Après des années de débats passionnés, tentatives législatives et appels judiciaires qui auront encore exacerbé les clivages profonds de la société sur le sujet, et alors que l’examen d’un projet de loi sur la question traîne en longueur au Parlement, la justice pourrait finalement décider ce mercredi 24 de faire de Taïwan le premier pays d’Asie à ouvrir le mariage aux personnes de même sexe !
Le Conseil des grands magistrats saisi de deux recours cruciaux, déterminera si les dispositions du code civil, selon laquelle « le mariage ne peut unir qu’un homme et une femme », est contraire à la Constitution, censée garantir l’égalité entre tous.
Chi Cia-wei, 59 ans, l’un des auteurs des recours déposés en 2015, est certain d’obtenir cette fois une issue positive : « Je suis optimiste mais ma joie ne sera pas excessive. Cela aurait dû se produire il y a bien longtemps », confiait-il à la presse en mars dernier. Le militant réclame la reconnaissance de son couple depuis 1986. En 2013, on lui a de nouveau refusé la délivrance du certificat.
L’autre requérant est la municipalité de Taipei, régulièrement contrainte de rejeter des demandes et qui souhaite également une clarification de la législation. Si le verdict est favorable, l’arrêt de la Cour s’imposera à Taïwan et pourrait faire écho dans toute l’Asie, jusqu’en Corée du Sud et au Japon. Une union civile pourrait en outre être envisagée. Mais comme l’explique Nicole Chung, militante LGBT, « ce serait une résolution bien moins rassurante après tant d’années d’acharnement. Nous ne souhaitons pas être relayés à des citoyens de seconde classe. On descendra dans la rue ! »
L’île nationaliste qui vit séparée de la Chine depuis 1949 figure déjà parmi les moins hostiles concernant les droits des LGBT. Et l’arrivée au pouvoir en mai 2016 de la présidente Tsai Ing-wen, candidate progressiste qui a pris position pour l’ouverture du mariage à tous les couples, a consolidé l’espoir. Dans les sondages, l’opinion publique adhère, avec un très fort taux chez les jeunes. En octobre dernier, près de 80 000 personnes ont ainsi défilé à Taipei.
Une évolution que religieux et conservateurs considèrent néanmoins comme « une destruction de la famille, plaidant « la piété filiale due par chacun à son père et à sa mère. Ils promettent de maintenir la mobilisation d’opposition et envisage une motion de censure si l’avis des juges du Conseil constitutionnel était positif, « le mariage n’étant pas simplement une question d’amour, ou de sentiments », insistent-ils, « mais la continuation de la race humaine. »