PMA pour toutes : les évêques de France intègrent un groupe chargé d’élaborer une parole « réfléchie et argumentée »

Réunis à Lourdes en assemblée plénière du 3 au 8 novembre, les évêques de France ont annoncé la création d’un groupe de travail pour aborder la révision des lois de bioéthique, prévue en 2018, dont la procréation médicalement assistée (PMA) et son extension aux femmes célibataires et couples lesbiens, « promesse de campagne » d’Emmanuel Macron.

Hostile à cette « systématisation des réponses médicales à des problématiques sociétales », tel que signifié dans ses précédentes objections, l’épiscopat fait savoir qu’elle participera aux débats.

Et pour éviter toute nouvelle « scission » au sein de la communauté, traumatisée depuis les cortèges de La Manif pour tous, ce groupe, placé sous la responsabilité de Mgr Pierre d’Ornellas, archevêque de Rennes, tâchera « d’élaborer une parole réfléchie, argumentée et livrable en temps opportun », de façon à permettre aux catholiques « d’exercer pleinement leur mission de citoyen en participant au débat pour le bien de tous les français », « sans jugement les uns sur les autres et dans un esprit évangélique. »

Pour que « la voix des catholiques puissent être rapidement entendue et prise en compte » :

« L’idée c’est que des arguments se confrontent, dans la sérénité. Je suis heureux que le gouvernement veuille un débat apaisé, je pense que notre société française a besoin qu’on construise non pas des barrières entre nous mais plutôt des ponts, et que nous soyons unis », a déclaré dans la presse Mgr d’Ornellas.

L’Église de France avait déjà écarté en juin dernier toute « interprétation compassionnelle ou humanitaire », en réaction à l’avis favorable du Comité consultatif national d’éthique (CCNE) d’ouvrir la PMA à toutes les femmes et « pallier une souffrance induite par une infécondité résultant d’orientations personnelles ».

« Nous pouvons être unis en accompagnant avec beaucoup de respect les personnes qui souffrent », mais « est-ce que la loi civile a pour mission d’apaiser toute souffrance ? », a lancé aux journalistes présents à Lourdes l’archevêque de Rennes, en évoquant « une vue de l’esprit, une aseptisation de la société qui ne correspond pas à ce qu’est le vivre-ensemble. » « Si la société a pour roc le désir individuel, elle ne peut qu’exploser, se fracturer, comme nous l’avons déjà expérimenté », s’est-il inquiété.

Outre Mgr d’Ornellas, ce groupe sera composé d’autres « experts » et d’évêques « rompus aux questions éthiques et morales », à l’instar de Mgr Michel Aupetit, évêque de Nanterre, Mgr Nicolas Brouwet, évêque de Tarbes et Lourdes ou encore Mgr Olivier de Germay, évêque d’Ajaccio.

Notons que, Michel Aupetit, Médecin et membre du Conseil Famille et Société de la Conférence des évêques, était déjà opposé au mariage des couples de personnes de même sexe. Pourquoi pas « la polygamie ou l’inceste ? », avait-il argué, alors Vicaire général de l’archidiocèse de Paris. Il s’est aussi prononcé contre la généralisation de la PMA « profondément injuste vis-à-vis de l’enfant » et qui créera nécessairement un nouveau clivage, dénonçant « l’instrumentalisation des homosexuels par un lobby très bien implanté dans les médias, mais qui n’est absolument pas représentatif. »

Pour Mgr Brouwet, les gays et lesbiennes n’étaient pas non plus concernés par le mariage. « Jusqu’où ira-t-on ? », écrivait-il dans ses réflexions en 2012, tout aussi dubitatif sur cette « dérive dangereuse » d’une loi autorisant l’adoption par des homosexuels : « une manière d’institutionnaliser un droit à l’enfant, ce qui est radicalement différent. Et contraire au respect de la personne qui n’est jamais un moyen pour satisfaire un désir, aussi fort soit-il ! »

« Pour qu’un enfant vienne au monde, il faut un homme et une femme. La fécondité biologique repose sur l’altérité sexuelle. La technologie actuelle peut évidemment cacher cette réalité, en inséminant une femme seule par exemple ; mais elle ne pourra jamais la contredire », avait-il insisté.

Message similaire de Mgr Olivier de Germay, pour qui dans cette affaire, « c’est le désir qui prend le dessus sur les droits de l’enfant », de moins en moins perçu comme un don. « La PMA pour les couples hétéros fait face à un problème de santé. Mais les homosexuels font le choix d’une union stérile. Pourquoi la médecine interviendrait-elle dans cette situation ? », avait-il entre-autres martelé, s’indignant d’une société qui jouerait aux « apprentis sorciers. »

Le « débat » promet d’être « serein » et constructif.

Au moins 64 % des Français souhaitent cette ouverture de l’assistance médicale à la procréation à toutes les femmes, comme le confirme une récente étude réalisée par l’Ifop pour le site my-pharma.info

En 2014, plus de 25 000 enfants sont nés en France d’une PMA, selon l’Agence de biomédecine. Et la Société européenne de reproduction humaine et d’embryologie estime qu’environ « 350 000 bébés sont conçus chaque année par FIV, ce qui représente 0,3 % des 130 millions d’enfants qui naissent dans le monde. »

« Apprentis sorciers » ?

Terrence Katchadourian
stophomophobie.com