Le VIH/sida pourrait bien être enfin éradiqué grâce à la contribution de deux scientifiques canadiens qui ont découvert comment le virus parvient à duper notre système immunitaire.
Cette découverte «nous rapprochera d’une fin pour le VIH/sida», estime Robert Reinhard, du Consortium canadien de recherche sur la guérison du VIH (CanCURE).
«On est très excités», se réjouit le Dr Éric Cohen, qui chapeaute CanCURE et dirige l’unité de recherche en rétrovirologie humaine à l’Institut de recherches cliniques de Montréal (IRCM).
Son équipe a décodé un mode d’action du virus qui pourrait permettre d’élaborer un remède qui rétablirait nos mécanismes de défense immunitaire naturelle. Nous parviendrions ainsi à empêcher le VIH de se multiplier au point de devenir impossible à éliminer, comme c’est le cas actuellement.
Système immunitaire
Avec la Dre Mariana Bego, le Dr Cohen a découvert la ruse qu’utilise le VIH pour berner notre système immunitaire.
Le processus est le suivant: quand le VIH arrive dans notre corps, il est aussitôt repéré par les cellules immunitaires chargées de la défense immédiate contre les infections.
« La découverte des Drs Bego et Cohen […] nous rapprochera d’une fin pour le VIH/sida. » – Robert Reinhard, CanCURE
Celles-ci patrouillent en permanence dans le corps et, dès qu’elles repèrent un intrus, elles sécrètent un groupe de protéines nommées interférons.
La mission de l’interféron est de déclencher les mécanismes de défense des cellules avoisinantes pour empêcher la propagation de l’intrus. Un des effets secondaires de cette lutte est la fièvre ressentie par la personne atteinte.
À la merci du virus
Mais le VIH réplique en sécrétant une protéine virale qui bloque la sécrétion d’interféron. Sans ce signal d’alarme, les cellules ne se défendent pas. Le virus peut donc se multiplier à sa guise pour créer rapidement des réservoirs viraux dormants.
«Les médicaments contrôlent le virus dans la phase de multiplication, mais n’ont aucun effet sur les réservoirs viraux latents. C’est pour ça qu’on est obligé de prendre la thérapie antirétrovirale à vie», explique le Dr Cohen. Il estime que la découverte de son équipe pourrait contribuer à établir enfin «une stratégie pour une rémission totale».
Éliminer le VIH/sida d’ici 2030 est possible
Une génération sans VIH/sida est désormais envisageable d’ici 2030, d’après le tout dernier rapport de l’ONUSIDA, présenté mardi par le secrétaire général de l’ONU, Ban Ki-moon.
Déjà, la lutte acharnée que mène la communauté internationale est un succès. «L’épidémie a été enrayée et inversée», s’est réjoui Ban Ki-moon.
Entre 2000 et 2014, le nombre de nouvelles infections a en effet plongé de 35,5 %. De plus, le nombre de personnes traitées aux antirétroviraux est passé d’un million en 2001 à 15 millions en 2015.
«Mettre fin à l’épidémie de sida […] d’ici 2030 est ambitieux, mais réaliste», a estimé le secrétaire général de l’ONU.
Investir davantage
Pour y parvenir, il faudra toutefois continuer d’investir gros, prévient l’Organisation des Nations unies. Alors que le monde a déboursé 21,7 milliards $ US cette année, il devra délier davantage les cordons de sa bourse, jusqu’à 32 milliards $ US chaque année d’ici 2020, selon l’ONU.
«Nous devons d’urgence mener des efforts à plus grande échelle ces cinq prochaines années», a pressé Ban Ki-moon. L’objectif premier est de rendre le dépistage et les traitements accessibles à tous, partout dans le monde.
«Sur les 36,9 millions de gens infectés dans le monde, seulement 15 millions de personnes sont traitées», insiste le Dr Éric Cohen, virologue et directeur de l’unité de recherche en rétrovirologie humaine à l’Institut de recherches cliniques de Montréal (IRCM).
Malades vieillissants
Le scientifique souligne par ailleurs que «même si demain matin on élargissait l’accès aux médicaments au monde entier, il restera toujours 36,9 millions de personnes infectées qui auront toujours le virus».
«Il faut trouver une solution pour ceux qui sont déjà infectés, qui vieillissent avec le virus et subissent des complications importantes», conclut le Dr Cohen.