L’animateur de « Salut les terriens ! », sur Canal Plus, accueillait samedi soir Christine Boutin. En quelques minutes, Thierry Ardisson a fait dire à la présidente du Parti démocrate-chrétien que son mariage avec son cousin germain, c’était « comme la PMA ». Une vraie performance télévisuelle, selon notre chroniqueur.
Comme disait ma grand-mère, « on lui aurait donné le bon Dieu sans confession », à Christine Boutin. Et pourtant : la présidente du Parti chrétien-démocrate qui s’est fait connaître par la violence de son combat contre le Pacs puis, par ses outrances contre le mariage gay, semble plus laxiste avec elle-même qu’avec les homosexuels qu’elle poursuit de ses soi-disant exigences morales.
Ainsi, Thierry Ardisson, dans « Salut les Terriens ! » du 2 mars, l’a crucifiée en révélant qu’elle s’était mariée… avec son cousin germain, ce qui, aux yeux de l’animateur, est « contre-nature » et qui, pour le moins, n’est pas très catholique au regard du dogme.
Car sans porter aucun jugement moralisateur sur cet aveu, comment ne pas trouver que ça fait quand même désordre pour quelqu’un qui se veut le porte-étendard intransigeant de sa religion et qui en contourne l’un des préceptes les plus fondamentaux ?
« Ce qu’ils n’aiment pas, c’est vos idées »
Tout commence pourtant avec des blagues plus légères et plus attendues, ce qui peut laisser penser à Christine Boutin qu’elle contrôle la situation. D’abord, l’animateur demande à l’ancienne ministre de dire « merci les pédés ! » en rappelant que c’est grâce à au mariage pour tous qu’elle est « revenue sur le devant de la scène » (à 1 min dans le « top des vannes »). Christine Boutin rit, mais reste silencieuse.
Ensuite, il la chambre sur son look (elle a changé de coiffure, a été gothique avec les ongles noirs) avant de lui asséner un premier coup de goupillon assez violent : « Vous pensez que ce que les gens n’aiment pas chez vous, c’est votre look, mais ce qu’ils n’aiment pas, Christine, c’est vos idées ».
Là, l’ancienne ministre de Nicolas Sarkozy commence à s’inquiéter, se demandant si elle a eu raison de venir. D’autant que ce n’est que le début de son calvaire. Car si Ardisson paraît lui faire un cadeau en lui suggérant cette confession « J’aime le sexe », il s’agit en réalité d’un piège qui se referme sur elle. Jugez plutôt.
« D’ailleurs, vous êtes marié ? » commence-t-il, avec un air de petit saint (partie 2 à 2 min 59).
« Oui, oui ».
« Vous êtes mariée avec votre cousin germain… C’est légal ça? »
Pour se marier avec son cousin germain, « il faut une dispense du pape »
Et voilà, en quelques minutes, l’émission va partir en vrille et le téléspectateur hésiter entre éclats de rire et étonnements, sinon gêne et indignation. Car Thierry Ardisson tape de plus en plus fort et Christine Boutin n’arrête pas de se contredire.
L’animateur, tout de noir vêtu comme un prêtre, commence ainsi son cours de catéchisme : « Je vais vous dire pourquoi c’est pas légal. Parce que pour un mariage entre cousins germains, ce qui à mon avis est contre-nature, je vous le dis franchement, il faut une dispense du pape ». Elle s’embrouille, lève la main comme pour supplier qu’il passe à autre chose, n’obtient qu’un « je ne plaisante pas ».
En fait, il reste alors sur son terrain à elle, celui du catholicisme le plus traditionaliste, répète que c’est « contre-nature », sous-entendu « pour elle ». D’autant qu’il apporte alors une « preuve » qu’il s’agit là d’une hérésie puisque lorsqu’on se marie entre cousins germains, il faut « une dispense », et donc, des justifications.
Cette fois, Christine Boutin est piégée, la voilà invitée à boire la coupe (de vin de messe) jusqu’à la lie. Elle s’engage alors dans une démonstration à la fois incertaine et pénible, de laquelle il ressort que oui, enfin peut-être, c’est si vieux, alors pour la dispense, elle ne se souvient pas très bien si elle l’a demandée.
« Faites ce que je dis, mais pas ce que je fais »
Arrêtons-nous quelques instants sur cet échange révélateur de ce fossé qui souvent sépare le discours des actes en politique. Car ces quelques secondes ne sont pas seulement drôles, elles sont aussi très embarrassantes, voire même révoltantes pour celui qui adhère aux idées conservatrices de cette fervente catholique et qui découvre soudain le fameux « faites ce que je dis, mais pas ce que je fais » :
« Sur le mariage civil, commence-t-elle pour gagner du temps, je n’ai pas besoin de demander l’autorisation du président de la République. En ce qui concerne l’église catholique, il faut effectivement une dispense, mais euh… »
Là, on devine l’égérie catholique très embarrassée, prise entre le désir de bien répondre et peut-être l’envie de biaiser, sinon de mentir. En bonne jésuite, elle ne dit pas « Je pense que je l’ai demandée » mais lâche du bout des lèvres, comme on bredouille une prière: « Je pense qu’elle a été demandée », ce qui n’est pas la même chose et qui même suggère tout le contraire.
Puis, elle croit s’en sortir en changeant de sujet : « Mais c’est vieux moi. Vous savez, depuis combien de temps je suis mariée ? Ça fait 46 ans. Alors, vous savez, vous savez ! »
Blandine dévorée par les lions
Sauf qu’Ardisson n’est pas décidé à la lâcher. Quand elle confesse qu’elle aime son mari, il la reprend en lui disant « votre cousin germain », avant de s’adresser à une autre invitée, Izïa Higelin, et de lui demander :
« Vous épouseriez votre cousin germain ? »
« Non, non ».
Et d’insister lourdement : » On ne tombe pas amoureux de son cousin ! On a des barrières. »
« C’est assez fréquent, si, si » répond Christine Boutin qui, maintenant, ressemble à Sainte Blandine dévorée par les lions. Mais l’animateur porte l’estocade : « On commence avec les cousins germains, mais après c’est les frères, les sœurs… Ça va se terminer avec les animaux ».
Christine Boutin se donne elle-même le coup de grâce
Là, on se dit que la catholique va s’effondrer en larmes, que décidément, Ardisson est allé trop loin, qu’il faut qu’il en finisse avec ce supplice. Sauf que, contre toute attente, par je ne sais quel curieux masochisme, c’est Boutin qui se donne à elle-même le coup de grâce en apportant la conclusion logique (et accablante) à cet échange : « C’est ce qui va arriver avec la PMA ! »
L’animateur de « Salut les Terriens » enfonce alors le clou, dit » L’inceste, la polygamie, ça commence comme ça ». Il a fait dire à son invitée l’exact contraire de ce qu’elle était venue clamer sur le plateau : se marier entre cousins germains, c’est comme se marier entre homosexuels : c’est ne pas être accepté par l’église qui trouve ça « contre nature », mais pour autant, ça existe et à défaut des préceptes catholiques, les lois laïques l’autorisent.
Thierry Ardisson peut être satisfait, Christine Boutin est crucifiée dans ses propres contradictions, il peut désormais choisir une autre victime.
http://www.canalplus.fr/c-divertissement/pid3350-c-salut-les-terriens.html?vid=826817&sc_cmpid=FBSharePlay
source:nouvelobs.com