les gays, lesbiennes et personnes transgenre «doivent avoir les mêmes droits et un accès égal à la prévention, aux soins, à l’information et aux services en matière de sida».
– Couper les fonds des pays homophones? –
Si les droits des homosexuels s’accroissent dans les pays occidentaux –avec un alignement des droits des couples homosexuels sur ceux des couples hétéros–, d’autres pays, notamment en Afrique, et la Russie, ont renforcé leur législation de lutte contre l’homosexualité.
Selon un rapport du programme Onusida publié la semaine dernière, 79 pays ont des lois qui criminalisent les pratiques sexuelles entre personnes du même sexe et sept prévoient la peine de mort.
L’Ouganda et le Nigéria comptent parmi les pays ayant renforcé leur législation. L’Inde a restauré une loi antisodomie qui date de l’époque coloniale. La Russie interdit l’information sur les orientations sexuelles, comparée à de «la propagande».
Dans certains pays, «des lois interdisent la liberté de se rassembler ou d’association» pour les homosexuels, ce qui fait que les gens ne peuvent même pas se réunir ou recevoir des fonds, a souligné Kene Esom, un Nigérian qui travaille en Afrique du Sud pour une organisation promouvant la santé et les droits des gays.
Les pays occidentaux, qui ont financé la moitié des 19 milliards de dollars US (14 milliards d’euros) consacrés à la lutte contre le sida dans les pays en développement, en 2013, commencent à perdre patience, a déclaré Michael Kirby, ancien juge à la Cour suprême d’Australie et défenseur des droits de l’Homme.
Les dirigeants des pays aux lois homophobes «ne peuvent pas s’attendre à ce que les contribuables des autres pays continuent de payer, indéfiniment, d’énormes sommes d’argent pour des antirétroviraux s’ils refusent de réformer leurs lois afin d’aider eux-mêmes leurs propres citoyens».
Mais Jean-Francois Delfraissy, directeur de l’agence nationale française sur les recherches sur le sida (ANRS), dit craindre les conséquences médicales d’un arrêt des financements occidentaux.
Il préfère que les protestations des pays donateurs s’expriment via le Fonds mondial de lutte contre le sida, la tuberculose et le paludisme, afin d’éviter les accusations d’interférences par les pays riches dans les politiques intérieures des pays plus pauvres.
«Le médecin que je suis dit +dans ces pays-là, ils ont besoin d’antirétroviraux comme les autres, on ne va pas sanctionner les patients sous prétexte de faire bouger un gouvernement», dit-il à l’AFP.
«Par contre, le Fonds, ce n’est pas seulement une banque, c’est une entité morale et il peut donc indiquer un certain nombre de grandes directions, et les financements peuvent être sous conditions».
>> Campaigners at the world AIDS conference are taking aim at countries with anti-gay laws, accusing them of creating conditions that let HIV spread like poison.
Powerfully mixing concerns over human rights and health, the issue threatens to divide western donor countries where gay equality is making strides from poor beneficiary nations where anti-gay laws persist or have been newly passed, say some.
Nobel laureate Francoise Barre-Sinoussi, who co-discovered HIV and co-chairs the 6-day conference, seized Sunday’s opening ceremony to lay down a barrage of fire at laws targeting minorities who bear a disproportionate share of the global pandemic.
« The cruel reality is that in every region of the world, stigma and discrimination continue to be the main barriers to effective access to health, » she said.
« We need again to shout out loud that we will not stand idly by when governments, in violation of all human rights principles, are enforcing monstrous laws that only marginalize populations that are already the most vulnerable in society. »
Experts point to bitterly-won experience in the war on AIDS, which has claimed 39 million lives in 33 years: HIV spreads stealthily from stigmatized minorities and into the mainstream population, where it then can spread like wildfire.
If gays or bisexuals are jailed or persecuted, this discourages them from taking an HIV test or seeking treatment if they are infected. It creates a toxic atmosphere of silence and fear – a perfect breeding ground for HIV.
The scenario is similar, say specialists, when sex workers and intravenous drug users are criminalized.
The 12,000 delegates attending the 20th International AIDS Conference are being urged to sign a « Melbourne Declaration » which insists that all gay, lesbian and transgender people « are entitled to equal rights and to equal access to HIV prevention, care and treatment information and services ».
But just as more and more western countries have passed laws enshrining equal rights to marriage, health care and pensions for gays, other countries have pushed through legislation to prosecute them.
According to a report issued last week by the UN agency UNAIDS, 79 countries have laws that criminalize same-sex practices, and seven of them have the death penalty for it.
Recent adopters of anti-gay legislation include Uganda and Nigeria. India has restored colonial-era anti-sodomy laws. Russia has passed legislation banning even the distribution of information about homosexual orientation.
Kene Esom, a Nigerian who works in South Africa for a gay campaign group, the African Men for Sexual Health and Rights, said these laws sometimes crippled efforts to spread the word about safe sex and expand access to life-saving HIV drugs.
« Some laws ban freedom of assembly and freedom of association » for gays, he said. « That means groups can’t meet or even receive funds. »
Donor anger
In a keynote speech, former Australian high court justice and human rights advocate Michael Kirby said patience was wearing thin among western countries which donated roughly half of the $19 billion (14 billion euros) in funds to fight AIDS in developing economies last year.
Most of the money is spent buying drugs that keep millions of infected people alive.
« Someone must tell those who will not act the practical facts of life in our world, » Kirby said acidly.
« They cannot expect taxpayers in other countries to shell out, indefinitely, huge funds for antiretroviral drugs if they simply refuse to reform their own laws and policies to help their own citizens. »
Jean-Francois Delfraissy, head of France’s National Agency for AIDS Research (ANRS), said he feared the medical consequences if the money stopped flowing.
Donor frustrations at repressive laws were best voiced through the Global Fund to Fight AIDS, TB and Malaria to avoid charges of interference by rich countries in the domestic politics of poor ones, he told AFP.
« I’m a doctor, so my reflex is to think that these countries need antiretrovirals like everyone, and we should not be punishing patients in the hope of getting a government to shift its position.
« However, the Fund is not just a bank, it’s a moral entity, » he said. « It can set general lines (for disbursement), so funding can be conditional. »
AFP