La manifestation du mouvement Civitas contre le mariage pour tous a dérapé dimanche après-midi à Paris. Des femmes du mouvement Femen, venues contre-manifester, ont été attaquées par des membres du service d’ordre et des jeunes catholiques intégristes. L’essayiste Caroline Fourest a également été agressée. Six députés PS ont d’ailleurs demandé la dissolution de Civitas.
Eloïse Bouton, l’une des leaders du mouvement Femen en France, revient sur ces événements et annonce qu’elle va porter plainte.
Que s’est-il passé exactement lors de la manifestation de dimanche ?
Nous avions décidé d’organiser une action contre les catholiques intégristes. Nous étions neuf filles. Nous nous étions déguisées en nonnes, seins nus, avec des slogans écrits sur le corps, comme «In gay we trust», «Fuck God» ou «Saint esprit étroit». On avait acheté aussi des petits extincteurs domestiques chez BHV, pas du tout dangereux, contrairement à ce qui a été dit. Dessus on avait inscrit «See the sperm, the holy sperm [«Voyez le sperme, le saint sperme», ndlr]». On est entré dans la manifestation, on a enlevé nos vêtements mais, au bout de dix secondes, des groupes de jeunes nous ont assaillies, leur service d’ordre est aussi entré dans la danse. Après, ça a été le chaos.
Pensez-vous que vous étiez attendues ?
Attendues, non, mais nous avons été immédiatement reconnues, oui.
Y a-t-il des blessées parmi les filles ?
Nous sommes plusieurs à nous être bien fait taper dessus. Inna Shevchenko a une dent cassée et des bleus sur tout le corps. Oksana Chatchko s’est tapée la tête par terre, on a eu peur d’un traumatisme crânien, mais ça devrait aller. Une autre fille a la lèvre toute tuméfiée. J’ai le dos bloqué, un torticolis, je vais aller porter plainte aujourd’hui.
Ne vous doutiez-vous pas qu’il y aurait une réaction violente contre vous ?
On s’attendait à une réaction, mais pas aussi rapide et violente. On pensait que la sécurité allait nous attraper et nous virer, pas que cinq personnes mettraient une fille à terre et lui donneraient des coups de poings et de pieds.
Vous annonciez vous-même vouloir symboliquement «attaquer» la manifestation de Civitas…
Bien sûr, nous voulons attaquer les catholiques intégristes. Le mariage gay est une affaire laïque et on ne comprend pas pourquoi ils s’en mêlent. De manière générale, depuis le lancement du mouvement Femen, les institutions religieuses sont un de nos principaux ennemis, comme lorsqu’Inna a découpé une croix en soutien aux Pussy Riot. Après, Civitas, ce sont des intégristes, mais ils ne sont qu’une minorité chez les catholiques. Ils ont montré hier leur vrai visage.
Pourquoi Femen, un mouvement féministe, se mobilise-t-il pour le mariage pour tous ?
En tant que féministes, nous considérons que nous devons avoir un avis sur tout, pas seulement sur les sujets qui ne concernent que les femmes. Sur la mondialisation, sur le réchauffement climatique, sur tout.