En meeting ce mercredi 12 avril devant des milliers de personnes à Lille, Jean-Luc Mélenchon est revenu sur les purges préventives d’hommes soupçonnés d’homosexualité en Tchétchénie et révélées par le journal d’investigation Novaya Gazeta.
L’information a été confirmée par des ONG russes, qui ont par ailleurs ouvert une ligne d’urgence, mais elle est qualifiée de « mensonge absolu » par Alvi Karimov, porte-parole du dirigeant tchétchène et pro-Kremlin Ramzan Kadyrov, arguant qu’il est impossible de persécuter « ce qui n’existe pas dans notre république. »
Une centaine de victimes auraient pourtant disparu et trois personnes seraient mortes, torturées dans des prisons secrètes, assimilées à des « camps de concentration ».
Les témoignages existent, même s’il est étonnant dans ce contexte de répression que des rescapés aient osé en parler. Certains craignent désormais d’être assassinés par des membres de leur propre famille, les crimes d’« honneur » restant impunis dans la région, sinon traités avec « compréhension », comme l’a déclaré avant de se rétracter, Kheda Saratova, membre du Conseil des droits de l’homme, mais sous l’égide de Kadyrov.
C’est d’une cruauté totale, a insisté dans son discours le candidat de La France insoumise, dénonçant l’homophobie criminelle encore pratiquée dans plus de 75 pays, dont 13 qui prévoient la peine de mort.
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En 2012, la semaine suivante son élection, François Hollande s’était engagé auprès de notre porte-parole, Alexandre Marcel, également Président du Comité IDAHO France, coordinateur de la journée internationale de lutte contre l’homophobie et la transphobie, à porter une résolution à l’Assemblée Générale des Nations Unies pour une dépénalisation universelle des discriminations à raison de l’orientation sexuelle et de l’identité de genre. Malgré l’urgence, il semble que depuis la loi Mariage pour tous, la volonté politique ait été éreintée.
Nous avons interpellé Jean-Luc Mélenchon sur notre combat et son équipe a répondu à nos questions :
« Oui, il faut porter cette résolution. La France doit porter la lutte contre les LGBTIphobies à tous les niveaux, y compris au plan international. Par ailleurs, nous sommes très attachés au cadre multilatéral des Nations unies, dont nous souhaitons renforcer le rôle de garante de la paix et de vigie des droits de l’Homme. Donc nous porterons cette résolution et, au-delà, les questions d’autodétermination du genre, de l’égalité des droits, de l’égalité femmes-hommes, du refus des LGBTIphobies dans tous les cadres internationaux. »
La France insoumise préconise aussi d’agir en direction de l’Organisation Mondiale de la Santé. « Ces actions sont nécessaires mais on connaît les obstacles dans les enceintes de l’ONU. »
« Dans l’Union européenne, il y a un risque et c’est aussi cela que nous voulons changer dans ce cadre : il faut une directive transversale contre les discriminations, de même qu’il faut se mobiliser en faveur de l’asile des personnes LGBTI. J’ajoute que la France sera d’autant mieux entendue dans ces enceintes qu’elle sera elle-même exemplaire, comme dans la pleine reconnaissance de la libre-disposition de soi et de l’égalité entre tou.te.s sur son sol : Capacité pour les personnes trans et intersexes de disposer de leur état civil, de la fin des réassignations sexuelles forcées pour les intersexes, ou encore à l’égal accès de toutes les femmes à la PMA. »
SH : Nous espérons l’inscription des orientations sexuelles et de genres dans la constitution comme une liberté à nos droits de conscience, bafoués par les lois.
« L’orientation sexuelle et l’identité de genre relèvent de la part la plus intime de nous-même, celle qui ne dépend et ne doit dépendre que de chacun.e. Nous savons qui nous sommes, et cela est respectable en tant que tel. Ce n’est pas à l’Etat, ni aux autres personnes, ni aux Eglises ou à quelque groupe que ce soit, de s’en mêler. Nous voulons donc assurer à la fois le respect le plus complet de cette relation de soi à soi, et proclamer le refus le plus absolu des discriminations fondées sur ces motifs. Donc oui : Nous proposerons que l’assemblée constituante, que nous convoquerons dès notre élection, inscrive dans la constitution de la 6e République deux choses. D’une part, la libre disposition de son genre. D’autre part, l’égalité de tou.te.s quelle que soit leur identité de genre et quelle que soit leur orientation sexuelle et le refus de toute discrimination LGBTIphobe. »
SH : Pourrait-on aussi envisager une allocation aux personnes trans le temps de leur transition ? Les témoignages confirment des situations extrêmes pour certaines.
« Le changement d’état civil et les procédures notamment médicales qui l’accompagnent doivent être libres. Elles seront donc, si Jean-Luc Mélenchon est élu, menées devant un officier d’état civil (et non un juge comme actuellement) et gratuites.
Comme détaillé en ligne dans le livret thématique « Droits nouveaux & LGBTI« , nous proposons la prise en charge intégrale par la sécurité sociale, ce qui en assurera la gratuité.
De plus, nous proposons deux mesures générales qui doivent améliorer la situation des trans aussi, notamment pendant une transition. D’une part, une hausse des salaires (smic a 1700 euros brut dès 2017) et des minimas sociaux. D’autre part, la régularisation de tou.te.s les travailleurs/ses sans papiers. »
SH : Quelle est sa position sur l’ouverture au don du sang pour les gay et les bi ?
« La préoccupation première, c’est la sécurité des transfusions sanguines. On peut bien sûr continuer à travailler sur les critères d’ajournement au don de sang, toujours en se fondant sur des arguments rationnels, étayés scientifiquement. Cela pourrait permettre, par exemple, sur la base de tels arguments, d’envisager de raccourcir le délai actuellement fixé à 12 mois. »
Stop Homophobie a enregistré près de 33.000 témoignages d’agressions à caractère homophobe en 3 ans. Nous avons besoin d’une justice plus réactive, des centres d’accueil réservés aux victimes pour qu’elles puissent porter plainte sans appréhension et sans dissuasion.
« La première réponse, c’est refuser fermement les LGBTphobies partout dans la société, et d’abord à la tête de l’Etat. Il n’y a pas de « clause de conscience » qui vaille lorsqu’on refuse de marier deux hommes ou deux femmes par homophobie ! Il n’était pas non plus acceptable de recevoir les conservateurs religieux de la « Manif pour tous » à l’Elysée. Toutes ces palinodies des gouvernements Hollande, d’ailleurs, n’ont rien apaisé du tout, n’ont fait qu’allonger la discussion et approfondir le fossé dans la société française. La France insoumise, elle, défend sans ambiguïté une ligne d’entière égalité, de plein refus des LGBTIphobies d’où qu’elles viennent. Et de plein respect des convictions privées de chacun.e sur ces sujets, dans le respect de la loi. La deuxième réponse de Jean-Luc Mélenchon et de la France insoumise est de défendre les services publics. Il sont nécessaires, et par exemple pour combattre les LGBTIphobies. La justice est dans un état pitoyable en France : nous lui donnerons des moyens massifs et immédiats. La police manque de policiers et se voit confier des tâches inutiles, pilotées par une politique du chiffre contre-productive : nous y mettrons fin. La France manque d’enseignant.e.s, d’infirmier.e.s scolaires : nous en recruterons car ils ont un rôle irremplaçable pour éclairer les jeunes consciences et faire reculer les préjugés. Enfin, nous appuyons les associations dans leur rôle d’information, d’accompagnement et d’alerte. Pour ce faire, il faut là aussi refuser l’austérité budgétaire pour mettre en cohérence les paroles et les actes. »
SH : Quelles thématiques vous sensibilisent plus particulièrement dans le cadre de la lutte contre les LGBTphobies ?
« Les discriminations contre les intersexes, les trans, les lesbiennes, les bis, les gays, ne sont pas « un sujet mineur ». Assurer l’émancipation de chacun.e, sa liberté, est un projet de société : le nôtre. C’est pourquoi nous avons proposé de l’inscrire dans le chapitre de notre programme consacré aux nouveaux droits, avec par exemple l’inscription dans la Constitution du droit à l’avortement ou encore le droit au suicide assisté. »
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Nous remercions La France insoumise pour cet engagement, le livret dédié « Droits nouveaux & LGBTI » et les mots du candidat à Lille.
Stophomophobie.org