Avec l’ouverture ce dimanche du second synode en deux ans sur les défis auxquels est confrontée la famille chrétienne, le Vatican s’apprête à réfléchir sur des sujets divisant l’Eglise catholique.
Mais de nombreux observateurs attendent aussi impatiemment de voir si un autre dossier brûlant sera évoqué par cette assemblée d’évêques entre les 4 et 25 octobre : la place des personnes homosexuelles dans la religion, à nouveau sur le devant de la scène avec le coming out d’un prêtre haut placé le 3 octobre.
Un sujet qui sera paradoxalement peu abordé lors des débats, certains prélats ne souhaitant même pas qu’il soit à l’ordre du jour.
Un thème que le pape François a pourtant abordé de nombreuses fois à travers des attitudes pour le moins contradictoires. Entre paroles de tolérance et dénonciations de « modèles de vie anormaux », retour sur le double discours du souverain pontife qui effectue un numéro d’équilibriste en tentant de suivre le catéchisme de l’Église qui estime qu’il ne faut pas condamner les homosexuels mais plutôt leurs actes.
« Si une personne est homosexuelle, cherche Dieu et est de bonne volonté, qui suis-je pour la juger? Le catéchisme de l’Eglise catholique explique bien cela. On ne doit pas marginaliser ces personnes, elles doivent être intégrées à la société », assurait-il alors devant les caméras, dans l’avion qui le ramenait des Journées mondiales de la jeunesse au Brésil en juillet 2013
Un incroyable signe d’ouverture? Sur la forme, sans aucun doute. Mais sur le fond, sûrement pas: François n’avait pas tardé à rappeler que l’homosexualité reste « intrinsèquement désordonnée » et que les actes qui y sont liés « ne sauraient recevoir d’approbation en aucun cas ».
Une fermeté qu’ont pu constater Laurent Stefanini, diplomate homosexuel dont la nomination par François Hollande pour devenir le nouvel ambassadeur de France auprès du Vatican reste bloquée par le pape, ou Krysztof Olaf Charamsa, ce prêtre polonais qui a fait scandale révélant qu’il était gay à la veille d’un synode sur la famille. Un geste qui a immédiatement déclenché les foudres du Vatican et lui a valu d’être immédiatement démis de ses fonctions auprès du Saint Siège.
En janvier 2014, le pape François avait à nouveau fait parler de lui pour un discours prononcé deux mois auparavant devant l’Union internationale des Supérieures générales. Selon des extraits diffusés par la presse italienne, ce dernier aurait demandé de reconsidérer le comportement de l’Eglise catholique vis à vis des enfants des couples homosexuels ou divorcés.
Mettant en garde contre une attitude qui reviendrait à « inoculer un vaccin contre la foi », le pape avait alors estimé que les responsables de l’éducation devaient se demander « comment enseigner le Christ à une génération en transformation ».
Une position que le souverain pontife avait tenu à clarifier 48 heures plus tard à travers la voix de son porte-parole sur Radio Vatican. D’après le père Federico Lombardi, la « distorsion » des propos du pape par les médias était « plus qu’évidente » pour « instrumentaliser » la reconnaissance des couples de même sexe: le pape parlait en fait « de la souffrance des enfants » vivant en dehors de la famille traditionnelle.
Les « modèles de vie anormaux et irresponsables »
Cette ambivalence sur la question, le pape en a encore fait preuve très récemment pendant sa visite remarquée sur le sol américain. Il a en effet reçu un de ses anciens étudiants et son compagnon, qui vivent en couple depuis 19 ans, à Washington le 23 septembre.
Yayo Grassi, à qui François a enseigné la littérature et la psychologie au lycée en 1964-1965, a assuré sur CNN que le pape « n’a jamais émis de jugement » sur le fait qu’il était homosexuel. « Il n’a jamais rien dit de négatif ».
[spacer]
[spacer]
La divulgation de cette rencontre symbolique est cependant intervenue après plusieurs jours de polémique sur le rendez-vous entre le souverain pontife et la greffière Kim Davis, devenue en quelques semaines l’égérie des anti-mariage gay pour avoir préféré faire plusieurs jours de prison plutôt que de signer des actes de mariage pour des couples de même sexe dans son comté du Kentucky (centre-est des Etats-Unis).
Si le pape a démenti toute forme de soutien et réaffirmé que l’objection de conscience était « un droit », il a cependant su se faire comprendre sans problème sur l’ouverture au mariage pour les couples gays et la prétendue « théorie du genre » devant l’Assemblée générale de l’ONU à New York le 25 septembre quand il a dénoncé « la colonisation idéologique » qui impose aux « peuples » des « modèles de vie anormaux et irresponsables » et demandé de reconnaître « une loi morale inscrite dans la nature humaine elle-même, qui comprend la distinction naturelle entre homme et femme ».
avec Maxime Bourdeau
(HuffPost)