Il avait partagé en décembre 2016, dans un forum d’entraide sur facebook, un post narrant une consultation avec un patient homosexuel, mais pas de type « fofolle avec des manières surjouées, plutôt un monsieur tout le monde », expliquait-il, s’inquiétant d’avoir frôlé « une erreur médicale » pour lui avoir diagnostiqué une fissure anale alors qu’il s’agissait d’un chancre syphilitique !
« Il y a des homos hommes qui ont des mimiques d’hommes, ceux-là je ne suppose rien, et des homos hommes qui ont des mimiques des femmes, ceux-là c’est écrit sur leur front… »
Une sorte de « mode d’emploi » donc pour sensibiliser ses confrères. Car le fait de ne pas avoir eu connaissance de l’orientation sexuelle du consultant, « et ce n’était pas marqué dans le dossier », l’aurait poussé à ne pas demander certains examens, pourtant de routine. D’où le message « pour poser la question de savoir s’il y avait d’autres cas ».
Des termes tout à fait « inacceptables », pour l’Ordre des médecins également qui, alerté par l’amicale des jeunes du refuge, a décidé en janvier dernier de poursuivre le généraliste, après l’avoir auditionné.
« Nous avons des règles, nous avons des lois que nous nous sommes prescrits pour respecter la dignité du patient et pour cela nous avons prêté serment. Dans ce cas précis, ce ne sont pas ses compétences médicales qui sont en cause mais sa vision qu’il a des patients, auxquels devons un plus que du mépris. Il faut que les praticiens sachent que l’on ne peut pas faire n’importe quoi », avait alors indiqué Jean-Pierre Mouraux, le président de l’ordre en Côte-d’Or.
Jugé ce 22 juin devant la chambre disciplinaire de première instance de Bourgogne pour propos homophobes, le médecin dijonnais a finalement été condamné à un mois d’interdiction d’exercice dont 15 jours avec sursis. Il devra par ailleurs s’acquitter de 1 000 euros au titre des frais de procédure.
Dans ses conclusions, relayées par le Quotidien, la chambre disciplinaire estime qu’un médecin doit exercer sa profession « dans le respect de la vie humaine, de la personne et de sa dignité », en usant de sa liberté d’expression « dans les limites et les conditions des règles de déontologie applicables aux médecins ». Or, les commentaires publiés par l’accusé sont « excessifs et constants » et son comportement de nature à « déconsidérer sa profession ».
Le condamné n’a pas assisté à l’audience, mais déplore, récidiviste, qu’une partie du dossier concerne des écrits de 2012, « tronqués et sortis de leur contexte », qu’il a tenu alors interne sur le site Remede.org. « Je n’étais pas soumis au code, car pas inscrit au tableau de l’Ordre, donc je ne peux pas être poursuivi pour ces propos ». Difficile toutefois de ne pas mentionner qu’il affirmait et considérait déjà « l’homosexualité comme une maladie et une déviance ».
Quant à ses commentaires sur Facebook, le médecin les trouve « ridicules » comparés à d’autres sur les réseaux sociaux. Il avait dès le début nié « toute mauvaise intention », regrettant que l’on « déforme le sens des mots pour chercher de l’homophobie partout ».
Pour l’Amicale des jeunes du Refuge, « cette décision est exemplaire. L’Ordre régional a agi en responsabilité, rappelant des règles essentielles que tout praticien devrait garder en mémoire. En interdisant au Docteur Jean-Roch Huet d’exercer sa profession, l’instance envoie un message fort et préventif : il n’y a pas d’impunité et l’homophobie n’est pas une opinion scientifique, mais un délit ! », ajoute Mehdi AIFA, président de l’association.
Le médecin a 30 jours pour faire appel, autrement sa sanction prendra effet dès le 1er septembre prochain.
Terrence Katchadourian
stophomophobie.com