Vladimir Poutine a entériné ce 5 décembre sa loi contre la « propagande LGBT » et « agents étrangers », qui durcit la législation qui existait déjà en Russie depuis 2013. Le texte, entré en vigueur ce 8 décembre, proscrit désormais toute « présentation positive des relations non traditionnelles » dans l’espace public, dans les médias en général donc, la publicité, Internet, dans les films ou les livres, déjà rares, et qui disparaissent depuis des libraires. Elles encourent autrement une amende de 10 millions de roubles (150 000€).
« Un risque trop important », comme en témoigne Olga, qui tient une petite maison d’édition et une boutique dans le centre de Moscou. La jeune femme a fait du tri et retiré des rayons tous les ouvrages qui, « d’une façon ou d’une autre, évoquent l’homosexualité ». Comme « Basic Wishes », l’une de ses meilleures ventes, dont elle avait acheté les droits, traduit et publié en Russie. Mais parfois, « il s’adresse aux lectrices en disant ‘ton ou ta partenaire’ ». D’où son retrait de la vente, comme des jeux de cartes, « parce que dans le paquet, l’une d’entre elle représentait deux hommes enlacés », explique-t-elle avec dépit à Radio-France. Sans être militante, elle envisage maintenant de quitter la Russie.
Comme souvent, la loi votée par la Douma, le 24 novembre, après l’invasion de l’Ukraine, est relativement vague, « d’où les craintes et l’autocensure », explique Marina Kadetova, également rédactrice en chef d’une maison d’édition. Personne ne comprend vraiment ce que signifie « la propagande LGBT est interdite ». Et s’il reste un espace d’expression, il est très restreint et « affecte considérablement notre travail ». Mais cette censure pourrait aussi attirer l’attention de certains lecteurs sur ces œuvres, devenues clandestines.
Pour Roman Poliakov, l’un des organisateurs du Festival du film LGBT de Saint-Pétersbourg, aujourd’hui interdit, il y a dans ce texte « la volonté de rendre la communauté LGBT complètement invisible » et « d’alourdir le cas de quelqu’un que les autorités n’aiment pas beaucoup ». Il a d’ailleurs lui aussi quitté la Russie, comme beaucoup d’autres activistes.