Une semaine d’action militante, culturelle et artistique, en préparation de la Journée mondiale contre l’homophobie, le 17 mai. À cette occasion, le point sur la situation dans notre région, avec Yoann, vice-président de l’association Divers Genres.
Quelle évolution observez-vous en France concernant les agressions homophobes ?
Yoann, vice-président de Divers Genres : Malheureusement, nous ne disposons pas de chiffres officiels communiqués par le ministère de l’Intérieur. Ce qui est clair, c’est que, depuis 2013, les observateurs mettent en évidence le doublement des actes homophobes : injures, coups… Et cela tous les ans.
Depuis l’instauration du mariage pour tous ?
Oui, mais ce n’est pas à cause du mariage en lui-même. Les manifestations, les débats douteux, les amalgames des politiques ont libéré la parole et les actes. C’est quelque chose qu’on remarque aussi pour les autres discriminations, comme le racisme ou l’islamophobie. L’intolérance concerne plusieurs minorités dans notre pays.
Pourquoi n’avez-vous pas accès aux chiffres ?
C’est peut-être une mauvaise volonté de la part du ministère de l’Intérieur. Mais ce serait intéressant d’étudier des chiffres non contestables, tout en gardant à l’esprit que les gens ne vont pas forcément porter plainte dès qu’ils se font insulter. Les chiffres sont donc sous-évalués. Pourtant, cela arrive à toutes les personnes LGBT, plusieurs fois par an.
Qu’en est-il de la situation en Bretagne ?
Dans l’ensemble, la Bretagne est une région humaniste, de culture « catholique de gauche », où nous ne subissons pas de pression de la part de l’extrême droite. On note tout de même des différences entre Brest et Rennes. À l’époque des manifs pour tous, les rassemblements étaient plus importants à Rennes, mais le climat d’insécurité y est aussi plus développé. Peut-être que Brest est plus à l’abri des extrémistes.
Selon le classement Idaho (International Day Against Homophobia and Transphobia), Brest est classée 32e sur 40. C’est un mauvais score ?
Ce classement note les différentes villes selon leur côté gay-friendly, en matière de politique publique. La mauvaise place de Brest s’explique facilement : c’est une petite ville, où il n’y a ni Marche des fiertés ni centre LGBT. Mais ce n’est pas une question de mauvaise volonté de la part de la municipalité. La mairie soutient fortement l’action du collectif LGBT, ce qui est agréable. Certains projets sont en cours, mais on manque de locaux. Nous ne sommes pas les seuls ; Brest connaît une crise du logement associatif.
Brest est donc une ville gay-friendly ?
C’est une ville où l’on se sent bien, accueillante, ouverte. Bien sûr, il y a toujours quelques problèmes sporadiques, mais pas de gros soucis. Seul hic, pour une ville de 200.000 habitants, et de 400.000 en comptant l’arrière-pays, on recense très peu d’établissements LGBT. Alors qu’à Quimper, il y en a trois qui marchent bien.
Alors à quand une Marche des fiertés brestoise ?
Il y a eu une tentative, il y a cinq ou six ans. Mais c’était une initiative personnelle, sans appui associatif ou politique. Ça a été un fiasco ! Une centaine de personnes, ce n’est ni très visible ni très utile. Du coup, les assos brestoises vont défiler à Rennes et à Nantes, mais aussi à Gourin, pour la plus grande Marche des fiertés rurale.
Ce genre de marche n’est pas réservé aux grandes villes, d’habitude ?
C’est vrai qu’en général, ce genre d’événement se passe dans des grandes villes qui garantissent l’anonymat. C’est surprenant de voir ça dans une petite ville de 4.000 habitants. Ça s’explique par la présence d’une discothèque LGBT dans la ville. Tous les ans, au début du mois d’août, près de 400 personnes défilent dans les rues. Les assos viennent de toute la Bretagne et les rues sont noires de monde.
En complément : Le programme de la semaine
Les festivités de cette semaine contre l’homophobie commencent, dès ce soir, à 20 h, par une projection au cinéma Les Studios. Pour 3,50 €, le public pourra voir le film « Pride », réalisé en 2014 par Matthew Warchus, puis débattre autour du sujet. Vendredi, dès 18 h, la salle des conférences de la faculté Victor-Segalen accueillera la conférence « Questions de genre : faire et défaire le genre », animée par la sociologue Marie-Laure Déroff. Puis, à 20 h 30, le spectacle « Ensemble », de la compagnie Jupon, sera présenté à la salle du Clous. Jérôme Pont et Julien Scholl, danseurs circassiens, donneront à voir et à comprendre le rapport à l’autre, le lien entre deux hommes, entre deux corps masculins (tarifs : normal, 8 € ; réduit, 5 €).
Une journée dédiée au dialogue
Point d’orgue de cette semaine, le village associatif investira la place de la Liberté, samedi. De 14 h à 18 h, West Up, Divers Genres, la Ligue des Droits de l’homme étudiante, le Planning familial et l’Unef tiendront des stands, afin d’informer et de discuter des sexualités. L’association de prévention Aides effectuera des tests de dépistage rapides du sida, avec des résultats en dix minutes. Des performances artistiques sont également au programme, avec les spectacles « À la racine », « Macho Machine » et « Filles-femmes : itinéraires non conformes ». Sans oublier une expo de photos, « Question de genre », créée par le club Unesco du lycée Roz-Glas (de Quimperlé), et une présentation ludique des « Gays dans l’histoire, ce que l’on vous a toujours caché à l’école »…
Rassemblement pour la tolérance
Cette journée se poursuivra, à 18 h, par un rassemblement pour la tolérance, sur les marches de la mairie. La soirée pourra alors commencer. Rendez-vous au Vauban d’abord, dès 20 h, pour applaudir The Odd Bods en première partie, avant P.O.U.F. (Petite Organisation Ultra Féminine). Un concert punky et sexy (tarifs : normal, 8 € ; réduit, 5 €) ! La soirée s’achèvera ensuite au bar le New Day. À partir de 21 h, l’établissement accueillera la soirée festive « Fais pas genre » !
A l’occasion de la Journée internationale de lutte contre l’homophobie et la transphobie, à Brest, le village associatif s’installera, samedi, dès 14 h, place de la Liberté, pour la quatrième année consécutive.
À 18 h, un rassemblement pour la tolérance sera organisé sur les marches de la mairie.
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