Le droit à l’adoption promis pour les couples homosexuels pourrait rester un voeu pieux, en raison du refus de nombreux pays de confier leurs orphelins à des personnes de même sexe et du faible nombre d’enfants légalement adoptables en France, préviennent des associations.
Le gouvernement a cette semaine renouvelé la promesse de campagne de François Hollande d’ouvrir l’adoption aux couples d’homosexuels, qui pourront notamment devenir « parent de l’enfant biologique de leur conjoint ».
Mais, s’agissant des adoptions internationales et des adoptions de pupilles de l’Etat français, une nouvelle loi pourrait ne pas changer grand chose à la situation actuelle.
« Si on doit autoriser l’adoption par des couples homosexuels, soyons honnêtes jusqu’au bout: il faut les prévenir qu’ils n’auront que très peu de chances de voir leur dossier aboutir », souligne ainsi Geneviève Miral, ancienne présidente de Enfance et Famille d’Adoption (EFA), qui dit fédérer « 93 associations, regroupant près de 9.000 familles ».
A cela, une première raison: « Très peu de pays d’origine autoriseront les démarches par les couples homosexuels », explique-t-elle.
Certains pays comme la Chine mentionnent expressément leur refus de l’adoption par des couples de même sexe. D’autres, comme le Togo, acceptent les profils de célibataires, uniquement des femmes, ayant moins de 30 ans.
D’autres encore, comme la Bulgarie, acceptent les candidatures de célibataires hommes ou femmes, « mais nous n’avons jamais eu, à ce jour, de propositions de ce pays pour de tels profils », souligne-t-on à l’Agence française de l’adoption (AFA), qui travaille avec 35 pays partenaires et gère près de 8.000 projets d’adoption.
« Une demande bien supérieure à l’offre »
Dans les faits, la France pourrait ainsi se retrouver dans la même situation que la Belgique: l’adoption par les couples de même sexe y a été autorisée en 2006, mais en six ans aucune adoption internationale par un couple homo n’a été enregistrée officiellement.
« Les pays avec lesquels nous travaillons ne veulent pas confier d’enfants à des personnes de même sexe », indique Verlaine Berger, porte-parole d’Arc-en-Ciel, fédération wallonne d’association LGTB.
« Pour les pays d’Afrique noire, d’Europe de l’est ou la Chine, c’est un refus catégorique », ajoute-t-elle.
Au ministère français de la Famille, on « se dit conscient des questions qui sont posées pour l’adoption internationale par des couples homosexuels ».
Ces derniers pourront certes se tourner vers l’adoption nationale. Mais là encore, la tâche sera rude, selon les associations.
« Les conseils de famille qui confient les pupilles de l’Etat ne choisiront pas les dossiers de couples homosexuels, étant donné qu’ils ne privilégient déjà pas les personnes célibataires », affirme Geneviève Miral. « Les personnes en couple, plutôt jeunes, sont en général les candidats favorisés », poursuit-elle.
Une sélection qui s’explique par une demande bien supérieure à l’offre: environ 700 enfants sont légalement adoptables en France, pour 25.000 candidats à l’adoption.
Les associations et le gouvernement ne pensent pas que le droit à l’adoption pour les couples homosexuels fera grimper encore la demande, de nombreux candidats s’étant déjà lancés en solo.
« Mais ils vont être confrontés aux mêmes difficultés que les couples hétérosexuels », prévient Pierre Salignon, directeur général de Médecins du Monde, l’un des 35 organismes français autorisés pour l’adoption.
Il est en effet désormais très difficile d’adopter des petits enfants en bonne santé et nombre de candidats ne sont pas préparés à cette réalité.