La Cour suprême prête à trancher sur le mariage gay

Sauf coup de théâtre, la Cour suprême des Etats-Unis rendra, dans les jours à venir, sa décision – très attendue – sur le mariage homosexuel, mais il semble peu probable que ses neuf juges décident de le légaliser au niveau du pays tout entier.

Traditionnellement, la plus haute juridiction du pays rend avant sa pause estivale ses arrêts dans les affaires entendues à l’automne et en hiver, et garde en général le meilleur pour la fin. Après la réforme de l’assurance-maladie de Barack Obama fin juin 2012, c’est cette fois l’avenir du mariage homosexuel qui devrait clore la saison des décisions. A moins que devant les difficultés à se mettre d’accord, les neuf juges – cinq nommés par un président républicain, quatre par un démocrate -, ne décident de remettre le dossier au menu de l’automne.

Le culte du secret est tel dans les alcôves du temple de la justice que la surprise sera complète et on s’attend à une réelle foire d’empoigne quand la Cour présidée par le conservateur John Roberts dira si la définition du mariage peut être élargie aux couples de même sexe.

Dans un pays où le mariage gay reste interdit ou impossible dans 38 Etats sur 50, la plus haute instance doit se positionner sur deux recours, en décidant si le principe d’égalité défendu par la Constitution est violé. D’un côté, des homosexuels légalement mariés réclament de toucher les mêmes droits que les autres couples mariés. De l’autre, des couples de même sexe bénéficiant des mêmes avantages que les hétérosexuels mariés demandent pourquoi on leur interdit le mariage comme tout le monde.

Dans le premier cas, une veuve homosexuelle de New York, Edith Windsor, soutenue par le gouvernement Obama lui-même, réclame que la loi fédérale de défense du mariage, dite DOMA, soit invalidée, car discriminatoire dans les dix Etats et dans la capitale où l’union des couples de même sexe est autorisée. Dans le second cas, c’est l’interdiction du mariage homosexuel en Californie, ou « proposition 8 », qu’un groupe de militants anti-gay demande de confirmer.

« Enormément d’attention »

A l’audience, fin mars, la haute Cour avait semblé prête à abroger la DOMA mais réticente à légaliser le mariage gay en Californie, dans les huit autres Etats où les homosexuels peuvent se lier par un pacte civil, et à fortiori dans tout le pays. Mais il est « très risqué de se livrer au moindre pronostic », soulignait récemment Elizabeth Wydra, avocate du Centre pour les droits constitutionnels. Comme dans la plupart des affaires importantes, le juge Anthony Kennedy, qui vote tantôt à droite, tantôt à gauche, « sera le facteur décisif ».

Pour David Cruz, professeur de droit à l’Université Southern California, « il est très improbable » que les neuf juges décident de légaliser le mariage homosexuel dans tous les Etats-Unis, « à cause de la tradition de cette Cour d’avancer par étapes ». « Quelle que soit la décision, elle suscitera énormément d’attention », a renchéri Thomas Keck, professeur à l’université de Syracuse, qui parie « au minimum » sur une abrogation de la DOMA.

Le mariage homosexuel remporte l’approbation de 53% des Américains, selon un récent sondage de l’institut Gallup, tandis que la toute dernière étude du centre de recherche Pew montre que 47% des articles de presse publiés pendant les deux mois de délibérations de la Cour parlaient des partisans du mariage gay. Pour éviter de trancher, la haute Cour pourrait décider que les plaintes ne sont pas recevables, en raison de l’incompétence juridique d’une des parties: les militants anti-gay qui défendent la « proposition 8 », un groupe d’élus républicains (BLAG), qui veut protéger le mariage traditionnel à travers la loi DOMA et/ou même le gouvernement Obama qui, après avoir défendu la loi, réclame son abrogation.