Le procès tendu du père et des oncles d’un ado gay de 17 ans, sauvagement assassiné en 2012, s’est ouvert à Diyarbakir.
Un procès qui pourrait faire date s’est ouvert jeudi dernier devant un tribunal de Diyarbakir (sud-est de la Turquie). Dans le box des accusés, un père de famille qui a avoué avoir abattu son fils de 17 ans, en juillet 2012, ainsi que deux oncles de la victime. Le père, M. Ç., soutient qu’il s’agissait d’un accident. L’adolescent avait fugué de la maison depuis dix jours. M. Ç. a raconté qu’après avoir retrouvé l’ado, il avait eu une violente dispute avec lui dans une voiture. «Il a commencé à m’insulter, puis il a tenté de m’étrangler et à me donner des coups de poings», a-t-il déclaré devant la Cour. Le père aurait alors sorti son arme pour le frapper avec la crosse, mais des coups seraient partis tout seuls, rapporte le site anglophone du quotidien «Hürriyet». Le père n’a pas prononcé le mot «homosexuel» pour parler de son fils, mais il a admis qu’il voulait «le faire soigner».
Témoignage accablant
Cette version cadre mal avec la découverte du corps de la victime, abandonné sur le bord d’une route. Selon la police, Roşin Ç. avait été roué de coups et exécuté de 14 balles. Un témoignage accablant est venu du frère cadet de Roşin. Il affirme que ses oncles avaient fixé un ultimatum au père. Il devait liquider le garçon parce qu’il était homosexuel et «couvrait de honte» la famille – un clan en vue à Diyarbakir. D’après ce plan, le frère, mineur, devait lui-même porter le chapeau, afin de protéger son père et ses oncles. «J’ai refusé, a déclaré le garçon. Alors, pendant un repas, mon oncle a dit à mon père: ‘Soit tu lui fais éclater la cervelle aujourd’hui, soit le je le ferai moi-même demain’.»
«Je ne veux pas de vous ici!»
La présence d’associations LGBT locales et nationales a fait des remous dans le tribunal, où leurs représentants ont été les cibles de menaces et d’insultes. Lors d’une première audience, fin avril, la mère de la victime leur a lancé: «Mon fils n’était pas gay, je ne veux pas de vous ici!» Jeudi, elle a ajouté: «Si Roşin avait été homosexuel, je l’aurais tué avec mes propres mains.»
Le procureur a demandé la prison à vie contre le père et les deux oncles pour meurtre avec préméditation. C’est la première fois qu’un crime d’honneur visant un homosexuel fait l’objet d’une telle médiatisation. Ce type d’affaire est habituellement escamotée, et trop souvent traitée avec complaisance par les juges. Fırat Söyle, un avocat et militant LGBT, a demandé un verdict exemplaire pour tous les suspects. Il est clair, selon lui, que «le motif du meurtre est l’honneur familial».
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