Agression homophobe au Maroc : le procès de la victime et de ses 3 agresseurs reporté (VIDEO)

Le 9 mars dernier, plusieurs jeunes gens font irruption dans un appartement de la ville de Beni Mellal (centre) et agressent deux homosexuels présumés, dont l’un est arrêté le jour même par la police et le second deux semaines plus tard, le 25 mars, de même que quatre des agresseurs.

La justice a déjà condamné l’une des victimes à quatre mois de prison ferme pour « actes sexuels contre-nature », l’équivalent d’homosexualité au Maroc. Le jeune homme a décidé de faire appel. Mais, ce lundi, le deuxième et trois de ses agresseurs ont comparu devant le tribunal. L’audience n’a duré que quelques minutes et le juge a fixé la prochaine au 11 avril après que l’un des avocats des assaillants a demandé plus de temps pour examiner le dossier, a-t-il ajouté. A l’extérieur, des manifestants s’étaient rassemblés pour appeler à leur libération : « Nous ne sommes pas prêts à accepter de voir deux hommes commettre de tels actes. Ce qu’on sait de la nature humaine, c’est que c’est homme et femme et non pas homme et homme. Nous refusons complètement l’homosexualité », a lancé l’une des habitantes du quartier.

Pour Ibrahim Hassala, l’avocat d’une des victimes, « c’est un indice de la destruction des institutions quand l’Etat ne fait pas son travail et laisse le citoyen faire ses propre lois. C’est la loi de la jungle ».

Dans ce procès, un homme âgé d’une trentaine est jugé pour « déviance sexuelle », alors que ses trois agresseurs sont accusés « d’entrée par effraction, de recours à la violence et de port d’armes (…).  Nous n’acceptons pas que quiconque joue le rôle de l’autorité pour appliquer les lois (…) », a-t-il ajouté, imputant cette situation au système éducatif au Maroc qui selon lui n’aborde ni les droits de l’Homme ni la sexualité. Le quatrième prévenu, un mineur, sera jugé le 7 avril par un tribunal pour mineurs.

La violence de l’agression et le procès intenté aux deux hommes ont soulevé un tollé dans le milieu notamment associatif marocain qui réclame l’abrogation de l’article 489 du code pénal, criminalisant « les actes licencieux ou contre nature avec un individu du même sexe » de 6 mois à 3 ans d’emprisonnement.

Déjà dans un communiqué diffusé le 28 mars, 17 associations avaient critiqué les deux procès, en estimant que « le traitement réservé à ce dossier allait à l’encontre des engagements du Maroc en termes de respect des droits humains (…) ».

Des intellectuels marocains ont également pris la parole pour dénoncer cette violence homophobe. Dans une tribune intitulée « Si j’avais été un homme à Beni Mellal », l’écrivaine Leïla Slimani se demande ce qu’elle aurait fait si elle était « née persuadée qu’il faut enfermer les débauchés, les adultérins, les femmes non mariées et non vierges et les homosexuels ».

Preuve de la sensibilité du sujet dans ce  pays de 35 millions d’habitants tiraillé entre conservatisme religieux et ouverture sur l’Occident, une équipe de journalistes du Petit journal de Canal+, qui enquêtait sur le sujet, a été interpellée dimanche dans le royaume avant d’être expulsée. Martin Weill a toutefois rapporté des images qui témoignent des horreurs auxquelles sont confrontés les LGBT.