Un harcèlement quasi quotidien devant l’Assemblée nationale, des actions ciblées contre les ministres concernés par le projet de loi et des milliers de fantassins en embuscade… Depuis ce qu’ils qualifient de «coup de force» du Sénat – qui a voté, vendredi, à main levée, la loi Taubira sur le mariage gay -, puis du gouvernement – qui a avancé à mercredi la date de retour du texte à l’Assemblée -, la «Grande Armée» du 24 mars s’est démultipliée en d’innombrables commandos mobiles. Dans les rangs des sympathisants de la Manif pour tous résonne plus que jamais le cri de ralliement: «On ne lâche rien!»
«À chaque fois que le gouvernement a tenté d’étouffer notre mouvement, il a provoqué un regain d’activité, note Tugdual Derville, l’un des porte-parole du collectif. Ce qui se dessine, c’est une densification de nos manifestations, aussi bien dans le temps que dans l’espace. Mais toujours dans le respect des biens et des personnes.» Premier rassemblement d’envergure annoncé, le 21 avril, à Paris. Puis le 25. «Ce jour-là, nous allons débattre du référendum d’initiative populaire, avec bien sûr, en tête, le projet Taubira, indique le député Hervé Mariton, principal orateur UMP du texte à l’Assemblée. Il faudrait prévoir une forte mobilisation.» Ensuite, ce sera le 5 mai, date déjà choisie par Mélenchon pour donner «un grand coup de balai» après l’affaire Cahuzac. Histoire de montrer, un an après l’arrivée de Hollande au pouvoir, que le gouvernement est assiégé de tous côtés… «On a bien conscience que ce sera en plein milieu des vacances scolaires, précise Frigide Barjot, l’égérie du collectif. Nous ne recherchons pas le nombre, mais la présence symbolique.»
«À chaque fois que le gouvernement a tenté d’étouffer notre mouvement, il a provoqué un regain d’activité» : Tugdual Derville, l’un des porte-parole du collectif !
La date du 26 mai, jour de la Fête des mères, est maintenue. «Ce sera un rassemblement plus large, pour la famille, explique Hervé Mariton. Car, hélas, les attaques du gouvernement ne s’arrêtent pas à ce texte: en remettant en cause le quotient familial et les allocations, il cherche à faire exploser le modèle familial.» Le collectif est déterminé: «Tant que le gouvernement bloque, nous bloquerons», martèle Frigide Barjot. Quitte à être accusés de «terreur idéologique» ? Dimanche, le premier secrétaire du PS, Harlem Désir, s’est emporté contre la «traque» menée samedi, à Nantes, contre la journaliste pro-mariage gay Caroline Fourest. «Je dénonce la persécution de personnes, insiste Frigide Barjot. Notre mobilisation est uniquement contre un projet de loi et les ministres qui le portent. Et encore, nous nous contentons de comités d’accueil sonores!»
À Tours, par exemple, les organisateurs soulignent leur souci de ne pas causer de nuisances: s’ils ont choisi de manifester à 19 heures ce lundi, et «peut-être les soirs suivants», c’est pour ne pas gêner les commerces, qui ferment à cette heure-là. Mais il n’est pas toujours facile de contrôler des jeunes gens «lassés de tout bien faire dans les règles et d’être pris pour des gens qui n’existent pas!», fait remarquer Raphaël de Bourayne, le coordinateur Sud-Ouest de la Manif pour tous. «Qui met le pays dans cet état d’insurrection?, s’enflamme Frigide Barjot. Je refuse de porter la responsabilité de l’état d’ébullition dans lequel François Hollande met la France!»
Ce sont, semble-t-il, des délinquants, et non des partisans du mariage gay, qui ont agressé, samedi, à l’arme blanche, Samuel Lafont, un jeune cadre UMP connu pour son engagement contre le mariage homosexuel. Reste que, quelques heures avant son agression, des tweets appelaient à le «suivre» après la manifestation de vendredi, indiquant qu’il y avait «du facho à coxer ce soir». Ensuite, un autre écrivait qu’il aurait «kiffé être le mec qui a mis un coup de couteau à #samuellafont»…
Samedi soir, la Manif pour tous a organisé un rassemblement au Mur pour la paix, à Paris, en soutien au jeune homme. «Nous ne voulons pas de violences, mais la paix et l’unité de notre pays !, insiste Frigide Barjot, qui vient de demander une protection policière après avoir entendu quelqu’un crier dans son téléphone: «Vous voulez du sang, vous aurez celui de vos enfants!» «Le président s’honorerait à supprimer une loi qui met le peuple dans cet état.»
Par Stéphane Kovacs