Les Jozi Cats, premier club gay, inclusif et africain de rugby à disputer des compétitions, font un buzz depuis quelques semaines avec une campagne volontairement provocatrice, pour dénoncer les stéréotypes qui persistent et conditionnent l’homophobie.
Grands gaillards « blond, black ou ténébreux », barbes fournies, tatoués, maillot de rugby et regard menaçant, baguette magique à la main et petites ailes dans le dos, ou qui apprécie plus particulièrement la cuisine : « trop chochottes ? Des tarlouzes ? ».
On a utilisé les injures les plus communément employées, explique Nathi Khoza, 26 ans, l’un des membres du club. Le rugby étant l’un des sports les plus populaires dans le pays, il s’agissait de « jouer sur les mots et contrastes pour caricaturer tous ces mythes et clichés associés ».
Mais pas uniquement. La campagne vise aussi à recruter de nouveaux joueurs, pour participer à des tournois et l’objectif est atteint ! Les Jozi Cats, lancés en 2015, compte désormais une bonne trentaine de rugbymen, tous amateurs et de niveaux divers.
Robert fait partie des petits nouveaux. Son compagnon, lunettes de soleil vert fluo, assiste à l’entraînement depuis les mini-gradins en bordure de terrain : « Je veux jouer au rugby mais dans une équipe où je ne suis pas jugé. (…) Et je n’y vois pas une occasion pour rencontrer d’autres mecs. »
La prochaine bataille des Jozi Cats ? « Recruter davantage de joueurs noirs », souligne Nathi : « Si dans la culture occidentale, les gens sont devenus plus ouverts (…), dans la culture noire, des gays sont toujours reniés et certains voient dans l’homosexualité une malédiction. »
L’Afrique du Sud fait en effet figure de précurseur. Le mariage pour tous y est légal depuis 2006. Mais les LGBT restent criminalisés sur la grande majorité du continent. « Et les préjugés sont tenaces. »
Quand il a fait son coming out il y a deux ans, Nathi se rappelle « la réaction négative » notamment des membres de son église. Il ne rentre pas dans les détails. Mais il n’a pas cherché à rejoindre une nouvelle paroisse quand il a emménagé à Johannesburg. « C’est une façon de me protéger », confie-t-il.
Dans l’ensemble pourtant, la campagne des Jozi Cats a reçu un accueil positif. Larry cherche ses mots, puis lâche: « Les gens m’ont dit : « Tu as eu les couilles de faire ça » ».
« Après un match, une équipe (hétérosexuelle) nous a payés « la tequila ». C’est vraiment encourageant », se réjouit également Nathi. Parmi les rares commentaires humiliants, ceux laissés sur la page Facebook du média Russia Today qui « nous ont traités de pédophiles et souhaité qu’on meure tous du sida », ajoute-t-il.
Anne V. Besnard
stophomophobie.org