Plus d’un mois après l’entrée en vigueur le 18 mai de la loi Taubira autorisant le mariage homosexuel, la Gay Pride, ou Marche des fiertés, a réuni plusieurs dizaines de milliers de personnes samedi 29 juin à Paris, à l’appel de l‘inter-LGBT (Lesbiennes, Gay, Bisexuels et Transgenres).
En attendant notre reportage complet, voici quelques extraits enregistrés entre 16h30 et 17 après les trois minutes de silence en mémoire aux victimes du SIDA.
Cette année, après plusieurs mois de manifestations des opposants au « mariage pour tous », ce rassemblement avait pour mot d’ordre : « Allons au bout de l’égalité ». L’inter-LGBT comme la plupart des manifestants dénonçant une reculade du gouvernement sur le sujet de la PMA, la procréation médicalement assistée, qui n’a pas été adoptée.
Le cortège, où se mêlent couples gay, hétérosexuels ou badauds, pour la plupart en tenues extravagantes et volontiers court-vêtus, a démarré à 14 heures place du 18 juin 1940, dans le quartier de Montparnasse (XVe arrondissement) pour rallier place de la Bastille (XIIe arrondissement), où un concert a débuté vers 17 heures.
« UN JOUR DE FÊTE ET DE COMBAT »
« Même si on a eu une avancée majeure en droit cette année avec le vote de la loi sur le mariage pour tous, un certain nombre de nos revendications n’ont pas été satisfaites », déplore Nicolas Gougain, porte-parole de l’inter-LGBT, à la tête du défilé. « De nombreux combats restent à mener, dont la PMA. C’est à la fois un jour de fête et de combat. Il ne faut pas qu’il y ait de temps mort », poursuit Mathieu Nocent, vice-président de cette fédération d’associations.
Egalement à la tête du cortège, Vincent et Bruno Boileau-Autin, devenus célèbres après avoir été en mai le premier couple homosexuel de France à se marier à Montpellier, sont sur la même position. « Cela fait un mois jour-pour-jour que nous nous sommes mariés. Mais la question de la PMA est aussi importante que celle du mariage, qui était symbolique », affirme Vincent, aussi président de l’association LGBT de Montpellier-Languedoc-Roussillon. « Ces dernières semaines, nous avons été abreuvés de haine et du discours homophobe qui s’est banalisé », ajoute Bruno.
« On a l’impression que le retrait de la PMA, que François Hollande avait pourtant promise, a été utilisé pour calmer la ‘manif pour tous' », peste Rohenna Rodriguez, une lesbienne de 30 ans, en brandissant une pancarte « PMA trahison socialiste ». En référence à la principale association qui s’oppose au mariage homosexuel.
« D’AUTRES CONQUÊTES À ARRACHER »
Quelques personnalités politiques de gauche étaient présentes pour soutenir cet événement, comme Anne Hidalgo, candidate à la mairie de Paris, Harlem Désir, premier secrétaire du Parti Socialiste, Cécile Duflot, ministre du Logement EELV ou encore le président PS du conseil régional d’Ile-de-France Jean-Paul Huchon. Jack Lang a ainsi souhaité « remercier » François Hollande même si lui aussi affirme que « d’autres conquêtes sont à arracher ». Pour cela, « l’école a un grand rôle à jouer, pour dire aux enfants l’exigence de l’égalité », soutient l’ancien ministre de l’éducation nationale.
Si beaucoup craignaient d’éventuels débordements, qui n’ont pas eu lieu jusqu’à l’arrivée du défilé à la Bastille en fin d’après-midi, le maire (PS) de Paris Bertrand Delanoë tenait à rassurer : « La préfecture de police a pris ces risques très au sérieux et a mis en place un dispositif d’envergure. Mais je participe à cet événement depuis 1995 et il n’y a jamais eu de rassemblement haineux ».
Dans le calme, les dizaines de milliers personnes ont défilé en dansant derrière les chars qui diffusaient de la musique techno, en brandissant des pancartes aux slogans plus ou moins politiques. « Ma liberté n’entrave pas la tienne », « L’homophobie est un délit, pas une opinion » ou encore « Pas d’égalité sans PMA ». Des jeunes filles en bas résille ou dessous fluos et des jeunes hommes torses nus, jupes plissées et colliers cloutés arboraient sur leurs corps les inscriptions « free hugs« , « free kiss« , « LGBT », au marqueur.
Enveloppé dans un drapeau aux couleurs de la communauté gay, Eric Reveillant, un angevin aux cheveux blonds bouclés d’une trentaine d’années, qui participait à sa première gay pride, fait partie de ceux qui restent sceptiques sur les revendications en faveur de la PMA. « Il faut déjà laisser le temps aux français d’assimiler que des homosexuels peuvent se marier. »
A l’arrivée place de la Bastille, un concert avec notamment Kiddy Smile ou Guéna LG était programmé, jusqu’à 21 heures. « Je ne suis venu que pour ça. La fête. La PMA, je m’en fous, même si être ici, c’est déjà un acte politique, par les temps qui courent », lâche Marie Galindo, une riveraine de 52 ans.
Shahzad Abdul