DESTIN – « Nous avons trouvé notre fils dans le métro »

C’est une histoire à la première personne racontée dans les pages « Opinion » du New York Times, et repérée par Rue89. Une histoire tellement extraordinaire qu’on ne la croirait pas si on la voyait adaptée sur nos écrans. Une histoire qui commence avec un banal trajet en métro, et un coup de téléphone. « J’ai trouvé un bébé. » Celui qui vient de décrocher s’appelle Peter Mercurio, un scénariste américain qui vit à New York, et narrateur du texte. Au bout du fil, son partenaire, Danny, à bout de souffle et le cœur battant. « J’ai appelé les urgences, mais ils ne veulent pas croire que j’ai trouvé un bébé. Viens vite et trouve des policiers en chemin. »

Dans les bras de Danny, emmitouflé dans un large pull noir, un nouveau né d’à peine un jour. Il sera surnommé « bébé ACE » par les services sociaux qui l’emmènent, du nom des lignes de métro qui s’arrêtent à l’endroit où il a été trouvé, derrière les tourniquets d’entrée. « Ce qu’on ignorait tous les deux à l’époque, c’est que Danny ne venait pas de sauver un orphelin, il venait surtout de trouver notre fils », explique Peter Mercurio.

Danny enchaîne alors les interview pour les médias locaux, et est convoqué trois mois plus tard devant le tribunal pour expliquer comment il a trouvé le bébé. « Soudain, la juge a demandé : ‘Souhaiteriez-vous adopter ce bébé ?’ La question a laissé pantoise toute l’assistance dans le tribunal, mais Danny a simplement répondu ‘Oui' », relate encore Peter Mercurio. Finalement convaincu à son tour de vouloir adopter le bébé, ce dernier raconte comment toutes les conditions ont été réunies pour faire d’eux, un couple homosexuel qui n’avait jusque là jamais pensé à adopter, les parents de ce bébé ACE, prénommé aujourd’hui Kevin.

Pendant un an, les deux hommes ont été la famille d’accueil du bambin, recevant régulièrement la visite des services sociaux. « A cette époque, nous nous demandions souvent ce qui était passé par la tête de cette juge. Savait-elle que Danny était un éducateur et qu’il ferait un bon père ? Aurait-elle accepté qu’il adopte Kevin si elle avait su qu’il était homosexuel et en couple ? » La réponse est venue à la dernière audience, lorsque l’adoption a été finalisée. A la question de savoir pourquoi elle avait proposé l’adoption, la juge a simplement répondu « avoir eu un pressentiment ».

Dix ans plus tard, alors que l’Etat de New York rendait légal le mariage homosexuel, les deux hommes se sont unis devant la loi. A la demande de leur fils, au courant de toute l’histoire, ils ont demandé à la même juge de les unir. « Kevin était nerveux. Quand il était plus jeune, nous lui avions expliqué l’histoire qui avait conduit à faire de nous une famille, et nous lui avions parlé de cette juge. Mais le personnage de la fiction allait devenir une personne bien réelle, que se passerait-il si elle trouvait qu’il avait mal grandi ? »

La rencontre s’est finalement faite dans la plus grande simplicité. « Elle lui a demandé si elle pouvait le prendre dans ses bras, et lui a posé des questions sur l’école, ses passions, ses amis, et lui a dit tout le bonheur qu’elle avait à le rencontrer », avant de marier les deux hommes. « Tout cela grâce à une découverte improbable et un pressentiment éclairé », conclut l’auteur, qui a tiré de cette histoire personnelle un scénario.

source:.lemonde.fr