Dans un article intitulé « Le prélat du lobby gay », Sandro Magister, le vaticaniste reconnu de l’hebdomadaire italien l’Espresso, révèle le passé « scandaleux » de Mgr Battista Ricca, « prélat », c’est-à-dire directeur par intérim de l’Institut pour les oeuvres de religion (IOR), la « banque du Vatican ». Depuis cette révélation, Mgr Battista Ricca aurait présenté sa démission au pape, selon l’agence I.Media. Sandro Magister fait le lien entre la vie privée sulfureuse de l’ecclésiastique et les rumeurs en vogue depuis plusieurs mois sur l’existence d’un « lobby gay » au Vatican et y voit la preuve tangible d’un complot pour affaiblir le pape.
Âgé de 57 ans, le prélat représente en son absence le pape François, qui n’était semble-t-il pas informé de sa vie privée. Originaire du diocèse de Brescia, à l’est de Milan, Mgr Ricca est issu de la carrière diplomatique. Il a exercé plusieurs postes-clés dans des nonciatures apostoliques – les ambassades du Vatican – avant d’être nommé à la Secrétairerie d’État, le gouvernement du Vatican. Il est désormais directeur de la résidence Sainte-Marthe, où le pape a choisi d’habiter depuis son élection.
« Trou noir » en Uruguay
Dans l’histoire personnelle et la carrière du prélat, il existe ce que Sandro Magister appelle un « trou noir », à savoir les années qu’il a passées à Montevideo, la capitale de l’Uruguay, située juste en face de Buenos Aires, ville dont Jorge Bergoglio, l’actuel pape, a été l’archevêque pendant près de vingt ans. Juste avant d’arriver en Uruguay, Mgr Ricca avait exercé un poste en Suisse, à Berne. C’est là qu’il aurait fait la connaissance d’un capitaine de l’armée suisse, Patrick Haari, avec qui il a entretenu pendant longtemps une relation.
Les deux hommes arrivent ensemble en Uruguay. Là, Battista Ricca demande à ce qu’une fonction et un logement à la nonciature soient également attribués à son ami. Le nonce rejette cette demande. Mais, quelques mois plus tard, il prend sa retraite et Ricca, resté sur place en tant que chargé d’affaires par intérim en attendant l’arrivée du nouveau nonce, attribue à Patrick Haari un logement à la nonciature, ainsi qu’une embauche en bonne et due forme et un salaire. « L’intimité des relations entre Ricca et Haari était tellement visible que de nombreux évêques, prêtres et laïcs de ce petit pays d’Amérique du Sud en furent scandalisés, parmi lesquels les religieuses qui travaillaient à la nonciature », raconte l’éditorialiste italien.
Une moralité irréprochable
Une fois rentré à Rome, le prélat est intégré dans le personnel diplomatique employé à la Secrétairerie d?État. Une de ses missions consiste notamment à contrôler les dépenses des nonciatures, ce qui lui a valu la réputation d’être un homme d’une moralité irréprochable. A partir de 2006, Mgr Ricca s’est vu petit à petit confier la gestion de une, puis deux, puis trois résidences papales, dont l’actuelle, Sainte-Marthe. Sa nomination en tant que prélat de l’IOR est ainsi arrivée comme le couronnement de sa carrière, sa récompense. Son passé en Uruguay était connu, mais la plupart des témoins directs auraient gardé le silence, par peur du scandale et des conséquences sur l’image de l’Église.
Avec cette nomination, le pape François avait comme objectif de placer une personne de confiance à un poste-clé de l’IOR. Auparavant, il s’était fait présenter, comme le veut la coutume, le dossier personnel concernant Ricca et il n’y avait rien trouvé d’inconvenant. Il avait également consulté différents membres de la Curie et aucun d’entre eux n’avait soulevé d’objections.
La main du « lobby gay » ?
Pour Sandro Magister, cela ne fait aucun doute : il faut y voir la main du fameux « lobby gay » qui aurait soigneusement occulté le passé du prélat pour tendre un piège au pape François. L’affaire avait défrayé la chronique il y a quelques mois quand la presse italienne s’était fait l’écho de rumeurs sur un groupe de prélats homosexuels au Saint-Siège, dont les activités auraient été responsables de la démission du pape émérite Benoît XVI.
Le pape François lui-même aurait indirectement reconnu son existence lors d’une rencontre avec des religieux latino-américains. « Et en effet certains des « patrons » du lobby gay ont tendu à Jorge Mario Bergoglio le plus cruel et le plus sournois des pièges qui ont été ourdis contre lui depuis son élection comme pape, écrit encore le journaliste de l’Espresso. Ils lui ont caché des informations significatives qui, s’il les avait connues à temps, l’auraient détourné de nommer Mgr Battista Ricca prélat de l’Institut pour les oeuvres de religion (IOR) ». « Pour le grand nombre d’honnêtes gens qui avaient connaissance de ses antécédents scandaleux, la nouvelle de sa promotion a été le motif d’une très grande amertume, ajoute-t-il. Cela d’autant plus qu’elle est perçue comme annonciatrice de difficultés pour l’entreprise ardue de nettoyage de l’Église et de réforme de la Curie romaine que le pape François est en train d’effectuer ».
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