« La transexualité, ce n’est que ça, n’ayez pas peur »

Vanessa Van Durme est Belge, actrice, scénariste. Autrefois homme, elle a changé de sexe en 1975 et d’identité officiellement en 1977. Elle raconte son histoire sur scène, ce vendredi soir, dans son spectacle « Regarde maman, je danse », dans le cadre du festival Autrement gay.

Elle nous attend dans le hall de son hôtel stéphanois. Elle porte un ensemble gris, pantalon. La poignée de main est franche. Ses ongles sont manucurés. Elle ne porte que peu de bijoux, un collier avec les alliances de ses parents et de sa soeur décédée en pendentifs. Elle nous entraîne dans la salle du petit déjeuner. A ses côtés, son assistante et amie, Griet, une accro à la tablette tactile, « elle m’aide, sans elle je ne pourrais pas tout faire ». Avec sa voix de fumeuse, la comédienne nous parle de son spectacle, rompue à l’exercice de la promo après 6 années passées sur les routes du monde entier pour le jouer : « c’est mon histoire que je raconte pendant une heure et demi », explique t-elle, « je me suis toujours vue femme, depuis ma naissance ».

« On était des singes que l’on montrait dans un zoo »

Elle n’utilise que rarement le mot de transexualité, « j’ai une dysphorie de genre ». Née à Gand en 1948, Vanessa grandit dans une famille d’ouvriers, au côté de sa soeur. Devenue adulte, sa transexualité choque la société belge des années 60/70 : « les transexuelles étaient ridiculisées, écartées de la société, on était des singes que l’on montrait dans un zoo, des monstres, de jolies monstres ». Elle raconte alors cet épisode dans une banque, « je suis allée ouvrir un compte, quand le banquier a vu que j’étais transexuelle, il a appelé tout le monde pour venir me voir ».

« Ce n’est pas grave »
Ce spectacle est aussi un hommage : « mes parents ont été formidables, ils m’ont tellement aimée, malgré le fait que ce ne soit pas facile d’avoir une enfant comme moi ». Ceux qu’elle voudrait toucher, ce sont les gens qui ne connaissent pas la transexualité, ceux qui en ont peur : « je veux leur montrer que ce n’est pas grave, je suis bien dans ma vie, j’ai fait une belle carrière ». Elle est d’ailleurs partie faire une tournée dans les villages d’Ardèche, il y a 3 ans.

Le mariage pour tous, « chez nous c’est complètement normal »
Elle a connu la prostution, pendant 13 ans : « on ne trouvait pas de travail ». Elle parle avec une logorrhée impressionnante, de son mariage avec Peter, un antiquaire, pendant 16 ans, « j’ai divorcé, comme tout le monde ». Son grand amour, c’est le théâtre : « mon plus grand et fidèle amour ». Vanessa Van Durme n’est pas militante. Membre d’aucune association. Présente à Autrement gay « parce qu’on a appelé mon agent, voilà ». Elle est choquée du traitement des transexuelles en France : « ici, rien n’est possible, la France a toujours du retard ». Sur le mariage pour tous, sa voix si calme se fait plus orageuse : « je suis choquée de voir la réaction des Français, particulièrement des plus jeunes, chez nous en Belgique, c’est complètement normal ».

Maison d’hôtes 
En dehors du théâtre, « il n’y a pas grand chose, je n’ai pas le temps ». Elle ne part jamais en vacances, « j’essaye de me caler 10 jours l’année prochaine ». Vanessa vit aujourd’hui en Ardèche, dans un petit village près de Privas. Elle y a ouvert avec son assistante des chambres d’hôtes. Elle est célibataire. « Je vis sur une colline avec des vaches pour voisines ». Officiellement à la retraite depuis deux mois, elle ne compte pas arrêter « surtout avec la retraite que je touche ». Elle prépare son prochain spectacle avec Richard Brunel (formé à la Comédie de Saint-Etienne) sur le thème de la maladie d’Alzeihmer. Elle partira encore en tournée avec son spectacle, raconter son histoire. Elle sait si bien le faire.

S. B.
zoomdici.fr