L’Agence française de l’adoption « inquiète » pour les couples homosexuels

La directrice générale de l’Agence française de l’adoption (AFA), Béatrice Biondi, s’est inquiétée jeudi du devenir des couples homosexuels qui vont être autorisés par la loi à adopter mais qui, dans les faits, ne trouveront pas de pays étrangers prêts à accepter leurs dossiers.

Mme Biondi était auditionnée à l’Assemblée nationale sur le projet de loi ouvrant le mariage et l’adoption aux couples homosexuels, avec Arnaud Del Moral, chef du service international de l’AFA, chargé de la stratégie et des procédures d’adoption.

Selon le projet de loi présenté par le gouvernement début novembre, les couples de même sexe pourront théoriquement adopter des enfants à l’international.

Mais la directrice générale de l’AFA a exprimé jeudi son « inquiétude quant au devenir de ces familles, qui pourraient venir nous voir mais qu’on aura énormément de mal à orienter vers un pays qui pourrait les accepter ».

Créée en 2006, l’AFA est une agence publique travaillant avec 35 pays partenaires et accompagnant 6.000 familles. « Premier opérateur pour l’adoption internationale », elle ne peut refuser de dossiers, s’ils répondent aux conditions requises pour l’adoption, contrairement à des organismes privés.

« Moins d’une vingtaine de pays autorisent l’adoption par des couples homosexuels, 70 condamnant l’homosexualité », a rappelé M. Del Moral.

« Mais parmi la vingtaine de pays, le nombre de pays proposant des enfants à adopter à l’étranger est extrêmement restreint », a-t-il poursuivi.

L’AFA n’a identifié que trois pays auxquels elle pourrait transmettre les dossiers de couples homosexuels : l’Afrique du Sud et quelques Etats du Brésil et des Etats-Unis.

Mais aux Etats-Unis, « le profil des enfants proposés est extrêmement complexe, ils ont plus de sept ans et sont souvent atteints de pathologies », a précisé M. Del Moral. Et au Brésil, « l’AFA n’a pas été reconnue par les autorités ».

Reste l’Afrique du Sud, mais « les profils des enfants pourraient ne pas correspondre non plus aux attentes des adoptants », a-t-il estimé.

Dans ces pays, les coûts d' »intermédiation » varient entre 18.000 et 25.000 euros, à la charge des familles, sans compter les frais d’avocats et les déplacements, a-t-il aussi souligné.

M. Del Moral a rappelé qu’un certain nombre de pays n’interdisaient pas formellement l’adoption par les couples homosexuels dans leur « droit positif » mais qu’ils n’acceptaient pas « socialement » l’homosexualité. Inutile donc pour l’AFA de leur transmettre les dossiers de couples gays.

L’AFA redoute qu’un certain nombre de pays décident de fermer progressivement l’adoption aux célibataires. « La Russie, par exemple, est très attentive au suivi des enfants adoptés », a souligné Mme Biondi. Si le pays découvre que des homosexuels adoptent en célibataire puis se marient, « cela pourrait entraîner des questionnements autour de la dissimulation d’informations », a-t-elle relevé.

Certains pays comme la Chine ou le Vietnam exigent déjà des « attestations de non homosexualité » pour les familles adoptantes, a-t-elle souligné.

L’adoption par des couples homos sera d’autant plus compliquée que le nombre d’enfants à adopter dans le monde a beaucoup baissé: en 2011, 1.995 enfants étrangers ont été adoptés par des Français, contre environ 4.000 en 2005.