La plus haute juridiction française a tranché ce mercredi 5 juillet en faveur de l’ouverture de la filiation des parents d’intention d’enfants nés par GPA à l’étranger par voie d’adoption. L’aboutissement d’une révolution juridique initiée par la Cour européenne des Droits de l’Homme, qui avait estimé dès juin 2014 que la France ne pouvait refuser de reconnaître les enfants nés d’une mère porteuse à l’étranger.
La Cour avait notamment été saisie par un couple d’hommes élevant un enfant né d’une gestation par autrui en Californie. Le père biologique est reconnu en France, mais ce n’est pas le cas de son conjoint. Un manque de reconnaissance légale que la justice vient de combler, lui reconnaissant désormais le droit de faire une demande d’adoption « simple », qui à la différence de la « plénière », n’efface pas la filiation d’origine, soit en l’occurrence, le lien biologique avec la mère porteuse.
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— Cour de cassation (@Courdecassation) 5 juillet 2017
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En revanche, la haute juridiction n’a pas accédé à la demande d’un autre couple, hétérosexuel, qui souhaitait la transcription pure et simple en France de l’état civil établi en Ukraine pour ses jumelles nées par GPA en 2011, sans passer par une procédure d’adoption. L’acte de naissance ukrainien ne mentionne pas de mère porteuse mais désigne le couple comme les parents. En France, les jumelles sont uniquement liées à leur père biologique. Selon le droit français, la mère est la femme qui accouche. L’acte de naissance étranger est donc, au regard de la loi française, une fiction, et ne peut être retranscrit tel quel.
« En cas de gestation pour autrui réalisée à l’étranger, l’acte de naissance peut être transcrit sur les registres de l’état civil français en ce qu’il désigne le père, mais pas en ce qu’il désigne la mère d’intention, qui n’a pas accouché », précise la Cour, estimant en outre qu’« une GPA réalisée à l’étranger ne fait pas obstacle à l’adoption de l’enfant par l’époux de son père ». Elle avait reconnu pour la première fois le 3 juillet 2015 les pères « biologiques » d’enfants nés de GPA en Russie.
La semaine dernière, catégoriquement hostile à la gestation pour autrui, le comité d’éthique (CCNE) s’est prononcé pour le maintien de son interdiction, en raison des « violences juridiques, économiques, sanitaires, et psychiques qui s’exercent sur les femmes recrutées comme gestatrices et sur les enfants qui naissent et sont objets de contrats passés entre des parties très inégales ».
Emmanuel Macron est également contre, mais favorable à la reconnaissance des enfants, afin de ne « pas les laisser sans existence juridique ».
Ils ont en effet droit à la nationalité française, comme le sipule l’article 18 du Code civil : « Est français l’enfant dont l’un des parents au moins est français ». C’est ce qu’a rappelé la circulaire « Taubira » de janvier 2013, qui a permis de faciliter la délivrance de papiers aux enfants concernés. Diffusé en plein débat sur le mariage pour tous, ce texte a mobilisé contre lui de nombreux opposants à la GPA, qui craignaient un encouragement des couples à recourir illégalement à une mère porteuse. Le 12 décembre 2014, le Conseil d’Etat a finalement rejeté les requêtes en annulation formulées contre la circulaire, jugeant que « le refus de reconnaître la nationalité française » constitue « une atteinte disproportionnée au respect de la vie privée de l’enfant » que garantit la CEDH.