La commission des Affaires sociales a adopté, mercredi 3 octobre, un amendement alignant pour le don de sang la durée d’abstinence imposée aux hommes ayant des relations sexuelles avec des hommes (HSH) sur celle s’appliquant actuellement aux hétérosexuels. Soit quatre mois d’absence de relations avec plusieurs partenaires, au lieu des 12 exigés depuis 2016 et la levée de l’interdiction totale des dons.
« Pour tout homme donneur et toute femme donneuse », le texte stipule qu’« aucune distinction ne doit être faite en fonction du genre et sexe du ou des partenaires avec qui il ou elle aurait entretenu des relations sexuelles ». Mais il doit encore être voté en séance publique ce jeudi 11 octobre, et le gouvernement semble s’y opposer.
Un amendement de suppression a en effet été déposé lundi 8. Le ministère de la Santé invoque sur le JDD d’Europe1 un désaccord, « non pas sur le fond » mais sur « une simple question de mécanique ».
Il souhaite que la contre-indication reste fixée par l’arrêté du 5 avril 2016 et n’entre pas dans la loi au motif qu’un arrêté « est évolutif et pourrait être modifié plus facilement en cas d’urgence de santé publique c ». Renvoyer à la loi la définition des critères de sélection des donneurs, « figerait » ainsi la capacité de réaction de l’Etat.
Mais le gouvernement comprend néanmoins le message de lutte contre les discriminations porté par l’article des socialistes. « C’est un principe auquel il est très attaché ».
Un proche du dossier a assuré sur Europe1 que « des arbitrages avaient lieu au gouvernement pour éviter une situation problématique jeudi en séance ».
Le conseiller régional d’Ile-de-France et adjoint à la maire du XIIe arrondissement de Paris, Jean-Luc Romero, militant LGBT+ et président fondateur d’Elus Locaux Contre le Sida, a publié pour l’occasion une tribune, appelant tous les députés à se responsabiliser pour mettre fin à ces discriminations.
« Cette période d’abstinence demandée aux homosexuel.le.s est complètement disproportionnée, au vu des techniques de dépistage récemment développées », explique-l’élu. Il suffit de 10 à 12 jours, période dite de la « fenêtre silencieuse », pour que le VIH puisse être détecté dans l’organisme, « 30 fois moins que ce qui est demandé aux LGBT ».
Ce passage, au gré de l’arrêté de 2016, fixant les critères de sélection des donneurs de sang, n’est par ailleurs que « pure hypocrisie, puisque ce sont en réalité 93,8% de cette population qui est écartée du don du sang », ajoute M. Romero.
Ouvrir ce don à tous et « dans les mêmes conditions que les hétérosexuel.le.s, permettrait d’accroitre de façon non-négligeable l’approvisionnement nécessaire en produits sanguins ».
D’après les estimations de la Direction générale de la santé (DGS), « le passage d’une exclusion définitive à une contre-indication de douze mois pour les personnes homosexuelles pourrait avoir déjà permis à l’EFS de gagner trois jours d’autosuffisance supplémentaires. Imaginez ce que ce serait si l’on changeait enfin de paradigme pour prendre enfin en compte les comportements à risque plutôt que les populations à risque… des pénuries très certainement moins nombreuses ! »
« En laissant la loi inchangée, vous acceptez d’une certaine façon que l’on présume séropositive toute une population. Et cela n’est pas sans nourrir l’homophobie qui se manifeste de plus en plus dans nos rues », conclut-il, en invitant les député.e.s, de tous bords à voter pour cet « amendement de raison ».