Accueillir les personnes homosexuelles dans l’Église : Comme tout le monde, ni plus ni moins !

Les personnes homosexuelles ont des dons et des qualités à offrir à la communauté chrétienne, ont exprimé les pères synodaux : sommes-nous en mesure de les accueillir en leur garantissant un espace de fraternité dans nos communautés ? Que peuvent-ils apporter à la communauté chrétienne ?
Accueillir les personnes homosexuelles dans l’Église, « comme tout le monde, ni plus ni moins » : telle est la position très largement majoritaire au sein des lecteurs de La Croix. Quels que soient leur âge, leur lieu de résidence, leur statut familial et même leur orientation sexuelle, les catholiques sont très nombreux à souhaiter la fin de toute « discrimination, positive ou négative » à leur égard.

« Apporter plus ou moins que les autres chrétiens »

Les paroles du pape François dans l’avion qui le ramenait des JMJ de Rio en juillet 2013 – « Si une personne est homosexuelle et cherche le Seigneur avec bonne volonté, qui suis-je pour la juger ? » – reviennent fréquemment à l’appui de cette demande, tout comme l’attitude du « Christ qui n’a rejeté personne ».
« Se pose-t-on la question des dons et des qualités à offrir à la communauté chrétienne par les personnes hétérosexuelles ? », s’interroge un Breton de 69 ans. Voire « par un prêtre ou une mère de famille ’comme il faut’ », relève un autre lecteur… « Pourquoi voulez-vous qu’on apporte plus ou moins que les autres chrétiens ? », s’interroge un lecteur lui-même homosexuel, pacsé et « bientôt marié ».

Aucun traitement spécifique

Dans leur grande majorité, les lecteurs de La Croix se prononcent aussi contre tout traitement spécifique. « Faudrait-il leur réserver un accueil étiqueté ? un banc spécifique dans l’église ? », s’interroge une mère de famille d’Île-de-France.
Nombreux sont aussi ceux qui posent comme condition à cet accueil la « discrétion » des chrétiens homosexuels, leur absence de « prosélytisme ». La nécessité de mettre un terme à la culture du secret entourant cette réalité fait largement consensus : beaucoup relèvent d’ailleurs – en positif ou en négatif – le rôle de révélateur de la Manif pour tous.

Une méconnaissance des chrétiens et de l’Église

De nombreuses contributions témoignent surtout de la méconnaissance des chrétiens sur le sujet : les phrases « je n’ai jamais été confronté à cette situation », « je ne suis pas en mesure de répondre » reviennent souvent.
« De nos jours, la question de l’homosexualité se pose dans le monde comme jamais auparavant, et l’Église – pourtant ’experte en humanité’ – doit reconnaître humblement à quel point est chétive son expertise en cette matière », lance Vincent, 72 ans, marié et père de quatre enfants dans les Yvelines.
Aujourd’hui encore, y compris pour ceux accueillant des couples de même sexe dans leur entourage proche, l’orientation homosexuelle reste « un mystère ».

Débat sur la qualification de l’acte homosexuel

Le débat, au fond, porte sur la qualification de l’acte homosexuel, actuellement considéré comme « intrinsèquement désordonné » par la doctrine catholique. Une petite minorité de contributeurs s’oppose à toute évolution sur le sujet, continuant à qualifier l’orientation homosexuelle d’« anomalie », d’« anti-naturelle », quitte à la rapprocher de la « pédophilie ».
Pour eux, des changements sont possibles, voire souhaitables, mais minimes. Un lecteur recommande aux couples homosexuels « qui veulent être accueillis en tant que tels » de fonder « des communautés spécifiques, comme aux États-Unis ». D’autres disent leur crainte que leur soit confié un rôle catéchétique « auprès d’enfants ou de jeunes fragiles »…

L’importance de la relation interpersonnelle

L’homosexualité a « toujours existé », rappellent à l’inverse une grande majorité des lecteurs, pour qui elle n’est « ni une maladie ni une perversion », voire « fait partie du plan divin pour l’humanité ».
Pour ces catholiques, plus que l’acte sexuel lui-même, c’est « la relation interpersonnelle associée » qui doit fonder le jugement de l’Église. « Un hétéro qui trompe sa femme, est violent, n’élève pas ses enfants, est-il mieux qu’un homo qui vit dans un couple stable, s’occupe de son partenaire, essaie de vivre sa foi en vérité, avec générosité ? », s’interroge ainsi une Rhônalpine.

Autoriser l’accès aux principaux sacrements

« Tout amour humain, quel qu’il soit, à partir du moment où il est relation, dit Dieu », complète une mère de famille, bien consciente que « ce qui choque notre Église, et nombre de personnes (et moi aussi si je suis honnête) c’est le fait de la relation sexuelle entre personnes de même sexe, de la recherche et du partage d’un plaisir non ouvert à la procréation ». « Et pourtant, combien de couples hétérosexuels, et chez les catholiques aussi (et plus qu’on ne croit ou qu’on imagine) vivent aussi la sexualité de cette manière ? »
En toute logique, les lecteurs de La Croix s’accordent donc sur un accès aux principaux sacrements – baptême, Eucharistie, confession – pour les personnes homosexuelles et leurs enfants. « Conditionner leur accueil dans l’Église à un comportement héroïque (la chasteté, par exemple) est une perversion éthique et un manque de courage étonnant », s’insurge un lecteur.
En revanche, ils restent divisés quant à la reconnaissance par l’Église de leur union  : oui pour certains à une « bénédiction » des couples de même sexe, mais non pour la très grande majorité à un mariage.

Anne-Bénédicte Hoffner