Ce sont des montagnes à gravir, mais Raymond Chan, premier député gay déclaré de Hong Kong, se dit déterminé à pousser le rocher de la réforme jusqu’à la légalisation du mariage homosexuel et la démocratisation de la mégapole chinoise.
L’ancien disc jockey, que les noctambules connaissent sous son nom de scène, « Slow Beat » (rythme lent), a profité de son élection au parlement de l’ancienne colonie britannique début septembre pour faire son coming out public.
Elu du parti pro-démocratie « Pouvoir au peuple », il entend consacrer son mandat de quatre ans à batailler pour l’instauration d’une démocratie pleine et entière et la reconnaissance des unions entre personnes du même sexe.
« Si je ne me bats pas pour mes propres droits, comment puis-je aider les opprimés et les marginaux? », explique Raymond Chan, 40 ans, dans un entretien à l’AFP. « En tant que parlementaire, le fait que j’aime un homme ou une femme n’affecte en rien mes compétences ou mes convictions politiques ».
Il affirme avoir reçu de larges encouragements depuis son « coming out », mais explique avoir attendu l’issue du scrutin pour révéler son homosexualité parce que ce n’était pas « vendeur » pour sa campagne.
Les associations LGBT ont vu dans son élection un levier pour promouvoir les droits des minorités sexuelles à Hong Kong, demeurée conservatrice sur les questions sociétales malgré sa réputation de grande ville moderne, cosmopolite et tolérante.
L’homosexualité n’y a été décrimininalisée qu’en 1991.
Et une étude publiée en mai pour le compte de la banque britannique Barclays mettait au jour des comportements toujours hostiles à l’égard de la communauté gay. Pas moins de 85% des LGBT interrogés affirmaient par exemple souffrir d’exclusion sur leur lieu de travail en raison de leur orientation sexuelle.
Un exécutif élu au suffrage universel
« Hong Kong est vraiment en retard », affirme Raymond Chan. Les couples homosexuels n’ont pas accès aux logements publics, les partenaires ne peuvent hériter l’un de l’autre et ne bénéficient pas des mêmes avantages fiscaux que les couples hétérosexuels.
« Il n’y aucune protection pour les couples gay. J’espère que nous pourrons faire passer des lois interdisant la discrimination contre l’orientation sexuelle dès que possible et, évidemment, l’objectif ultime est de réformer la loi pour autoriser le mariage homosexuel ».
Face aux résistances – en particulier des communautés religieuses, bouddhistes ou catholiques – Raymond Chan prône une approche « pédagogique » plutôt que les gesticulations bruyantes de ses alliés politiques.
« Que cela prenne une législature, que cela prenne deux législatures, peu importe, du moment que quelqu’un mène la bataille ».
Gay… et démocrate, Raymond Chan est pour l’heure élu d’une assemblée qui ne reconnaît pas les unions homosexuelles, et est constituée en majorité de personnalités désignées par des grands électeurs acquis à Pékin.
Le chef de l’exécutif honkongais, nécessairement pro-chinois, est lui-même élu au suffrage indirect.
La Chine, après le retour de Hong Kong dans son giron en 1997, a promis d’instaurer le suffrage universel direct pour l’élection du chef de l’exécutif en 2017 et celle du parlement en 2020. Mais de nombreux démocrates locaux doutent fortement de ses promesses.
« Mon rêve est qu’un jour, quand l’union entre personnes du même sexe sera autorisée à Hong Kong, je sois le premier à me marier. Et j’aimerais inviter à la noce un chef de l’exécutif élu par tous les Hongkongais au suffrage universel ».