Sur les 2 000 cantons concernés par ces élections, l’UDMF présentera des candidats à Bobigny (Seine-Saint-Denis), à Bagneux (Hauts-de-Seine), aux Mureaux (Yvelines), à Marseille (Bouches-du-Rhône), à Lyon (Rhône), Nice (Alpes-Maritimes), Avion (Pas-de-Calais) et possiblement à Strasbourg (Alsace).
Politique ou religion ?
La défense des religions est au cœur du combat politique de l’UDMF. Et certaines mesures ne manqueront pas de faire débat, comme le port du voile pour toutes les étudiantes par exemple. Mais Najib Azergui promet une déontologie républicaine exemplaire. « L’islam démocrate, c’est une évidence ET une réalité. Nous ne voulons pas imposer la charia. Nous avons des membres – et même une candidate, à Bagneux – qui ne sont pas voilées. Nous ne voulons pas d’un état théocratique. De nombreux musulmans, d’ailleurs, fuient les Etats qui mettent en place la charia », renchérit cet informaticien de 33 ans.
Dans les colonnes du Parisien, le président fondateur du parti, Najib Azergui, se défend de toute démarche communautariste : « Il existe en France un parti des chrétiens-démocrates (…) L’UDMF tente de donner une voix à une partie de la population qui ne se retrouve pas dans les partis traditionnels et qui a envie d’agir ».
Née en novembre 2012, UDMF revendique près de 900 adhérents et 8.000 sympathisants : un public d' »actifs, Français de confession musulmane pour la plupart, qui ne se reconnaissent pas dans l’offre politique » actuelle et veulent « sortir du bipartisme », explique Najib Azergui : « Il y a une place pour ce parti, entre la droite, coupable de discrimination, et la gauche, rejetée pour son instrumentalisation du vote arabo-musulman ».
Le parti emprunte ainsi ses thèmes à la droite et à la gauche, ultra-conservateur sur le plan sociétal – avec la « Manif pour tous » et ses positions hostiles aux droits des personnes LGBT comme référence – mais antilibéral sur le plan économique et social. Il se veut non confessionnel, à l’instar du parti chrétien-démocrate de Christine Boutin, dont il dit suivre l’exemple.
L’UDMF est également favorable au droit de vote des étrangers aux élections locales, pour l’entrée de la Turquie dans l’Union européenne. Le parti milite aussi pour l’enseignement de la langue arabe, « injustement bannie » du secondaire et souhaite faire de la France un des « leaders mondiaux » sur le marché de l’alimentation « hallal ».
En vue des élections des 22 et 29 mars, l’UDMF a présenté dans le canton de Bobigny Khalid Majid, 36 ans, cadre commercial à la SNCF, et Schérazade Benhaddad, 34 ans, une militante associative et secrétaire de la section locale du parti.
La formation compte un seul élu, Hocine Hebbali, candidat sous l’étiquette UDMF sur la liste UDI de Stéphane de Paoli à Bobigny, arrivée en tête lors des municipales de mars 2014. Cette liste s’était appuyée sur le vote de la communauté musulmane pour battre les communistes, implantés depuis 1919.
L’UDMF a un précédent, le Parti des musulmans de France, créé en 1997 à Strasbourg. Son président, Mohamed Latrèche, avait obtenu 0,92% des voix aux législatives de 2007.
Un parti « musulman démocrate » peut-il percer ?
Najib Azergui reconnaît que c’est un « terrain qui prendra du temps ». Mais « le temps » suffira-t-il ? « Ils ont un créneau extrêmement faible », tranche Pascal Perrineau, politologue spécialiste de sociologie électorale, contacté par Europe1. « Même s’ils le contestent, leur parti se fonde, de fait, sur une référence religieuse. Or, les partis qui se construisent sur des bases communautaires n’ont jamais fait un tabac en France. Regardez l’état dans lequel se trouve le parti de Christine Boutin ! », décrypte ce spécialiste.
Selon Pascal Perrineau, en s’adressant aux abstentionnistes, le parti peut espérer « 1 » ou « 2 »% d’intentions de vote tout au plus. Bien loin des 41% obtenus par l’Union chrétienne démocrate d’Angela Merkel, lors des législatives allemandes de 2013. « C’est différent. Ce genre de parti peut s’enraciner dans une démocratie chrétienne extrêmement vieille. En Allemagne, la montée de ce courant date de l’entre-deux guerres, lorsqu’il a fallu trouver une réponse au Marxisme. En France, il n’y a pas du tout de dimension confessionnelle dans l’électorat », conclut Pascal Perrineau.
avec l’AFP