« Proud Lebanon », qui milite pour la reconnaissance des droits des personnes LGBT au Liban, accompagne les victimes, procure assistance juridique ou encore soins et conseils de santé, a dévoilé, ce 22 octobre, son rapport, « fruit de six mois de recherches et d’entretiens », dénonçant sévices et tortures, procédures abusives et autres détentions dégradantes, « l’homosexualité étant un facteur très aggravant ».
Cette étude, réalisée conjointement avec deux avocats et deux psychologues, devait être dévoilée en mai dernier, lors de la Journée mondiale contre l’homophobie et la transphobie (IDAHO). Mais sa présentation a finalement été annulée, après « des menaces de groupes conservateurs ».
Elle vient d’être envoyée « à Genève, à la Commission internationale contre la torture », précise sur L’Orient-Le Jour Bertho Makso, président de l’association. Mais « le gouvernement libanais représenté là-bas a nié en bloc toutes les accusations, expliquant que les LGBT n’étaient pas torturés au Liban ».
En décembre 2016, Human Rights Watch a révélé le calvaire d’un jeune réfugié syrien qui, « soupçonné d’homosexualité », a été contraint à des examens anaux, emprisonné et torturé pendant des heures par différents services de sécurité libanais, « jusqu’à ce qu’il avoue ».
Le ministère de l’Intérieur a débouté l’ONG dans ses réclamations d’une ouverture d’enquête, aucune plainte n’ayant été déposée par la personne concernée. Dont « le témoignage anonyme et rendu public plusieurs mois après les faits supposés ne fournit pas assez d’informations et de preuves tangibles », a même regretté une source militaire, « haut placée », qui a toutefois requis l’anonymat pour répondre à l’OLJ.
Les services de sécurité libanais « condamnent évidemment avec la plus grande fermeté ce genre de comportements abusifs » dans leurs rangs, ajoute la source.
Avec la parution officielle de son rapport, de quelque vingt-six pages, Proud Lebanon espère une mobilisation mais aussi des collaborations. Créé en 2014, l’organisme offre une aide psychologique, « laquelle fonctionne autant par psychothérapie que par de l’art thérapie », et propose par ailleurs des tests rapides du VIH, des hépatites B et C, de la syphilis, ainsi que des séances de sensibilisation dédiées.
Elle en appelle aux médecins et à tout autre partenaire capable de soutenir la cause, invitant pareillement les médias à utiliser les bonnes « terminologies », lorsque les journalistes traitent de ces thématiques précisément.
« Les LGBT doivent sentir qu’ils ont le droit de se défendre par la loi, d’être protégés s’ils sont mis en danger », plaide Cosette Maalouf, psychologue-clinicienne et coordinatrice de projet au sein de Proud Lebanon. Elle a participé à l’étude, qui aborde, entre-autres, « la question de la réhabilitation des victimes ».
« Les interrogations et arrestations d’individus sont basées uniquement au regard de leurs manières et de leur apparence physique, sans aucune preuve tangible de « délit sexuel ». Ces personnes ont besoin d’un suivi sur le court et moyen terme, et nous devons les prendre en charge », a-t-elle défendu, évoquant toute une série d’incidents, dont ce drame vécu par deux hommes, interpellés lors d’un contrôle à un barrage.
« Les forces de sécurité (liées à un parti politique) ont vérifié leurs téléphones contenant des photos intimes. En prison, ils ont été battus, insultés, ont été présentés aux autres prisonniers comme des « pédés ». Au final, l’homosexualité était la charge retenue contre eux ».
Le Liban a ratifié la Convention contre la torture et autres peines ou traitements cruels. Dans la Déclaration des droits de l’homme et la Constitution libanaise, il est inscrit que « tout homme naît libre et doit jouir des mêmes droits », rappelle l’OLJ. Cependant, Beyrouth continue de poursuivre les LGBT en raison de l’article 534 du code pénal, qui établit que « tout acte contre-nature devra être puni d’une peine d’emprisonnement allant jusqu’à un an de détention ».
Proud Lebanon souhaite l’abrogation de cette loi criminalisant l’homosexualité, avec « la mise en place d’un mécanisme de rapport de la torture ». Et dans cet objectif du « vivre-ensemble », mettre fin « aux phénomènes de rejets, inhérents à la société libanaise ».
STOP homophobie soutient les espoirs et actions de Proud Lebanon et exhorte les Nations unies à agir pour une dépénalisation universelle. L’homosexualité reste condamnée dans au moins 75 pays, dont 13 qui prévoient la peine capitale.
Terrence Katchadourian
stophomophobie.com