Les poupées pour les filles et les voitures ou jeux de construction pour les garçons: diverses études ont été publiées ces dernières décennies, avec démonstrations de ces préférences, selon le sexe de l’enfant.
Des théories cognitives, sociales ou biologiques ont été mises en avant et très débattues pour tenter d’expliquer ces préférences. La théorie biologique avait été renforcée par deux études: l’une portant sur de jeunes signes, mâles ou femelles, lesquels manifestaient également des préférences pour des jouets « humanisés » typés filles ou garçons, selon leur sexe (1).
L’autre étude avait été effectuée sur des nouveaux-nés, donc nécessairement naïfs quant aux rôles-stéréotypes hommes-femmes, et allait dans le même sens (2). Souvent citée également pour justifier l’hypothèse biologique (en l’occurrence le rôle des facteurs hormonaux sur la masculinisation ou féminisation du cerveau et des choix en résultant), un travail sur des fillettes présentant des taux d’androgènes hors-normes (hyperplasie congénitale des surrénales), qui jouaient plus avec des jouets « garçons » que les autres fillettes ayant des taux d’androgènes dans la norme.
Préférence innée ou acquise de ces choix, nécessité ou moyens d’y remédier: les hypothèses enflamment les débats, surtout à l’heure de la sortie des catalogues de jouets de Noël.
A peine publiée, une nouvelle recherche (3), s’est penchée sur cette question, et annonce qu’à un âge inférieur à 6 mois, il n’y a pas de différences dans les choix de jouets garçons/filles (poupées versus jeux mécaniques). L’hypothèse d’un comportement inné est là bien remise en question.
Dans ce travail, des images de voitures ou cuisinières électriques jouets ou images de voitures ou cuisinières électriques réelles, images de visages de poupées ou images de visages réels, féminins ou masculins, étaient proposées à une cohorte de bébés entre 4 et 5 mois. La direction du regard était enregistrée par un système de « eye tracking ». Les images étaient présentées 2 par 2, pour permettre d’estimer aussi quelle était image qui attirait d’abord le regard, en plus de la durée de fixation. Les différentes combinaisons d’images étaient proposées successivement.
Les chercheurs relèvent ainsi, qu’au contraire des études précédentes, leurs résultats démontrent une préférence des bébés garçons et filles pour les images de visages (poupées ou réels) plutôt que pour les objets. Pas de préférence donc du bébé garçon pour les images de voitures. À noter aussi que les visages de poupées et visages réels préférés étaient indifféremment féminins ou masculins.
Un travail qui contredit donc bien l’hypothèse d’une préférence innée pour des jouets ou objets typés filles ou garçons.
Un dernier volet de cette recherche était de répliquer cela sur une cohorte de jeunes adultes (âge moyen 22 ans environ), hommes et femmes. Les mêmes images étaient proposées, même enregistrement du regard et observation de quelles images attiraient d’abord le regard. Intéressant de constater que les visages (réels ou de poupées) étaient aussi préférés aux images de voiture ou de cuisinière électrique, par les hommes et les femmes. Mais là, les visages de sexe opposé étaient préférentiellement choisis.
L’homme adulte, préférait bien une image de femme à celle d’une voiture. À garder en tête pour le choix des images du calendrier 2014.
Ariane Giacobino
Médecin généticienne
(1) Hassett et al., Horm Behav. 2008
(2) Connellan et al., Infant Behav Dev. 2000
(3) Escudero et al., J Exp Child Psychol. 2013