Les personnes lesbiennes, gays, bisexuelles, transgenres et intersexes (LGBTI) sont aujourd’hui plus nombreuses à évoquer ouvertement leur identité, mais la peur, la violence et la discrimination restent élevées, selon les conclusions de la dernière enquête menée par l’Agence européenne des droits fondamentaux (FRA), publiée ce jeudi 14 mai.
La discrimination est quotidienne et à travers tous les niveaux
Avec 140 000 répondants, dans les 27 pays de l’Union, au Royaume-Uni, en Serbie et en Macédoine du Nord, cette enquête, qui inclut pour la première fois les expériences des personnes intersexuées et des adolescents âgés entre 15 et 17 ans, est la plus vaste jamais menée sur les crimes de haine et la discrimination à l’encontre des personnes LGBTI.
Ils sont ainsi 43% à confier s’être sentis discriminés dans les douze mois ayant précédé le questionnaire. Un chiffre en augmentation de 6 points par rapport à la dernière enquête effectuée en 2012. Pour les transgenres, cette proportion monte même à 60%. Et, avec les personnes intersexuées, ils sont deux fois plus nombreux que les autres groupes LGBTI à faire état d’une agression.
Une situation qui dans l’ensemble a très peu progressé en sept ans
Les moyennes de l’UE masquent aussi des différences marquées entre pays. Dans certains, plus de 70 % des répondants affirment que la société est plus tolérante, tandis que dans d’autres, jusqu’à 68 % d’entre eux estiment qu’elle est moindre. La France arrive treizième du classement. Le Portugal se distingue davantage. C’est le pays qui compte le moins d’attaques motivées par l’orientation ou l’identité sexuelle.
« Trop de personnes LGBTI continuent de vivre dans l’ombre, craignant d’être ridiculisées, discriminées, voire attaquées. Bien que certains pays aient amélioré l’égalité de traitement envers les personnes LGBTI, les conclusions de notre enquête montrent que, dans l’ensemble, les progrès réels restent trop rares, laissant de nombreuses personnes vulnérables », a commenté le directeur de la FRA, Michael O’Flaherty. De même, en raison du COVID-19, leurs difficultés peuvent s’aggraver dans les domaines de l’emploi et des soins de santé. Les responsables politiques devraient en prendre note et accroître leurs efforts pour défendre activement le plein respect des droits des personnes LGBTI ».
Le Commissaire à l’Egalite Helena Dalli a ajouté « malgré les avancées importantes concernant l’égalité des personnes LGBTI + dans l’UE au cours des dernières années, les personnes LGBTI+ continuent de signaler des niveaux élevés de discrimination. Plus inquiétant, nous avons récemment assisté à des incidents anti-LGBTI au sein de l’UE, tels que des attaques contre les marches des fiertés, l’adoption de déclarations de « zone sans idéologie LGBTI », des amendes pour les publicités favorables aux LGBTI et autres. Tout le monde dans l’Union européenne devrait se sentir en sécurité et libre d’être lui-même ».
Les principales conclusions de l’enquête sont les suivantes :
- Transparence : six répondants sur dix évitent de tenir la main de leur partenaire en public.
- Harcèlement : deux répondants sur cinq affirment avoir été harcelés l’année précédant l’enquête.
- Agressions : un répondant transgenre ou intersexué sur cinq a été agressé physiquement ou sexuellement ; cette proportion représente le double de celle des autres groupes LGBTI.
- Discrimination : un répondant sur cinq se sent discriminé sur son lieu de travail, et plus d’un sur trois se sent discriminé quand il sort pour se restaurer, boire un verre ou rencontrer d’autres personnes.
- Scolarisation : un élève LGBTI sur deux affirme que quelqu’un parmi ses camarades ou le corps enseignant a soutenu les personnes LGBTI.
- Situation économique : une personne LGBTI sur trois déclare avoir des difficultés à subvenir à ses besoins. La situation est pire pour les personnes intersexuées et transgenres (environ une personne sur deux).
Ces éléments soutiendront la stratégie de la Commission européenne en faveur de l’égalité de traitement à l’égard des personnes LGBTI prévue cette année. La FRA invite l’UE et ses États membres à mettre en place des mesures visant à protéger les droits des personnes LGBTI, notamment dans les domaines suivants :
- Crimes de haine : instaurer une culture de tolérance zéro envers la violence et le harcèlement à l’encontre de la communauté LGBTI, afin que ses membres puissent jouir de leur droit de circuler librement et sans crainte. Investir dans la formation pour veiller à ce que la police puisse reconnaître et enregistrer les crimes de haine à l’encontre des personnes LGBTI, et puisse enquêter correctement à leur sujet. Ainsi, les victimes n’auront pas peur de signaler des agressions et seront traitées sur un pied d’égalité.
- Signalement : permettre aux victimes de signaler plus aisément les crimes de haine et la discrimination grâce aux outils de signalement en ligne, aux liens avec la communauté, et à la formation de la police. Fournir des ressources suffisantes aux organismes de promotion de l’égalité, afin qu’ils puissent soutenir efficacement les victimes de discrimination.
- Discrimination : adopter la directive sur l’égalité de traitement afin d’étendre la protection contre la discrimination au-delà de l’emploi. Appliquer des plans d’action nationaux complets pour encourager le respect des droits des personnes LGBTI dans tous les domaines de la vie.
- Scolarisation : créer un environnement sûr et favorable pour les jeunes LGBTI à l’école. Aider les établissements scolaires et les enseignants à partager leurs expériences, à lutter contre l’intimidation des élèves LGBTI, et à veiller à ce que le matériel pédagogique n’associe pas l’appartenance au groupe LGBTI à une maladie.
- Montrer l’exemple : chacun a un rôle à jouer pour que l’égalité devienne une réalité.
Avec les principaux résultats de l’enquête, la FRA publie un vaste explorateur de données en ligne, qui permet de filtrer les données par pays, par question posée, et par groupe L, G, B, T ou I.