Son nom est indissociable de celui d’Yves Saint Laurent, son compagnon pendant cinquante ans, dont il comptait inaugurer en octobre prochain deux musées, qui lui sont dédiés à Paris et à Marrakech. Mais « la maladie aura pris ces projets de vitesse ». Pierre Bergé souffrait de myopathie. Il s’est éteint, vendredi 8 septembre, à l’âge de 86 ans, à son domicile à Saint-Rémy-de-Provence (Bouches-du-Rhône, dans le sud-est de la France).
« C’est toute une partie de notre mémoire littéraire et artistique qui disparaît. Il fut pour nombre d’entre nous un passeur sans égal », a salué le président Emmanuel Macron, dans un communiqué. « Fabuleux mécène, philanthrope, esthète insatiable, génial entrepreneur, homme de culture et de toutes les passions, Pierre Bergé était tout cela à la fois, mais plus encore, il incarnait un humaniste qui plaçait la destinée des hommes au-dessus de toutes les autres valeurs », a résumé L’ancien ministre de la Culture Jack Lang.
Homme d’engagements, « Pierre était mon frère d’armes dans la lutte contre le sida (…), vif, instinctif, toujours à l’affût de l’air du temps. Faire la route sans Pierre est terriblement douloureux mais le plus bel hommage que l’on puisse lui rendre aujourd’hui, c’est de poursuivre notre combat », a confié à l’AFP la chanteuse et actrice Line Renaud, vice présidente du Sidaction.
Dès les années 80, il avait apporté un soutien plus discret mais non moins important à la lutte pour les droits LGBT, finançant indirectement plusieurs titre de presse. Il avait aussi repris le magazine Têtu, en difficultés, renflouant le titre déficitaire des années durant, avant de le céder il y a cinq ans.
Réputé pour son franc-parler, il s’était en outre fait remarqué par ses prises de positions, notamment au moment du débat sur le mariage pour tous, suscitant souvent de vives réactions chez les opposants à la loi, qui en avaient fait leur « bête noire », maître du « lobby ».
Né le 14 novembre 1930 sur l’île d’Oléron d’une mère institutrice et d’un père fonctionnaire des finances, ce passionné de littérature, grand collectionneur d’ouvrages et d’oeuvres d’art, a été le compagnon du peintre Bernard Buffet, dont il accompagne la carrière pendant huit ans, avant de rencontrer Yves Saint Laurent, en 1958, avec qui il va fonder la maison de couture éponyme en 1961.
« Si je n’avais pas aimé Saint Laurent, je ne me serais jamais lancé dans la haute couture », disait-il, affirmant « ne croire qu’à l’obsession et aux obsessionnels. »
A la fin mars 2017, il s’était marié avec le paysagiste Madison Cox, 58 ans, désigné comme son exécuteur testamentaire, « afin d’être certain que ses dernières volontés soient respectées ».
« J’ai vécu deux premières histoires d’amour, avec Bernard Buffet pendant dix ans et avec Yves Saint Laurent pendant cinquante ans. Le mariage gay n’existait pas. Aujourd’hui, il existe. Je régularise ma situation avec Madison Cox, que je connais depuis 40 ans. Il est le vice-président de la Fondation Pierre-Bergé – Yves Saint Laurent. Il va me succéder. Il est en charge des musées Saint Laurent de Paris et Marrakech », avait-il alors expliqué. C’était un nouveau départ, un nouveau souffle.
Hommage à son amour de toujours, le musée Yves-Saint-Laurent, situé au 5 avenue Marceau dans le XVIe arrondissement de Paris, s’ouvrira le 3 octobre prochain. C’est le « premier de cette ampleur consacré à l’œuvre de l’un des plus grands couturiers du XXe siècle » dans la capitale, stipule le livret de présentation.