C’est un symbole: la cour d’appel de Versailles a validé jeudi matin l’adoption par l’épouse de la mère d’un enfant né par PMA à l’étranger. Il y a un an, le TGI de Versailles avait été le premier à dire «non» à l’adoption d’un enfant conçu par insémination artificielle avec donneur anonyme à l’étranger. Ce nouvel arrêt signe donc la fin d’une polémique.
«Il vient clore le débat juridique et médiatique sur ce type d’adoption, estime Me Caroline Mécary, l’avocate de l’un des quatre couples qui ont obtenu en appel l’adoption de leurs enfants à Versailles. C’est la fin d’un an et demi d’angoisse et d’anxiété pour mes clientes. Elles sont soulagées, heureuses de voir que leur fille est protégée et a officiellement deux parents. La cour a considéré qu’il n’y avait pas à tenir compte du mode de conception de l’enfant pour prononcer l’adoption».
Cet arrêt s’appuie sur les avis de la Cour de cassation, sollicitée par les TGI d’Avignon et de Poitiers. Le recours à la PMA «ne fait pas obstacle» à ce que l’épouse d’une mère puisse adopter son enfant, avait estimé la plus haute juridiction de l’ordre judiciaire le 22 septembre dernier. «Le fait que des femmes y aient recours à l’étranger ne heurte aucun principe essentiel du droit français», avait-t-elle indiqué, levant ainsi une ambiguïté de la loi «mariage pour tous» qui a autorisé l’adoption aux couples homosexuels mariés sans leur ouvrir le droit à la PMA.
«C’est un petit bastion qui tombe, un de plus»
Mardi, la cour d’appel d’Aix-en-Provence a également jugé qu’une PMA réalisée à l’étranger n’était pas un obstacle à l’adoption d’un enfant par l’épouse de la mère. «C’est un petit bastion qui tombe, un de plus», a commenté Me Catherine Clavin, l’avocate du couple de femmes. «Le problème n’est pas tant la fraude à la loi que le détournement de l’institution de l’adoption, avait pour sa part commenté la juriste Aude Mirkovic, auteur de PMA, GPA la controverse juridique (Pierre Téqui éditeur). Nous espérons qu’il y aura un pourvoi afin que la Cour de cassation se prononce sur cette question.»
Si les familles homoparentales estiment avoir remporté une manche pour la défense de leurs droits, elles ne crient cependant pas victoire. «La question sur l’accès à la PMA pour tous les couples se pose à nouveau, souligne Me Mécary. Il faudrait réfléchir à un mécanisme juridique similaire à celui de la Belgique qui considère que tous les couples mariés peuvent avoir recours à la PMA et que l’enfant qui naît après une PMA a automatiquement pour parents les deux conjoints. Il s’agit d’aligner le régime des couples de femmes sur celui des couples hétérosexuels. C’est le choix du pragmatisme et de la simplicité juridique. Malheureusement, le débat sur la PMA n’arrive pas à s’ouvrir en France».
Le Comité consultatif national d’éthique (CCNE) pourrait rendre son avis sur les questions sociétales de l’AMP (assistance médicale à la procréation), déjà repoussé à plusieurs reprises, à la fin de l’année 2015. Le président de la République, François Hollande, avait indiqué qu’il attendait cet avis avant de se prononcer sur une éventuelle évolution de la législation.
Par Agnès Leclair