Depuis 2020, Laurent et Lionel, un couple gay vivant à Vitry-sur-Seine (Val-de-Marne), subissent un harcèlement homophobe incessant de la part de leurs voisins. Insultes, menaces, dégradations, agressions physiques : leur quotidien est devenu un enfer. Malgré des plaintes répétées, l’inaction des autorités et du bailleur a laissé leur situation se détériorer, au point de les contraindre à partir.
Quatre ans de violences et d’impunité
Tout a commencé il y a quatre ans, lorsqu’un voisin et son fils ont entrepris de les persécuter. « C’est comme si on vivait en temps de guerre », confie Laurent. D’abord victimes d’insultes et de détériorations, ils ont ensuite subi des agressions physiques. En décembre 2023, Laurent a même été blessé lors d’une altercation avec son agresseur.
Le couple, installé à Vitry depuis plus de 30 ans, a multiplié les signalements auprès de la police. Si les forces de l’ordre ont fini par convoquer l’agresseur, cela n’a rien changé. Après plusieurs plaintes, c’est la police elle-même qui leur a conseillé de se tourner vers la mairie et le bailleur, Valdevy. Mais aucune mesure concrète n’a été prise pour les protéger. Pire encore, le bailleur, parfaitement informé, les a laissés exposés à leurs persécuteurs sans agir.
Un silence coupable des autorités et du bailleur
« La situation a empiré lorsque notre voisin a pris conscience de notre orientation sexuelle. Nous avons tout fait pour rester discrets, mais chaque jour est devenu un combat », confie Lionel. L’impact psychologique est immense : Laurent, en situation de handicap, voit ses troubles cardiaques s’aggraver sous l’effet du stress, tandis que Lionel, à bout, a tenté à deux reprises de mettre fin à ses jours.
Face à l’inaction de Valdevy, qui n’a engagé aucune procédure d’expulsion, le couple espérait un soutien plus ferme de la mairie. Mais celle-ci n’a réagi qu’après la menace d’un article sur leur situation. Lors d’une réunion avec l’élu au logement et son équipe, la municipalité aurait même tenté d’écarter tout témoin, une demande que les victimes ont fermement refusée, imposant la présence d’une journaliste.
« Cette situation est symptomatique de l’insuffisance des moyens judiciaires. Plusieurs plaintes ont été déposées sans qu’à aucun moment les agresseurs ne soient sanctionnés. Pire, il a été conseillé à mes clients de quitter leur appartement et la ville où ils vivent depuis des années, faute de réelle volonté d’agir contre les fautifs. Ils ont également dû faire face à l’absence de coopération et de compassion de leur bailleur, qui refuse à ce jour d’engager toute procédure d’expulsion des squatteurs ou même de nous transmettre des informations utiles. Une fois de plus, les victimes d’agression subissent la surcharge des services de police et la victimisation secondaire : on leur impose de partir, tandis que la loi du plus fort l’emporte », dénonce Me Anne-Sophie Lagens, avocate du couple.
Une solution qui ne résout rien
Finalement, le relogement du couple a été présenté comme une solution. Une protection en apparence, mais qui interroge : plutôt que de sanctionner les agresseurs, on déplace les victimes. Une décision qui ressemble davantage à un abandon qu’à une véritable réponse au problème.
« C’est à nos harceleurs de partir, pas à nous », conclut Laurent.
Cette affaire révèle les limites de la réponse des autorités face aux discriminations persistantes. Si les discours officiels prônent l’égalité, la réalité sur le terrain est toute autre. Des victimes se retrouvent livrées à elles-mêmes, tandis que les agresseurs continuent d’agir en toute impunité.
L’association STOP homophobie a pris en charge le dossier et accompagne le couple dans ses démarches judiciaires. « Nous ne laisserons pas cette situation impunie. Chaque acte homophobe doit être condamné et chaque victime doit être protégée », a déclaré l’association.