En mars 2014, sur fond de polémique autour du mariage pour tous et du programme scolaire expérimental ABCD sur l’égalité entre hommes et femmes, la mère d’origine tchétchène d’un petit garçon de trois ans avait rapporté des propos de son enfant selon lequel sa maîtresse l’avait déculotté, ainsi qu’une petite fille de la classe, afin qu’ils échangent des caresses sexuelles et des « bisous ».
Alertée par Mme Hassan, correspondante locale de son mouvement « Journée de retrait de l’école » (JRE), Farida Belghoul s’était présentée dès le lendemain devant l’école, après avoir partagé une vidéo litigieuse accusant l’institutrice de faire l’apologie de la soi-disant « théorie du genre ».
Le temps d’un week-end, plusieurs dizaines de milliers de personnes visionneront le film. Si le nom de l’enseignante n’y est pas livré, celui de son école est évoqué, ce qui la rend parfaitement identifiable. Elle avait ainsi porté plainte avec constitution de partie civile pour « diffamation envers un fonctionnaire public ».
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« L’arme des réseaux sociaux, c’est l’arme des lâches », avait dénoncé l’avocat général Jean-Dominique Trippier devant les juges d’appel, en rappelant que l’enquête sur les allégations de la mère de famille avait révélé « d’abord du sable, et à la fin… du vent ».
Lors de l’audience en appel du 5 décembre 2016, le parquet s’était borné à réclamer la confirmation de la peine prononcée en première instance, à 5.000 euros d’amende.
Mais Mme Belghoul et la mère de famille, mise en scène dans le document et poursuivie pour diffamation, ont finalement été condamnées par la cour d’appel d’Orléans ce lundi 30 janvier à payer solidairement 15.000 euros de dommages et intérêts à l’institutrice, en plus d’une indemnisation à hauteur de 3.000 euros pour ses frais d’avocat et la publication du jugement dans les quotidiens Le Monde, Le Figaro et dans l’édition d’Indre-et-Loire du quotidien régional La Nouvelle République.
Mme Dalila Hassan, qui partageait le combat de Mme Belghoul, mais aura cependant admis « avec recul » avoir été « manipulée », a vu réduite en appel sa peine d’amende de 4.000 à 2.000 euros. Son avocate avait insisté sur le « contexte politique et social sulfureux » de l’époque. Cette mère de trois enfants scolarisés dans une autre école se serait ainsi bornée à répéter devant la caméra « ce que lui avait dit la mère du petit garçon, sans mensonge ni invention » et n’a participé ni de près ni de loin à la diffusion de la vidéo.
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