Ce samedi 29 juillet, 42 hommes ont été arrêtés lors d’un raid de la police dans un hôtel de l’extrême-nord de Lagos, « où séjournent régulièrement des gays », selon des habitants du quartier et déclaration d’un porte-parole des autorités, pour justifier cette « arrestation massive ».
40 d’entre-eux, dont 12 mineurs, ont ainsi été traduits en justice jeudi, accusés « d’avoir commis des actes homosexuels » et « encouragé d’autres hommes à se rencontrer », des faits « contre-nature » et punissables de 14 ans de prison, a souligné dans un communiqué le ministère local de la Justice.
Les mineurs ont toutefois comparu à huit-clos, sans qu’aucun détail ne soit dévoilé à la presse.
Tous ont plaidé non coupable, et sont désormais libérables sous caution (500.000 nairas, soit 1.150 euros) en attendant leur procès. Le ministère ne s’y est pas opposé, mais demande expressément à la Cour « une obligation de réhabilitation sexuelle » des accusés, à travers des associations soutenues par les autorités, selon ses termes.
Ces jeunes s’étaient rassemblés pour une fête organisée dans le hall de l’hôtel, où une association prodiguait également des conseils sur les risques du VIH, a précisé à l’AFP une autre source proche du dossier. Le frère – hétérosexuel – de l’un des participants a déclenché une violente bagarre, qui a attiré l’attention et conduit à l’interpellation d’environ 70 personnes. « Certaines auront pu s’échapper en payant des pots-de-vin. »
Une pétition, adressée au ministre de la Justice nigériane, a en outre été lancée sur les réseaux sociaux. Ces soirées sont « clandestines » mais « très fréquentes » au Nigeria. « Ce sont des rares endroits où il est possible pour les gays de se rencontrer », s’informer, parler prévention ou « d’être qui ils sont vraiment pendant quelques heures », regrette l’activiste Bisi Alimi, défenseur nigérian des droits LGBT. Mais le combat est loin d’être gagné.
L’ex-président nigérian Goodluck Jonathan a encore durci la répression en faisant voter en 2014 une loi interdisant le mariage, mais aussi toute « cohabitation » et démonstration publique de « relations amoureuses entre personnes de même sexe », passibles de 10 à 14 ans de prison.
Dans un pays où le système judiciaire est particulièrement corrompu, les associations de défense des droits humains dénoncent une législation qui « encourage la corruption et les extorsions » par la police et la population en général.
« Il y a encore 87% des Nigérians qui pensent que la loi interdisant le mariage de même sexe est une bonne chose. Et quand vous êtes un politicien, vous ne voulez pas aller contre 87% de vos électeurs potentiels », reconnait Ashiwaju Bisi Alimi, autre militant pour la cause. « Il n’y a jamais eu au Nigeria de véritable mouvement en faveur du mariage ou réclamer la légalisation des pratiques homosexuelles. Mais ce que nous voudrions, c’est un environnement où – comme n’importe quel Nigérian – nous pourrions avoir le droit de nous réunir, d’accéder aux informations et de participer au processus démocratique », poursuit-il. « Ce que nous voudrions, ce serait de pouvoir respirer, vivre et faire partie de la société nigériane ».
Anne V. Besnard
stophomophobie.com