« Majorité silencieuse » ou « minorité bruyante » ? En 2013 et 2014, de nombreuses polémiques avaient surgi autour des effectifs de manifestants contre la loi ouvrant le mariage aux homosexuels, dont les chiffres variaient du simple jusqu’au septuple entre police et organisateurs. La préfecture avait donc sollicité un «comité des sages» afin d’analyser et éventuellement améliorer les méthodes de comptage. Dans leurs conclusions rendues publiques le 15 avril dernier, les experts ont conclu qu’aucune modification fondamentale de la technique actuelle n’était à recommander.
Les techniques de comptage de la police «sont bonnes et sont les seules possibles» !
Actuellement, la méthode utilisée par la police est manuelle. Postés à deux points du parcours, en hauteur, des agents estiment le nombre de rangées de dix personnes. À chaque rang, ils actionnent un compteur manuel qui additionne les chiffres. À la fin du défilé, la moyenne des deux comptages est calculée et augmentée de 10%, pour couvrir la marge d’erreur. Puis, une fois la manifestation terminée, les forces de l’ordre utilisent les enregistrements vidéo pour revisionner et recompter plus facilement le nombre de participants. Sous le feu des critiques, la préfecture avait invité des journalistes à venir assister à ce protocole, afin de préciser cette méthode.
Davantage de points de comptage
«La préfecture de police est agacée par les chiffres des responsables syndicaux qui sont toujours multipliés par trois ou quatre», confirmait en septembre Dominique Schnapper, sociologue, historienne et directrice d’études à l’EHESS, qui préside la commission à laquelle participent également Pierre Muller, statisticien à l’Insee, et Daniel Gaxié, professeur de sciences politiques. Depuis mai 2014, trois experts ont donc analysé ces méthodes. Après avoir effectué des comptages de manifestants en parallèle des forces de l’ordre, les experts ont sollicité les trois principaux syndicats et ont rencontré des statisticiens. Seuls la CFDT et Force ouvrière ont répondu à l’appel, la CGT n’ayant pas donné suite. Mais les discussions avec ces organisations syndicales n’ont pas permis d’établir de modifications précises à mettre en place. Quant aux statisticiens, «ils ont validé la technique» tout en conseillant quelques modifications, précise-t-on dans l’entourage de la commission.
Les forces de l’ordre ont «tout intérêt» à montrer leur méthode «puisqu’elle est bonne», concluent les experts.
Parmi les préconisations adressées aux forces de l’ordre figurent notamment le fait de définir non plus deux mais trois points de comptage pour améliorer la précision. La commission recommande également aux policiers «d’être très transparents» et de diffuser, après la première estimation donnée le jour même, le deuxième chiffre établi après visionnage des vidéos le lendemain. Les forces de l’ordre ont «tout intérêt» à montrer leur méthode «puisqu’elle est bonne», concluent les experts.
Plusieurs autres techniques de comptage ont néanmoins été envisagées par la commission, qui a consulté plusieurs entreprises proposant des méthodes alternatives : prendre des vues d’en haut ou compter le nombre de téléphones portables à un point précis, notamment. La société TrenCube, qui propose une technique de ce type, avait ainsi expliqué au Figaro avoir établi un ratio permettant de comptabiliser les effectifs de personnes présentes en fonction du nombre de téléphones dont la connexion wifi est activée. Mais ces techniques alternatives n’ont pas emporté l’adhésion des experts, puisqu’il s’agit dans tous les cas d’échantillonnages et non de comptages réels, ce qui augmenterait la zone d’incertitude. Au final, à part quelques aménagements à la marge, la technique de comptage de la police devrait donc rester inchangée. Tout comme les polémiques.
Illustration de Nawak, extrait de la France rose et bleu.
Distribué par le biais de Bibliocraphie, l’ouvrage recense plus de 60 dessins d’actualité réalisés de mars 2013 à juin 2014 et consacrés au réveil de la France réac : Mariage pour tous, « théorie du genre », IVG, euthanasie… : un livre pour se souvenir… et ne rien oublier !
Nawak sera en séance de dédicaces à Toulouse, le 16 mai prochain à l’Espace de la diversité et de la laïcité, et les 30 et 31 mai à Paris, au Centre LGBT, à l’occasion du 2e Salon de la BD LGBT (les horaire sont à confirmer).