Un mois après les arrêts de la Cour de cassation ayant autorisé, au prix d’un revirement de jurisprudence, la transcription intégrale des actes de naissance étrangers des enfants nés par GPA à l’étranger [1], c’est-à-dire la reconnaissance de la filiation de leurs deux parents telle qu’établie dans leur pays de naissance, le gouvernement entend utiliser le vecteur de la loi de bioéthique pour venir restreindre la portée de ces arrêts.
Interrogée en la matière le 3 octobre dernier à l’occasion de l’examen en première lecture du projet de loi de bioéthique à l’Assemblée Nationale, la ministre de la Justice avait pourtant déclaré : « je me fie plutôt à la jurisprudence de la Cour de cassation » [2]. Force est de constater qu’elle emprunte finalement un chemin opposé puisque, par cet amendement, le gouvernement veut de nouveau limiter les transcriptions au seul père biologique. Pour faire reconnaître la filiation déjà établie dans le pays de naissance de l’enfant, le second parent devra alors opter pour l’adoption intraconjugale en France. Il pourra aussi – solution déjà effective –, s’il dispose d’un jugement étranger établissant sa filiation, soumettre ce jugement à l’appréciation du juge français afin que ce dernier le rende exécutoire en France et en détermine les effets.
Il s’agit clairement, pour le gouvernement, d’un acte politique qui semble vouloir donner des gages à une droite réactionnaire qui ne cesse d’affirmer que la GPA découlera nécessairement de l’ouverture de la PMA aux couples de femmes. La ministre de la Justice ne soutiendra toutefois pas l’amendement adopté, par la commission sénatoriale, à l’initiative du sénateur Retailleau (LR) [3].
L’amendement proposé par le gouvernement paraît devoir faire primer une posture politicienne sur l’intérêt supérieur de l’enfant. Un enfant n’est pourtant ni responsable ni comptable du mode de procréation choisi par ses parents pour le concevoir. A l’heure où 68% des français se prononcent pour la reconnaissance, par les autorités françaises, des états civils étrangers des enfants nés par GPA [4], le gouvernement continue à estimer devoir trier les enfants en fonction de leur mode de conception pour leur accorder plus ou moins de droits.
Lien de l’amendement proposé par le gouvernement : http://www.senat.fr/amendements/2019-2020/238/Amdt_301.html
[1] https://www.courdecassation.fr/jurisprudence_2/premiere_chambre_civile_568/1111_18_44102.html et https://www.courdecassation.fr/jurisprudence_2/premiere_chambre_civile_568/1112_18_44103.html
[2] http://www.assemblee-nationale.fr/15/cri/2019-2020/20200008.asp
[3] http://www2.senat.fr/encommission/2019-2020/63/Amdt_COM-99.html
[4] https://adfh.net/wp-content/uploads/2019/06/115524_Rapport_Ifop_ADFH_2019-3.pdf
Source : ADFH