>> Mariage pour tous, Manif pour tous, le débat ne s’est pas apaisé. Autant de violences verbales et de postures politiques qui énervent Charles Consigny.
Poser encore, aujourd’hui, des conditions à l’homosexualité, chercher des moyens d’en limiter l’exercice, l’accomplissement, la visibilité, lui inventer des limites, des raisons de l’exclure, phosphorer, sous le masque de l’intelligence et du scrupule culturel, sur ses différences avec l’hétérosexualité qui justifieraient des traitements publics différents, faire comme s’il y avait une forteresse Vauban de la civilisation qui serait la famille hétérosexuelle, et des débordements à contrôler qui seraient les relations homosexuelles, bref lutter, tout simplement, aujourd’hui encore, contre l’homosexualité, comme le font, quoi qu’ils en disent, les « manifestants pour tous », c’est lutter contre la liberté.
Si M. Sarkozy a réellement dit, contrairement à ses démentis qui semblent bien politiques, que le mariage pour tous, il s’en fout, et que la Manif pour tous, c’était du fascisme en loden, je suis décidément des siens, et je ne saurais que trop lui conseiller d’écouter son intime conviction plutôt que les sondages qui lui indiquent qu’il aura besoin de telle ou telle catégorie d’électeurs dans quelques années.
Nos voisins anglais s’en moquaient, du mariage pour tous, à tel point qu’ils l’ont voté en moins d’une journée, et ils ont eu raison d’en passer par cette méthode expéditive. En France, nous avons ridiculement protesté contre cette loi qui n’intervenait que trop tard, et j’ai eu de la peine pour les enfants des manifestants qui, comme des millions et des millions d’autres, auraient à affronter leurs parents le jour d’un éventuel coming-out. La sortie de placard est déjà aussi difficile qu’une traversée de la Manche à la nage quand on a des géniteurs ouverts d’esprit, alors je n’ose imaginer l’océan où doivent s’élancer avec leur seul courage ceux qui n’ont pas cette chance.
Il faudra arrêter une bonne fois pour toutes avec ces discours faussement sophistiqués, faussement guidés par le souci d’une société apaisée, faussement nourris de références bibliques, qui consistent toujours en des raisonnements grotesques, et ne visent qu’à assouvir un fantasme risible que des fascistes en loden nourrissent à l’endroit des homosexuels et de leur sexualité.
La responsabilité politique commande de voir plus loin
Ça n’est pas parce que les dévots de Béatrice Bourges, toute sympathique qu’elle croit être avec son nom gaguesque et son carré caricatural, ressentent les sentiments contradictoires de l’attraction et de la répulsion quand ils feuillettent par hasard le calendrier des Dieux du stade qu’ils doivent revendiquer des moyens légaux d’entraver l’existence normale de ceux qui ont préféré l’attraction à la répulsion. Et ça n’est pas parce que d’autres pensent encore qu’il y a des raisons de craindre les invertis, et se trouvent par là moins avancés qu’on ne l’était il y a plusieurs millénaires en Grèce ou en Mésopotamie, que la sphère politique doit répondre favorablement à leur sotte inquiétude.
Les prétendants au trône qui, à droite, revendiquent leur volonté de revenir sur la loi instaurant le mariage pour tous s’ils accédaient aux responsabilités sont des coupe-jarrets du débat public, de bas stratèges prêts à toutes les indignités pour satisfaire leur soif carriériste. La responsabilité politique commande parfois de voir plus loin, plus haut et plus grand que la multitude aveuglée par sa peur. M. Sarkozy ou un autre, puisque vous savez qu’il y a toujours eu des pédés et des gouines, qu’il y en aura toujours, qu’ils ne valent pas mieux, ni moins bien que les autres, qu’ils ont le droit de s’aimer, de rêver à leurs avenirs communs, d’officialiser leurs unions, une bonne fois pour toutes, grand Dieu, fermez ce débat !