Un an et demi après l’ouverture de la première des deux assemblées du Synode des évêques sur la famille, un processus inédit dans l’histoire de l’Eglise, le Vatican a publié, le 8 avril 2016, l’exhortation apostolique « Amoris Lætitia » (La joie de l’amour) du pape François, « sur l’amour dans la famille », datée du 19 mars, dans laquelle il tend la main aux personnes « en situation irrégulière » dans l’Eglise catholique, dont les nombreux divorcés remariés.
La question de la place des homosexuels au sein de l’Eglise, qui avait été soulevée énergiquement par quelques évêques occidentaux, s’est en revanche heurtée à un tir de barrage des prélats du Sud, en particulier africains. Seuls deux paragraphes sont ainsi consacrés à l’homosexualité, évoquant essentiellement la nécessité d’entourer les familles dont « l’un des membres manifeste une tendance homosexuelle » :
« Chaque personne, indépendamment… doit être respectée dans sa dignité et accueillie avec respect » mais il n’y a « aucun fondement pour assimiler ou établir des analogies, même lointaines, entre les unions homosexuelles et le dessein de Dieu sur le mariage et la famille », insiste le pontife argentin, qui juge dans la foulée « inacceptable » que des églises « subissent des pressions » pour assimiler ces unions avec le mariage.
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Jorge Bergoglio reconnaît donc une valeur à certaines unions libres, mais uniquement celles entre un homme et une femme, et fondées sur la stabilité. Les couples hétérosexuels en union libre ou mariés seulement civilement peuvent aussi être des « signes d’amour » à prendre en compte quand ils atteignent une « stabilité consistante à travers un lien public », ou lorsque leur union est « caractérisée par une affection profonde », écrit le pape.
Interrogée par l’AFP, Anne Soupa, présidente de la Conférence des baptisé(e)s francophone, salue un « texte très politique, très rusé » : « François déplace la matière sur le terrain de la miséricorde ». Certes, « en ce qui concerne l’homosexualité, on a peu bougé », regrette cette intellectuelle, tout en relevant que « le pape évite de citer l’article le plus controversé du catéchisme de l’Église catholique (le n°2357, qui évoque des actes « intrinsèquement désordonnés », NDLR) pour citer le suivant qui demande d’accueillir les personnes homosexuelles ».
« On peut se demander si ça valait deux ans de travail. Moi je crois que oui parce que c’est l’attitude de fond qui change, avec une bienveillance foncière envers les couples et les difficultés des familles : c’est un gros acquis », estime-t-elle.