« Je ne suis pas homophobe mais… » : l’intenable posture des anti-mariage pour tous !
Ainsi donc, nous martèle-t-on, les opposants au mariage pour tous, qui se sont mobilisés en masse (inutile de le nier) ce dimanche à Paris, ne sont pas homophobes. Ainsi donc, s’offusque-t-on, il serait indigne de qualifier d’homophobes ceux qui s’opposent à cette ouverture du mariage à ceux qui en sont exclus.
Les dérapages furent, sont et seront encore pourtant nombreux, malgré les consignes strictes données par l’organisation : éviter de répondre aux journalistes (ces vilains méchants pas beaux à la solde du lobby LBGT qui ne chercheront qu’à piéger l’innocent manifestant défendant la famille), et s’en tenir aux « éléments de langage » fournis clés en main. On en trouve notamment des exemples dans ce reportage, réalisé dans le cortège principal, et non dans celui des homophobes revendiqués de Civitas, qui militent pour la repénalisation de l’homosexualité et ont ainsi, au moins, le mérite d’être clairs.
Après nous être amusé du paradoxe qu’il y a à ressentir la nécessité d’encadrer et de brider ainsi les paroles de ses troupes lorsqu’on prétend être à la tête d’un mouvement non homophobe, faisons donc un peu de linguistique.
Une pensée discriminatoire
Ce qui permet aux manifestants et opposants de tout poil de prétendre ne pas être homophobe, c’est uniquement une certaine acception de ce terme : celle qui le prend au pied de la lettre et retient la notion, très forte, de phobie qu’il contient. « Allons bon, mon pauvre ami, je ne suis pas homophobe : je n’ai pas peur des homosexuels (j’ai même un ami qui…), je ne rejette pas l’homosexuel. Je pense simplement qu’il ne doit pas avoir les mêmes droits que moi, hétérosexuel. »
Or, cette pensée est discriminatoire et c’est bien dès le stade de la discrimination que commence l’homophobie. De la même façon qu’il n’est nul besoin de « haïr » les noirs ou les arabes pour être raciste, de craindre les juifs pour être antisémite, ni de détester les femmes pour penser que leur place est à la maison, ou, il y a quelques décennies, qu’elles ne devraient pas voter ou pouvoir contracter sans leur mari, faisant ainsi preuve de sexisme.
Alors oui, que vous le vouliez ou non, refuser un droit à une partie de la population est discriminatoire : c’est raciste, c’est antisémite, c’est sexiste, c’est « homociste », devrait-on dire pour évacuer cette notion de haine qui permet au gentil manifestant de s’affranchir de l’accusation d’homophobie. Faites l’exercice de remplacer « homosexuel » par « juif », « noir » ou « femme » dans n’importe lequel de vos arguments et la lumière jaillira.
Un mouvement anti-égalitaire
Ce mouvement anti-mariage pour tous est anti-égalitaire, bien que s’abritant sous le cache-bénitier d’une cause supérieure, celle de l’enfant à qui on mentirait – ce dont il n’a jamais été et ne sera jamais question.
Ce mouvement anti-mariage est composé de masses de gens qui, sans doute de bonne foi pour une bonne part, ne sont que des M. Jourdain de l’homophobie, instrumentalisés par des défenseurs d’une norme qu’ils ont décrétée.
Ce mouvement anti-mariage dégouline d’une charité chrétienne insupportable, tendant à dépeindre l’homosexuel(le) comme une pauvre créature sur le sort de laquelle on s’apitoie, que son « choix de vie » condamne à la souffrance et/ou à une sexualité débridée, incapable qu’elle est de fidélité – sans réaliser un instant que la seule cause de cette souffrance est cette commisération.
L’homosexuel n’a pas besoin de votre bienveillance condescendante pour trouver le bonheur. Tout ce qui lui faut, c’est votre indifférence, qui ne sera acquise que par l’égalité et aboutira un jour à la réduction de cette haine irrationnelle à sa portion congrue.