Le changement de sexe pour les personnes transgenres en droit français [Rapport de recherche]

STOP homophobie est fière de partager ce rapport de recherche inédit, portant sur « Le changement de sexe pour les personnes transgenres en droit français, entre un passé révolu et des avenirs incertains : le parcours des combattants d’aujourd’hui » écrit par Maxime Loiry (MtF). Pour la première fois en France, un travail à destination des personnes transgenres est réalisé par une personne transgenre sur les aspects juridiques incontournables de la procédure de changement de la mention du sexe à l’état civil en guide pratique.

De part son caractère inédit notamment avec la réalisation d’entretiens, d’une analyse multifactorielle du paradigme transgenre et de l’apport des positions militantes et politiques de tout horizon, Maxime Loiry (MtF) démontre que les transidentités sont plus que jamais d’actualité et conduisent à l’effritement salutaire d’une hétéronormativité nocive. Une véritable mutation des questions relatives aux droits des personnes transgenres devenues éminemment politiques est en cours. Aujourd’hui, cela permet d’offrir des occasions de rendre visible les transidentités pour les personnes en questionnement sur leur identité de genre et aux allié(e)s de la communauté LGBTQIA. Il devient plus qu’urgent d’apporter un renouveau sans précédent dans l’approche du fait transidentitaire en France en n’écrivant pas contre mais pour et avec les personnes concernées par le sujet. C’est l’ambition de ce rapport.

Associer des revendications politique, culturelle et sociétale issues des terrains militants face aux innombrables difficultés que rencontrent les personnes transgenres permettent de dévoiler la dure réalité des parcours de transition en France dans un univers transphobe. Concevoir un unique parcours de transition est dangereux face à la diversité transgenre, le faire sans les personnes transgenres est inacceptable. Elles seules détiennent les réponses. La France doit impérativement prendre en compte le respect des genres et des sexualités en accordant la même effectivité des droits et libertés à ces personnes qui n’ont pas à prouver qu’elles sont différentes car elles sont comme les autres : des citoyennes et des citoyens à part entière de la République française.

Le travail reste immense. Ce rapport n’est qu’une goutte d’eau dans l’océan du militantisme transgenre. Les personnes transgenres, militantes ou non, doivent impérativement repenser leurs rôles en fabriquant une image conforme à la réalité des besoins trans. Elles et leurs allié(e)s le pourront en favorisant l’éducation aux transidentités, le besoin en formation du personnel médical et paramédical amené à les accompagner dans leur parcours et à relayer les actes odieux dont sont encore victimes les personnes transgenres de nos jours.

« Le changement de sexe pour les personnes transgenres en droit français, entre un passé révolu et des avenirs incertains : le parcours des combattants d’aujourd’hui »

Rapport réalisée par Maxime Loiry (MtF), sous la direction de MME. IMBERT AMELIE, Maîtresse de conférences.

Remerciements

Je tiens à remercier sincèrement Madame Amélie Imbert, Maîtresse de conférences, pour l’accompagnement et l’attention à toute épreuve qu’elle m’a porté tout au long de cette année dans la construction de ce rapport. Merci pour votre confiance.

La détermination des axes de recherche n’aurait pas pu aboutir sans le regard avisé et les conseils précieux à toute heure du jour et de la nuit de Monsieur Loïc Bret, Doctorant en droit international et européen des droits de l’Homme.

Je tiens à remercier également Madame Bénédicte Fischer, Maîtresse de conférences, pour m’avoir transmis des informations variées et utiles en lien avec le mouvement transgenre et la lutte pour les droits des personnes LGBTIQIA+ me permettant de compléter ma réflexion sur de très nombreux points.

Il y a peu de mots pour remercier les personnes interrogées pour le temps qu’elles ont consacré à répondre à mes questions : Camille Prins pour m’avoir fait un tour d’horizon des principales problématiques, Laurent B et Sophie A dont la rencontre m’a permis de découvrir une partie lointaine mais ravissante de la Haute-Savoie, Anastasia, nos lieux et heures de rencontres atypiques ne t’ont pas empêchée de t’exprimer avec une franchise qui inspire le respect, Paul R avec tes blagues qui nous font oublier la noirceur du monde dans lequel nous sommes, Romain Bancel pour ton soutien à chaque instant et ton regard pragmatique, Soline Laurent avec ton engagement sur des questions sociétales majeures et une grande culture qui ne sont plus à démontrer.

J’adresse également de très chaleureux remerciements à celles et ceux qui ont pu contribuer à leur manière à l’accomplissement de ce travail de recherche notamment à Messieurs Olivier Lemaire, Documentariste, et Vincent Perez, Chef de produit accessoires, pour avoir pris le temps d’apporter des réponses à mes questionnements.

SOMMAIRE

Introduction

Chapitre 1 : Le sexe et le genre pour les personnes transgenres, révélateurs d’une situation sémantique complexe

Section 1 : Le sexe, une notion obstacle au mouvement transgenre
Section 2 : Le genre, une notion perturbée par le mouvement transgenre

Chapitre 2 : Le changement de sexe pour les personnes transgenres, le renouveau juridique

Section 1 : D’une jurisprudence conservatrice à des dispositions législatives réformatrices

§1 : L’ancienne nécessité d’une preuve d’un syndrome de transsexualisme démontrée par l’irréversibilité de l’apparence pour la jurisprudence
§2 : La Loi du 18 novembre 2016 relative à la Modernisation de la Justice du XXIème siècle : la fin salvatrice du silence législatif

Section 2 : Une libéralisation procédurale du changement de sexe, le basculement incomplet de la référence sexuelle à celle de genre

§1 : Les conditions limitées à la démonstration du comportement social
§2 : Une grande place accordée à l’appréciation du juge
§3 : Un changement d’état civil aux lourdes conséquences juridiques

Section 3 : Une procédure suscitant de larges inquiétudes

§1 : Une atteinte consentie au principe d’indisponibilité de l’état civil
§2 : Une instrumentalisation des questions médicales
§3 : Une préservation contestable de la binarité des sexes : le refus de la création d’un sexe neutre
§4 : La prise en compte insuffisante de l’accompagnement psychologique lors du parcours de changement de sexe

Tables des sigles et des abréviations

AFDA : Association française pour la recherche en droit administratif
AJDA : L’Actualité juridique Droit administratif
aff. : Affaire
al. : Alinéa
art. : Article
Ass. : Assemblée
Ass. plèn. : Assemblée plénière
Avis. cont. : Avis contentieux
Bull. : Bulletin de la Cour de cassation
C. : Code
C. civ. : Code civil
CSP : Code de la santé publique
c/ : Contre
CA : Cour d’appel
CAA : Cour administrative d’appel
Cass. civ. : Cour de cassation, chambre civile
Cass. crim. : Cour de cassation, chambre criminelle
CC : Conseil constitutionnel
CE : Conseil d’Etat
CEDH : Cour européenne des droits de l’homme
CESDH : Convention européenne de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales
Cf. : Confer
CJCE : Cour de justice des Communautés européennes
CJUE : Cour de justice de l’Union européenne
CNCDH : Commission nationale consultative des droits de l’homme
Comm. : Commentaire
Concl. : Conclusions
Ed. : Édition
JCP : Jurisclasseur périodique (La semaine juridique)
JORF : Journal officiel de la République française
LGBT : Lesbien Gay Bisexuel Transgenre
LGBTQIA+ : Lesbien Gay Bisexuel Transgenre Queer Intersexe Asexuel allié(e)s
LGDJ : Librairie générale de droit et de jurisprudence
Obs. : Observations
p. : Page
PUF : Presses universitaires françaises
Rec. : Recueil des décisions du Conseil constitutionnel
Req. : Requête
RDSS : Revue de droit sanitaire et social
RFDA : Revue française de droit administratif
RIDC : Revue internationale de droit comparé
RTDC : Revue trimestrielle de droit civil
S. : Sirey
Sect. : Section
Sté : Société
TA : Tribunal administratif
TC : Tribunal des conflits

Conclusion

Bibliographie

Annexes

Table des matières


Introduction

Selon la militante transféministe Maud-Yeuse Thomas, co-fondatrice de l’Observatoire des Transidentités (ODT) et de la revue des Cahiers de la Transidentité, la société française a longtemps considéré que les personnes transgenres souhaitaient « détruire la société et transgresser la nature »[1]. Selon elle, la « démocratie des Lumières y trouve là sa limite qu’elle prétend surmonter en légitimant un discours »[2] malheureusement dépassé par « des critères et des valeurs scientifiques »[3] devenus stériles engendrant des « naufrages (…) et des crises idéologiques »[4]. Son appréciation, certes sévère, permet de dévoiler toute la difficulté des institutions publiques françaises à redéfinir une approche non discriminante envers les personnes transgenres. La mise en place de ce nouveau paradigme paraît nécessaire, surtout lorsque la France se place en chef de file de l’exportation du « modèle humaniste de droits et de respect de l’humain »[5] à l’échelle internationale.

Aborder un sujet d’une telle complexité demande de prendre toutes les précautions d’usage dans la délimitation sémantique. En effet, il peut apparaître aux yeux de certaines et de certains que s’intéresser aux personnes transgenres n’est pas un « sujet normal pour un étudiant en droit »[6]. Les personnes transgenres peuvent être considérées comme des « personnes qui ne se reconnaissent pas dans le sexe qui leur a été assigné à la naissance et entreprennent d’en changer »[7]. Autrefois, le terme transsexuel était largement utilisé mais il est aujourd’hui à proscrire. Il commence à se raréfier dans les productions scientifiques même s’il reste utilisé pour introduire les développements relatifs à la transidentité. Pour Ali Aguado et Ian Zdanowicz, « une personne transgenre se distingue d’une personne transsexuelle en ce qu’elle n’a généralement pas recours à la chirurgie et revendique une identité trans en tant que telle, et non l’appartenance à une catégorie de sexe homogène »[8]. Selon eux, on distinguait alors « les transsexuelles (et les transgenres) MtF (male to female) devenues des femmes (ou nées hommes et présentant des caractéristiques féminines), et les transsexuels FtM (female to male) devenus des hommes (ou nés femmes et présentant des caractéristiques masculines) »[9]. Proposer une définition simple qui permet de rassembler tous les schémas transgenres n’est pas une perspective aisée. En ce sens, dans le cas d’une personne de sexe mâle qui « transitionne »[10] ou « se métamorphose »[11] et vit comme l’autre sexe ou genre, on la désignera comme une « femme transgenre ou MtF »[12]. La personne MtF va employer le féminin en parlant d’elle. À l’inverse, pour l’individu naissant avec un sexe femelle, le schéma transitionnel reste le même, on le désignera comme un « homme transgenre ou FtM »[13] et il va employer la sémantique masculine en parlant de lui. Il faut bien comprendre qu’il ne faut pas réduire, une personne MtF par exemple, à « un homme qui se déguise »[14] ce qui met à part les performances artistiques des Drag Queens ou Drags Kings dans la construction d’un parcours de transition. Au sein de la communauté dite « LGBTi+ ou LGBTQIA+ »[15], les personnes transgenres ont toujours eu une place particulière, pour ne pas dire à part. Pour Ali Aguado et Ian Zdanowicz, les personnes transgenres sont souvent envisagées par rapport à une seule « question »[16] qui est au croisement d’enjeux majeurs trop souvent réduits à une « l’hypertrophie de la sexualité »[17]. Par rapport aux autres membres formant cette communauté, les personnes transgenres cristallisent la volonté de dépsychiatrisation qui fût juridiquement obtenue avec la loi[18] de 2016. Dans cette optique, les relations avec l’ensemble de la communauté sont parfois difficiles à appréhender ou mêmes houleuses dans le sens où les personnes transgenres vont « remettre en question les catégories de l’hétérosexualité et de l’homosexualité »[19]. En effet, l’exemple d’une personne transgenre MtF « n’ayant pas subi d’opérations chirurgicales mais se comportant comme une femme biologique »[20] peut se considérer comme « hétérosexuelle avec un partenaire sexuel homme »[21] alors que « le partenaire sexuel homme peut se considérer lui comme homosexuel »[22]. Cela entraine donc une « multiplicité des combinaisons »[23] et la quasi-impossibilité de faire « œuvre de classification (…) au sein du mouvement LGBTi+ »[24] dont les évolutions sont permanentes.

            Dans le paradigme des « trans »[25], la transidentité est une notion substantielle car elle va cristalliser l’impossibilité « de penser ou d’envisager »[26] ces personnes dans le « traditionnel schéma dichotomique femme ou homme »[27]. Pourtant, ce n’est pas le terme de transidentité qui va s’imposer immédiatement. Au tout début des années 1950, pour Jean-Baptiste Marchand, c’est la notion de transsexualisme qui fait référence en désignant « une demande de changement de sexe la plus complète possible qui se caractérise par trois signes majeurs : le désir de vivre et d’appartenir à l’autre sexe, le rejet (…) des caractéristiques sexuelles de son corps, le souhait de modifier le plus totalement possible l’apparence de son corps par le recours aux techniques médicales de son époque (…) »[28]. Dès les années 1960, le terme de transsexualisme va être employé et utilisé par la sphère médicale, d’une manière discriminante, comme une sorte de « diagnostic »[29] pour reprendre le terme issu des travaux du sexologue Harry Benjamin qui a d’une part, opéré une grande formalisation d’un « diagnostic de transsexualisme »[30] et d’autre part, milité pour une « reconnaissance pleine et entière de la transsexualité et des opérations de changement de sexe »[31]. Par ailleurs, le « syndrome de Benjamin »[32] a été la première étape de la délimitation sémantique des personnes transgenres, au départ transsexuelles, et c’est à cet auteur que l’on doit la classification MtF et FtM, encore utilisée de nos jours.

Lors de la prise de conscience par un individu de sa transidentité, son existence va indéniablement basculer dans l’inconnu car il aura la possibilité d’entamer un « passage entre les genres »[33] car « [sa] vie psychique du genre va se révéler à travers une déconstruction et une construction »[34]. En effet, le fait qu’un individu se considère comme une personne transgenre va entrainer « l’installation d’un trouble dans les catégories naturalisées du genre »[35] en raison de son identité profonde qui est devenue « décalée par rapport aux catégories du sexe instaurées par l’idéologie binaire comme fondatrices de l’appartenance à une communauté humaine »[36]. Au début d’un parcours de transition, ces individus ont une certaine forme de liberté  car ce sont des « passeurs de mondes »[37] entre les genres car ils ne sont pas « assignés à résidence »[38] dans le genre attribué à leur sexe à la naissance. Il ne sera jamais question de la sexualité de l’individu qui doit rester un « angle mort »[39] du parcours de transition au nom du droit au respect à la vie privée.

            Les transidentités amènent inexorablement la question du changement de sexe, avec d’une part, la perspective médicale avec « certaines chirurgies »[40] aux résultats parfois décevants et, d’autre part, la perspective juridique avec le changement de la mention du sexe à l’état civil qui sera le sujet principal des propos qui vont suivre. La possibilité de changer de sexe à l’état civil est admise en droit français sous la condition du respect d’une procédure particulièrement rigoureuse empêchant un changement libre pourtant ardemment souhaité par les milieux militants transgenres. De plus, ces questions amènent irrémédiablement des postures de personnalités connues ou moins connues et plus ou moins trans-friendly, à s’exprimer sur le sujet au risque de créer de véritables polémiques et d’assombrir les possibilités juridiques et thérapeutiques offertes aux personnes transgenres. Par exemple, la Professeure Colette Chiland, ancienne présidente d’honneur de la sulfureuse Société Française d’Etudes et de prise en charge de la Transidentité appelée couramment SOFECT, a affirmé non sans mal que « changer de sexe est impossible »[41] en filant la métaphore à propos d’Icare qui « a vu les attaches de cire de ses ailes fondre au soleil »[42]. C’est ici l’une des problématiques les plus prégnantes et délicates à aborder pour les personnes transgenres. Il est légitime tout à fait légitime de penser que l’on puisse « changer de genre mais pas le sexe »[43] car les procédures de réassignation de sexe vont « toucher l’apparence du corps et non le corps tout entier »[44]. Pour Colette Chiland, l’exemple d’une personne MtF qui pourra toujours « changer son état civil et vivre en tant que femme sans être née femelle (…) mais on ne peut pas devenir en tout point comparable à une femme née biologiquement femme »[45]. En outre, les réassignations, qu’elles soient médicales ou juridiques ne changent pas « l’intérieur du corps, les chromosomes, les gonades (…) »[46]. Les transformations médicales et juridiques doivent permettre à la personne transgenre si elles sont « faites à bon escient »[47] de pouvoir « vivre mieux »[48] et ne pas s’engager vers la voie d’une « chirurgie mutilatrice complétée d’une hormono-thérapie »[49]. C’est une position qui n’est pas minoritaire chez les auteurs mais qui reste relativement isolée car régulièrement remise en cause par les milieux militants transgenres. Pour d’autres, comme par exemple Françoise Sironi dont la position est partagée en grande partie par le mouvement transgenre et qui fera l’objet d’un développement particulier, souhaitant quant à elle un véritable renouveau dans l’accompagnement des personnes transidentitaires.

S’interroger sur le changement de sexe pour les personnes transgenres demande un renouveau dans la méthode, notamment en donnant la parole aux personnes concernées et à leurs « allié.e.s »[50]. L’approche choisie pour construire les développements qui vont suivre peut dans une certaine mesure s’apparenter à la « recherche-action »[51]. Cette construction implique de s’interroger d’une part, sur les procédés de « fabrication des personnes »[52] et d’autre part, de regarder « les choses du point de vue de l’autre côté »[53] en raison de la « traversée des catégories »[54] réalisée par les personnes transgenres. Dans la construction du sujet choisi, il n’y a pas eu des « questions de départ »[55] mais des « questions de recherche »[56] dans le sens où le thème général était depuis longtemps défini mais l’angle de construction, notamment avec les entretiens a été « modifié par l’action de la recherche »[57]. Dans la même perspective que Françoise Sironi[58] pour l’approche psychologique des personnes transgenres ou Stéphanie Hennette-Vauchez[59] pour l’influence du genre sur le Droit, le champ de recherche s’est affiné tout au long de l’année en partant du principe qu’il « ne faut pas écrire contre mais pour et avec toutes les personnes concernées par le sujet »[60] tout en gardant à l’esprit que la ligne directrice doit répondre aux « critères de scientificité d’une recherche universitaire »[61]. C’est toute la difficulté du sujet. Réfléchir sur le changement dit juridique de sexe pour les personnes transgenres impose d’une part, de « se départir d’une vision réductionniste et psychopathologisante »[62] et d’autre part, d’envisager des problématiques essentielles que vont devoir affronter les personnes transgenres si elles souhaitent s’affirmer dans leur nouvelle identité.

            Ainsi, il sera traité dans un premier temps, de la situation sémantique complexe pour les personnes transgenres entre la notion de genre et de sexe (Chapitre 1) et dans un second temps, du renouveau juridique incarné par le changement de sexe pour les personnes transgenres (Chapitre 2). 

Chapitre 1 : Le sexe et le genre pour les personnes transgenres, révélateur d’une situation sémantique complexe

Pour Maud-Yeuse Thomas, il faut arrêter de penser sous le prisme du « fantasme fondateur »[63] que le sexe est l’égal du genre. En effet, les personnes transgenres vont révéler que le « sexe est opposé au genre »[64] malgré d’une part, le « dogme naturaliste binaire »[65] et d’autre part, le « redoutable problème de l’identification reposant sur le dogme de la naissance »[66].

Envisagées dans le paradigme transgenre, les notions de sexe et de genre sont brouillées car « autonomes »[67]. Au sein du mouvement transgenre, ces notions sont critiquées et on y voit une opération de « déconstruction de la notion de sexe »[68]. En effet, dès les années 1990, les « études transgenres »[69] menées par Kate Bornstein[70] aux Etats-Unis d’Amérique vont démontrer d’une part, une « critique du système de partition de l’humanité en sexes »[71] et d’autre part, la volonté de mettre un terme au « sexe comme indice pertinent des divisions du monde social »[72]. En confrontant les notions de sexe et de genre, les personnes transgenres mettent en avant une « volonté de plus en plus forte de s’affirmer en tant que personne avant de s’affirmer en tant qu’homme ou femme »[73].

Ainsi, il sera observé d’une part, que le sexe est une notion qualifiable d’obstacle au mouvement transgenre (Section 1) et d’autre part, que le genre reste une notion perturbée par le mouvement transgenre (Section 2).

Section 1 : Le sexe, une notion obstacle au mouvement transgenre

            En droit français, le sexe reste un élément essentiel de l’individualisation des personnes. À la lecture de l’article 57 du Code civil, l’écriture du sexe est « obligatoire »[74] et déterminée après une prise en compte de l’apparence des organes génitaux externes de l’enfant. Face aux problématiques des personnes transgenres, la mention du sexe à l’état civil est sans aucun doute l’une des plus importantes car les transidentités provoquent une véritable explosion de cette notion. En effet, le terme de sexe s’illustre par une grande « ambiguïté »[75] car ce sont les organes génitaux qui sont des « marqueurs (…) indiscutables de l’appartenance à une classe d’êtres (…) les hommes ou les femmes »[76]. De manière générale, il est légitime de regretter que « l’homme reste défini par son pénis et une femme par son vagin »[77]. Par opposition à ce modèle, les mots engagés de Simone de Beauvoir gardent une signification particulière dans le sens où d’une part, le fameux « on ne naît pas femme : on le devient »[78] et, d’autre part, l’idée selon laquelle « aucun destin biologique, psychique, économique ne définit la figure que revêt au sein de la société la femelle humaine »[79].

            En jurisprudence, c’est d’abord la nécessité de faire un choix entre un sexe masculin ou féminin rappelée depuis 1974[80]. Néanmoins, cette ligne de défense a commencé à se fissurer grâce aux critiques dirigées contre l’arrêt[81] de la Cour de cassation du 4 mai 2017 suite au cas d’une personne intersexuée, née avec des caractéristiques sexuelles qui ne sont pas en adéquation avec les définitions des sexes mâle et femelle. Cette dernière a demandé l’inscription d’un sexe neutre sur son état civil qui fût acceptée à la grande surprise du monde juridique par un jugement[82] du Tribunal de Grande Instance de Tours. Cette prise de position d’une juridiction du fonds a eu quelques retentissements au sein de la communauté transgenre. En effet, au moment du rendu de la décision, les débats étaient vifs sur le caractère artificiel et non naturel de la dualité de sexes. Une partie de la communauté transgenre, venant soutenir les revendications des personnes intersexuées, a considéré le rejet du sexe neutre par la Cour de cassation comme non justifié et cela n’a fait que renforcer la défiance rampante en direction des institutions judiciaires. Pour Benjamin Moron-Puech, cette décision a mis en exergue la dualité des sexes comme une « construction sociale dénaturante »[83] déjà largement dénoncée par Marie-Xavière Catto[84] en 2014 dans une partie des conclusions du comité REGINE.

            La mention du sexe à l’état civil est donc limitée au sexe masculin ou féminin car « il n’y a pas d’autre choix dans notre culture »[85]. Le sexe reste un terme polysémique car il engendre des conséquences différentes en fonction de sa mention sur l’acte de naissance notamment sur « la place symbolique que nous devons occuper dans les échanges »[86] ou même « les vêtements que nous devons porter »[87]. En outre, la mention du sexe sur l’état civil va tracer dans une certaine mesure le destin de la personne car elle devra se réaliser comme une femme ou un homme sous le poids des stéréotypes sociaux inhérents à la dualité des sexes.

            Au final, les revendications sociétales portées par les personnes transgenres et intersexuées, liées à la mention du sexe à l’état civil sont des « revendications politiques déstabilisantes »[88] pour nos sociétés contemporaines. En effet, le sexe constitue un « véritable obstacle épistémologique »[89] dans le sens où il vient assoir une binarité des sexes déstabilisante et nocive pour les personnes transgenres qui peuvent être perdues face à ce schéma dans lequel elles ne peuvent pas se situer. Pour Christine Delphy, « le genre précède le sexe »[90] mais Elsa Dorlin n’hésite pas à rappeler que  « la sexualité précède le genre »[91] car les transidentités viennent remettent en cause le schéma hétéronormatif. Face aux relations que la notion de sexe entretient avec la notion de genre, il conviendra de s’intéresser à cette dernière qui apparaît comme perturbée par le mouvement transgenre (Section 2).

Section 2 : Le genre, une notion perturbée par le mouvement transgenre

         Dans son avis[92] du 27 juin 2013, la Commission Nationale Consultative des Droits de l’Homme (CNCDH) a enfin reconnu la situation « très précaire des personnes transidentitaires en France »[93] où le droit français « n’est pas suffisamment protecteur (…) mais contribue aussi à les maintenir (…) dans une situation de grande vulnérabilité sociale »[94]. D’une manière générale, la CNCDH a estimé « nécessaire »[95] une « refonte de la législation française concernant l’identité de genre »[96]. Malgré cette prise de position tout à fait louable, il faut rappeler qu’une bonne partie du droit français est irriguée par un très grand nombre de textes internationaux qui ont de lourdes conséquences parfois invisibles pour les justiciables. L’identité de genre en fait partie car elle « n’apparaît pas dans la législation française »[97]. Depuis, la convention d’Istanbul fût adoptée et signée par la France le 11 mai 2011 puis ratifiée le 4 juillet 2014[98] entrainant une entrée en vigueur le 1er novembre 2014 en raison d’un seuil suffisant de ratification atteint par les Etats parties. Cependant, cette convention ambitieuse n’a pas d’effet direct au sens de la jurisprudence[99] du Conseil d’Etat. En outre, les buts de cette convention étaient de prévenir et de lutter contre les violences faites aux femmes dans la sphère publique et privée, la notion d’identité de genre s’y voit définie comme des « références à l’expérience intime et personnelle de son genre profondément vécue par chacun »[100], d’une « correspondance ou non au sexe assigné à la naissance »[101] et surtout d’une « conscience personnelle du corps, qui peut impliquer, si consentie librement, une modification de l’apparence ou des fonctions corporelles par des moyens médicaux, chirurgicaux ou autres »[102]. Cette convention marque un « tournant majeur »[103] car elle mentionne à la toute fin de la définition de l’identité de genre, les « autres expressions du genre, y compris l’habillement, le discours et les manières de se conduire »[104]. Néanmoins, en raison de la nécessité de la concordance linguistique dont font l’objet les conventions internationales, Jimmy Charruau souligne l’utilisation d’une sémantique peu fiable en raison d’une part, d’une « énumération de termes assez éloignés dans leur signification »[105] et, d’autre part, d’une « prétention exhaustive de l’acceptation du genre (…) s’avérant finalement restrictive pour son appréhension générale »[106]. L’emploi du terme « société donnée »[107] s’avère être d’une « instabilité spatio-temporelle »[108] très élevée. En effet, la convention n’a pas fourni d’indicateurs suffisants pour déterminer les composants permettant d’évaluer le sentiment général d’une société en particulier. De plus, la convention d’Istanbul appréhende uniquement le « sexe social »[109] qui est « opposé au sexe biologique »[110] entrainant un « regard sociétal conformisé »[111] qui ne permet pas une prise en compte des diversités du mouvement transgenre. Le prisme d’analyse est donc centré sur l’identité de la personne et non sur son sexe, ce qui représente une avancée en matière de reconnaissance des droits et des libertés fondamentaux des personnes transgenres malgré une effectivité non uniforme sur le territoire européen.

            Cependant, les développements de la CNCDH ne font pas l’unanimité. En 2014, pour Ali Aguado et Ian Zdanowicz, les appels du pied de la CNCDH à destination du législateur ne sont pas suffisants car cela est « insatisfaisant de construire une loi à partir d’une vision naturalisée et dépolitisée du genre »[112]. En effet, pour ces deux membres de l’association OUTrans, cette définition de l’identité de genre a « balayé d’un revers de manche les longues années de réflexion et de politisation des questions de genre »[113] car malgré les actions militantes « la population trans se trouve toujours confrontée à un vide juridique qui l’expose à des discriminations »[114] qui sont « non seulement licites mais tout à fait légales »[115]. Suite à l’avis de la CNCDH, le mouvement transgenre n’a pas hésité à appuyer les positions prises par la CNCDH dans le sens où le genre devient un « outil d’analyse critique des rapports de force »[116] et une véritable « arme majeure pour la politisation des luttes féministes »[117]. De plus, pour une partie du milieu militant transgenre, il y a la considération que la notion de genre est « instrumentalisée »[118] par des personnes qui sont « bien souvent cisgenres »[119]. En effet, rares sont les personnes sérieuses directement concernées par ces questions qui bénéficient d’une large médiatisation[120] afin d’expliquer les transidentités au grand public et de ne pas rester entre personnes initiées.

            La politisation à toutes les échelles de la notion de genre va rendre cette dernière difficile à appréhender pour les personnes transgenres. Avant ce phénomène de politisation, dès les années 1950, les sexologues Anke Ehrhardt et John Money considèrent que le genre « constitue (…) une norme sociale devant guider la réassignation sexuelle médicale »[121] dans l’accompagnement des personnes intersexuées. De plus, lors d’une Conférence[122] en 1992, dans l’analyse de cette définition, John Money accentue ses propos sur les personnes transgenres en expliquant que « l’identité de genre est l’expérience privée du rôle de genre, et le rôle de genre est la manifestation publique de l’identité de genre »[123]. Ces deux notions sont « les deux côtés d’une même pièce de monnaie »[124]. Cependant, cette interprétation n’est pas pertinente dans le sens où les transidentités ne peuvent pas être résumées en deux seules faces d’une même pièce de monnaie. En outre, dans l’approche de John Money « il n’y a pas de jeu entre identité et rôle social »[125]. Pour Colette Chiland, la définition proposée par John Money « ne respecte pas certaines données de la vie quotidienne et de la clinique »[126] notamment dans la correspondance entre l’identité de genre et l’identité sociale qu’une personne peut renvoyer publiquement. On peut considérer « qu’il n’y a pas d’essence du masculin et d’essence du féminin »[127]. La réalité du paradigme transgenre vient compliquer les grilles de lecture. L’interprétation de la notion de genre va dépendre de la construction psychologique et intellectuelle de l’individu même si elle est « étroitement conditionnée par le politique et le sociétal »[128]. Pour Colette Chiland, lorsque « nous disons en face d’une personne qu’il s’agit d’un homme ou d’une femme, à la fois nous émettons un jugement soumis aux standards sociaux auxquels nous nous rallions et nous mobilisons nos options personnelles les plus idiosyncrasiques et les plus profondes »[129]. Confronter la notion de genre à la réalité quotidienne d’une personne transgenre ne permet pas de dresser des réactions uniformes et policées car cela va dépendre irrémédiablement des « critères de surface »[130] et de la « trajectoire »[131] de la personne. Concrètement, les codes sociaux peuvent souhaiter « qu’on ne dise pas Madame ou Mademoiselle à qui porte barbe et moustache »[132]. Dans un processus de transition, une personne transgenre peut également faire le choix de la non binarité dans le sens où elle préféra mettre en avant sa personnalité afin d’éviter qu’elle soit considérée à travers des codes sociaux ou des clichés inhérents à un genre en particulier.

Grâce aux travaux sur le transsexualisme de Robert Stoller, l’interprétation de la notion de genre pour les personnes transgenres va s’affiner davantage. Pour lui, le « sexe biologique ne coïncide pas toujours avec le ressenti psychologique de la personne, son identité de genre »[133]. Cependant, pour Jimmy Charruau le concept d’identité de genre reste considéré d’une part, comme un « substrat invariable relevant de la nature »[134] et, d’autre part, comme une « variable contingente relevant de la culture »[135] mais de toute façon, à la fin, « le premier précède toujours le second »[136]. En outre, lors des questionnements autour de la notion de genre, cette dernière est pratiquement toujours abordée par le prisme de la binarité ou dichotomie des sexes ce qui provoque des « angles morts dans la pratique thérapeutique et dans la théorisation »[137]. Cette approche va donc empêcher d’une part, une « remise en question possible de cette théorie »[138] et d’autre part, les personnes transgenres sont perçues comme des « empêcheurs de dichotomiser en rond »[139].

            Il aura fallu attendre la « consécration de l’identité de genre »[140] réalisée avec la loi[141] de 2016. Pour Sophie Paricard, l’identité de genre va « reposer ainsi sur le seul sentiment d’identité concrétisé par l’apparence sociale que la personne s’est choisie »[142]. La précision explicite du législateur a fait table rase de la jurisprudence[143] de la Cour de cassation pour donner lieu aujourd’hui à une « rectification de la mention du sexe qui ne saurait dès lors être subordonnée aux strictes exigences médicales »[144]. Cette avancée législative est majeure pour les personnes transgenres car cela permet de « faire correspondre la mention du sexe aux comportements adoptés par la personne en société »[145]. Sur cet aspect, il faut rappeler toutes les difficultés liées à « l’identification des rôles considérés comme féminin ou masculin »[146]. En réalité, les personnes transgenres vont « se conformer à des clichés de genre pour être socialement acceptées et reconnues dans leur identité de genre »[147] avec parfois des situations complexes comme celle de l’artiste Bilal Hassani qui a une « image très féminine mais il se définit comme un homme »[148]. Par exemple, un « homme transgenre ne peut pas se maquiller ou porter une robe »[149] et une « femme transgenre ne peut pas avoir les cheveux courts ou de la barbe »[150]. Ces interprétations des codes imposés par le genre donnent lieu à des discriminations qui sont « d’autant plus difficiles lorsqu’elles viennent (…) des personnes cisgenres mais parfois (…) de la communauté transgenre elle-même »[151]. L’idée d’un « seuil à trouver »[152] peut paraître intéressante notamment dans une vision « pragmatique »[153] du quotidien de la personne transgenre qui va malheureusement mettre « en adéquation »[154] ses vêtements avec les « situations qu’elle va trouver dans sa journée »[155].

            Par ailleurs, l’identité de genre pour une personne transgenre, en plus d’être un élément fondamental dans la construction de sa nouvelle identité psychologique, va nécessairement avoir des influences sur sa « vie psychique du genre »[156]. En effet, la transidentité d’un individu permet à celui-ci de « libérer le genre de ses carcans normatifs »[157] grâce à une « étonnante vitalité créatrice »[158]. Cette libération peut prendre la forme dans un premier temps d’une « fluidité du genre »[159] qui permet, pour une femme transgenre, de se « libérer d’une masculinité toxique et omniprésente »[160]. Cela peut soutenir l’individu dans la « nouvelle manière de se définir »[161]. Pour Françoise Sironi, la vie psychique du genre va désigner « la manière subjective que nous avons de vivre le genre »[162] car elle se révèle par « un travail libératoire de déconstruction des possibles contraintes, résistances, désirs ou rejets des normes construites en dehors de soi »[163]. Néanmoins, cette vie psychique du genre va « concerner tout à chacun (…) y compris les sujets bien assis dans la dichotomie des genres »[164]. Elle prend une forme toute particulière pour les personnes transgenres car, la particularité est « qu’elle n’est pas nécessairement fixée et immuable chez le même sujet »[165]. La personne transgenre va devoir faire un travail de « désidentification »[166] en faisant des « projections sociétales »[167]. L’impératif est de « vivre cette libération (…) sans culpabilité »[168]. Cela va se manifester, par exemple, par un changement progressif dans les habitudes vestimentaires. Cela n’est pas sans difficultés pour les personnes transgenres et  ouvre trop souvent la porte à des « propositions sexuelles inadmissibles »[169]. C’est un élément que beaucoup de personnes cisgenres ont du mal à percevoir au quotidien, contrairement aux personnes transgenres qui sont en première ligne pour « être en adéquation avec leur personnalité intérieure »[170] et cela ne constitue en rien une « invitation à s’envoyer en l’air avec n’importe qui ou à se faire insulter gratuitement parce que l’on aime ça »[171].

            Au final, les confrontations entre les notions de sexe et de genre sont révélatrices d’une situation sémantique complexe qui amène à dire que le « genre n’est pas inscrit sur le corps »[172]. Pour Judith Butler, les « nouvelles configurations culturelles du sexe et du genre pourraient se multiplier »[173] avec les avancées sociétales obtenues par le mouvement transgenre. Par ailleurs, ces notions resteront toujours entremêlées, critiquées ou repensées par les personnes transgenres en raison de la diversité des parcours de transition. S’intéresser aux notions de sexe et de genre permet de mieux discerner l’importance vitale du changement de sexe pour les personnes transgenres qui est et sera un renouveau juridique ayant des conséquences sociales très importantes. Ainsi, il sera observé dans un second chapitre du changement de sexe pour les personnes transgenres (Chapitre 2).

Chapitre 2 : Le changement de sexe pour les personnes transgenres, le renouveau juridique  

            La procédure de changement de sexe, au sens ici du changement de la mention du sexe à l’état civil, est considérée par une partie de la communauté transgenre comme une finalité incontournable. Dans le passé, elle fût difficile à entreprendre en raison de l’omniprésence médicale et psychiatrique qui a eu des conséquences juridiques particulièrement dures pour les personnes souhaitant faire reconnaitre leur véritable personnalité. Néanmoins, il n’y a pas de parcours de transition identique en raison de la grande diversité des profils rencontrés. On peut également se demander si le changement de sexe à l’état civil serait forcément l’étape finale ou obligée pour une personne transgenre.

            Penser le changement de sexe pour les personnes transgenres comme finalité absolue du parcours transitionnel est impertinent. Pour Laura Badler, figure incontournable de la communauté transféminine, le changement de sexe, qu’il soit médical ou juridique, n’a pas de sens car « vouloir être une femme n’existe pas car on est déjà ce que l’on est »[174]. L’exemple d’une femme transgenre est exhaustif car cette personne « n’a pas envie d’être une femme car elle a toujours été une femme à l’intérieur »[175]. De plus, Laura Badler précise à titre général qu’une « personne trans ne va pas nécessairement changer de sexe »[176] car « elle exprime son genre comme elle le souhaite »[177]. Cela revient à l’idée qu’il est impossible d’envisager la procédure de changement de sexe commune uniforme et linéaire au sein de la communauté transgenre car « ce n’est pas correct »[178]. La richesse des transidentités se trouvent dans les parcours des personnes transgenres car ils sont avant tout personnels.

            Dans une autre optique, en raison de la grande diversité des parcours transitionnels des personnes transgenres, il est légitime de se demander comment aborder l’hypothétique procédure de changement de sexe pour les personnes souhaitant l’entreprendre. Pour le dessinateur et illustrateur Guy Mauve, connu sous le pseudonyme Guynotaguy pour ses créations en lien avec la communauté transmasculine, il y a « plein de manières d’être trans »[179] avec un changement de sexe qui aujourd’hui peut « se faire à toutes les étapes de la vie »[180]. Pour lui, l’objectif cardinal des personnes transgenres est « d’avoir la paix »[181] et ces dernières n’ont pas forcément envie que « le fait d’être trans soit la seule caractéristique que l’on a en tant que personne »[182]. En effet, derrière la transidentité, il y une personnalité, une manière d’être, des sentiments et des émotions. Les institutions publiques doivent rester en dehors de la vie d’une personne transgenre car cette dernière « n’a pas besoin de l’approbation des gens pour exister »[183] car d’une part, « elle est déjà là »[184] et, d’autre part, « elle sait qui elle est »[185].

            Néanmoins, l’état civil, réduit à un « bout de papier »[186], n’a pas fini de faire parler de lui au sein de la communauté transgenre. En effet, le changement d’état civil peut paraître « indispensable »[187] en raison des « changements physiques importants »[188] effectués avec le concours des hormones ou de la chirurgie. Ce changement d’état civil doit permettre d’éviter en cas de «vérification de l’identité »[189] de faire naître « le doute ou la suspicion »[190] car concrètement la personne « n’est plus celle qui figure sur les papiers officiels de la République »[191]. L’état civil est donc apparenté à une « véritable instance disciplinaire des corps »[192] qui ne prend pas en compte les personnes transidentitaires au risque, quasi-certain, de favoriser des actes discriminatoires en cas de vérification de l’identité.

            Ainsi, il sera observé dans un premier temps, d’une jurisprudence conservatrice à la création de dispositions législatives réformatrices (Section 1) et dans un second temps, de la libéralisation de la procédure de changement de sexe (Section 2).

Section 1 : D’une jurisprudence conservatrice à des dispositions législatives réformatrices

            Pour entrevoir une évolution dans la possibilité d’entamer une procédure de changement de la mention du sexe à l’état civil, les personnes transgenres ont dû attendre la nomination de Michèle Alliot-Marie à la Place Vendôme en tant que ministre d’Etat, garde des Sceaux, ministre de la Justice et des Libertés, pour que leurs revendications soient entendues. Malgré un parcours qui ne laisse pas apparaître de sensibilité sur ces questions, cette dernière a diffusé pour la toute première fois dans notre droit, une circulaire[193] interne très détaillée sur le changement d’état civil. Cependant, le renouveau juridique, déjà amorcé avec l’avis[194] de la CNCDH faisant office d’appel du pied au législateur, sera enfin une réalité avec la promulgation le 18 novembre 2016 de la loi qui a enfin placé les seules « volonté et apparence (…) de l’individu pour changer de vie via la demande de changement de sexe »[195].

            Ainsi, il sera observé dans un premier temps, de l’ancienne nécessité d’une preuve d’un syndrome de transsexualisme démontrée par l’irréversibilité de l’apparence pour la jurisprudence (Paragraphe 1) et dans un second temps, la Loi de Modernisation de la justice du XXIème siècle promulguée le 18 novembre 2016 qui marque la fin salvatrice du silence législatif (Paragraphe 2).

  • 1 : L’ancienne nécessité d’une preuve d’un syndrome de transsexualisme démontrée par l’irréversibilité de l’apparence pour la jurisprudence

            Pour obtenir le changement de la mention du sexe à l’état civil, il fallait tout d’abord apporter la preuve d’un syndrome du transsexualisme démontrée par l’irréversibilité de l’apparence. Cela était une condition essentielle pour les juridictions françaises. En effet, le terme de transsexualisme va apparaître dans les travaux[196] d’Harry Benjamin en 1966. La transsexualité va être expliquée comme « le mauvais corps »[197] soit comme une « discordance entre l’identité vécue et la réalité corporelle »[198]. À cette époque, l’emprise médicale sur les personnes transgenres était à son paroxysme en raison d’une part, de la nécessité de remettre en « adéquation un corps et une identité »[199] et, d’autre part, elle était « reconnue comme une pathologie pour pouvoir être traitée »[200]. Selon cette notion, les personnes transgenres sont des « minorités sexuelles »[201] qui sont « troublées et malades »[202] renvoyant au modèle « du déviant »[203]. En outre, ce « paradigme médical de la transsexualité »[204] a engendré un « renforcement de l’idéologie du genre »[205] c’est-à-dire à appuyer la « dualité des sexes et leur manifestation métonymique par les organes génitaux »[206] anéantissant les rares possibilités offertes aux personnes transgenres d’exprimer leur véritable identité.

            Face à une médicalisation largement soutenue par les médecins chargés de suivre les personnes transgenres, à l’époque considérées comme transsexuelles, la jurisprudence était dans le même sillage. Jusqu’en 2016, pour Sophie Paricard, la Cour de cassation avait pendant très longtemps « refusé le changement de sexe sur le fondement du principe d’indisponibilité de l’état des personnes »[207] car « la volonté ne pouvait permettre de changer de sexe »[208]. Cependant, ce refus catégorique émanant de la plus haute juridiction judiciaire de France a été considéré comme illégal et a entrainé une condamnation[209] retentissante par la Cour Européenne des Droits de l’Homme (CEDH) grâce en partie « aux pressions des activistes trans français.e.s »[210]. Face à cela, dans un arrêt[211] d’Assemblée plénière, la Cour de cassation a entrepris de trouver une nouvelle justification afin de restreindre davantage les éventuelles demandes de changement de sexe à l’état civil en mobilisant les « critères médicaux »[212] corroborés d’une part, d’un « diagnostic du syndrome de transsexualisme »[213] et, d’autre part, des « traitements médico-chirurgicaux impliquant une stérilisation »[214]. Par la notion de stérilisation, il faut comprendre que l’individu, considéré comme transsexuel, doit apporter la preuve irréfutable du « caractère irréversible de la transformation de l’apparence »[215]. Pour le Professeur François Vialla, cette sémantique a entrainé des « positions fort variables des juridictions »[216] entrainant une « insécurité juridique »[217] qui a rendu « assourdissant »[218] l’inexplicable « silence gardé par le législateur »[219]. Face à cela, les autorités politiques n’ont pas hésité à prendre un contrepied réglementaire avec plus ou moins de réussite.

            Par un décret[220] du 8 février 2010, Roselyne Bachelot, alors ministre de la Santé et des Sports a annoncé la fin de la psychiatrisation des personnes transgenres lors d’un parcours transitionnel. Pour Ali Aguado et Ian Zdanowicz, cette « démarche »[221] était « purement symbolique »[222]. En effet, à cette époque pour ces auteurs, dans l’optique de se faire rembourser les soins liés au long parcours de la transition, les « trans pouvaient, et peuvent encore à ce jour, demander à bénéficier d’une allocation de longue durée (ALD) »[223] car cette dernière comprend « l’ensemble des maladies psychiatriques nécessitant des soins sur une durée de plus de six mois »[224]. Cependant, avec l’arrivée du décret dans le paysage juridique français, l’allocation devient « hors liste »[225] c’est-à-dire que l’affection de longue durée va concerner « les patients atteints d’une forme grave d’une maladie ou d’une forme évolutive ou invalidante d’une maladie grave ne figurant pas sur la liste des ALD 30 et 23. Elles comportent un traitement prolongé d’une durée prévisible supérieure à six mois et une thérapeutique particulièrement coûteuse »[226]. En réalité, il s’agit d’un faux espoir car « il ne s’agit pas d’une dépsychiatrisation effective »[227] qui devait concrètement « à ne plus exiger, de la part de la médecine comme de la justice, l’aval et les recommandations obligatoires d’un psychiatre pour transitionner ou changer d’état civil »[228]. Aujourd’hui, les personnes transgenres ont une « obligation de suivi psychiatrique »[229] avant de procéder à « toute modification corporelle »[230] et ce « qu’il s’agisse de prise d’hormones ou de chirurgies »[231].

Par une circulaire du 14 mai 2010, Michèle Alliot-Marie, en tant que ministre d’Etat, Garde des Sceaux, ministre de la Justice et des Libertés, a décidé d’arrêter la machine infernale en raison d’une « jurisprudence fluctuante »[232] sur la réalisation « d’expertises médicales »[233] qui est une « source d’incompréhension »[234]. De plus, elle est « perçue comme discriminatoire, puisque selon le lieu où est déposée la requête, l’expertise sera ordonnée ou non »[235]. Cette prise de position interne à Place Vendôme, très appréciée de surcroit par la communauté transgenre, a permis d’ouvrir la voie aux demandes de changement de la mention du sexe à l’état civil dès lors que « les traitements hormonaux ont pour effet une transformation physique ou physiologique définitive, associés, le cas échéant, à des opérations de chirurgie plastique, ayant entrainé un changement de sexe irréversible, sans exiger pour autant l’ablation des organes génitaux »[236]. Malgré l’intention qui peut être considérée légitiment louable, Sophie Paricard a alerté que cette circulaire retentissante a engendré une « difficulté majeure »[237] notamment sur la question de la « réversibilité du processus de stérilisation »[238]. En effet, la Cour de cassation fût très réticente à adopter cette nouvelle position et cette dernière n’a pas hésité à le faire savoir dans deux arrêts[239]. De plus, en introduisant explicitement une notion d’irréversibilité, certes explicite par sa sémantique mais vague sur la pratique, cela a laissé une « possibilité d’interpréter dans le sens d’une perte définitive des facultés de procréer »[240]. Par exemple, un homme transgenre qui se voit prescrire une « prise d’hormones prolongée »[241] ne va pas pouvoir être capable de procéder à une « fabrication naturelle de gamètes »[242] et en cas « d’ablation des seins »[243] cela rend de facto « impossible la production de lait maternel puisqu’il y a ablation des glandes mammaires »[244]. En outre, cette large capacité d’interpréter offerte au juge dans l’appréciation des cas permet de souligner le fait que « le corps (…) est au centre des préoccupations de la justice »[245] et malheureusement, il est « toujours associé à la procréation »[246] ce qui entraine une nouvelle montée en puissance de la « distinction binaire des deux sexes »[247]. De plus, dans l’analyse de cette sombre situation, Ali Aguado et Ian Zdanowicz soulignent le paradoxe où « l’Etat et la société attendent des corps trans qu’ils se rapprochent au plus près des normes sexuées liées aux normes de reproduction, tout en les contraignant à ne plus jamais pouvoir se reproduire biologiquement »[248].

            En 2012, sous la présidence de François Hollande, grâce à l’impulsion de Christiane Taubira, Garde des Sceaux, ministre de la Justice, la notion d’identité sexuelle a été intégrée dans la politique de lutte contre les discriminations. En effet, l’article 225-1 du Code pénal a permis d’inclure ce type de discrimination subie par les personnes transgenres notamment dans les cas « d’harcèlement au travail »[249]. Cependant, l’introduction de cette notion a fait « débat »[250] au sein de la communauté transgenre qui n’a pas « hésité à lutter »[251] pour opérer un remplacement par la notion d’identité de genre considérée comme plus pertinente. Face aux critiques, la Commission Nationale Consultative des Droits de l’Homme (CNCDH) a été consultée sur cette interrogation et a rendu un avis[252] dont on connaît déjà les grandes lignes. Pour Marie-Xavière Catto, l’avis rendu par la CNCDH a permis de révéler que l’intégration de la notion d’identité de genre permettrait de « saisir l’ensemble des discriminations liées au genre en distinguant l’identité de genre du sexe et de l’orientation sexuelle »[253] ce qui pourrait davantage « protéger les personnes transidentitaires dans leur diversité »[254].

Dans cette perspective, la fin de la nécessité d’apporter la preuve d’un syndrome de transsexualisme démontrée par l’irréversibilité de l’apparence, est en marche. Le processus salvateur fût enclenché grâce à l’impulsion de la Cour Européenne des Droits de l’Homme (CEDH). En effet, suite à l’arrêt[255] intitulé Y. Y. c/ Turquie du 10 mars 2015, le Professeur Jean-Pierre Marguénaud a estimé que la Cour s’était « directement prononcée pour la première fois sur la question de la conformité de l’article 8 des exigences préalables au processus de conversion sexuelle pouvant être imposées aux transsexuels »[256]. En effet, cette décision sans précédant au niveau européen a permis de constater que « la condition d’incapacité de procréer à laquelle le Code civil turc avait subordonné l’autorisation de subir une opération de changement de sexe entraînait une violation du droit au respect de la vie privée »[257]. Néanmoins, cet arrêt, certes important pour la communauté transgenre, n’a pas mis fin aux processus de conversion sexuelle. En effet, la difficulté en l’espèce était que les personnes, ici désignées sous le terme de transsexuelles, étaient  « candidates à une stérilisation volontaire »[258] et non véritablement forcées ce qui a entrainé des erreurs d’interprétation en cascades de la décision. Au sein du Conseil de l’Europe, les polémiques autour du Code civil turc n’ont malheureusement pas pu mettre davantage en exergue les discriminations, violences et autres répressions subies par la communauté LGBTi+ turque.

            Ainsi, après « vingt ans d’une jurisprudence contrastée mais fondamentalement rigoureuse »[259], le législateur va enfin « sortir de son silence sur cette question d’importance »[260] pour les personnes transgenres souhaitant entreprendre une procédure de changement de la mention du sexe à l’état civil. En effet, l’inversion du paradigme est en cours avec d’une part, une montée en puissance des écrits doctrinaux[261] et d’autre part, une jurisprudence européenne[262] qui apparaît comme « particulièrement menaçante »[263] pour la France si la situation reste en l’état. En outre, ce sera d’autant plus violent si la France continue d’opter pour une vision conservatrice, mais dépassée, du changement de sexe. Le changement se fera grâce à certaines dispositions de la loi[264] du 18 novembre 2016 marquant ainsi la fin salvatrice du silence législatif (Paragraphe 2).

  • 2 : La Loi de Modernisation de la justice du XXIème siècle du 18 novembre 2016 : la fin salvatrice du silence législatif

             Le 18 novembre 2016 est l’une des dates considérées comme les plus importantes de la communauté transgenre. Dans le même esprit que la journée du 20 novembre, le Transgender Day of Remembrance[265] en mémoire aux victimes de la transphobie dans le monde, cette loi[266] a permis au législateur de pallier partiellement aux carences subies par les personnes transgenres.

            Dans cette perspective, le Code civil a été complété par de nouvelles dispositions au sein du livre 1er sous l’appellation « la modification de la mention du sexe à l’état civil »[267] avec une série d’articles qui encadrent la procédure de changement de la mention du sexe à l’état civil. Cette possibilité est ouverte, selon l’alinéa 1 de l’article 61-5 à « toute personne majeure ou mineure émancipée »[268]. Ces dispositions furent précisées par un décret[269] en date du 29 mars 2017 qui a permis la création des articles 1055-5 à 1055-9 pour les éléments procéduraux rassemblés au sein du Code de procédure civile. De part l’ampleur de la réforme qui a été entreprise, ce dernier a entrainé la modification du décret[270] du 15 mai 1974 en prévoyant un nouvel article 16-1 à propos de la délivrance, si le changement de la mention du sexe est accepté, d’un nouveau livret de famille.

            Pour Pierrette Aufière et Elisabeth Schellino, l’objectif de cette réforme était de  « favoriser la demande de changement de sexe devant les tribunaux en supprimant toutes obligations de traitements médicaux, d’opérations chirurgicales et de stérilisations pour la personne intéressée »[271]. Cette réforme, mis à part pour Sophie Paricard qui est une « atteinte considérable au principe d’indisponibilité de l’état civil »[272],  a permis de concrétiser l’identité de genre dans le sens du « seul sentiment d’identité concrétisé par l’apparence sociale que la personne s’est choisie »[273].

            Néanmoins, le chemin parcouru par cette réforme ne fût pas de tout repos. Contrairement à une idée reçue d’un consensus de la classe politique, le Professeur François Vialla rappelle que la « question du changement de la mention de sexe à l’état civil »[274] est arrivée par un « amendement »[275]. En observant rapidement les débats parlementaires s’étant déroulés avant l’engagement par le Gouvernement de la procédure accélérée suite à l’échec de la commission mixte paritaire, l’idée était de permettre un changement de la mention du sexe à l’état civil mais cela suscitait de vives oppositions de la part du Palais du Luxembourg qui souhaitait « conserver une médicalisation partielle là où les députés s’en étaient affranchis »[276]. Les considérations des sénateurs étaient d’éviter d’entamer une lourde procédure sur le fondement d’un « trouble temporaire du genre »[277]. En outre, dans un aspect médical, l’argument principal reposait sur le fait que « la personne ne possède plus tous les caractères de son sexe d’origine et a pris une apparence physique la rapprochant de l’autre sexe »[278]. Malgré cette position conservatrice, l’Assemblée nationale « à laquelle le dernier mot appartenait »[279], ne s’est pas écartée de sa position originelle d’une « démédicalisation de la procédure »[280]. Cette perspective sera façonnée dans une « logique de possession d’état »[281] notamment dans la création des trois conditions à suivre pour pouvoir obtenir le changement de la mention du sexe à l’état civil.

Cependant, les combats se sont poursuivis devant les Hauts Conseillers de l’Aile de Montpensier du Palais-Royal. En effet, après une saisine par les parlementaires à propos d’une éventuelle inconstitutionnalité de l’article 56 qui selon eux, laissait une « place trop importante à l’autonomie de la volonté »[282] le Conseil constitutionnel a dû se livrer à une interprétation. Dans une décision[283] du 17 novembre 2016, le Conseil constitutionnel a considéré que les « dispositions prévues à l’article 56 ne méconnaissait ni l’article 66 de la Constitution ni le principe de sauvegarde de la dignité humaine »[284]. Dans une certaine mesure, l’idée principale qui se dégageait de la loi[285] fût pour Scarlett-May Ferrié de « ne plus dissimuler l’existence d’un syndrome mais de revendiquer une identité sexuelle subjectivement définie »[286]. Cela était déjà le cas au niveau européen. En effet, la Cour Européenne des Droits de l’Homme (CEDH) a déjà considéré que « le choix d’affirmer et d’assumer son identité sexuelle tombe sous la protection de l’article 8 paragraphe 1 de la Convention »[287].

Dans une perspective d’interprétation de la décision[288] du Conseil constitutionnel, il y a la possibilité de considérer que « c’est la volonté de choisir son sexe qui est prégnante de la nouvelle procédure »[289] car l’Aile de Montpensier n’hésite pas à affirmer que « la procédure de changement de sexe à l’état civil est le résultat d’une démarche purement volontaire »[290] qui « n’est pas contraire à la dignité humaine »[291]. Pour Scarlett-May Ferrié, l’optique de la « modification du sexe à l’état civil serait toujours justifiée par le droit au respect de la vie privée mais au nom de la liberté de la vie privée et non pas au secret de celle-ci »[292].

Néanmoins, il est légitime de remarquer que le Conseil constitutionnel ne s’est pas attardé davantage sur les trois conditions prévues à l’article 61-5 du Code civil qui seront expliquées plus loin dans les développements. Pierrette Aufière et Chantal Barousse, respectivement avocat honoraire et médecin endocrinologue, estiment que la loi[293] de 2016 a  « bousculé les repères médicaux et jurisprudentiels établis avec plus ou moins de souplesse »[294]. Pour ces auteurs, c’est la problématique de la nouvelle « typologie du transsexualisme »[295] qui va « interroger sur son implication dans la réalité sociologique et judiciaire »[296] en raison du contenu de l’article 61-6 du Code civil qui « n’impose aucun traitement médical, opération (…) ou stérilisation pour obtenir la décision souhaitée »[297]. Sur l’aspect de la stérilisation, évidemment très contesté et figurant aux premières lignes des revendications historiques au sein de la communauté transgenre, la Cour Européenne des Droits de l’Homme (CEDH) a été amenée à se prononcer. En effet, avant la loi[298] de 2016, le Professeur Jean-Pierre Marguénaud a estimé que « le droit français assujettissait bien les personnes transgenres à la réalisation d’une opération stérilisante ou d’un traitement qui, par sa nature ou son intensité, entrainait une très forte probabilité de stérilité »[299]. La CEDH s’était déjà prononcée, notamment au travers du respect au droit à la vie privée, dans une décision[300] en 2003 pour laquelle elle a envisagé qu’un « traitement ou une intervention chirurgicale à haute probabilité stérilisatrice n’est pas non plus véritablement consenti lorsque le fait pour l’intéressé de ne pas s’y plier a pour conséquence de le priver du plein exercice de son droit à l’identité sexuelle et à l’épanouissement personnel »[301] qui est considéré comme un « aspect fondamental de la vie privée »[302]. Sous le prisme de l’alinéa 2 de l’article 61-6 du Code civil qui dispose « le fait de ne pas avoir subi des traitements médicaux, une opération chirurgicale ou une stérilisation ne peut motiver le refus de faire droit à la demande »[303] ici entendue comme la celle du changement de la mention du sexe à l’état civil. À cet égard, pour le Professeur Jean-Pierre Marguénaud, la décision[304] rendue le 6 avril 2017, la CEDH a décidé « qu’il n’y avait pas eu de manquement par la France à son obligation positive de garantir le droit au respect de la vie privée d’un des trois requérants dont la demande avait été rejetée parce qu’il avait opposé un refus de principe à l’expertise médicale ordonnée par le juge »[305]. Pour l’universitaire, un « simple examen médical ne présente, en principe, guère le risque de traitement inhumain ou dégradant, il est cohérent que l’Etat retrouve (…) sa large marge d’appréciation »[306].

Ainsi, les possibilités offertes aux personnes transgenres souhaitant entreprendre une procédure de changement de la mention du sexe à l’état civil ont été réformées afin de prendre en compte les parcours et les demandes multiples sur un sujet d’importance. Les nouvelles dispositions apportées par la loi[307] du 18 novembre 2016 ont permis d’une part, de mettre fin aux « inoubliables blessures »[308] et, d’autre part, de sortir les personnes transgenres de leur « isolement »[309].

Il conviendra maintenant d’étudier plus précisément la libéralisation procédurale du changement de sexe avec le basculement incomplet de la référence sexuelle à celle de genre (Section 2) qui est pour beaucoup de personnes transgenres ou en devenir, un « parcours de construction de soi »[310] afin de répondre à une « nécessité intérieure, impérieuse et inaltérable »[311].

Section 2 : La libéralisation procédurale du changement de sexe, le basculement incomplet de la référence sexuelle à celle de genre

La loi du 18 novembre 2016 a inséré au sein du Code civil l’article 61-5 qui dispose que « toute personne majeure ou mineure émancipée qui démontre par une réunion suffisante de faits que la mention relative à son sexe dans les actes de l’état civil ne correspond pas à celui dans lequel elle se présente et dans lequel elle est connue, peut en obtenir la modification »[312]. Néanmoins, l’article ne se limite pas à un changement libre et dénué de limites car il précise en filigrane les trois conditions démontrées par « une réunion suffisante de faits »[313], empruntées à la possession d’état, qui sont le « nomen, le tractatus et la fama »[314]. En outre, la personne souhaitant entreprendre la procédure doit satisfaire aux dispositions de l’article 61-5, qui sont : « qu’elle se présente publiquement comme appartenant au sexe revendiqué ; qu’elle est connue sous le sexe revendiqué par son entourage familial, amical ou professionnel ; qu’elle a obtenu le changement de son prénom afin qu’il corresponde au sexe revendiqué »[315].

Dans cette perspective, l’idée principale de ces dispositions juridiques est de consacrer le comportement social comme une composante cardinale pour obtenir le changement de sexe car la loi consacre un « changement de sexe social »[316] en raison du fait que la personne n’est plus obligée de « changer de sexe biologique »[317]. Cependant, il serait légitime de penser que cette procédure braque ses lumières uniquement sur le comportement de la personne transgenre mais il ne faut pas sous-estimer la place accordée au juge dans l’interprétation générale des trois conditions précédemment énoncées. En effet, pour Sophie Paricard, le changement de sexe reste soumis à « l’appréciation souveraine des juges du fond »[318] ce qui implique de constituer un dossier très complet notamment dans la réunion de témoignages pour corroborer davantage la démarche.

            En s’intéressant aux conditions énoncées par cette procédure, « réclamée de longue date par le mouvement transgenre »[319] au nom de « la question de survie sociale »[320], apparaît l’importance de la mention du sexe à l’état civil pour tous les actes de la vie quotidienne. Il est ici indispensable de comprendre que cette procédure, certes considérée comme une période relativement éprouvante moralement et psychologiquement, est une « seconde naissance »[321] qui marque une idée de fin dans le « processus de métamorphose humaine »[322] entamé par la personne transgenre. C’est à la fois le début d’une nouvelle vie mais avec le corps de la vie précédente qui peut avoir subi quelques transformations. C’est la fin d’un épisode juridique mais certainement pas celui de la vie de la personne notamment dans à la prise d’hormones qui va l’accompagner jusqu’à la fin de sa vie.

Il sera observé en trois temps avec les conditions limitées à la démonstration du comportement social (Paragraphe 1) puis la grande place accordée à l’appréciation du juge (Paragraphe 2) et enfin des lourdes conséquences juridiques de ce changement d’état civil (Paragraphe 3).

  • 1 : Les conditions limitées à la démonstration du comportement social

            L’idée de démontrer un comportement social peut s’articuler avec la notion de « passing »[323] développé par le dessinateur et illustrateur Guy Mauve. Cela peut se définir lorsqu’on « passe bien pour son genre »[324]. En effet, la signification qui peut se dégager à travers ces trois conditions est de favoriser une situation dans laquelle la personne transgenre MtF ou FtM soit « un mec transgenre pris pour un mec cisgenre ou une meuf transgenre prise pour une meuf cisgenre »[325]. La difficulté qui peut émerger de la mise en place de ces conditions, malgré une relative pertinence, c’est que cela peut apparaître comme une « invention par des personnes cisgenres pour le confort des personnes cisgenres »[326] et non une réelle construction personnelle et conceptuelle par les personnes transgenres.

En raison de la diversité des profils, des parcours, de la volonté ou non de procéder à des transformations chirurgicales, les personnes transgenres souhaitant entamer ce parcours juridique peuvent considérer qu’elles sont enfermées dans cette procédure qui, dans certains cas, ne peut pas donner lieu à une suite favorable. Par exemple, pour une personne MtF, c’est le problème d’être considérée comme une « vraie femme »[327] avec parfois une pilosité difficile à cacher ou le fait de refuser d’adopter les codes vestimentaires ou comportementaux socialement attribués aux femmes.

Ainsi, il conviendra d’étudier ici les trois conditions avec la revendication publique assumée au sexe désiré (A) puis de l’obligation de porter à la connaissance des tiers son identité sexuelle (B) et enfin de l’obtention de changement de prénom correspondant au sexe désiré (C).

A : Une revendication publique assumée au sexe désiré

            Cette première condition est consacrée au sein de l’article 61-5 du Code civil qui dispose que « les principaux de ces faits, dont la preuve peut être rapportée par tous moyens peuvent être : qu’elle se présente publiquement comme appartenant au sexe revendiqué »[328]. La personne transgenre va donc devoir assumer publiquement une revendication claire et non équivoque de sa volonté d’être considérée comme appartenant au sexe désiré et non au sexe assigné à la naissance.

            Pour Sophie Paricard, cette condition peut s’apparenter comme le « comportement adopté en société »[329] soit le « tractatus »[330]. En effet, la personne transgenre doit adopter une « attitude sociale »[331] en faisant rejaillir dans sa vie quotidienne qu’elle se conforme, d’une certaine manière, aux clichés du sexe désiré en matière « d’habillement, d’attitudes ou de discours »[332]. L’idée clairement affichée par cette condition est « d’écarter toute attitude androgyne »[333]. Cette vision relativement extrême de ce que doit être une femme ou un homme ne va hélas que renforcer « une consolidation des stéréotypes de genre »[334]. Cette condition, malgré un abord qui peut laisser présager une interprétation pertinente, ne va qu’enfermer la personne transgenre dans des registres de genre stéréotypés et ainsi l’empêcher d’exprimer librement son genre. Néanmoins, la sémantique de cette condition permet d’écarter les comportements uniquement réduits à du travestissement temporaire ou à de la dysphorie de genre.

            Dans cette perspective, cette condition a également eu un impact, qui a pu être mal interprété dès le départ, celui relatif à la prise d’hormones. En outre, de part l’objectif de cette condition, il est légitime de s’interroger sur « l’impact des traitements hormonaux sur l’apparence »[335]. Comme il s’agit d’un regard sociétal porté sur le corps d’une personne, cette dernière a vivement intérêt à ressembler de la manière la plus adéquate ou proche au sexe revendiqué. Cette condition peut entrainer des difficultés pour les personnes transgenres MtF qui, à défaut d’avoir les cheveux longs, un visage fin ou un comportement social parfaitement féminin, ne seront peut être pas en mesure d’apporter suffisamment de faits probants. De  plus, les « effets maximaux »[336] de l’estradiol pour les personnes MtF ou la testostérone pour les personnes FtM, sont en général obtenus « après deux ans de traitement »[337] ce qui peut inquiéter les personnes en les incitant à reporter le lancement de la procédure à un moment plus adéquat de leur transition.

            Ainsi, cette condition est peut être l’une des plus difficiles à rapporter pour constituer un solide dossier en vue d’une demande de changement de la mention du sexe à l’état civil en raison de multiples facteurs en présence. Néanmoins, une fois rapportée, cette condition pourra allégrement se compléter avec la condition relative à l’obligation de porter à la connaissance des tiers son identité sexuelle (B).

B : L’obligation de porter à la connaissance des tiers son identité sexuelle

            Cette seconde condition est consacrée à la suite de la précédente à l’article 61-5 du Code civil qui dispose que « les principaux de ces faits, dont la preuve peut être rapportée par tous moyens peuvent être : (…) qu’elle est connue sous le sexe revendiqué de son entourage familial, amical ou professionnel »[338]. L’environnement de la personne transgenre est ici pris en compte et fait l’objet d’une analyse rigoureuse par les juges.

            Pour Sophie Paricard, cette condition peut renvoyer au « regard social porté sur la personne »[339] soit la « fama »[340]. En effet, cette dernière, pour être démontrée, va nécessiter un « minimum d’intégration sociale »[341] ce qui va malheureusement entrainer l’éviction des « personnes les plus marginalisées »[342]. Ici, il est important de préciser qu’il serait difficile d’imaginer l’absence d’un coming out[343]  réalisé précédemment pour appuyer cette condition car il s’agit de « revendiquer une identité sexuelle »[344]. Dans cette même optique, Guy Mauve n’hésite pas à soulever le problème des personnes transgenres qui ont un « mauvais passing »[345] dans le sens où faire « une transition n’est pas donnée à tout le monde »[346].

            En effet, pour appuyer l’obligation de porter à la connaissance des tiers son identité sexuelle, une personne transgenre peut recourir à un « acte de notoriété »[347]. Il s’agit d’un « document dressé par un officier public concernant un fait que deux ou plusieurs personnes lui déclarent être à leur connaissance et de notoriété publique »[348]. Concernant les personnes transgenres désireuses de changer de sexe à l’état civil, cette optique peut être très intéressante car elles peuvent faire intervenir des « allié(e)s »[349] comme des membres de la famille, des amis proches et plus largement des collègues de travail. En outre, les juges chargés des dossiers relatifs à des demandes de changement de la mention du sexe à l’état civil pourront « apprécier la situation »[350] grâce à des « témoignages versés sous forme d’attestations »[351]. Ces dernières devront répondre aux exigences de l’article 202 du Code de procédure civile. Ces éléments ne pourront qu’appuyer davantage la volonté de la personne transgenre de changer la mention de son sexe à l’état civil. Néanmoins, l’appréciation générale est « livrée à l’appréciation des magistrats »[352] d’après, et c’est un risque ici, une « perception  plus ou moins étendue et compréhensive »[353] des transidentités. Un des problèmes qui peut émerger ici est, face à des « dispositions ouvertes et libérales »[354], que les tribunaux judiciaires français se mettent à « développer une jurisprudence à tendance restrictive »[355] en raison de leur insuffisante connaissance des transidentités et des processus de transition.

            Ainsi, cette condition peut être considérée comme l’une des plus importantes car elle demande une intégration sociale entendue au sens large de la personne transgenre ce qui peut poser quelques difficultés, pire des obstacles infranchissables, pour celle qui est marginalisée. Après les développements relatifs aux notions de « tractatus et de fama »[356], il convient de s’intéresser à la dernière condition, celle relative à l’obtention d’un changement de prénom correspondant au sexe désiré (C).

C : L’obtention d’un changement de prénom correspondant au sexe désiré

Cette troisième condition est consacrée en toute fin à l’article 61-5 du Code civil qui dispose que « les principaux de ces faits, dont la preuve peut être rapportée par tous moyens peuvent être : (…) qu’elle a obtenu le changement de son prénom afin qu’il corresponde au sexe revendiqué »[357]. Il s’agit de la dernière pierre à l’édifice qui doit être apportée pour obtenir le changement de la mention du sexe à l’état civil.

Cette condition, mentionnée dans celle prévue pour les personnes transgenres souhaitant changer juridiquement de sexe, est une procédure à part entière qui demande de longs développements qui ne seront pas réalisés ici. Les éléments qui seront traités seront ceux exclusivement en lien avec le changement de la mention du sexe à l’état civil. En effet, pour Sophie Paricard, c’est la condition relative au « nomen » qui ne pose pas de difficulté en raison de la déjudiciarisation de la procédure de changement de prénom effectuée par la loi[358] de 2016. Cette procédure peut être réalisée en même temps que celle pour le changement de la mention du sexe à l’état civil. Cet allégement procédural permettant un meilleur traitement des dossiers a été rappelé par une circulaire[359] du 10 mai 2017 de Jean-Jacques Urvoas en tant que Garde des Sceaux, ministre de la Justice. Ainsi, selon l’article 60 du Code civil qui dispose que « toute personne peut demander à l’officier de l’état civil à changer de prénom. La demande est remise à l’officier de l’état civil du lieu de résidence ou du lieu où l’acte de naissance a été dressé. S’il s’agit d’un mineur ou d’un majeur en tutelle, la demande est remise par son représentant légal. L’adjonction, la suppression ou la modification de l’ordre des prénoms peut également être demandée ». À titre d’illustration, dans une jurisprudence[360] émanant de la Cour d’Appel de Montpellier du 15 mars 2017, les juges ont opéré un changement de prénom en même temps que le changement sexe en raison des nombreux témoignages apportés par la personne MtF notamment ceux qui apportaient la preuve que le demandeur se faisait appeler par un prénom féminin depuis 5 ans. En ce sens, la juridiction d’appel a précisé que le requérant « a justifié par les nombreuses attestations de sa famille et de ses proches »[361] l’utilisation expresse d’un prénom féminin en plus des deux autres conditions, qui en l’espèce pour les juges d’appel étaient remplies contrairement à l’avis des juges de première instance.

Néanmoins, cette troisième condition ne doit pas être considérée comme anecdotique. Pour Guy Mauve, le fait de « changer de prénom reste un cliché » notamment dans l’optique de « ménager l’entourage et garder des liens » avec sa famille. Cela reste un cliché mais qui reste pris en compte comme l’une des conditions essentielles pour pouvoir procéder à un changement de la mention du sexe à l’état civil. Cependant, la personne transgenre en qualité de demandeur à l’action peut très bien garder son prénom actuel, sous réserve d’une justification suffisante auprès du Tribunal judiciaire d’un « intérêt légitime »[362]. Il est nécessaire de préciser que cette possibilité reste rare car les personnes entreprenant cette démarche souhaitent, d’une manière générale, tourner la page de leur ancienne vie dans un genre opposé à leur ressenti intime.

Ainsi, la perspective de la libéralisation de la procédure de changement de sexe à travers la réunion de ces trois conditions permet aux personnes transgenres de démontrer, sans apporter la preuve d’une réassignation chirurgicale ou d’un traitement hormonal, leur véritable comportement social dans le genre qu’ils ressentent profondément et non dans celui qui leur a été assigné à la naissance. Après avoir analysé les conditions préalables au changement de sexe, il va être traité de l’aspect procédural avec la grande place accordée à l’appréciation du juge (Paragraphe 2).

  • 2 : Une grande place accordée à l’appréciation du juge

            Dans ses premières revendications, le mouvement transgenre souhaitait une véritable déjudiciarisation de la procédure du changement de la mention du sexe à l’état civil. L’Etat et plus largement les institutions judiciaires devaient cesser d’intervenir dans la vie d’une personne transgenre. Cette revendication, aussi légitime qu’elle puisse paraître, ne pouvait pas avoir lieu en raison d’une part, du passage obligé devant un juge pour pouvoir changer juridiquement de sexe et, d’autre part, du principe d’indisponibilité de l’état civil qui complique la grille de lecture.

            Dans son avis[363] de 2013, la Commission Nationale Consultative des Droits de l’Homme (CNCDH) a pu prendre une position favorable à une déjudiciarisation partielle, et non totale, de la procédure sans oublier bien évidemment son souhait de voir abandonner les conditions médicales. La CNCDH n’a jamais souhaité écarter l’institution judiciaire dans le parcours de changement de sexe car selon elle « l’action du juge (…) est un jalon nécessaire de la procédure (…) même au titre d’un simple contrôle ou validation »[364]. Le magistrat est ici placé comme un protecteur des droits et libertés des personnes souhaitant entamer cette démarche difficile et il n’est certainement pas là pour livrer des jugements de valeur. Ce dernier doit donc vérifier si les conditions énoncées par les textes sont respectées et permettre ainsi le changement de la mention du sexe si cela est le cas. La loi[365] de 2016 a permis d’une part, de conforter cette perspective en laissant au juge une grande place dans la procédure et, d’autre part, a également mis fin aux divergences de jurisprudence entre les tribunaux sur cette question d’importance.

            La place accordée au juge est, certes de faciliter le déroulement de la procédure si les conditions sont réunies, mais il doit également veiller à éviter les changements de sexe dus à des sautes d’humeur ou de convenances. La CNCDH a pu particulièrement insister sur ce point dans son avis[366] en considérant qu’il ne faut pas faire droit à la demande d’une personne de changer de sexe si cela relève d’une volonté « arbitraire, conjoncturelle ou fantasmatique »[367]. En effet, cette perspective est à envisager car cette libéralisation de la procédure de changement de la mention du sexe à l’état civil ne doit pas être une source de dérives. En outre, cet avertissement sévère de la CNCDH n’a pas d’effet pour une personne transgenre souhaitant changer juridiquement de sexe au sens qu’elle ne fraude ou ne simule pas car elle ressent cette « conviction profonde (…) dès l’enfance »[368]. De plus, il ne doit pas s’agir d’une « identification passagère mais de l’identité même »[369] de la personne.

            Cependant, cette appréciation laissée au juge par la loi[370] de 2016 n’a pas satisfait le milieu militant transgenre. Pour Ali Aguado et Ian Zdanowicz, le fait de laisser une telle place aux juges risque de « renforcer le contrôle étatique »[371] sur les personnes transgenres. De plus, on peut remarquer que les personnes transgenres souhaitant changer juridiquement de sexe doivent, en plus des trois conditions vues précédemment, rentrer dans des petites cases imposées par des textes juridiques tout au long de leur vie quotidienne. Au regard de la procédure, les personnes transgenres doivent donc se conformer une fois de plus à des clichés de genre qui ne font que renforcer une binarité des sexes nocive.

            Ainsi, il conviendra d’étudier les trois grands axes de cette procédure avec l’appréciation du consentement libre et éclairée du demandeur (A) puis de la compétence du Tribunal judiciaire (B) et enfin de la décision de modification de la mention du sexe dans les actes de l’état civil (C).

A : L’appréciation du consentement libre et éclairé du demandeur

            Selon l’article 61-6 du Code civil disposant que « le demandeur fait état de son consentement libre et éclairé à la modification de la mention relative à son sexe dans les actes de l’état civil (…) »[372]. Cette disposition permet de souligner que le demandeur doit être parfaitement capable de démontrer qu’il souhaite une modification de la mention de son sexe à l’état civil. Cela doit prendre la forme d’une volonté sans équivoque. Cependant, la sémantique peut laisser songeur. En effet, pour Pierrette Aufière et Chantal Barousse, les termes choisis sont « étranges »[373] dans le sens où « le terme de consentement libre et éclairé relève davantage du Code de la santé publique en son article L. 1111-4, traitant du consentement du patient, que de la procédure civile pour introduire une instance »[374]. Il est légitime de remarquer qu’il reste des traces de la science médicale au sein de la science juridique mais suffisamment cachées pour qu’elles en deviennent presque invisibles aux yeux des justiciables.

            Cette condition procédurale de l’appréciation du consentement libre et éclairé par le juge fût considérablement renforcée par la loi[375] de 2016. Une décision[376] du Conseil constitutionnel a pu éclaircir cette perspective car il s’agit quand même d’une véritable « entorse au principe d’indisponibilité de l’état des personnes »[377]. En effet, les Hauts conseillers de l’Aile de Montpensier ont considéré que « la procédure de changement de sexe à l’état civil est le résultat d’une démarche purement volontaire qui n’est pas contraire à la dignité humaine »[378]. Selon l’analyse de Scarlett-May Ferrié, « la modification du sexe à l’état civil serait toujours justifiée par le droit au respect de la vie privée, mais au nom de la liberté de la vie privée et non pas au nom du secret de celle-ci »[379]. Pour les personnes transgenres souhaitant entreprendre cette procédure, cela doit être en toute conscience et un retour en arrière est impossible. Elles doivent ainsi démontrer qu’elles souhaitent vraiment changer de sexe car elles apportent des preuves sérieuses notamment grâce aux actes de notoriété constitués auprès de leurs proches.

            Dans l’analyse du consentement libre et éclairé, le juge doit vérifier que la personne transgenre souhaitant changer de sexe ne subit aucune pression, de la part de son entourage mais aussi venant d’elle-même. Il est utile ici de reprendre les considérations de la CNCDH qui souhaitait éviter que le changement de sexe à l’état civil soit autorisé pour des personnes transgenres suite à une décision « arbitraire, conjoncturelle ou fantasmatique »[380]. En effet, le demandeur à l’action ne doit pas avoir décidé du jour au lendemain de vouloir changer la mention de son sexe à l’état civil car cette volonté doit s’inscrire dans un long et permanent processus. Sur les cas de changement « arbitraire »[381], Colette Chiland a pu dégager deux catégories de personne qui sont susceptibles de prendre ce type de décision avec d’une part, les « transvestis secondairement transsexualisés »[382] et, d’autre part, les « les homosexuels secondairement transsexualisés »[383]. Pour les premiers, il s’agit de la composante transvestie qui fait défaut dans le sens où le processus de travestissement de l’individu est irrégulier. Pour Colette Chiland, c’est un rapprochement que l’on peut faire, dans une certaine mesure, avec les émissions de téléréalité de Drag[384]. En effet, cela peut s’expliquer durant l’enfance lorsque que ces individus « de temps à autre, en secret à partir de l’adolescence, ils avaient un besoin de se travestir (…), avec au maximum une masturbation et un plaisir orgastique, au minimum un sentiment de bien être »[385]. Ces individus vont « toute leur vie (…) se travestir et prendront part à des activités de club où l’on se rend en week-end avec sa garde-robe, ses perruques, ses accessoires de maquillage, et où l’on rivalise de beauté et d’élégance avec d’autres transvestis »[386]. Il faut bien avoir conscience que les frontières entre les Drags Queens ou Kings et les personnes transgenres sont parfois minces mais l’une qu’il est nécessaire de connaître est que la personne transgenre se travestit, au sens de changer d’apparence vestimentaire ou physique pour se sentir en harmonie avec sa personnalité intérieure. Il ne s’agit pas d’un jeu, d’un show temporaire, d’une performance stylistique ou esthétique comme sont adeptes les personnes amatrices de Drag[387]. Par ailleurs, pour les seconds individus dits « homosexuels secondairement transsexualisés »[388], il s’agit pour la plupart « d’hommes, (…) souvent à la quarantaine ou plus tard, qui viennent demander une transformation, après toute une vie qu’ils présentent eux-mêmes comme homosexuelle ». En outre, ce sont des personnes en souffrance psychologique ou en train de vivre une crise existentielle. La perspective de pouvoir changer de sexe est vécue pour certains d’entre eux comme un refuge.

            En effet, le juge doit également s’assurer que le demandeur n’a pas enclenché cette procédure suite à une préoccupation « conjoncturelle ou fantasmatique »[389]. La préoccupation dite « conjoncturelle »[390] peut être rapprochée vis à vis des travailleuses et travailleurs du sexe. En effet, l’une des intentions premières du législateur quant à la libéralisation du changement de sexe était de ne pas ouvrir la route à une instrumentalisation de cette procédure notamment à des fins économiques. Il faut rappeler que les travailleuses et travailleurs du sexe transgenres constituent au même titre que les personnes n’exerçant pas cette activité comme des membres à part entière du mouvement militant transgenre. Quant à la préoccupation « fantasmatique »[391], elle est présente chez des personnes ayant des troubles psychologiques avec une altération du discernement. Dans ce cas, le déclenchement d’une procédure de changement de la mention du sexe à l’état civil serait immédiatement compromis car considéré comme irrecevable en raison de l’état mental et psychologique du demandeur.

            Ainsi, l’appréciation du consentement libre et éclairé du demandeur est un élément essentiel de cette procédure et qui requiert une analyse poussée de la réelle intention du demandeur par le juge afin d’éviter les instrumentalisations. Il conviendra de poursuivre nos développements en se concentrant sur la compétence du Tribunal judiciaire (B) pour le déroulé procédural.

B : La compétence du Tribunal judiciaire

            Dans son avis[392] de 2013, la Commission Nationale Consultative des Droits de l’Homme (CNCDH) a pu proposer l’introduction d’une « procédure type référé »[393]. En effet, c’était pour résoudre le problème majeur de la « vulnérabilité sociale »[394] dans laquelle sont placées les personnes transgenres dans le sens où elles sont dans une période « où leur genre ne coïncide pas avec la mention du sexe inscrite sur les documents d’identité »[395]. Pour la CNCDH, ces « mesures urgentes »[396] pourraient avoir comme objectif une « modification des documents d’identité, (…) du prénom et (…) du numéro de sécurité sociale »[397]. Néanmoins, cela ne vaudrait que pour la « période d’attente pour le changement de la mention du sexe à l’état civil »[398] et ne serait pas définitif car « le changement (…) lui-même demeurerait du ressort du juge du fond »[399]. En fait, l’objectif est de « lever les obstacles entravant la vie quotidienne »[400] liés au changement de sexe car « la personne transidentitaire aurait des documents d’identité conforme au sexe revendiqué »[401]. Cependant, la CNCDH dans sa force de proposition a émis deux objections liées intrinsèquement à la procédure de référé. En effet, la mise en place d’un référé d’une part, va considérablement « alourdir la procédure actuelle en ajoutant une étape supplémentaire à celle déjà en vigueur »[402] et, d’autre part, une « procédure de référé se heurte à la nature, par définition provisoire, des ordonnances du juge statuant en référé »[403] car « la modification des documents d’identité ne saurait en effet être considérée comme une mesure provisoire »[404]. Avec la loi[405] de 2016, cette proposition ne sera pas retenue malgré le fait qu’elle aurait pu résoudre des problèmes administratifs dont sont victimes les personnes transgenres en général. De plus, il faut se rendre compte que les personnes transgenres, souhaitant ou non changer juridiquement de sexe, se heurtent à des murs insurmontables lors de leurs échanges avec les institutions publiques avec le risque de se retrouver dans un « placard administratif »[406] et de ne plus pouvoir en sortir.

            Par un décret[407] du 18 septembre 2019, les lignes de la procédure relative au changement de la mention du sexe à l’état civil ont été modifiées. Dans une perspective procédurale, selon l’article 1055-5 du Code de procédure civile disposant que « la demande de modification de la mention du sexe et, le cas échéant, des prénoms, dans les actes de l’état civil, est portée devant le Tribunal judiciaire dans le ressort duquel soit la personne intéressée demeure, soit son acte de naissance a été dressée ou transcrit »[408]. Le Tribunal judiciaire remplace le Tribunal de grande instance depuis le 1er janvier 2020 suite à la modification de l’organisation judiciaire. C’est plutôt un changement de sémantique car le contentieux de l’état civil et de la famille n’a pas été éclaté entre d’autres juridictions. Cependant, l’article 1055-5 du Code de procédure civile précise pour le second cas qu’il développe que « sont toutefois seuls compétents : la juridiction du lieu d’établissement du service central d’état civil du ministère des Affaires étrangères, pour les actes détenus par ce service ; le tribunal judiciaire de Paris, pour les pièces tenant lieu d’acte d’état civil à un réfugié, un apatride ou un bénéficiaire de la protection subsidiaire »[409]. De plus, selon les articles 1055-6 à 1055-8, la demande doit être adressée au greffe et cela relève de la matière gracieuse avec la possibilité de ne pas recourir à un avocat (même si cela est vivement conseillé). La demande de changement de sexe et (ou) des prénoms sera instruite en chambre du conseil (non publique) après un avis du ministère public qui possèdera toujours des voies de recours. De plus, les décisions seront rendues sans la présence du public. Cela est compréhensible en raison du caractère personnel, voir intime de la demande. En outre, la fin de la procédure demande de mentionner les deux temps avec le changement des prénoms et de la mention du sexe sur les actes de l’état civil. Pour les premiers, l’article 1055-9 du Code de procédure civile disposant que « le tribunal ordonne la modification des prénoms dans les actes de l’état civil des conjoints, et, le cas échéant, des enfants, après avoir constaté le consentement des intéressés ou de leurs représentants légaux »[410]. Pour le second, l’article 61-6 du Code civil dispose que « le tribunal constate que le demandeur satisfait aux conditions fixées à l’article 61-5 et ordonne, la modification de la mention relative au sexe (..) dans les actes de l’état civil »[411]. Cette décision sera définitive et sera également accompagnée des nouveaux documents.

            Ainsi, au terme de cette procédure, souvent éprouvante pour les personnes transgenres souhaitant changer de sexe, ce parcours, ce terminera par la décision de modification de la mention du sexe dans les actes de l’état civil (C).

C : La décision de modification de la mention du sexe dans les actes de l’état civil

Selon l’article 61-7 du Code civil disposant que « la mention de la décision de modification du sexe et, le cas échéant, des prénoms, est portée en marge de l’acte de naissance de l’intéressé, à la requête du procureur de la République, dans les quinze jours suivant la date à laquelle cette décision est passée en force de chose jugée »[412]. Cette décision est une étape cruciale dans un processus de transition complet pour une personne transgenre dans le sens où désormais, aux yeux de l’Etat, elle est considérée comme appartenant au sexe qu’elle a toujours ressenti.

En effet, en accordant le changement de la mention du sexe à l’état civil, le juge ne rend pas une simple décision. C’est LA décision pour une personne transgenre qui est à placer au même niveau que la première ordonnance pour recevoir des hormones pour démarrer une transition ou une métamorphose vers l’autre sexe. L’aspect juridique est désormais réglé mais il ne faut pas sous-estimer le parcours qu’il reste à faire auprès des institutions et administrations publiques afin d’apporter les corrections sur les documents d’identité qu’elles détiennent. De plus, ce n’est pas la fin mais le commencement d’une nouvelle vie à partir de son ancien corps modifié ou non. À titre légitime, il n’y aura jamais de fin sociale à une transition ou à une métamorphose car, malgré les effets puissants des hormones, la personne transgenre sera obligée d’en prendre « jusqu’au cercueil »[413] pour conforter son apparence physique en adéquation avec son comportement social.

Néanmoins, pour Colette Chiland, une modification acceptée du sexe à l’état civil ne va pas résoudre tous les problèmes que subissent au quotidien les personnes transgenres en raison parfois d’un « écart entre leur apparence et leurs papiers d’identité »[414]. De plus, la diversité des approches du mouvement transgenre ne permet pas de fabriquer un seul schéma pour toutes les personnes ayant accompli cette procédure. Pour Françoise Sironi c’est un moment « véritablement libératoire »[415] au même titre que la prise d’hormones mais cela traduit aussi la question de l’ancienne vie que l’on menait mais quitter « la forme d’avant cela n’implique pas obligatoirement de renoncer à tous les investissements passés »[416]. Cela reste un choix aux mains de la personne transgenre en faisant soit d’une part, « table rase »[417] d’un passé douloureux ou d’autre part, acquiescer un changement qui n’a pas de précédant au cours d’une vie (mis à part la naissance) et s’en servir pour se projeter de nouveau dans la société.

Ainsi, le changement de la mention du sexe à l’état civil laisse une grande place à l’appréciation du juge (Paragraphe 2) avec la prise en compte du consentement libre et éclairé du demandeur (A) lors de la procédure devant le Tribunal judiciaire (B) et d’une décision de modification (C) ayant une grande valeur pour la personne transgenre qui a entrepris ce parcours. Néanmoins, en plus du bouleversement que peut représenter cette décision pour la personne, le changement d’état civil va provoquer de lourdes conséquences juridiques (Paragraphe 3) notamment au niveau familial.

  • 3 : Un changement d’état civil aux lourdes conséquences juridiques

            Une fois la mention du sexe changée, la personne transgenre peut devenir aux yeux de tous ce qu’elle a toujours été. Sur l’aspect administratif le chemin est encore long, la personne va devoir entreprendre des démarches auprès des organismes de sécurité sociale et de son employeur. Néanmoins, les conservatismes qui frappent les aspects familiaux et sociaux sont toujours là. Pour Soline Laurent, malgré un changement de sexe, les regards de certaines personnes, dont celui de l’Etat, ne peuvent pas totalement changer car « l’identité de la personne disparaît totalement derrière sa part trans, on ne considère plus la personne, on considère la-e trans. Socialement, c’est quelque chose de terrible »[418]. Le changement de la mention du sexe sur l’acte de l’état civil est l’une des opérations les plus lourdes juridiquement car elle a des conséquences incalculables pour le quotidien de la personne. Malgré la réforme apportée par la loi[419] de 2016,  les complications vont s’enchainer pour la personne transgenre notamment lorsqu’elle souhaitera adopter un enfant, ou se pacser ou se marier avec la personne qu’elle aime.

            Les lourdes conséquences juridiques du changement d’état civil sont sans aucun doute celles qui vont impacter la famille et plus largement la parentalité. En ce sens, le paradigme transgenre va ici remettre en question les bases traditionnelles de la famille hétéronormée avec la notion de « transparentalité »[420] qui a fait l’objet d’une étude[421] menée par le Docteur en Psychologie clinique et psychanalyse Jean-Baptiste Marchand. Selon lui, le terme « transparentalité correspond au terme servant à désigner une situation familiale dans laquelle au moins un des parents a réalisé (ou est en train de réaliser) une transition d’un sexe (ou d’un genre) vers un autre, c’est-à-dire une situation familiale dans laquelle au moins un des parents est transsexuel ou transgenre »[422]. La simplicité apparente de cette notion est à relativiser. En effet, cette dernière entretient des liens avec les questions de procréation et d’adoption qui compliquent sa lecture car on doit parler de « transparentalités au pluriel plutôt qu’au singulier »[423].

En France, les questions de transparentalités sont « réduites et limitées, voire circonscrites »[424] aux débats rattachés à l’homoparentalité en raison de « similitudes »[425]. Depuis la loi[426] de 2013 qui a enfin permis aux personnes de même sexe d’adopter, cela a relancé « le débat de l’ouverture de nouveaux moyens aux couples homosexuels dont un membre a changé de sexe ou de genre »[427]. Il y a une question sous-jacente et éminemment politique liée au mouvement transgenre car elle est contestée par les mouvements de type La Manif pour tous[428]. En effet, c’est de savoir si les personnes transgenres ont « la capacité de s’inscrire ou à rester inscrites dans un système de parenté »[429]. Dans un arrêt[430] de 2010, la Cour Européenne des Droits de l’Homme (CEDH) a pu considérer que « la réduction du droit de temps de visite du parent transsexuel suite à un divorce n’est pas contraire aux articles 8 et 14 de la convention européenne des droits de l’homme »[431]. En effet, selon la juridiction européenne, « la condition transsexuelle pouvait justifier des restrictions à l’exercice du droit de visite »[432] car «  l’instabilité émotionnelle du transsexuel, suite à son changement de sexe, est susceptible de perturber l’intégrité physique et le développement de la personnalité du mineur »[433].  Il aurait été judicieux ici d’envisager si la personnalité et le développement normal d’un enfant peut s’accomplir en le privant de rencontrer l’un de ses parents.

Le désir de devenir parent est infiniment corrélé à la nature humaine mais les personnes transgenres vont venir troubler le schéma en place en raison du fait que « si on met de côté celles qui avaient eu un ou plusieurs enfants avant leur transition, seules les demandes des personnes transsexuelles qui avaient effectué l’intégralité de leur transformation, changé totalement de sexe et obtenu le changement de sexe de leur l’état civil et qui, suite à celle-ci, formaient un couple dit hétérosexuel étaient prises en considération (…) avec soit une demande d’adoption pour les (…) MtF, soit l’accompagnement de leur partenaire femme (biologique) dans une demande d’insémination artificielle avec don de sperme pour les FtM »[434]. En France, la loi de 2016[435] a pu apporter des correctifs sur le plan familial que ce soit pour le passé ou l’avenir d’une personne transgenre souhaitant devenir parent.

Ainsi, il sera observé dans un premier temps, de la préservation du passé familial (A) et dans un second temps, de l’incertitude de l’avenir familial (B).

A : La préservation du passé familial

Lors du changement de la mention du sexe à l’état civil, la personne transgenre va voir son passé familial préservé (A) avec d’une part, au niveau du mariage (1) et, d’autre part, sur les liens de filiation établis avant le changement (2).

1 : Le mariage conclu avant le changement de sexe

Avant la loi[436] de 2013, la situation était très différente pour les personnes transgenres car la jurisprudence civile n’était pas favorable à une reconnaissance de droits. Le transsexualisme était alors considéré comme une maladie et pouvait être une cause de divorce. L’article 143 du Code civil dispose que « le mariage est contracté par deux personnes de sexe différent ou de même sexe »[437]. Ce dernier met fin à la condition obligatoire de la différence de sexe pour qu’un mariage soit valide. La loi[438] de 2013 a eu ici une influence essentielle pour le mouvement transgenre car elle permet une modification du sexe, entendu ici comme juridique, de la précédente union. Cela a mis fin à des jurisprudences parfois sévères avant son entrée en vigueur. L’exemple d’un jugement[439] du Tribunal de Grande Instance de Brest qui a pu considérer qu’un « époux changeant de sexe au cours de la vie conjugale ne peut obtenir la modification de son état civil tout en restant marié car cela reviendrait à créer un mariage homosexuel prohibé par la loi française »[440]. Néanmoins, les juges ont rappelé la possibilité aux requérants de se tourner vers le Pacte Civil de Solidarité (PACS). De plus, la Cour d’appel de Nîmes a pu considérer que durant le mariage « l’acquisition du sexe féminin par le mari, à la suite d’une opération chirurgicale, oblige au prononcé du divorce à ses torts exclusifs »[441]. Dans cette même optique, la Cour d’appel d’Orléans a pu elle aussi considérer que « l’attitude tendancieuse du mari ayant des relations extra-conjugales homosexuelles et une tendance au travestissement constitue un motif de divorce pour faute »[442]. Avec le regard d’aujourd’hui, il n’apparaît pas impertinent que ces juridictions aient eu ces positions car elles n’ont fait qu’appliquer les textes et jurisprudences en vigueur à cette époque. Avec l’arrivée de la loi[443] de 2013, cela permet de résoudre un certain nombre de difficultés dans la préservation du passé familial car le mariage peut être désormais conservé et les cas de fautes imputables aux époux ayant changé de sexe au cours de l’union à l’exception de celles prévues par l’article 242 du Code civil

 Ainsi, il sera traité dans un second temps des liens de filiations établis avant le changement de sexe (2).

2 : Les liens de filiation établis avant le changement de sexe

Selon l’article 61-8 du Code civil disposant que « la modification de la mention du sexe dans les actes de l’état civil est sans effet sur les obligations contractées à l’égard des tiers ni sur les filiations établies avant cette modification »[444]. Il n’y a pas d’effet rétroactif de la décision de modification de la mention du sexe pour la personne transgenre. Il s’agit ici d’une reprise d’une interprétation jurisprudentielle initiée par la Cour d’appel de Paris qui a affirmé que « la décision ordonnant la modification de la mention du sexe à l’état civil n’a d’effet que pour l’avenir et ne remet pas en cause les énonciations de l’acte de naissance de l’enfant de l’intéressé »[445]. Par conséquent, il est important d’affirmer que les liens de filiations ne seront jamais remis en question.

Les liens de filiations établis avant le changement de sexe d’un des parents va bousculer le paradigme transgenre. En effet, c’est une situation dont la complexité ne cesse de s’élever car il peut apparaître difficile de considérer qu’une « personne MtF ou FtM »[446] puisse conserver son sexe de naissance avec ses enfants alors qu’aux yeux de l’Etat ou des tiers, il est devenu un membre indiscutable du sexe revendiqué. On peut donc se demander si dans une certaine mesure cette situation peut bousculer l’éducation ou l’apprentissage de leurs enfants. En France, pour Colette Chiland, cette situation va parfois conduire le ou la conjoint(e) de la personne transgenre (qui en tant que tel ne l’est plus) à « interdire à son conjoint transformé tout accès à l’enfant »[447]. De plus, lors du début des relations amoureuses de l’adolescent, ce dernier peut être « dans l’embarras de présenter deux mères et pas de père [et inversement] »[448]. Néanmoins, au même titre que les enfants de couples homosexuels, ils risquent de subir des « préjugés sociaux »[449]. Outre Atlantique, le psychiatre et avocat Richard Green, spécialiste mondialement reconnu des troubles de l’identité de genre, a dans un article[450] minimisé les difficultés réelles rencontrées par les enfants de personnes transgenres. Selon lui, son étude menée en 1998 démontre que le développement de l’identité sexuée des enfants est « conforme à leur sexe d’assignation et hétérosexuel »[451]. Il n’y a donc pas d’influence qui pourrait être considérée comme néfaste pour le développement des enfants. Pour Jean-Baptiste Marchand, les études menées ont permis de montrer que les enfants « s’adaptent bien à la transsexualité d’un de leurs parents d’autant plus lorsqu’ils sont jeunes »[452].

Ainsi, la loi[453] de 2013 permet de préserver le passé familial (A) des personnes ayant effectuées un changement de sexe à l’état civil durant le mariage  (1) et sur la continuité des liens de filiations (2). Néanmoins, ce changement a également des conséquences incertaines sur l’avenir familial (B) qu’il convient d’étudier.

B : L’incertitude de l’avenir familial

            Le changement de la mention du sexe à l’état civil permet de dévoiler des incertitudes sur l’avenir familial (B) de la personne ayant entrepris cette procédure juridique sur le plan du mariage (1) mais surtout sur les liens de filiation établis après le changement de sexe (2).

1 : Le mariage

Depuis une décision[454] du Conseil constitutionnel, la liberté de se marier est constitutionnellement garantie au sens où cette dernière est une « composante de la liberté personnelle protégée par les articles 2 et 4 de la Déclaration de 1789 »[455]. Après la modification de la mention du sexe à l’état civil, la personne transgenre peut donc se marier avec qui elle le souhaite. Cette personne peut être du sexe opposé ou depuis la loi[456] de 2013, une personne de même sexe.

Depuis un arrêt[457] de la Cour Européenne des Droits de l’Homme (CEDH) de 2002, « la non-concordance des facteurs biologiques chez un transsexuel opéré ne peut plus constituer un motif suffisant pour justifier le refus de reconnaître juridiquement le changement de sexe de l’intéressé »[458]. De plus, la CEDH a considéré que « le fait que le droit national retienne aux fins du mariage le sexe enregistré à la naissance constitue en l’espèce une limitation portant atteinte à la substance même du droit de se marier »[459]. Dans la même optique, la Cour de Justice de l’Union Européenne (CJUE) s’est également prononcée sur les rapports entre le mariage et le transsexualisme dans une décision[460] en 2004 où elle a considéré que « l’exclusion d’un partenaire transsexuel du bénéfice d’une pension de réversion dont l’octroi est limité au conjoint survivant est une discrimination fondée sur le sexe »[461]. En outre, cela permet de mettre en avant qu’il peut être considéré comme discriminatoire pour une législation qui a pour seul et unique but d’empêcher ou de rendre impossible le mariage d’une personne ayant changé juridiquement de sexe car cela va le priver indéniablement de l’ensemble des droits reconnus aux conjoints (filiation, autorité parentale, pension de réversion).

Ainsi, il sera traité dans un second temps des liens de filiation établis après le changement de sexe (2).

2 : Les liens de filiation établis après le changement de sexe

L’idée générale qui est renvoyée par l’article 343 du Code civil est qu’une personne transgenre, seule, mariée ou pacsée, a la possibilité d’adopter un enfant. La pratique va démontrer que le cadre théorique reste l’idéal dans le sens où les conditions d’adoption sévères et les procédures d’enquêtes sont draconiennes et l’entreprise à mener pour pouvoir adopter est difficile.

L’optique de la Procréation Médicale Assistée (PMA) est intéressante. En effet, au même titre qu’un couple hétérosexuel ou homosexuel, la personne transgenre et sa ou son conjoint(e) peuvent avoir recours à cette méthode de procréation si et seulement si un des membres du couple est une femme et peut donc porter l’enfant. Dans le passé, l’exemple d’un arrêt[462] en 2002 de la Cour d’appel d’Aix-en-Provence qui a annulé la reconnaissance qui avait été faite par un parent ayant changé de sexe à la suite d’une PMA. Aujourd’hui, l’article 311-20 du Code civil a interdit la contestation de filiation d’un enfant issu d’une PMA ce qui permet de sécuriser la reconnaissance des liens de filiation.

Pour Jean-Baptiste Marchand, la loi[463] de 2013 a « relancé le débat de l’ouverture de nouveaux moyens aux couples dont un membre a changé de sexe »[464]. Les transparentalités doivent être ici analysées de plusieurs manières. En effet, il y a deux cas avec d’une part, « la transparentalité transsexuelle où le sujet devient stérile compte tenu de l’ablation des organes génitaux »[465] et, d’autre part, « la transparentalité transgenre où le sujet n’est pas nécessairement rendu stérile par sa transformation partielle »[466]. Toute la difficulté qui est rattachée à ces notions, sans oublier l’évolution sémantique qui abandonne peu à peu le terme de personne transsexuelle, est de concevoir la place des parents face au modèle de la famille hétérosexuelle cisgenre tout en prenant en compte l’intérêt supérieur de l’enfant. En effet, pour Jean-Baptiste Marchand, une « personne transgenre MtF ayant conservé ses organes génitaux masculins peut avoir des enfants avec une femme biologique »[467] et constituera un « couple transparental lesbien »[468]. À l’inverse, une « personne transgenre FtM n’ayant pas subi d’hystérectomie et d’ovariectomie peut avoir des enfants avec un homme biologique »[469] et constituera un « couple transparental transgenre gay »[470]. Enfin, il y a l’hypothèse où un « couple formé par deux personnes transgenres de sexe biologique différent et donc d’appartenance hétéronormée (s’ils ont tous deux conservé leur organes génitaux) peut aussi avoir naturellement des enfants »[471]. De plus, pour Martine Gross, sociologue et ingénieure de recherche en sciences sociales au Centre National de la Recherche Scientifique (CNRS),  les personnalités infinies des personnes transgenres conjuguées par les transparentalités permettent de dévoiler qu’il est possible que « des hommes sont enceints et mettent leurs enfants au monde (…) des femmes conçoivent avec leur sperme, (…) des femmes sont pères et des hommes sont mères »[472]. Le paradigme de la famille hétérosexuelle et parfaitement cisgenre est remis en question et apparaît aujourd’hui être une simple configuration du modèle parental et non comme une normalité absolue.

Au final, le changement d’état civil a de lourdes conséquences juridiques (Paragraphe 3) avec d’une part, un passé familial qui reste préservé (A) mais dont le futur est grevé d’incertitudes (B) que devront affronter les personnes transgenres souhaitant se lancer dans l’aventure de la famille. Les transparentalités sont en train de « s’affirmer et d’apparaître au grand jour »[473] en bousculant les lignes de la famille dite traditionnelle. La réforme apportée par la loi[474] de 2016 et tant souhaitée par les milieux militants transgenres a également redistribué les cartes auprès des acteurs du parcours de transition ou de métamorphose que doit suivre (ou subir) la personne transgenre. Dans cette perspective, il sera observé dans un troisième temps, d’une procédure suscitant de larges inquiétudes (Section 3).

Section 3 : Une procédure suscitant de larges inquiétudes

            Pour les militant(e)s du mouvement transgenre, la loi[475] de 2016 a apporté une réelle réforme qui était souhaitée depuis longtemps avec l’abandon des exigences médicales et en consacrant le comportement social avec les 3 composantes vues précédemment pour pouvoir changer la mention de son sexe à l’état civil. Néanmoins, malgré les accueils favorables, les dispositions consacrées au changement juridique de sexe ont suscité des inquiétudes pour une partie de la doctrine française et même des attitudes de rejet à propos de certaines dispositions.

            Les principales inquiétudes sont issues de potentielles lacunes de la loi[476] de 2016 notamment sur l’atteinte consentie au principe d’indisponibilité de l’état civil (Paragraphe 1), sur l’instrumentalisation des questions médicales (Paragraphe 2) puis sur la préservation contestable de la binarité des sexes avec le refus de la création d’un sexe neutre (Paragraphe 3) et enfin sur la prise en compte insuffisante de l’accompagnement psychologique lors du parcours de changement de sexe (Paragraphe 4).

  • 1 : Une atteinte consentie au principe d’indisponibilité de l’état civil

Dans son avis[477] de 2013, la Commission Nationale Consultative des Droits de l’Homme (CNCDH) a pu proposer une « déjudiciarisation totale de la procédure »[478] qui permettrait à une personne de changer la mention de son sexe à l’état civil par une « simple déclaration faite devant un officier d’état civil »[479]. Cependant, cette possibilité ne sera pas reprise par la loi[480] de 2016 préférant conserver un passage obligatoire devant le Tribunal judiciaire. En effet, la CNCDH n’était pas très enjouée à proposer une mise en place effective de cette possibilité dans le sens où elle a pondéré sa proposition avec d’une part, que « la mention du sexe demeure, dans notre droit, un élément essentiel de l’identification des personnes »[481] et, d’autre part, que « l’état civil revêt une forte importance symbolique dans la tradition républicaine française »[482]. La loi[483] de 2016 a permis de trouver une sorte de compromis en permettant une modification de l’une des mentions, certes essentielle, de l’état civil sous le couvert d’une procédure rigoureuse à suivre. Il s’agit d’une une atteinte consentie car discutée et approuvée par le législateur.

L’atteinte réalisée par la loi[484] de 2016 au principe d’indisponibilité de l’état civil permet de révéler certaines faiblesses dans la procédure nouvellement instituée. En effet, Sophie Paricard a relevé une faille majeure notamment celle de « l’absence de limites relatives au nombre de changements de sexe »[485]. Pour l’universitaire, « l’abandon de l’exigence de traitements induisant des modifications difficilement réversibles autorisent dès lors ces personnes à faire des allers-retours d’un sexe à l’autre, en fonction de leur ressenti ponctuel »[486]. Il s’agit d’une appréciation qui peut être légitime car les dispositions de la loi[487] de 2016 ne semblent pas avoir pris en compte cette éventualité. C’est le risque d’abus dont cette procédure est susceptible de faire l’objet car le « sexe n’aurait donc plus vocation à s’inscrire dans la durée mais à évoluer au gré des flottements de leur sentiment d’identité »[488]. Face à cette lacune, il faudra s’en remettre à l’appréciation des juges car il y a le risque non négligeable que la libéralisation apportée par la loi[489] de 2016 soit affaiblie par la construction « d’une jurisprudence à tendance restrictive »[490]. Pour Sophie Paricard, la simple lecture des dispositions permet de mettre en évidence que les « magistrats [pourront] autoriser plusieurs changements de sexe successifs ou bien exiger, en se fondant sur le principe de l’indisponibilité de l’état civil, des qualités propres à la possession d’état »[491] en exigeant une « continuité des faits établis permettant (…) d’ancrer dans une certaine mesure la mention du sexe dans le temps »[492]. Dans cette optique, si une personne transgenre souhaite entreprendre une procédure de changement de la mention du sexe à l’état civil, elle devra redoubler d’effort pour prouver sa transidentité alors que cette dernière est inhérente à sa personnalité. D’une manière légitime, on peut se demander si cette vision ne serait pas trop archaïque car toute loi n’est pas parfaite et comporte nécessairement des failles. C’est donc au juge d’interpréter le texte de loi dans une vision pragmatique en fonction des dossiers. Dans une autre perspective, la mise en garde de Sophie Paricard est à propos des « flottements »[493] relatifs à l’identité de genre que la personne peut adopter dans sa vie quotidienne. Cela est une référence aux personnes se définissant comme queer[494]. Pour Maud-Yeuse Thomas, c’est la notion d’identité abordée ici avec un nouveau paradigme dans le sens où « il est devenu elle (ou inversement) »[495]. C’est cette « permutation non-fixiste théorisée par les queers en une identité labile et multiple qui inquiète et fait fantasmer »[496]. L’argument de l’atteinte absolue au principe de l’indisponibilité de l’état civil ne tient pas car il s’agit d’une modification qui ne remet pas en cause l’état civil dans sa globalité. De plus, cette perspective permet de mettre en avant une « obsession du contrôle et de la maîtrise »[497] de l’identité des personnes transgenres avec le maintien par l’intermédiaire de ce principe, de « l’équation cisgenre (…) pour identité stable et saine »[498].

L’atteinte au principe de l’indisponibilité est, encore une fois consentie légalement, mais elle était avant tout nécessaire. Pour Camille Prins, la « question de la dangerosité d’une facilitation de la procédure (…) et ses effets de mode me semblent être de faux débats »[499]. Selon elle, « vivre la transsexualité aujourd’hui est un parcours du combattant, administratif, mais aussi social, que peu de personne sont prêtes à traverser si ce n’est pour de bonnes raisons »[500]. Les dangerosités relevées par les personnes, peu convaincues par la réforme apportée par la loi[501] de 2016, sont de « faux arguments et un faux danger freinant l’évolution de cette procédure »[502]. En ce sens, peut être que la société française n’est pas encore prête à accepter une déjudiciarisation totale. Dans une hypothèse contraire, si le changement d’état civil est impossible ou très difficile à obtenir alors que les opérations de réassignation chirurgicale ou les traitements hormonaux sont permis dans une société, ce serait une « absurdité »[503] pour Colette Chiland car « on obligerait une personne à vivre dans un no man’s land avec des papiers d’identité d’un sexe et l’apparence de l’autre sexe, non pas dans ses seuls vêtements, mais dans son corps »[504].

Ainsi, l’atteinte consentie au principe de l’indisponibilité de l’état civil (Paragraphe 1) est l’une des conséquences de la libéralisation de la procédure de changement de la mention du sexe à l’état civil. Il sera traité de la seconde conséquence, qui est beaucoup plus épineuse que la précédente, celle de l’instrumentalisation des questions médicales (Paragraphe 2).

  • 2 : Une instrumentalisation des questions médicales

            Dans l’étude du mouvement transgenre, les questions médicales reviennent sans cesse et sont largement contestées par les personnes transgenres. Dans le passé, la matière médicale était essentiellement abordée sous l’angle psychiatrique ou dans la recherche d’un traitement contre les transidentités. Dans une optique plus contemporaine, en France, les questions médicales ont été sorties du champ juridique notamment dans la procédure du changement de la mention du sexe à l’état civil. De plus, ce sont les questions relevant de la réassignation hormonale et (ou) chirurgicale qui sont le plus souvent étudiées à la marge car elles entretiennent des rapports interdépendants avec la procédure de changement de la mention du sexe à l’état civil.

            La « question corporelle (…) rappelle l’émancipation »[505] des personnes transgenres face aux dérives de la médecine et aux problématiques qui y sont étroitement liées. La portée ou le ressenti qu’a la personne transgenre face à ces questions ne peuvent pas être considérées comme des généralités car chaque profil est différent et unique. Pour Emmanuelle Beaubatie, l’émancipation peut « passer par la médicalisation et le changement d’état civil »[506] dont l’importance sera différente en fonction de la personne. En effet, la perspective de réaliser par des tiers des changements irréversibles ou radicaux sur son corps n’a pas la même signification pour toutes les personnes transgenres MtF et FtM. Dans son ouvrage[507], Judith Butler va procéder à un véritable travail de fond en pesant « le pour et contre de la dépsychiatrisation réclamée par un mouvement qu’elle a contribué à former »[508]. De plus, pour Judith Butler, le fait de « défendre en s’opposant au dispositif psychiatrique peut avoir une visée émancipatoire »[509]. Cependant, il y a deux problèmes inhérents au mouvement transgenre qui amènent à repenser indéniablement les processus de transition ou de métamorphose. À cette fin, Judith Butler envisage d’une part, une « autonomie financière avec le remboursement des soins (qui) permet aux plus précaires de faire leur transition »[510] et, d’autre part, une « autonomie symbolique avec la dépathologisation des trans »[511]. Pour Emmanuelle Beaubatie, le mouvement transgenre est un l’un des seuls courants de la communauté LGBTQIA+ à révéler une grande « complexité des enjeux sanitaires et sociaux »[512].

            L’instrumentalisation des questions médicales est l’un des principaux reproches qui est fait par le mouvement militant transgenre notamment à l’égard de la sulfureuse Société Française d’Etudes et de prise en charge de la Transidentité appelée couramment SOFECT dont la très controversée Professeure Colette Chiland fût Présidente d’honneur. Pour cette dernière, une partie des recherches a porté sur les transidentités avec une ligne directrice qui appelle à ne pas se faire de fausses illusions sur les aspects médicaux et sociaux liés à un changement de sexe. En effet, Colette Chiland fait part d’un entretien qu’elle a eu avec une personne transgenre FtM qui « avait l’allure d’une jeune fille sans trace de masculinité et disait l’intensité de son attrait pour les femmes. Elle avait entendu à la télé qu’aujourd’hui on pouvait transformer une femme en homme, elle voulait être un homme et avoir un pénis. Elle s’est effondrée dans une cataracte de sanglots quand je lui ai dit [Colette Chiland] qu’on ne changeait que les apparences et qu’elle n’aurait jamais un pénis fonctionnant comme celui d’un homme né homme. Je suis devenue [Colette Chiland] pour elle l’ennemie numéro un. Sa mère [de la personne transgenre FtM] qui l’accompagnait partageait les illusions et m’a rejeté [Colette Chiland] aussi intensément. (…) Cinq ans plus tard, la fille [personne FtM] est revenue me voir [Colette Chiland] pour demander une psychothérapie parce que j’étais [Colette Chiland] la seule personne qui lui avait dit la vérité… »[513]. L’interprétation réalisée par Colette Chiland reviendrait à penser que changer de sexe est un non sens car la personne souhaitant entreprendre cette démarche, à la fois juridique et médicale, pour mettre en adéquation son genre à son sexe intiment ressenti ne pourra jamais ressembler parfaitement à une personne biologique assignée dans le sexe désiré. Si certaines personnes, plutôt très rares en pratique, trouvent cela légitime il est possible de regretter le manque d’indépendance. Dans l’exemple précédemment mentionné, la praticienne, en l’espèce Colette Chiland, prend un parti pris qui place la personne transgenre en difficulté. Elle apparaît alors comme une menace aux yeux de la personne, certainement venue demander de l’aide ou un accompagnement. Cette attitude a été depuis longtemps dénoncée par Françoise Sironi qui considère cela comme un « bras de fer pour faire admettre au patient sa folie lucide : une conviction délirante d’appartenir à l’autre genre »[514]. Il s’agit donc une « hypocrisie professionnelle »[515] au sens où « il y a une véritable hostilité à l’égard des patients, liée à un rejet moral de même nature que le racisme, et qui porte aujourd’hui un nom : la transphobie »[516]. Pour Françoise Sironi, le « lien thérapeutique va devenir un lien paradoxal, mortifère, toxique et destructeur pour les « patients », car il se construit sur de la haine et plus probablement encore sur de la sidération ou de la fascination répulsive »[517]. En outre, l’universitaire n’hésite pas alors à estimer qu’il serait « du meilleur aloi que les thérapeutes (…) soient dénoncés par leur patients afin d’arrêter la démolition psychologique dont ces derniers sont l’objet »[518]. C’est une injonction lancée en direction des praticiens médicaux affiliés à la SOFECT où ces derniers ont un « rôle de gardien de la morale et de l’ordre du genre (…) par leurs productions écrites, leur prise de parole, et leur pratique thérapeutique »[519].

            Dans cette perspective, il est légitime d’évoquer les déboires et les dérives commises par la SOFECT dénoncées, certes au niveau thérapeutique et théorique par Françoise Sironi, mais aussi par les membres de la communauté transgenre. En effet, pour Laura Badler, les personnes affiliées à la SOFECT sont des « spécialistes autoproclamés de la transidentité avec une Présidente d’honneur [Colette Chiliand] complètement transphobe »[520]. Laura Badler pointe surtout les nombreuses pratiques défavorables de la SOFECT à l’encontre des personnes transgenres notamment celles qui imposent d’une part, « deux ans de suivi psychiatrique imposé avec une échelle de féminité à respecter »[521] et, d’autre part, des « questions intrusives comme savoir comment on se sent durant une pénétration (…) des questions qui ne se posent pas à une personne transgenre »[522]. Ces pratiques font penser aux « thérapies de forces qui sont barbares »[523] dans le sens où une personne transgenre « n’est pas considérée pour ce qu’elle est »[524] c’est-à-dire avant tout un être humain et pas une maladie à éradiquer. Le plus intéressant ici est que Laura Badler livre son expérience quant à sa transition MtF durant laquelle elle a pu constater que la « SOFECT a le culot de brouiller les parcours privés en faisant pression sur les médecins indépendants »[525] en évoquant que son « endocrinologue (…) a été intimidé »[526].

            Ainsi, les questions médicales, qui ont ou qui n’ont pas à être imposées aux personnes transgenres sont instrumentalisées par différents acteurs dont certains cherchent à obtenir un leadership dans la construction ou la prise en charge des transidentités. Dans une autre mesure, la réforme apportée par la loi[527] de 2016 n’a pas mis fin à la binarité de sexes en refusant notamment la création d’un sexe neutre (Paragraphe 3) qui fait pourtant partie des revendications des militant(e)s LGBTQIA+.

  • 3 : Une préservation contestable de la binarité des sexes : le refus de la création d’un sexe neutre

            Au sein du mouvement LGBT, la binarité des sexes fait partie de l’un des nombreux sujets de contestations et de revendications. Ce refus d’un monde binaire est l’un des éléments qui fédère le plus les personnes intersexes mais également une partie des personnes transgenres. En effet, dans la prise de conscience de sa transidentité, une personne transgenre peut se définir hors des sentiers battus de la binarité en s’affirmant d’abord comme une personne et ensuite comme une femme ou un homme.

La sociologue Laure Bereni a pu estimer que « le mouvement transgenre (…) a révolutionné la théorie et les stratégies politiques des mouvements sociaux liés au genre »[528]. Selon elle, « qu’il s’agisse d’un transsexuel décidant de « changer de sexe » par le moyen d’une opération chirurgicale, d’une personne intersexe à l’anatomie génitale indéterminée, ou encore d’un individu ne se reconnaissant ni comme homme ni comme femme, l’identité trans remet elle aussi en question le système de bicatégorisation du genre »[529]. La possibilité de reconnaitre un sexe neutre ou d’abolir la binarité des sexes peut être une solution juridique et sociale car un certain nombre de personne ne se reconnaissent pas dans le schéma imposé. Néanmoins, cette perspective pourrait amener au sein de la sphère politique de nouvelles problématiques. Pour Laure Bereni, les « hypothèses d’un troisième sexe, d’un ou plusieurs sexes indéterminés, ou encore de l’absence de sexe ou de la disparition du sexe comme catégorie classificatoire contribuent à troubler le genre et représentent des revendications politiques déstabilisantes dans les sociétés où elles sont posées »[530]. Ces possibilités n’ont pas été reprises par la loi[531] de 2016.

D’une manière légitime, on peut se demander si la société française est prête à abandonner le modèle issu de la binarité des sexes notamment en mettant en place une stratégie de paliers en reconnaissant dans un premier temps le sexe neutre. Malheureusement, la Cour de cassation n’y est pas disposée. En effet, dans un arrêt[532] du 4 mai 2017, la Première chambre civile a rejeté la demande d’une personne intersexe de voir inscrire sur son état civil un sexe neutre. La motivation de la Cour de la cassation peut s’analyser au sens où « la loi française ne permet pas de faire figurer, dans les actes de l’état civil, l’indication d’un sexe autre masculin ou féminin »[533]. Par cette jurisprudence[534], la Cour de cassation a mis fin à une divergence avec les juridictions du fond, qui ont pu reconnaître un sexe neutre avant que le Parquet interjette systématiquement appel et se pourvoie en cassation. Pour Benjamin Moron-Puech, cette position des juges du Quai de l’Horloge « laisse penser qu’existe désormais une règle coutumière générale selon laquelle il n’y aurait pas, du moins dans l’ordre judiciaire, d’autres sexes que le masculin et le féminin »[535]. L’universitaire relève aussi qu’une « telle affirmation n’échappe néanmoins pas à la critique »[536] car il regrette « l’absence de toute motivation »[537]. En outre, la Cour de cassation a développé une argumentation qui a laissé songeur les militant(e)s intersexes et une partie des militant(e)s transgenres. Elle n’a pas ouvert officiellement la porte à une possible reconnaissance d’un sexe neutre ce qui aurait pu interpeller le législateur à légiférer sur cette problématique. Cependant, pour Benjamin Moron-Puech, « si le sexe intervient encore dans les règles sur la parité, la filiation, la procréation médicalement assistée, les documents d’identité ou encore certaines activités ou lieu dans lesquels les individus sont séparés selon leur sexe (prison, compétition sportive, toilettes, etc.), il a été montré que les plus importantes de ces règles peuvent être adaptées à l’existence d’un troisième sexe par un simple travail interprétatif, ne nécessitant pas d’intervention du législateur »[538]. De plus, la Cour de cassation a estimé que « la binarité des sexes est nécessaire à l’organisation sociale et juridique, dont elle constitue un élément fondateur »[539]. Pour Benjamin Moron-Puech, cette argumentation peut laisser pantois car « si l’on peut éventuellement approuver mais encore faudrait-il le démontrer via les sciences sociales »[540]. On ne peut qu’enjoindre le législateur à prendre ses responsabilités afin de mettre fin aux déboires juridiques que subissent les personnes intersexes. En outre, la perspective de reconnaissance par le législateur du sexe neutre est inéluctable pour Jean-Philippe Vauthier et François Vialla dans le sens où « seul le législateur peut permettre l’admission en droit français de la mention du sexe neutre dans les actes de l’état civil »[541]. De plus, selon les universitaires, « l’intersexuation est une réalité anatomique, biologique, sociale…, il serait peut-être temps d’en faire une réalité juridique »[542]. Ali Aguado et Ian Zdanowicz proposent quant à eux « l’annulation de la mention du sexe à l’état civil »[543] qui permettrai de mettre fin à « une source importante des discriminations »[544] que subissent les personnes intersexes et transgenres. La solution qui semblerait la plus consensuelle serait d’éviter de « faire disparaître le sexe de l’environnement juridique, mais plutôt de ne plus en faire un élément de catégorisation excluante pour ceux qui n’ont pas l’heur de rentrer dans les cases prédéfinies »[545].

La construction de la société occidentale telle que nous la connaissons aujourd’hui s’est faite par l’intermédiaire de la binarité des sexes et du cisgenrisme. En effet, pour Maud-Yeuse Thomas, le « mode cisgenre synthétise le mode le plus courant de la construction socio-identitaire sur un schéma binaire et oppositionnel : une femme féminine, un homme masculin »[546]. Pour la militante transféministe et cofondatrice de l’Observatoire Des Transidentités (ODT), « l’opposition homme/femme régule les liens, codes, relations, comme la sexualité »[547]. Face à la binarité, les comportements produits par les personnes transgenres seront différents. Elles pourront défaire les codes en créant les leurs ou alors se conformer à ceux appartenant respectivement aux deux sexes établis. Le paradigme établi par les personnes transgenres face au monde binaire va permettre de traverser « le clivage des sexualités, des comportements, des modes d’identification et de construction identitaires »[548]. La situation décrite par Maud-Yeuse Thomas permet de mettre en avant « une société binaire (L’Homme et La Femme) comme un mur »[549] mais qui, grâce aux personnes transgenres et intersexes, est en train de s’effriter lentement mais sûrement. Néanmoins, le modèle binaire reste puissant car ce dernier permet « un socle sociétal stable pour une partie de la population »[550]. Il devient donc un « instrument étatique d’un type de pensée et de société générant discrimination, inégalité et infériorisation »[551]. Dans cette perspective, Soline Laurent considère que « les personnes cis et hétéro possèdent un certain pouvoir de normativité (…) qui a tendance à marginaliser toutes les personnes, qui de part leur genre et/ou leur sexualité, n’entrent pas dans ce cadre »[552]. À propos de la transition des personnes MtF et FtM, Camille Prins remarque que « la binarité nous amène parfois à considérer cette transition comme étant woman to male ou male to woman systématiquement, or certaines personnes transgenres ne se définissent pas dans un sexe ou dans l’autre »[553]. De plus, elle relève également que « la procédure de changement de prénom et de sexe sur le registre d’état civil souffre de cette binarité »[554] car « on demande aux personnes de faire un choix qu’elle ne souhaitent pas faire »[555].

Au final, le modèle d’organisation reposant sur la binarité des sexes doit impérativement être redéfini ou définitivement renversé. Dans son ouvrage[556], la Professeure Anne Fausto-Sterling considère que les « limites séparant le féminin et le masculin semblent plus difficiles que jamais à définir »[557]. Cependant, l’universitaire rappelle « qu’il peut sembler naturel de considérer que les intersexes et les transgenres vivent à mi-chemin entre les pôles mâles et femelles, mais cela reviendrait à voir ces deux catégories, le masculin et le féminin, comme les deux extrémités d’un continuum »[558]. Pour obtenir un véritable changement des mentalités, l’abolition de la binarité des sexes doit être effectuée au terme d’un consensus de la société. À ce sujet, la Professeure Anne Fausto-Sterling ne milite pas pour un « monde couleur pastel, dans lequel l’androgynie serait reine et où les hommes et femmes seraient exactement les mêmes »[559] dans le sens où pour elle le « pastel et couleurs vives cohabitent »[560] pour reconnaître toutes les diversités d’identité de genre.

Ainsi, après avoir observé la préservation contestée de la binarité des sexes dans le refus de la création d’un sexe neutre (Paragraphe 3), il sera traité de la prise en compte insuffisante de l’accompagnement psychologique lors du parcours de changement de sexe (Paragraphe 4).

  • 4 : La prise en compte insuffisante de l’accompagnement psychologique lors du parcours de changement de sexe

            L’accompagnement psychologique lors du parcours de changement de sexe est une question hautement sensible qui donne lieu à des affrontements militants et doctrinaux importants. Dans les débats liés au vote de la loi[561] de 2016, les interrogations sur l’accompagnement psychologique notamment sur la reconnaissance de plusieurs entités capables d’assurer un suivi des personnes transgenres souhaitant entreprendre une procédure de changement de sexe à la fois juridique et médicale ont été passées sous silence. C’est regrettable car cela reste une problématique des plus importantes pour le mouvement transgenre. Le terme accompagnement est ici mis en avant à la place de traitement, de palliatif ou de remède en raison du fait que la transidentité n’a et ne sera jamais une maladie à soigner. Face aux divergences qui peuvent en découler, des opinions s’affrontent et des personnalités n’hésitent pas à faire des propositions.

            Pour Colette Chiland, dont une partie des travaux sont en lien avec cette problématique, l’accompagnement psychologique peut se traduire comme « changer ce qu’il y a la dans la tête »[562]. Selon elle, « les progrès de la chirurgie ne résoudraient pas le problème de fond »[563]. Sa proposition, très controversée, est de mettre en place une psychothérapie sous un angle particulièrement médical, ce qui, en raison du passé théorique de la transidentité considérée comme une maladie, n’a pas été accueilli très favorablement. Elle met l’accent sur un changement de sexe, qui dans un sens médical, peut être considéré comme illusoire car la personne ne ressemblera ou ne sera jamais à femme ou homme biologique à part entière. Dans cette optique, elle estime que « dans le cas du changement de sexe, on a utilisé une certaine capacité technique pour fabriquer des organes sexuels, qui n’ont pas les fonctions des organes naturels »[564]. En outre, Colette Chiland estime que « par la réassignation hormono-chirurgicale du sexe, on tente de satisfaire la demande du patient, on ne guérit pas le trouble psychique qui est le sien. La personne transsexuelle conteste qu’elle souffre d’un trouble psychique, elle ne souffre que d’une erreur de la nature qui ne lui a pas donné le corps approprié à ce qu’elle se sent être, veut être. Qu’un homme ou une femme aient un rejet total de leur sexe, on peut le comprendre. Mais qu’ils parlent de leur vrai corps à propos d’un corps mutilé, dont l’apparence n’est devenue plausible qu’à coup d’artifices, c’est d’un autre registre »[565]. Face à cette position, largement pratiquée par la SOFECT, on ne peut que déplorer l’instrumentalisation de l’aspect psychologique de la transition à une fin exclusivement médicale et psychiatrique et non comme un véritable accompagnement de la personne, qui est reste considérée comme une patiente atteinte d’une maladie incurable.

            Dans une autre perspective, l’accompagnement psychologique peut être conçu d’une autre manière grâce aux travaux de Françoise Sironi qui ont bouleversé le suivi des transidentités. Pour Françoise Sironi, « les théories et les pratiques cliniques peuvent fonctionner comme une véritable maltraitance quand elles ne sont pas capables d’accueillir, sans la trahir, l’expérience de vie du sujet »[566]. De plus, elle estime que « cette expérience de vie soit pathologique ou normale, un dispositif thérapeutique, (…), une méthodologie d’approche se doivent d’être capables d’intégrer aussi le point de vue du sujet »[567]. L’aspect primordial pour changer les pratiques thérapeutiques dans le suivi d’une personne transgenre dans le processus de la « métamorphose »[568] est de « penser avec lui, sur ce qui lui arrive, et non pas contre lui »[569]. Les propositions de Colette Chiland, pratiquées par la SOFECT, permettent de mentionner les « inoubliables blessures (…) de la part des interlocuteurs »[570] qui espéraient « venir à bout (…) ou faire disparaître la préoccupation transsexuelle chez un sujet »[571]. Par conséquent, ces « théories et pratiques inadéquates »[572] vont engendrer des « syndromes de persécution, de méfiance, d’agressivité, (…), d’autodévalorisation, des tentatives de suicide »[573]. Pour Françoise Sironi, ces « symptômes sont, à tort, attribués à une prétendue psychopathologie des sujets (…), et non à l’impact des cliniciens sur leurs patients »[574]. Le modèle d’accompagnement proposé par Françoise Sironi est novateur et prend en compte les revendications du mouvement transgenre sans pour autant sacrifier à la pertinence théorique. Ainsi, Françoise Sironi préfère parler « d’accompagnement psychologique d’un parcours de métamorphose plutôt que de psychothérapie »[575]. Cette optique est nécessaire, même vitale, car peu de personnes transgenres souhaitant entamer une procédure de changement de sexe au sens médical et juridique, se rendent compte des bouleversements que ce parcours induit. Le principe général qu’elle développe repose sur trois branches qui permettent d’englober toutes les subtilités de la transidentité. En effet, il faut donc opter avant tout pour « pas de pratique contre, ni pour mais engagée aux côtés des sujets concernés »[576] puis « pas de production de discours sans la participation effectives des personnes concernées »[577] et enfin sur « pas de discours unique sur ce qui en résulte »[578]. Durant toute la durée de cet accompagnement, la personne transgenre va se livrer à « un travail d’archéologie de soi »[579]. Cette vision de l’accompagnement psychologique a été théorisée par la psychanalyste et agrégée de philosophie Sabine Prokhoris dans le but « d’aménager un espace à l’abri duquel il soit fait droit à la possibilité pour lui d’inventer d’autres normes que celles qui lui font tort, de renouveler en somme les logiques constitutives de son système d’existence »[580]. D’une manière concrète, la personne transgenre va effectuer un « travail de désidentification avec les projections sociétales, parentales, et les anciennes formes de soi préalables »[581] pour lui permettre de vivre « cette libération (…), sans culpabilité »[582]. En effet, la culpabilité peut être considérée comme l’un des principaux ennemis de la personne transgenre dans le sens où elle va devoir « organiser son passage vers son devenir »[583]. En fait, cela est lié « à un fantasme d’outrecuidance »[584] car la personne va devoir « oser être soi, au risque de se désaffilier du groupe familial (…) »[585].

            S’intéresser à ce renouveau théorique proposé par Françoise Sironi permet de remettre la personne transgenre au centre de la pratique thérapeutique. Le thérapeute ne va pas « imposer sa vision du monde, ni son idée du bien-être et du bien-vivre »[586]. Pour l’universitaire, il s’agit d’un acteur incontournable au sens où il doit « libérer le genre (…) chez les sujets concernés »[587] en révélant qu’ils sont dotés de « richesses et des ressources qui ne pouvaient pas s’exprimer avec autant de force jusqu’alors »[588]. Ainsi, il est grand temps de permettre aux personnes transgenres de reprendre le contrôle de leur destin car elles seules peuvent l’édifier.

Conclusion

Le changement de sexe pour les personnes transgenres a débuté et va continuer à conjuguer des questions juridiques, sociétales et de passions militantes. La loi[589] de 2016 a permis de mettre fin à des obstacles injustifiés et de remodeler une procédure de changement de la mention du sexe à l’état civil au plus près des demandes des personnes transgenres souhaitant entreprendre ce parcours, en fonction de leur ressenti et de leur vécu, qui reste néanmoins difficile et lourd. Pour que la matière juridique puisse évoluer sans encombre, la société devra être la première à évoluer pour intégrer définitivement en son seing le paradigme transgenre.

            La libéralisation apportée en 2016 a fait ressurgir de nombreux débats et a dévoilé de nouvelles incertitudes non réglées à ce jour, notamment sur la jurisprudence qui risque d’être conservatrice face au changement des conditions. Le sujet du changement de sexe, pris dans sa globalité, ne permet pas de faire émerger des lignes directrices car il est situé au cœur d’une société en évolution constante. Depuis les années 2000, les sociétés humaines se heurtent à de nombreux phénomènes issus de la mondialisation comme la montée en puissance des nouveaux supports de communication qui font et défont les acquis révélant ainsi de multiples ratifications liées aux transidentités. La loi, en actant le phénomène social, sera obligée de prendre en considération ces évolutions au risque de mettre en marge ou d’exclure de la société des populations livrées à elles-mêmes. Cependant, l’évolution des mentalités sur ces questions sociétales d’importance ne doivent pas uniquement être réduites aux situations des personnes transgenres ou de la communauté LGBTQIA+ mais elles doivent servir la cause de tout le monde. Cela ne doit pas rester un point anecdotique mais un véritable sujet de société.

En le polissant socialement, il pourrait entrainer une réduction ou une fracture de la base militante en excluant les personnes transgenres travailleuses ou travailleurs du sexe[590] qui ont une place au sein du mouvement transgenre. Les artistes comme Bilal Hassani et Conchita Wurst n’ont pas hésité à mener des actions fortes et visibles pour faire bouger les lignes et les mentalités en faisant parfois plus de mal que de bien et en provoquant des polémiques, contreproductives de surcroit. Néanmoins, il faut garder à l’esprit que les paradigmes transidentitaires ont inévitablement besoin d’être observés, maniés et intégrés avec mesure et équilibre. Vouloir faire évoluer ou changer radicalement les perceptions des transidentités ne pourra pas se faire d’une manière brutale ou instantanée car cela entrainerait le risque de braquer la société dans laquelle vivent les personnes transgenres en développant notamment davantage de comportements hostiles à leur égard. L’évolution des mentalités ne se réalisera pas uniquement avec les personnes transgenres amatrices de comportements excentriques ou stéréotypés mais grâce aux personnes transgenres ne versant pas dans la caricature. Ces dernières détiennent les moyens pour transformer le rejet apparent de la société à l’égard du fait transgenre en acceptation en démontrant, par leur activité, travail, engagement et compétences qu’elles sont les égales au point de vue social des personnes cisgenres.

            Les possibilités reconnues aux personnes transgenres de pouvoir enfin exercer leurs droits et libertés ne seront jamais acquises à défaut d’une hétéronormativité dominante et néfaste. Les discriminations dont elles sont victimes restent inhérentes à notre société qui n’arrive plus à justifier le refus de déconnecter l’expression de l’identité de genre du sexe biologique assigné à la naissance. Les personnes transgenres remettent en question l’assignation sociale des modèles attribués aux femmes et aux hommes impliquant désormais de lever les restrictions familiales ou sociétales dont elles font l’objet. En ce sens, la déconstruction de ce que l’on croit connaître est essentielle pour établir un nouveau cadre sociétal qui ne repose pas uniquement sur une cisnormativité. Il est impossible de construire une théorie ou de voter une loi qui pourra prendre en compte l’ensemble des aléas formant les transidentités. Les enjeux, une fois soulevés, développent des problématiques exponentielles en raison de multitudes combinaisons qui participent à la construction d’un paradigme transgenre. Il ne s’agit pas d’opposer des vraies ou fausses personnes transgenres mais de parvenir à une unité dans la diversité pour rassembler et porter une voix transgenre sans complexe au sein du mouvement LGBTQIA+ et au-delà dans notre société.

Aujourd’hui, le débat autour des transidentités est « hypermoderne »[591] car il attire l’intérêt de certains médias de masse[592] créant certaines polémiques dans le choix de la l’approche jugée trop souvent sensationnelle[593], peu scientifique et faisant même intervenir des personnes non concernées. Malgré cela, il y a quand même l’émergence de « pointes d’espoir »[594] offrant des occasions de rendre visible les transidentités. Un contexte sociétal en pleine mutation où les questions relatives aux droits humains sont devenues « éminemment politiques »[595] vont parfois ralentir l’émergence des véritables solutions face aux « difficultés rencontrées à obtenir le changement à l’état civil »[596] et aux « casse-têtes »[597] de la vie quotidienne des personnes transgenres. Parmi les difficultés relevées, la militante transféministe Yuffy Tipoui n’hésite pas à dénoncer les travers de l’hyperféminisation et de l’hypersexualisation qui frappent les femmes transgenres considérées pour certain(e)s comme un « objet de désir »[598] notamment à travers les représentations du « porn »[599] en créant « des modèles et des idéaux de transition complètement (…) absurdes »[600] auxquels seraient censées se conformer les personnes MtF ou également FtM pour pouvoir exister et êtres reconnu(e)s socialement.

Associer les revendications politique, juridique et sociale issues du terrain militant face aux difficultés des parcours de transition ou de métamorphose, ne pourra être réalisé à la condition que les institutions publiques et politiques prennent en compte le respect des genres et des sexualités en accordant les mêmes droits et libertés à ces personnes qui n’ont pas à prouver qu’elles sont différentes car elles sont comme les autres : des citoyennes et des citoyens à part entière de la République Française. Le travail reste immense car les personnes transgenres militantes doivent impérativement repenser leurs rôles en fabriquant une image conforme à la réalité des besoins trans et non en fonction des attentes des personnes cisgenres. Elles et leurs allié(e)s le pourront en favorisant l’éducation aux transidentités, le besoin en formation du personnel médical et paramédical amené à les accompagner, dans leur parcours et en relayant les actes odieux[601] dont sont encore victimes les personnes transgenres de nos jours.

Bibliographie

I : Les ouvrages

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BERENI Laure (dir.), CHAUVIN Sébastien, JAUNAIT Alexandre, REVILLARD Anne, Introduction aux études sur le genre, éditions de Boeck, 2ème édition, 2015, pp. 43 à 49.

BENJAMIN Harry, The Transsexual Phenomenon, éditions Julian Press, 1966, 286 p.

BORNSTEIN Kate, Gender Outlaw : One men, Women, and the Rest of Us, éditions Routledge, 1994, 224 p.

BUTLER Judith, Trouble dans le genre : le féminisme et la subversion de l’identité, éditions La Découverte, 2006, 277 p.

CHILAND Colette, Changer de sexe : illusion et réalité, éditions Odile Jacob, 2011, 349 p.

DE BEAUVOIR Simone, Le deuxième sexe, éditions Gallimard, 1949, 285 p.

DELPHY Christine, L’ennemi principal, éditions Syllepse, 1998, 272 p.

DORLIN Elsa, Sexe, genre et sexualités, éditions PUF, 2019, 153 p.

EHRHARDT Anke, MONEY John, Man and Women, Boy and Girl : The differentiation and dimorphism of gender identity from conception to maturity, éditions Johns Hopkins University Press, 1972, 311 p.

FAUSTO-STERLING Anne, Les cinq sexes : pourquoi mâle et femelle ne sont pas suffisants, éditions Payot, 2018, 92 p.

HENNETTE-VAUCHEZ Stéphanie (dir.), PICHARD Marc, ROMAN Diane, La loi et le genre : études critiques de droit français, éditions du CNRS, coordination du comité scientifique REGINE, 2014, 799 p.

HENNETTE-VAUCHEZ Stéphanie (dir.), PICHARD Marc, ROMAN Diane, Genre et Droit, éditions Dalloz, ressources pédagogiques, collection méthodes du droit, 2016, 454 p.

PROKHORIS Sabine, Le Sexe prescrit : la différence sexuelle en question, éditions Aubier, 2000, 348 p.

SIRONI Françoise, Psychologie(s) des transsexuels et des transgenres, éditions Odile Jacob, 2011, 269 p.

II : La doctrine universitaire

AGUADO Ali, ZDANOWICZ Ian, « L’usage du Droit dans le mouvement d’émancipation Trans », Cahiers du Genre, 2014, n° 57 pp. 77 à 94.

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MARGUENAUD Jean-Pierre, « La reconnaissance du droit à l’identité sexuelle des personnes transgenres », RTD Civ., 2017, p. 825.

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VIALLA François, « Loi de modernisation de la justice du XXIème siècle : changement de la mention de sexe à l’état civil », Recueil Dalloz, 2016, p. 2351.

III : Les textes législatifs et réglementaires

Loi n° 2016-1547, 18 novembre 2016, Modernisation de la justice du XXIème siècle, NOR : JUSX1515639L.

Loi n° 2013-404, 17 mai 2013, ouvrant le mariage aux couples de personnes de même sexe, NOR : JUSC1236338L.

Décret, n° 2019-966, 18 septembre 2019, Portant substitution du tribunal judiciaire au tribunal de grande instance et au tribunal d’instance en application de l’article 95 de la loi n° 2019-222 du 23 mars 2019 de programmation 2018-2022 et de réforme pour la justice et diverses dispositions relatives à l’organisation judiciaire et modifiant l’annexe du décret n° 2019-913 du 30 août 2019 pris en application de l’article 95 de la loi n° 2019-222 du 23 mars 2019 de programmation 2018-2022 et de réforme pour la justice, NOR : JUSB1925944D.

Décret n° 2017-450, 29 mars 2017, Procédures de changement de prénom et de modification de la mention du sexe dans les actes de l’état civil, NOR : JUSC1703390D.

Décret n° 2010-125, 8 février 2010, Modification de l’annexe figurant à l’article D. 322-1 du Code de la sécurité sociale relative aux critères médicaux utilisés pour la définition de l’affection de longue durée « affectations psychiatriques de longue durée », JORF n° 0034, 10 février 2010, p. 2398.

Décret n° 74-449, 15 mai 1974, Livret de famille et à l’information des futurs époux sur le droit de la famille.

IV : Les décisions des juridictions françaises et européennes

CEDH, 5ème sect., 6 avril 2017, nos 79885/12, 52471/13 et 52596/13, A. P., Garçon et Nicot c/ France.

CEDH, 10 mars 2015, n° 14793/08, Y. Y c/ Turquie.

CEDH, 30 novembre 2010, n° 35159/09, P. V. c/ Espagne.

CEDH. Sect., 12 juin 2003, n° 35968/97, Van Kück c/ Allemagne.

CEDH, 11 juillet 2002, n° 28957/95, Goodwin. c/ Royaume-Uni.

CEDH, 25 mars 1992, n° 13343/87, B. c/ France.

CJCE, 7 janvier 2004, n° C-117/01, K. B. c/ National Health Service Pensions Agency.

CC, 17 novembre 2016, n° 2016-739 DC, Loi de modernisation de la justice du XXIème siècle.

CC, n° 2003-484 DC, 20 novembre 2003, loi relative à la maitrise de l’immigration, au séjour des étrangers en France et à la nationalité.

CE, Ass., 11 avril 2012, n° 322326, GISTI, Fédération des associations pour la promotion et l’insertion par le logement.

Cass, 1er. civ., n° 16-17.189, 4 mai 2017.

Cass, 1er, Civ., n° 11-14.515, n° 12-11.949, 13 février 2013, Bull. civ. I., n° 13 et n° 14.

Cass, 1er, Civ., 7 juin 2012,  n° 11-22.490 et n° 10-26.947.

Cass, Ass., plèn., 11 décembre 1992, n° 91-11.900 et n° 91-12.373.

CA Montpellier, 15 mars 2017, n° 16/02691.

CA Orléans, 24 février 2009, n° 08/00134.

CA Aix-en-Provence, 12 mars 2002, D., 2003, 1528, note Cadou.

CA Nîmes, 7 juin 2000, n° 99/2516.

CA Paris, 2 juillet 1998, JCP, 1999, II. 10005, note Garé.

CA Paris, 18 janvier 1974, D., 1974, 196, concl. Granjon.

TGI Tours, 2ème ch. civ., 20 août 2015.

TGI Brest, 15 décembre 2011, n° 11/00975.

V : Les documents institutionnels

Circulaire de la DACS, relative aux demandes de changement de sexe à l’état civil, 14 mai 2010, n°JUSC1012994C.

CNCDH, Avis sur l’identité de genre et sur le changement de la mention du sexe à l’état civil, 27 juin 2013, disponible au JORF au n° 0176 du 31 juillet 2013.

Circulaire de la DACS, présentation des dispositions de l’article 56 de la loi n° 2016-1547 du 18 novembre 2016 de modernisation de la justice du XXIème siècle concernant les procédures judiciaires de changement de prénom et de modification de la mention du sexe à l’état civil, 10 mai 2017, n° JUSC1709389C. 

VI : La participation à des conférences

CEREZAL-ORELLANA Alix, JOUAN Marlène (dir.), « Déconstruisons le Genre », Atelier Doctiphilo, Université Grenoble-Alpes, Faculté des Lettres et des Sciences humaines, 10 décembre 2019.

JOUAN Marlène, « Qu’est-ce que le genre ? », Festival Trouble ton genre, 2ème édition, Département des Arts et de Sciences humaines, Université Grenoble-Alpes, 9 mars 2020.

CARAYON Lisa, GRINO Claire, SICOT Marie, JOUAN Marlène (dir.), « Regards croisés sur la contraception : encore un enjeu féministe ? », Festival Trouble ton genre, 2ème édition, Maison des Sciences de l’Homme, Université Grenoble-Alpes, 12 mars 2020.

VII : Les émissions radiophoniques

BROUARD Annabelle, KERVRAN Perrine, L’histoire inédite d’une mobilisation : l’histoire de la militance transgenre, 27 août 2018, épisode 1, disponible sur https://www.franceculture.fr/emissions/series/les-transidentites-racontees-par-les-trans (consulté le 25/09/2019).

BROUARD Annabelle, KERVRAN Perrine, Sous le joug médical : l’invention d’un symptôme, 28 août 2018, épisode 2, disponible sur https://www.franceculture.fr/emissions/series/les-transidentites-racontees-par-les-trans (consulté le 25/09/2019).

BROUARD Annabelle, KERVRAN Perrine, Uniques en leur genre : la lutte contre la transphobie, 29 août 2018, épisode 3, disponible sur https://www.franceculture.fr/emissions/series/les-transidentites-racontees-par-les-trans (consulté le 25/09/2019).

BROUARD Annabelle, KERVRAN Perrine, Libertés, égalité, transidentités : quand les intéressé.e.s nous racontent le militantisme transgenre, 30 août 2018, épisode 4, disponible sur https://www.franceculture.fr/emissions/series/les-transidentites-racontees-par-les-trans (consulté le 25/09/2019).

VIII : Les émissions télévisuelles

PESTIEL Sébastien (dir.), SANGIN Anne-Marie, THOMAS Evelyne, Homme ou femme : saurez-vous devinez qui je suis ?, émission « C’est mon choix », production Réservoir Prod, 11 mai 2017, consulté le 05/12/2019, disponible sur : https://www.youtube.com/watch?v=LoKkmQtnlZQ.

PESTIEL Sébastien (dir.), SANGIN Anne-Marie, THOMAS Evelyne, Fille ou garçon : ils cachent bien leur jeu !, émission « C’est mon choix », production Réservoir Prod, 30 novembre 2016, consulté le 05/12/2019, disponible sur : https://www.youtube.com/watch?v=4ThjkymA1-8.

IX : Les documentaires et œuvres cinématographiques

GOETELEN Vanessa, MARRA Luigi, Dans la tête d’un trans, Production Radio Télévision Suisse, Suisse, 29 janvier 2020.

LEMAIRE Olivier, Celui qui danse, Production France.tv, France, 2019.

BOLLAERS Mya, MAGINEL Laurent, MICHELI Laurent (dir.), Lola vers la mer, Production Les Films du Losange, France, 2019.

X : Les vidéos consultées sur Youtube et autres plateformes de diffusion en continu.

BALDER Laura, Transgenre : ma participation à Zone Interdite, 1er novembre 2017, consulté le 27/02/2020, URL : https://www.youtube.com/watch?v=0FszJvooMmA.

BALDER Laura, La vérité sur la SOFECT : l’usine à transphobie, 18 décembre 2018, consulté le 27/02/2020, URL : https://www.youtube.com/watch?v=fMIeeb7LSu8.

BALDER Laura, Transidentité et préjugés, 11 août 2019, consulté le 27/02/2020, URL : https://www.youtube.com/watch?v=6lxvBsBMO-I.

BRUT, Adriàn de la Vega, youtuber trans, 24 avril 2018, consulté le 27/02/2020, URL : https://www.youtube.com/watch?v=7XtH6k-bfCo.

BRUT, Le message d’espoir de Jake et Hannah, couple transgenre, 13 mai 2018, consulté le 27/02/2020, URL : https://www.youtube.com/watch?v=G8q573kSueg.

BRUT, Youtubeuse transgenre, Laura Badler raconte sa transition, 2 juillet 2018, consulté le 27/02/2020, URL : https://www.youtube.com/watch?v=Nz6G-a9a5ko.

BRUT, La lutte pour les droits des LGBT en 7 dates, 2 juillet 2018, consulté le 27/02/2020, URL : https://www.youtube.com/watch?v=_2cn8bucQuc.

BRUT, Le Rainbow Flag, étendard de la communauté LGBT, 25 juillet 2018, consulté le 27/02/2020, URL : https://www.youtube.com/watch?v=KafaxSqPXbk.

GESTE Minima, PINE O’NOIR Catherine, L’univers du drag expliqué par les Queens Minima et Catherine, 18 octobre 2019, consulté le 22/03/2020, URL : https://www.youtube.com/watch?v=vvbVT-_3AK4.

HOSCHI, Amour censure (vidéo sincère), 2 décembre 2019, consulté le 3/12/2019, URL : https://www.youtube.com/watch?v=nCKtYXIh1Ac.

MADAME FIGARO, Je t’aime ma fille, la campagne choc de l’Inter-LGBT contre la transphobie, 3 avril 2019, consulté le 22/03/2020, URL : https://www.youtube.com/watch?v=Kph_D3SZQe0.

MAUVE Guy, Le passing, 18 octobre 2017, consulté le 15/03/2020, URL : https://www.youtube.com/watch?v=Qb9hm-UV1zI.

MAUVE Guy, Pas assez trans ?, 18 mars 2018, consulté le 28/02/2020, URL : https://www.youtube.com/watch?v=3KQCYm6u2xA.

MISE AU POINT, Rencontre avec Valentina, Top-modèle transgenre, 3 avril 2017, consulté le 12/11/2019, URL : https://www.youtube.com/watch?v=eyzih-eCHko.

TIPOUI YUFFY, Hyperféminisation et hypersexualisation des femmes trans, 24 avril 2020, consulté le 25/04/2020, URL : https://www.youtube.com/watch?v=T9sd8scuQnA.

TIPOUI YUFFY, Transitionner pour détruire le genre, 5 février 2019, consulté le 10/03/2020, URL : https://www.youtube.com/watch?v=mQVD-vq96cw.

TIPOUI YUFFY, Les trans sont sexistes ?, 10 février 2019, consulté le 11/03/2020, URL : https://www.youtube.com/watch?v=7BVPaFVMtIk.

TIPOUI YUFFY, Le Cisplaining, 24 février 2019, consulté le 11/03/2020, URL : https://www.youtube.com/watch?v=zp3k0sSKBN0.

TIPOUI YUFFY, Les définitions queer, 6 mars 2018, consulté le 12/03/2020, URL : https://www.youtube.com/watch?v=nJpOQsiMkgQ.

XI : Les entretiens réalisés

ANASTASIA, 4 entretiens réalisés à Grenoble (Isère, CP 38 000), Echirolles (Isère, CP 38 130), Seyssins (Isère, CP 38 180) et Voiron (Isère, CP 38 500).

BANCEL Romain, 1 entretien réalisé à Valence (Drôme, CP 26 000).

B Laurent, A Sophie, 1 entretien réalisé à Villaz (Haute-Savoie, CP 74 370)

LAURENT Soline, 1 entretien réalisé à Saint-Martin-d’Hères (Isère, CP 38 400).

PRINS Camille, 1 entretien réalisé à Pringy (Haute-Savoie, CP 74 370).

R Paul, 1 entretien réalisé à Grenoble (Isère, CP 38 000).

Annexes

Sommaire des annexes

Remarques générales (page 87)

Annexe 1 : L’entretien de Camille PRINS (page 88)

Annexe 2 : L’entretien de Laurent B et Sophie A (page 96)

Annexe 3 : L’entretien d’Anastasia (page 97)

Annexe 4 : L’entretien de Paul R (page 109)

Annexe 5 : L’entretien de Romain BANCEL (page 110)

Annexe 6 : L’entretien de Soline LAURENT (page 115)

Remarques générales

Les annexes qui vont suivre comprennent les retranscriptions des entretiens des personnes qui ont été interrogées dans le cadre de la réalisation du présent rapport de recherche. Il y en a uniquement quatre qui sont intégralement retranscrites sur les six réalisées. Les deux autres entretiens n’ont pas été retranscrits à la demande des personnes intéressées.

Les retranscriptions des rencontres jointes au rapport sont les versions finales et corrigées ce qui m’oblige à signaler que certains passages, à la demande des personnes interrogées, ont été supprimés et (ou) modifiés. Les entretiens se composent d’une part, d’une première partie avec des questions envoyées (sauf indications contraires) à l’avance et, d’autre part, d’une seconde partie avec un large débat. Des questions identiques ont été posées pour tous les entretiens afin de dégager des grandes lignes dans le but de faciliter le traitement des informations.

La classification des entretiens correspond à l’ordre des rencontres et ne résulte pas d’un choix personnel. À la demande de certaines personnes interrogées, il ne sera pas mentionné leur véritable identité et (ou) certains éléments d’identification. Les éléments qui sont systématiquement indiqués sont leur prénom et (ou) noms choisis et la ville où s’est déroulé l’entretien.

Les propos tenus dans l’ensemble des entretiens retranscrits n’engagent que leurs auteurs.

Annexe 1 : L’entretien de Camille PRINS

A : Les éléments de contexte

L’entretien de Camille PRINS s’est déroulé dans la ville de Pringy (Haute-Savoie, CP 74 370). Il s’agit d’une ancienne étudiante (promotion 2018-2019) du Master 2 Histoire, Théorie et Pratique des Droits de l’Homme de la Faculté de Droit de Grenoble.

Les problématiques abordées avaient pour objectif de mettre en avant les principaux enjeux de la première construction du sujet du rapport qui, à ce moment là, tendait vers la remise en cause de la binarité des sexes. Les notions de sexe et de genre ont été également abordées sous le prisme des difficultés sociétales mais aussi quotidiennes des personnes transgenres. Des passages ont été supprimés et (ou) modifiés.

B : L’entretien

Maxime LOIRY : Qui êtes-vous ? Pourquoi avez-vous une sensibilité particulière sur le sujet des personnes transgenres ?

Camille PRINS : « Je suis Camille PRINS, membre du CA de l’association L’HaViSe (Ligue contre le harcèlement et les violences sexistes et sexuelles, homophobes et transphobes). J’ai longtemps été engagée dans des associations féministes intersectionnelles, et je suis moi-même convaincue que les problématiques liées au sexisme, à la lesbophobie, à l’homophobie et à la transexualité ou autres sont liées entre elle par des idées du genre stéréotypées et binaires.

En outre, le sujet des personnes transgenres m’a également intéressée dans le cadre de mon travail de recherche relatif à la loi de pénalisation des clients, et plus largement à la prostitution ».

ML : Pourquoi avoir créé une association sur le campus ? Dans quel but ? Y a-t-il une carence de l’UGA sur cette question ?

CP : « A l’origine, la création de l’association vient d’un cours de Montage de Projet dans le cadre duquel il nous a été demandé d’imaginer, d’élaborer et de débuter un projet dans l’Université. Ayant rencontré la cellule de veille de l’Université de Bordeaux dans le cadre de mon M1, lorsque j’ai vu que l’UGA en était dépourvue j’ai proposé à trois autres étudiantes de réfléchir à ce projet.

Nous avons entamé des démarches et nous avons notamment sollicité la mission égalité homme/femme de l’Université afin de collaborer avec eux sur notre projet. Cette rencontre a été l’occasion pour nous d’apprendre qu’une cellule de veille était en cours de création dans l’UGA. Son fonctionnement nous a été expliqué dans le détail et nous avons été peu convaincues, notamment en raison du manque de transparence et du manque d’adaptabilité du dispositif aux besoins des victimes.

Ils se sont montrés hostiles à toutes nos remarques et ont refusé toute collaboration avec des étudiant.e.s. Raison pour laquelle nous avons décidé de supplanter la cellule de veille de l’Université avec notre association qui pourrait cependant nous conduire à orienter nos usagèr.e.s. vers cette cellule afin de débuter une procédure interne à l’Université selon la situation et toujours selon les besoins de la personne concernée. Une collaboration n’est pas exclue, et nous comptons dans l’avenir retourner voir la mission égalité pour leur proposer de collaborer ».

ML : Avez-vous rencontré des difficultés particulières ? Lesquelles ?

CP : « Nous avons eu des difficultés à créer notre association. Nous avons eu la chance d’être suivies par notre codirectrice de master qui nous a beaucoup aidées, et l’une d’entre nous avait plus d’expérience que les autres sur les problématiques rencontrées dans les associations ce qui nous a permis de ficeler nos statuts correctement.

Nous avions à cœur de  créer une association horizontale, sans président/trésorier etc. Or, les préfectures n’apprécient pas trop les associations horizontales, notamment en termes de responsabilité, raison pour laquelle nous avons dû recommencer la procédure plusieurs fois avant qu’ils n’acceptent. Je pense que ça a été le plus long et difficile.

Petite difficulté également sur certains sujets, notamment en ce qui concerne la détermination de l’association dans les statuts.

Alors que j’aurais voulu créer une association dite féministe et l’inscrire dans les statuts, deux d’entres nous n’ont pas souhaité le mentionner. Nous en avons discuté et nous avons finalement choisi que cette mention n’apparaitrait pas. Nous avons eu peu de difficultés de ce type et nous les considérons comme des discussions normales et essentielles dans le processus de création ».

ML : Quelles sont les difficultés principales que rencontrent les personnes transgenres ?

CP : « Je ne suis pas à même de répondre à cette question, n’étant pas une personne concernée. Nous souhaitons que des personnes concernées puissent s’investir dans l’association afin de mieux l’adapter aux problématiques rencontrées.

Personnellement, je peux seulement témoigner de ce que j’ai vu ou de ce que les personnes transgenres que j’ai rencontrées m’ont confié. Au-delà des remarques et comportements transphobes auxquels ces personnes font face quotidiennement, venant parfois de la part de leur entourage proche, elles sont également victimes de nombreuses violences dans leur parcours médical, qu’il soit lié à leur transition ou pas.

Dans le cadre de l’Université, je pense notamment au refus soudain du centre de santé de réaliser les injections hormonales aux étudiant.e.s. transgenres sur des motifs peu convaincants. Une violence ordinaire qui impacte nécessairement leur quotidien et qui les laisse perplexes quant aux raisons qui motivent ces décisions ».

ML : Selon vous, à quoi sert une transition ? Quelle est votre définition ?

CP : « Les personnes transgenres sont des personnes dont le sexe biologique ne correspond pas à leur identité de genre. Pour moi, une transition va donc permettre aux personnes concernées d’adapter leurs comportements et leur apparence physique à leur identité de genre.

Je pense que la binarité nous amène parfois à considérer cette transition comme étant woman to male ou male to woman systématiquement, or certaines personnes transgenres ne se définissent pas dans un sexe ou dans l’autre. Ainsi, leur comportement/apparence physique ne va pas permettre de déterminer s’il s’agit d’un homme ou d’une femme, tout comme les personnes non-transgenres… ».

ML : Que pensez-vous du traitement des personnes « trans » par les associations LGBTi+ ? Y a t-il des carences ? Des difficultés ?

CP : « Je ne suis pas assez investie dans des associations LGBTIQ+. Cependant, j’avoue adhérer davantage au diminutif LGBTIQ+, plus inclusif que le simple LGBT. Peut-être que tout comme dans les associations féministes, les personnes transgenres ont parfois du mal à adhérer entièrement aux messages politiques portés par les associations LGBTIQ+, et peuvent se sentir exclues.

Mais je n’en connais pas suffisamment sur ce sujet pour aller plus loin ».

ML : Que pensez-vous des politiques sociales, médicales ou psychologiques d’accompagnement auprès des personnes transgenres ?

CP : « Je pense que la plupart des dispositifs mis en place sont bien trop binaires, distinguant homme ou femme. La procédure de changement du prénom et du sexe sur le registre d’état civil souffre de cette binarité.

La détermination réalisée par le juge sur le point de savoir si la personne concernée est suffisamment femme ou suffisamment homme pour bénéficier de la procédure me semble s’appuyer sur des schémas sexistes et désuets.

Je pense également au suivi médical et psychologique auxquels doivent se soumettre les personnes trans, qui est parfois réalisé par des personnes peu voire pas formées à ce type de problématiques, autrices parfois de transphobie ordinaire voire de discrimination.

Selon mon expérience, par rapport aux personnes concernées que j’ai pu rencontrer, il me semble que peu d’entre elles se retrouvent dans le schéma binaire homme/femme ».

ML : Faut-il réformer la procédure de changement de sexe ? N’est-ce pas dangereux ? Comment éviter les effets de mode ?

CP : « Je pense qu’il serait bon de réformer la procédure de changement de sexe, comme je l’ai indiqué plus haut, et de prendre en compte la parole des personnes concernées en priorité, voire exclusivement.

Actuellement en discussion en Suisse, le changement de sexe sur les registres devrait très prochainement être facilité et ne sera plus qu’une formalité pour les personnes concernées. Par ailleurs ce pays a mis en place des procédures transitoires permettant de ne pas exposer au public leur transsexualité.

La transsexualité est une problématique propre à l’individu qu’elle concerne. Je considère que son parcours, sa volonté et son genre ne peuvent être déterminés que par lui. Ce qui est dangereux c’est d’exposer les personnes trans durant leur procédure de changement de sexe souvent longue et fastidieuse, en raison du blocage résultant de la binarité des genres.

La question de la dangerosité d’une facilitation de la procédure de changement de sexe et son « effet  de mode » me semblent être des faux débats. Vivre la transsexualité aujourd’hui est un parcours du combattant, administratif mais aussi social, que peu de personnes sont prêtes à traverser si ce n’est pour de bonnes raisons.

Il me semble contreproductif et légèrement hypocrite d’opposer ce type d’argument à la simplification de la procédure de changement de sexe dans son ensemble. Il me semble que la transsexualité est un état qui est parfois très difficile à vivre pour les personnes.

Tout comme l’homosexualité, il ne s’agit pas d’un choix, et beaucoup de personnes transgenres préféreraient ne pas l’être. Le contraire, une personne non-transgenre qui souhaiterait en devenir une pour aucune raison, s’il existe, me semble extrêmement marginal, et être un faux argument et un faux danger freinant l’évolution des procédures ».

ML : Est-ce que les personnes transgenres ont droit à une prise en charge médicale pour leur transition ? À quelle hauteur ? Est-ce suffisant ?

CP : « Je ne saurais pas dire dans le détail mais certaines opérations, suivis et examens médicaux sont remboursés par la sécurité sociale, à condition d’entrer dans une procédure de changement de sexe et d’en respecter les étapes.

Je me rappelle en avoir discuté avec une personne prostituée trans qui m’avait indiqué avoir été remboursée pour la plupart de ses opérations, sauf pour son nez. Cela m’amène à penser que la détermination du remboursable et du non-remboursable est peut-être un peu arbitraire… Mais je n’en sais pas plus et je ne saurais pas dire si la prise en charge médicale est suffisante ».

ML : Y a t-il d’autres acteurs actifs sur les questions de genre (entreprises, ONG) ?

CP : « Je ne suis pas sûre de très bien comprendre le sens de cette question, mais évidemment que de nombreux acteurs, outre les associations, sont impliqués dans les questions de genre. Les entreprises à leur échelle peuvent adopter des dispositifs spécifiques pour améliorer l’intégration des personnes transgenres dans leur effectif ou former leur personnel pour améliorer la prise en charge des personnes concernées. Mais je pense surtout aux ONG et aux organisations internationales, ainsi qu’à certains médias qui tentent de faire évoluer les mentalités ».

ML : Apparemment le terme des « effets de mode» vous intrigue ?

CP: « Ce terme m’agace. Ce ne n’est pas le problème du genre mais du système. L’exemple des personnes queers ont choisi de ne rentrer dans aucun genre. La société devra évoluer sinon ces personnes se retrouveront dans un placard administratif, ils ne seront personne.

Aujourd’hui, beaucoup d’associations dans leur questionnaire prévoient une case « autre » concernant le sexe. C’est possible de transposer ce modèle à l’administration, on peut très bien aussi ne rien demander du tout. Il faut se donner les moyens, ce n’est pas un problème ».

ML : Les personnes queers ont une légitimité suffisante pour intégrer les mouvements LGBTi + ?

CP: « Oui, comme toute personne avec les mêmes problématiques de genre. Le problème vient de la société sinon il n’y aurait pas besoin d’associations. Ces personnes sont les plus touchées par les discriminations ».

ML : Plus discriminées que les personnes transgenres ?

CP: « Ce sont les plus touchées en tout cas. Ils sont tous concernés, il n’y a pas d’échelle. Ils ont le droit d’être considérés dans les associations. Les queers ont permis de remettre en question la binarité des sexes. Ils n’ont pas choisi de sexe, malgré des possibles transformations chirurgicales.

Ces personnes gardent leur sexe biologique, malgré des seins ou de porter des habits plus féminins.  Il ne faut pas croire que c’est une minorité, les définitions qui énoncent ce qui doit être féminin ou masculin sont d’origines sociétales. On demande aux personnes de faire un choix, qu’elles ne souhaitent pas faire.

Pour revenir sur l’effet de mode, pour moi c’est lorsque une personne décide de se comporter ou de s’habiller comme un homme mais après quelques temps, elle souhaite essayer des vêtements féminins. La personne ne sait pas qui elle est. On nous demande de choisir, alors que certaines personnes ne le souhaitent pas. Les queers intègrent une notion de fluidité dans notre société, qui remet en cause la binarité des sexes ».

ML : Pour en venir à Bilal Hassani, qu’en pensez-vous ?

CP: « Il n’a pas de problème avec sa masculinité malgré des personnes qui lui disent le contraire. Il n’est pas trans, queer ou travesti mais il a déterminé son propre genre. Il a réalisé cela car il se sentait peut être perdu. Il a un genre qu’il a parfaitement identifié, qu’il va devoir défendre alors qu’il n’a pas à le faire.

On n’a pas à défendre le fait qu’on soit un genre masculin ou féminin. C’est à la personne de dire ce qu’elle est ».

ML : La solution serait donc une sorte de fluidité de genre ?

CP: « Oui tout à fait. Il faut arrêter de considérer que des hommes qui se maquillent vont être des femmes. Cela n’a pas de sens. C’est d’ailleurs bizarre que les hommes ne se soient pas appropriés cet outil social. C’est bien d’utiliser du maquillage ou des paillettes dans sa vie ».

ML : Pourquoi parle t-on plus des hommes qui souhaitent devenir des femmes que l’inverse ?

CP: « C’est parce que nous sommes une société bien sexiste. C’est comme si on perdait un homme au profit du camp adverse et cela est jugé inacceptable ».

ML : Pour vous, c’est plus facile qu’un homme devienne une femme ou qu’une femme devienne un homme ?

CP: « Ce n’est pas le même parcours médical, qui est éprouvant. Pour le reste, je ne sais pas. C’est difficile de faire des généralités, c’est en fonction de chaque personne. Pour que ces personnes soient acceptées, le meilleur moyen est qu’elles le disent aux personnes qu’elles rencontrent dans la vie de tous les jours.

Parfois elles devront en parler ou se justifier, alors que certaines personnes ne veulent pas en parler. Une dysphorie de genre peut conduire au suicide. Des personnes ne souhaitent plus être identifiées à leur sexe biologique, c’est encore plus dur d’en parler d’où la nécessité de les protéger en changeant rapidement leur état civil.

C’est assez dur psychologiquement mais c’est en fonction des personnes. Certaines aiment se trimbaler entre les genres et porter un message politique fort. C’est très intéressant. Mais d’autres ne voudront pas en parler, à cause d’une absence de politisation ».

ML : Politiser ? Oui mais en union avec les LGBTi+ ou en désunion ?

CP: « La problématique de fond est la même mais attention au décalage. On ne peut pas faire front commun avec un homme homosexuel et un homme en transition. Il y a une meilleure acceptation de l’homosexualité de nos jours que de la transsexualité.

Ils ne subissent pas les mêmes violences. Il faut laisser le choix aux associations, qui vont englober ou non. Il faut assumer de porter la lettre T. Il faut redorer les blasons. C’est comme si des personnes hétérosexuelles étaient dans l’exécutif des associations. C’est dérangeant ».

ML : Ah bon ? Pourquoi les personnes hétérosexuelles ne pourraient pas être dans l’exécutif de certaines associations LGBTi+ ?

CP: « C’est en fonction des associations. Pour moi, ce sont des alliés dans la diffusion d’un message politique ».

ML : Est-ce une question de légitimité ?

CP: « Oui clairement. C’est mon avis. Je n’ai pas de problème à ce qu’un homme cisgenre hétérosexuel fasse partie d’une association féministe, mais pas dans certains lieux, réservés et dédiés aux personnes concernées.

La non-mixité est un outil, c’est un choix de l’association. Je ne pense pas qu’un homme cisgenre hétérosexuel puisse comprendre les discriminations faites aux femmes, mais il peut les voir, en témoigner ou dire que c’est anormal.

Le problème c’est qu’il n’a pas subi ce genre de violences. Il faut impliquer les personnes concernées, sinon c’est l’éparpillement. On a tous des restes de notre société sexiste, homophobe ou transphobe. Ce sont des mécanismes qu’on ne peut pas gérer. Les personnes concernées par ces violences sont les mieux à même de comprendre ces violences, pour lutter contre.

Les personnes cisgenres sont là pour porter un combat, d’être comme les autres personnes de la société et qui n’ont pas de problèmes avec des personnes subissant des violences. Il faut juste des lieux dédiés réservés aux personnes concernées, en évitant les cocons car c’est pour porter un message politique. Ce sont des lieux de discussions ou de témoignages. Les personnes concernées ont plus besoin que des alliés, de pouvoir parler de leurs expériences avec d’autres personnes comme elles pour dire qu’elles ne sont pas seules. Il faut ouvrir la parole ».

ML : Aujourd’hui, qui serait capable de porter la parole des personnes transgenres ?

CP: « Bilal Hassani a une visibilité qui permet de remettre en cause la binarité de sexes. Je n’ai pas en tête d’exemples précis, je ne suis pas très people ».

ML : Pourquoi pas Conchita Wurst ? Qu’en pensez-vous ? (A propos de sa dernière apparition en tenue « BDSM» à la Pride à Amsterdam en 2019).

CP: « C’est compliqué. Ce n’est pas facile d’un point de vue stratégique. Il faut prendre la personne avec ses qualités et ses défauts. Au niveau politique, c’est apprécier de voir des personnes qui se montrent bien car des gens pourront s’identifier à eux pour se sentir moins seuls.

Il faut aussi arrêter avec l’image de la femme féminine. Les personnes évoluent en montrant une autre exception. Il faut faire évoluer les mentalités, sans tomber dans l’extrême. Il y a une différence entre choquer et porter un message ».

ML : Y-a-t-il une ou des cause(s) pour les personnes transgenres ?

CP: « On a certes besoin de personnalités un peu trash mais pas entièrement. Il faut juste dépasser les cadres. On n’est choqué qu’en fonction de nos propres stéréotypes. C’est une question de personnalité. Ces personnes peuvent porter le combat, à leur manière. C’est une autre forme de message politique ».

ML : Ce message politique ne sera-t-il pas trop fort ?

CP : « Trop fort pour qui ? Toutes les personnalités ne sont pas les mêmes. Certaines sont plus fantasques. Ils portent juste une personnalité qu’ils ont au fond d’eux. Ce n’est ni bien, ni mal. Ces personnes sont essentielles.

En voyant cela à la télévision, des personnes en plein doute pourront se dire qu’elles ne sont pas toutes seules. Elles ont peut être envie de leur ressembler. Après tout, pourquoi pas ? Ce n’est pas grave.

C’est une question de bien-être dans n’importe quel corps. Personnellement, ce qui me choque c’est que ces personnes [B. Hassani, C. Wurst] peuvent encore choquer aujourd’hui. Ce ne sont que des personnes qui mettent des vêtements différents, ce n’est pas commettre un crime.

C’est une expression de sa personnalité. C’est important que ces personnes puissent se montrer, ce serait encore mieux si elles étaient acceptées ».

ML : Acceptées par qui ?

CP: « Par la société, c’est important. Sans ces personnalités, la vie serait un peu morne. Elles apportent une revitalisation de la société. C’est le retour à la fluidité des genres, qui permet à la personne de s’exprimer.

La personne transgenre n’est pas une travestie, elle ne choisit pas de se transformer en femme ou en homme le soir. C’est un état de fait. Elles ont une place dans les associations, mais moindre que les personnes transgenres ».

ML : Demain, vous êtes nommée par le Président de la République en tant que ministre de l’Egalité entre les femmes et les hommes, votre première mesure ?

CP: « Je ne saurai même pas par où commencer (rires) ! Je commencerai par m’entourer d’un panel de population le plus large possible pour commencer à travailler sur un sujet. Pour le reste, il faut voir ce que donne le panel ».

ML : Des derniers mots en guise de conclusion ?

CP: « Il n’y a pas d’échelle des combats. Je pense que les problèmes viennent de la binarité des sexes. En luttant contre cela, on sert la cause de tout le monde. Il ne faut pas l’abolir mais commencer à faire des actions politiques portant une remise en cause de la binarité.

Cela ne se fait pas actuellement. Il faut ouvrir un débat entre les citoyens, pour montrer que les personnes différentes en matière de genre ne le sont pas tellement des autres citoyens dits normaux.

Les personnalités qui choquent vont permettre de faire émerger un débat et de faire avancer les choses. On ne peut pas faire avancer la société avec des coups de poing car les gens vont se sentir agressés ou scandalisés. Il ne faut pas imposer un choix sociétal, il faut intégrer les citoyens dans les politiques traitant de ces questions ».

Annexe 2 : L’entretien de Laurent B et Sophie A

A : Les éléments de contexte

L’entretien de Laurent B et Sophie B a lieu dans le village de Villaz (CP 74 370). Il s’agit d’un couple où Laurent, personne FtM, est en couple depuis cinq ans avec Sophie A, femme cisgenre.

Les sujets abordés ont permis d’aborder les problématiques (administratives, parentalité, regards sur la société et la vie quotidienne) que peut rencontrer un couple dont l’un des membres est une personne transgenre FtM.

B : L’entretien

À la demande des intéressé(e)s, l’entretien n’a pas été retranscrit.

Annexe 3 : L’entretien d’Anastasia

A : Les éléments de contexte

Il y a eu 4 entretiens avec Anastasia à Grenoble (Isère, CP 38 000), Echirolles (Isère, CP 38 130), Seyssins (Isère, CP 38 180) et Voiron (Isère, CP 38 500). À la demande de l’intéressée, en raison d’une partie de son activité professionnelle illégale en France, le mot Anastasia est un prénom d’emprunt.

Il est mentionné ici que d’une part, des passages ont été supprimés entrainant parfois une rupture avec le fil conducteur des rencontres et, d’autre part, les conditions de rencontre ne seront pas explicitées pour des raisons évidentes de sécurité.

Les problématiques abordées avaient pour objectif de mettre en lumière les effets positifs et négatifs du changement de sexe et le regard que pouvait porter la société sur la situation des personnes transgenres travailleuse ou travailleur du sexe en France.

B : L’entretien

1ère rencontre.

Maxime Loiry : Pourquoi avoir accepté de me rencontrer?

Anastasia : « D’abord par curiosité. J’ai été très surprise de savoir que quelqu’un souhaitait me rencontrer pour parler des transidentités sous cet angle, je ne fais pas cela ça tous les jours.

Au départ, je pensais que cela était une énième rencontre sur la situation des personnes prostituées, sur les difficultés quotidiennes, les risques. J’avoue que c’est la première fois que j’aborde avec une personne comme toi le sujet trans même si je n’aime pas ce terme ».

ML : Comme moi ?

A : « À vrai dire pour être honnête, tu n’es pas le style de personne que je rencontre souvent (rires) ! Et puis, je me suis renseignée un peu sur toi.

Il se trouve que je connais une personne que tu as été amené à fréquenter il y a quelque temps. Si je ne l’avais pas consulté, j’aurais immédiatement refusé ».

ML : Je dois me sentir flatté alors (rires) !

A : « On peut dire ça car ce n’est pas un sujet que j’aborde facilement ».

ML : Pour préciser, je mentionne que tu as souhaité prendre un pseudonyme.

A : « Oui, je pense que c’est mieux, pour moi et comme pour toi. On en parlera plus tard si tu veux. Je n’ai pas envie de faire du tort à ton travail d’où l’intérêt de préciser les choses. C’est assez courant dans la prostitution ».

ML : Je pense que ta contribution a toute sa place dans mon travail car il a une véritable importance.

A : « Importance oui mais je n’ai pas envie que tu passes pour un dégénéré sexuel auprès de tes collègues de promo. C’est tout ».

ML : Un dégénéré ?

A : « Oui. Je suis désolée de te le dire d’une manière un peu abrupte mais tu as choisi un sujet éminemment polémique, voir dangereux ».

ML : Dangereux non, peut être polémique…

A : « Ce n’est pas un sujet normal pour un étudiant en droit, ça ne va que t’attirer des ennuis ».

ML : Je me suis toujours intéressé à ces questions mais j’ai dû attendre l’arrivée en Master 1 pour pouvoir concrètement les traiter.

A : « Tu aurais pu attendre encore un peu et prendre un autre sujet beaucoup plus soft ».

ML : Soft ?

A : « Oui. Du style le Président de la République ou le rôle des Ministres, quelque chose de plus juridique ou politique ».

ML : La situation personnes transgenres, les notions de sexe et de genre et les identités de genre ont une place dans la réflexion juridique. On fait même des thèses ou de la recherche dessus.

A : « Sérieux ? ».

ML : Oui. Tout à fait. Une personne qui me suit dans ma réflexion est en train de faire une thèse en Droit international et européen des Droits de l’homme sur le concept d’identité de genre et sur les personnes transgenres. Je n’ai pas le sujet exact mais c’est dans cette veine.

A : « Vous devez avoir plein de choses en commun alors ! ».

ML : En tout cas nous avons un thème en commun mais pas au même niveau bien entendu.

A : « Les questions autour du genre sont toutes instrumentalisées par des personnes, qui bien souvent, sont parfaitement cisgenres. Je ne trouve pas ça sain que des questions si importantes soient traitées par des personnes qui, dans la réalité ou au quotidien, ne sont pas confrontées à ces problèmes qui rendent la vie difficile ou même invivable ».

ML : Je ne vais pas instrumentaliser cette question à d’autres fins, si je peux apporter des garanties…

A : « Ce n’est pas ça que je veux dire. Je te connais grâce à quelques connaissances qui m’ont renseigné sur toi, si je n’avais pas eu ces infos, jamais je n’aurai accepté de te rencontrer pour évoquer ce sujet.

C’est bien qu’une personne directement intéressée par un tel sujet puisse faire un travail dans le cadre de ses études. Si cela peut faire bouger les lignes patriarcales de notre société, c’est toujours bon à prendre ».

Tu aurais dû choisir un autre sujet avec les trans mais abordé d’une autre manière, comme la communauté LGBT, les discriminations liées à l’orientation sexuelle ou les violences faites aux femmes, sujet d’actualité malheureusement ».

ML : C’est un sujet qui demande une démarche particulière, j’en suis pleinement conscient et je connaissais les potentielles difficultés que cela pouvait engendrer.

A : « Pas difficultés mais des problèmes. La société, l’Etat, tes profs ou mêmes tes collègues de promo, pensent que c’est un problème qu’un homme mette une robe, des ballerines, du maquillage ou d’autres trucs genrés féminin. Ils ne vont pas te le dire en face mais derrière ton dos, ça va y aller et là tu pourras dire adieu aux opportunités ».

ML : Je ne fais pas cela pour le regard des autres.

A : « Je l’avais bien compris dès le départ. Et c’est ça qui est intéressant dans ta démarche. Souvent des personnes LGBT friendly ou trans-friendly se disent à l’aise avec les personnes transgenres mais dès qu’il faut aller aux anniversaires des potes ou des amis, se faire embaucher ou représenter quelqu’un …ben là il n’y a plus personne.

En plus, les trans se font conspuer par tout le monde car il est vrai que pour les personnes homosexuelles, les lesbiennes ou les bisexuelles, on n’invoque pas le côté psychologique ou psychiatrique alors que pour les trans, c’est une catastrophe et elles passent pour des tarées. Personnellement, je serais plus inquiète de rencontrer une personne qui dit aimer Hollande ou Macron plutôt qu’un homme qui décide de mettre des talons ou une perruque (rires) ! ».

ML : Est ce que des personnalité.e.s pourraient incarner ou porter la revendication des droits pour les personnes transgenres ?

A : « Ça dépend de l’angle d’attaque. Par exemple, Bilal Hassani, qui se revendique comme un homme au genre fluide même si je trouve que son côté féminin est très développé, peut essayer, du moins s’il le souhaite, de changer les mentalités sur la communauté LGBT au sens large ».

ML : Pourquoi pas Conchita Wurst ?

A : « Il faut faire attention car il y a eu un quiproquo sur la personne en elle-même ».

ML : Oui, c’est une Drag Queen.

A : « Tout à fait donc ce n’est pas une femme transgenre, en tout cas pas pour moi. Elle fait un super travail, ses chansons sont sublimes comme ses fringues mais il y a un arrière goût de provocation, de voyeurisme ».

ML : En même temps c’est une chanteuse (rires) !

A : « C’est sûr que vu sous cet angle je suis d’accord avec toi (rires) ! Non mais en fait c’est que les personnes transgenres, quelles soient femmes ou hommes au départ, souhaitent devenir des « véritables » femmes ou hommes à l’arrivée, au sens physique j’entends, avec les hormones ou de la chirurgie.

Elles ne veulent pas devenir Conchita ou Bilal mais madame ou monsieur tout le monde. L’enjeu serait de dire, et ton travail peut y contribuer, que les personnes transgenres sont comme tout le monde, elles travaillent légalement ce qui n’est pas mon cas mais passons, elles dorment, sortent ou gardent des enfants. Bref, elles doivent arrêter subir des discriminations. La peur doit changer de camp ».

ML : Intéressant. J’aimerai aborder d’autres points avec toi, notamment sur ta définition de ce qu’est une transition, les difficultés des personnes transgenres, le côté psychologique et bien d’autres choses comme le choix de ton pseudonyme ou la binarité.

A : « Tout un programme (rires) ! Oui, je vois l’heure et il est très tard ».

ML : On pourra se revoir ?

A : « Oui bien sûr ! Ça me rappelle des trucs que j’ai vécus il y a longtemps et c’est une question qui m’intéresse. Je suis bien avec toi, on peut te parler librement ».

2ème rencontre.

Maxime Loiry : Revenons aux fondamentaux. Peux-tu te présenter ?

Anastasia : « Oui bien sûr. J’aurai dû le faire en premier ! Alors, je suis Anastasia, du moins pour ton rapport, car tu connais ma véritable identité mais je ne souhaite pas qu’elle soit mentionnée dans ton rapport ».

ML : Pas de soucis.

A : « J’ai 21 ans. Je suis née dans une petite ville proche de Clermont-Ferrand en pleine campagne mais mes parents ont déménagé à Lyon où j’ai pu faire ma Licence en Arts plastiques ».

ML : Je vais te poser des questions assez personnelles, mais étant donné mon sujet je ne vois pas faire autrement. Bien évidement, tu n’es pas obligée de répondre.

A : « Pas de problème. Je m’y attendais de toute façon ».

ML : D’abord pourquoi avoir choisi le prénom Anastasia pour nos échanges ?

A : « Par sécurité avant tout. Cela peut paraître bizarre mais c’est assez courant chez les personnes prostituées. J’ai choisi le prénom Anastasia car au cours de ma Licence j’ai étudié les arts sous la période soviétique et la légende entourant la princesse Anastasia m’a toujours passionnée.

Après je ne me considère pas comme une princesse, loin de là, c’est juste pour avoir un prénom mais j’aurai pu prendre une lettre de l’alphabet au hasard. Un prénom est plus facile pour faire un entretien, même s’il est rare ou décalé ».

ML : Comment définir une personne transgenre ?

A : « Vaste question (rires) ! Je ne suis pas une pro des définitions officielles mais je vais te donner mon avis. En fait, par exemple, pour moi une personne transgenre, c’est une personne qui va avoir une identité de genre qui va être différente de son sexe assignée à la naissance. Ce n’est pas une maladie mais juste des comportements sociaux qui vont être considérés comme différents du sexe assigné à la naissance.

J’ai toujours considéré que l’identité de genre est un parcours personnel, qui ne peut pas être défini d’une manière officielle car cela dépend des personnes, des parcours et des modes de vie. Je déteste le terme de transsexuelle car j’ai l’impression d’être malade ou folle alors que j’exprime mon identité de genre d’une manière différente à celle identifiée par la société. D’ailleurs il n’y a plus que ces enfoirés de la SOFECT qui utilisent ce terme ».

ML : D’ailleurs en parlant de la SOFECT, un avis ?

A : « Il faudrait tous les faire arrêter ! Je vais reprendre les termes de Laura Badler qui dans l’une de ses vidéos a qualifié la SOFECT d’usine à Transphobie. Cette organisation considère les personnes comme moi ou les hommes transgenres comme des malades mentaux, qu’il faut soigner à tout prix en nous imposant de nous balader pendant 2 ans dans les fringues du genre opposé alors qu’on a même pas commencé les hormones pour soit disant prouver notre transidentité.

Avec ça on devient des cibles dans les rues, c’est comme mettre des cibles sur nos têtes pour que l’on se fasse agresser déjà qu’en temps normal c’est difficile. Je te laisse imaginer le choc que cela représente pour des trans qui sont entre leurs mains, ils sont tous simplement en enfer ».

ML : C’est l’image qui s’en dégage lorsque j’aborde ce sujet.

A : « Et ce n’est pas prêt d’en finir. Enfin si, le jour où la SOFECT aura disparu, ce sera une victoire pour toutes les personnes transgenres ».

ML : À quoi sert une transition ?

A : Je n’aime pas ce mot.

ML : Décidément.

A : « Non mais ce n’est pas contre toi mais je préfère le terme métamorphose ».

ML : Pourquoi ?

A : « Ben oui. Je suis une adepte des livres de Françoise Sironi qui en a fait un sur nous que je considère comme le meilleur car elle aborde nos difficultés, nos parcours identitaires, d’une manière intéressante et sans arrières pensées, contrairement aux autres auteurs sur ce sujet ».

ML : Et elle aborde comment la métamorphose ?

A : « Dans mes souvenirs, elle définit la transition comme une métamorphose car c’est un changement de forme intérieur et extérieur. Lorsque j’ai démarré mon parcours, mon corps s’est changé bien sûr avec la prise d’hormones quotidienne qui donne parfois des sautes d’humeurs mais c’est normal au début. Après, et c’est là où je suis d’accord avec elle car on change à l’intérieur de nous même. C’est comme la mue d’un serpent. On quitte une peau pour une nouvelle qu’on aura fabriquée à partir de l’ancienne. L’image qu’elle en donne m’a beaucoup plu ».

ML : Je me suis procuré un exemplaire et l’approche psychologique est intéressante car c’est de l’accompagnement et non de la stigmatisation.

A : « Oui car lors d’une métamorphose, il faut que la personne soit accompagnée et elle doit rencontrer les bonnes personnes, qui vont l’aider et non la regarder bizarrement ou la rejeter ».

ML : C’est important d’être accompagné ?

A : « Essentiel. Tu ne pourras jamais faire de métamorphose seul, tu vas de te retrouver dans les mains de la SOFECT avec leur parcours à la con et là tu vas souffrir. J’ai des amis, enfin j’avais des amis qui ont été suivis par eux et pour certains, ils ne sont plus là aujourd’hui ».

ML : Il y a des propositions ou des idées qui souhaitent donner plus de place aux psychologues et d’écarter les médecins et psychiatres.

A : « Il faut être accompagné oui, mais pas par n’importe qui. Les médecins trans friendly se comptent sur les doigts de la main. Je pense qu’il faudrait écarter les psychiatres car je ne suis pas une malade mais renforcer le rôle des psychologues.

Je sais que beaucoup de personnes transgenres souhaitent pouvoir changer d’état civil en un clin d’œil et pouvoir se shooter aux hormones mais il faut mettre des limites pour éviter les accidents. Je suis pour un changement d’état civil libre et sans contraintes ».

ML : On m’a dit que ce n’était qu’un bout de papier.

A : « Ben c’est vrai en plus. Ce n’est pas ce bout de papier qui va déterminer ta vie, tes amis, tes passions, ton orientation sexuelle ou ton genre ».

ML : Et pour le changement de sexe ?

A : « Cela dépend si tu veux faire une métamorphose partielle uniquement avec la poitrine ou le nez ou totale avec la vaginoplastie ou la phalloplastie. C’est un traitement ultra lourd et difficile.

Je peux t’en parler en toute liberté mais je ne souhaite pas que cela soit mentionné officiellement dans mon interview. On fera ça à part ».

ML : Oui tu me l’avais dit et cela faisait partie de tes conditions. Il n’y a pas de problème là-dessus.

A : « Je sais que je suis un peu chiante mais je suis sûre que tu me comprends. Je m’en veux un peu de te faire balader dans tout Grenoble et aux alentours mais c’est pour qu’ont soit tranquilles et pour la sécurité ».

ML : Je m’y attendais et de toute façon si tu m’avais parlé de ça, je t’aurai demandé si tu souhaitais que cela apparaisse dans le rendu final.

A : « Tu ne pourras pas me citer mais tu trouveras le nécessaire. Après ton sujet c’est le changement de sexe et d’état civil et tu comptes faire un truc sur les discriminations ? ».

ML : C’est l’idée que j’ai.

A : « Tu pourras toujours mentionner les grandes lignes ».

ML : On va être amené à se rencontrer une nouvelle fois.

A : « Aucun problème, bien au contraire ! Je te donnerai une date et un lieu dès demain ».

 

3ème rencontre.

Maxime Loiry : Quelles sont les discriminations que subissent les personnes transgenres ?

Anastasia : « Tu poses des questions de plus en plus sensibles (rires) ! Il y en a beaucoup, trop même. En ce qui me concerne, les premières qui me viennent à l’esprit sont celles que tu peux subir lorsque tu vas acheter des fringues dans des boutiques généralistes.

Avant de faire une transition intégrale, j’entends chirurgicale et la prise d’hormones quotidienne, je m’habillais genré féminin, avec des robes, chemisiers et une perruque brune longue que je n’ai jamais changé car elle était très réaliste. Pour la perruque je l’ai balancée lorsque j’ai commencé à avoir les cheveux longs comme maintenant ».

ML : C’est la perruque qui posait problème ?

A : « Pas tellement car elle était bien faite heureusement. Mon corps passait partout car j’étais très fine et je suis toujours aujourd’hui. Je me souviens un jour en rentrant de la fac, je suis passée récupérer un colis dans une boutique. Lorsque je suis rentrée, j’ai vu qu’il y avait du monde donc je commençais à regarder les habits autour de moi. Et là une vendeuse est arrivée et m’a demandé ce que je voulais. Je lui ai dit que je venais pour récupérer un colis. Elle m’a demandé mon nom et a couru pour aller me le chercher.

Je commençais à être un peu mal à l’aise car des gens me regardaient d’une drôle de façon. Je me souviendrai pour toujours de l’arrivée de la vendeuse avec mon colis, qu’elle m’a jeté dans les mains en me disant que je devais partir car je n’avais rien à faire ici, que je ne pouvais pas faire partie de la clientèle ».

ML : C’est discriminatoire.

A : « Oui, surtout que j’étais habillée normalement ».

ML : Et aujourd’hui ?

A : « Quoi aujourd’hui ? ».

ML : Je pensais dans la relation au client(e) de ton activité actuelle.

A : « Ah ça oui. Je n’ai pas de problème avec ce type de discrimination. Lorsque des gens viennent me voir, c’est pour avoir une relation sexuelle, et pour être franche pour la plupart, ils s’en moquent d’avoir une personne transgenre. Bien au contraire malheureusement. Je regrette que les personnes transgenres soient un peu trop fétichisées et pas assez aimées.

Après moi je suis quelqu’un qui marche au réseau, je ne rencontre pas n’importe qui. J’ai des personnes habituées des deux sexes. Et ce n’est pas mon activité principale.

Pour mon travail, je dirai officiel, je fais des missions d’intérim de temps en temps, je demande toujours d’être appelée sur Lyon ou même parfois Valence, comme ça je sors de Grenoble et ça m’évite de croiser les personnes que je rencontre pour les besoins de ma seconde activité ».

ML : C’est déjà arrivé ?

A : « À moi ? Non jamais, à des ami(e)s oui. Souvent les protitué(e)s font de l’intérim car il faut bien avoir un travail légal, payer ses factures et impôts. On ne marque pas qu’ont fait le trottoir ou internet.

L’idéal serait, enfin à mon avis, de légaliser la prostitution afin de fixer des règles et éviter les réseaux mafieux des pays de l’Est qui sont un fléau pour nous, une peur même ».

ML : Et à l’Université ?

A : « Alors, je parle pour mon cas. Les cursus en arts plastiques sont réputés pour accueillir les branleurs et punk à chien gauchistes ».

ML : C’est la réalité (rires) ?

A : « Oui (rires) ! Plus sérieusement, non pas trop. Après je ne suis jamais arrivée en homme à la fac, toutes les personnes qui m’ont fréquentée me voyaient en habits genrés féminins, y compris les profs donc cela n’a pas posé de problème. Après je venais en cours et je partais, je ne suis jamais restée des journées entières à la BU ou devant les bâtiments ».

ML : Pourquoi être arrivée à se prostituer ?

A : « La vie. Tout simplement. Mes parents, ce sont eux qui ont posé le plus de problème. Ils ne l’ont jamais accepté, en tout cas que leur fils devienne une fille avec toutes les conséquences qui suivent, le changement de sexe, l’état civil et toute la paperasse de la Sécu qui est le deuxième enfer après la SOFECT.

J’ai réussi à finir ma Licence, avec mention. Cela devenait ultra compliqué. Après j’ai toujours des missions d’intérim dans la création ou la conception. Je ne souhaite à personne de vivre ce que j’ai vécu, beaucoup dans leur transition ne reviennent pas ».

ML : Quel a été le plus dur avant la transition ?

A : « Se regarder dans le miroir, de voir un visage qu’on déteste, qui ne nous ressemble pas. D’être une femme emprisonnée dans un corps d’homme ».

ML : Et pendant ?

A : « De voir son corps changer, dans le bon sens mais aussi psychologiquement. J’avais l’impression parfois de sentir en moi une sorte de combat permanent entre mon ancien moi en homme et mon nouveau moi en femme. C’est difficile à décrire mais c’est ce que j’ai ressenti ».

ML : Et après, qui a gagné le combat ?

A : « C’est-à-dire ? Tu me perds avec tes questions tordues (rires) ! »

ML : C’est ton sentiment d’être entièrement une femme ou la sensation de cacher d’une certaine manière ta masculinité ?

A : « Ah. C’est la femme qui l’a remporté. Cela à mis du temps mais j’ai pu le faire. Je suis plus heureuse maintenant qu’avant, et cela peu importe la situation dans laquelle je suis aujourd’hui ».

ML : Tu aurais pu faire le choix de continuer à t’habiller d’une manière féminine et non entamer une transition.

A : « Oui, mais j’ai préféré faire l’inverse et terminer mon parcours. Enfin terminer, façon de parler car on est obligé de prendre des hormones jusqu’au cercueil.

Il faudrait que les labos inventent des hormones à prendre une unique fois, cela éviterait de courir tous les 6 mois pour avoir une ordonnance ».

ML : Est-ce que les institutions politiques en France sont transphobes ?

A : « Oui, très. Elles ne le seraient plus si elles acceptaient de nous permettre un changement d’état civil libre et pas trop compliqué. Je ne parle même pas de la transphobie, qui est partout, à tous les niveaux de la société, y compris chez les associations LGBTi+ qui favorisent toutes les lettres sauf la lettre T. D’ailleurs je ne suis membre d’aucune d’entre elles ».

ML : Une dernière question pour clôturer cette troisième rencontre.

A : Je t’en prie. Tu gardes les meilleures pour la quatrième (rires) !

ML : Ce seront les mêmes questions terminales posées aux autres personnes interviewées.

A : Quel luxe !

ML : La voici, quels sont les dangers que le mouvement transgenre peut subir aujourd’hui dans la société ?

A : « Le principal c’est lorsque des personnes cisgenres s’excitent sur des choses futiles comme l’apparence ou l’orientation sexuelle des personnes transgenres. Ce que je déteste le plus c’est les personnes qui pensent que mettre une robe ou des ballerines pour un homme, que ça l’excite et que cela ouvre les portes à des propositions sexuelles inadmissibles.

Souvent les personnes qui changent leur apparence le font pour être en adéquation avec leur personnalité intérieure. Ce n’est pas une invitation pour s’envoyer en l’air avec n’importe qui ou à se faire insulter gratuitement parce que l’on aime ça. Les trans sont des personnes comme les autres, hormis l’apparence pour certains d’entre eux j’en suis d’accord mais cela reste des être humains ».

4ème rencontre.

Maxime Loiry : Voici notre dernière rencontre, du moins pour les besoins du rapport.

Anastasia : « J’espère que tu m’enverras un exemplaire dédicacé (rires) ! ».

ML : Il est peut être un peu tard mais le Président de la République Emmanuel Macron va t’appeler pour te proposer d’être sa nouvelle ministre de l’Egalité entre les femmes et les hommes. Ta première mesure ?

A : « Je ne pense pas qu’un homme comme lui ait besoin d’une prostituée devienne ministre (rires) ! C’est un peu bizarre comme question mais je ne sais pas comment réagir. J’accepterais peut être, j’ai toujours aimé relever des défis après ce n’est pas un travail commun ou classique. J’aimerais bien voir la tête de certains de mes clients en apprenant la nouvelle aux infos (rires) ».

ML : La première mesure ?

A : « Je ferai en premier l’abolition de la binarité des sexes, je remplace le mot fraternité par sororité, je libéralise la procédure du changement de sexe et celle d’état civil ».

ML : Tu as déjà un programme chargé !

A : « Il faut parer à toutes les éventualités ».

ML : Pour la lutte contre la transphobie ?

A : « Je me tournerai vers le nouveau ministre d’Etat, ministre de l’Intérieur pour mettre en place une répression implacable sur la transphobie et sur les LGBTphobies. Je suis certaine qu’il sera d’accord car il aura déjà fait quelques réformes majeures ».

ML : Très drôle. J’imagine que c’est la personne que nous avons en commun qui t’a soufflé cette idée ? Il faudra penser à la remercier (rires) !

A : « Oui (rires) ! Mais rassure toi, ses exigences s’arrêteront à la Place Vendôme ».

ML : Des derniers mots en guise de conclusion finale ?

A : « Déjà ? ».

ML : Oui. Il faut bien que le rideau tombe un jour.

A : « C’est vrai ».

ML : Alors ?

A : « Que dire de plus…Ah oui. Si j’ai pu paraître un peu agressive au début ce n’était pas contre toi, je tiens à m’excuser ».

ML : Ce n’est rien.

A : « Pour le reste, enfin pour ce que j’ai dit. J’espère que cela a permis de t’aider car c’est vraiment cool qu’une personne comme toi s’intéresse à ce sujet là, j’espère que cela va payer à la fin et que tu n’auras pas trop de problèmes dans le traitement du sujets, vis-à-vis de tes profs ou de tes collègues de promo ».

ML : Je mentionne que tu auras un exemplaire au même titre que les autres personnes rencontrées.

A : « Oui tu me l’avais dit. Cela va me faire bizarre car c’est la première fois que mon nom va apparaître sur un travail comme celui-là, enfin pas mon vrai nom mais ma personnalité, ma vie, ce que je suis ».

ML : À ta demande, je ne vais pas tout mentionner notamment sur certains passages.

A : « Oui. Merci ».

ML : Je te laisse la fin.

A : « La fin de quoi ? ».

ML : La conclusion. Les derniers mots.

A : « Ah Oui. J’espère que la société changera dans le bon sens, que les personnes transgenres ou celles en devenir pourront se métamorphoser normalement et en toute sécurité car se voiler la face n’amène rien de bon. Il faut faire confiance en l’avenir, on pourra enfin vivre décemment et exprimer sa véritable personnalité, qui on est vraiment car c’est ça l’humanité ».

Annexe 4 : L’entretien de Paul R

A : Les éléments de contexte

L’entretien de Paul R a été réalisé à Grenoble (Isère, CP 38 000). Il s’agit d’une personne FtM qui a réalisé une réassignation hormono-chirurgicale et qui a obtenu son changement d’état civil il y a peu.

L’objectif de l’entretien était de recueillir la position d’un homme transgenre sur les rapports qu’entretiennent les personnes transgenres avec la binarité des sexes et les codes liés aux genres masculin et féminin dans la construction de sa propre identité. Les rapports professionnels ont également été abordés notamment sur l’employabilité des personnes transgenres.

B : L’entretien

À la demande de l’intéressé, l’entretien n’a pas été retranscrit.

 

Annexe 5 : L’entretien de Romain BANCEL

A : Les éléments de contexte

L’entretien de Romain BANCEL a été réalisé à Valence (Drôme, CP 26 000). Il est à noter qu’il s’agit uniquement d’un débat non préparé en amont. Il s’agit d’une personne qui a toujours soutenu depuis le début la démarche du présent rapport de recherche ainsi que les opérations liées à ce dernier. L’emploi de la deuxième personne du pluriel dans la retranscription a été réalisée afin d’objectiver les propos de l’entretien et d’instaurer une distance vis-à-vis de lui étant donné que c’est un proche.

L’objectif de l’entretien était de recueillir la position d’un homme cisgenre hétérosexuel sur les questions relatives aux discriminations liées à l’identité de genre et à l’orientation sexuelle que peuvent subir les personnes transgenres MtF et FtM.

B : L’entretien

Maxime Loiry : Présentez-vous.

Romain Bancel : « Je suis Romain Bancel, un étudiant du M1 Droit public, mention Droit des collectivités territoriales de la Faculté de Droit de Grenoble comme vous d’ailleurs. J’habite à Valence ».

ML : Vous m’avez parlé d’un de vos amis qui fût victime d’une agression ? Vous pouvez m’en dire plus ?

RB : « Pendant la fête de la musique à Valence l’année dernière, mon ami se baladait avec sa copine et quelques amis dans un quartier sensible de Valence. Ils se sont fait interpeler par des habitants qui leur disaient qu’ils ne voulaient pas d’homosexuels chez eux alors qu’il n’était même pas concerné. Il s’est défendu en disant qu’on avait le droit d’être homosexuel mais il s’est fait tabasser avant même d’avoir fini de parler ».

ML : Est-ce qu’un jour la religion pourra accepter l’homosexualité ?

RB : « Toutes les religions sont conservatrices. Ça va être dur. Pour la religion catholique, il me semble que le Pape Benoit XVI avait déclaré que le préservatif n’était pas le meilleur moyen pour lutter contre le sida et le Pape François disait quant à lui que l’homosexualité était une maladie psychiatrique. On est loin du progrès !

J’ai fait un travail de recherche en 2ème année de Licence sur les droits des homosexuels. J’ai été choqué d’apprendre que ce n’est que vers les années 1990 que l’OMS a considéré que l’homosexualité n’était pas une maladie. C’est récent quant on y pense, même pas 30 ans ! ».

ML : Aujourd’hui, pour revenir sur les personnes transgenres, ces personnes peuvent se balader dans la rue sans risques ?

RB : « Je suis pragmatique. On sait très bien qu’il y a des quartiers, à Valence ou à Grenoble, où la vie n’est pas sereine pour ces personnes. Dans le plus simple des cas, il y aurait des regards, soit d’interrogation mais parfois ils sont plus sombres. Des personnes religieuses ou non, des blancs ou des noirs, risquent de regarder ces personnes pour, je pense, essentiellement se moquer ou faire du scandale. C’est compliqué aujourd’hui.

Ce qui m’importe c’est que ces personnes soient herseuses, qu’elles puissent vivre sans craindre de se faire agresser à chaque coin de rue ».

ML : Les regards noirs viennent plus des gens normaux ou des gens religieux ?

RB: « Bonne question. Je n’ai pas d’avis là-dessus. J’essaye de ne pas vivre dans un monde de bisousnours mais beaucoup de gens se font interpeller sans raisons. Il y a des cons partout. Cela dépend de l’éducation de la personne. Des gens religieux peuvent être très tolérants et accueillir n’importe qui dans leur immeuble ou quartier ».

ML : Selon vous, quels seraient les facteurs qui pourraient expliquer les agressions sur les personnes transgenres ? Ces personnes doivent-elles adopter des comportements pour éviter les agressions ?

RB: « Ces personnes n’ont rien à faire. Il ne faut pas aboutir à la logique de se cacher afin d’éviter les autres, envisagés ici comme des agresseurs potentiels. Elles peuvent se fondre dans la masse, dans l’océan du quotidien. Après, l’océan fait quelques vagues, ce qui n’est pas gênant. Il faut surmonter les regards.

Pour être franc, ces personnes ont le choix. Se fondre dans la masse ou opter pour des comportements plus fous. Il y a un juste milieu. Ces personnes doivent rester elles-mêmes, c’est la meilleure garantie pour passer inaperçu. Il faut prendre en compte l’endroit aussi ».

ML : On peut donc montrer sa transidentité mais sans l’exagérer ?

RB : « Je ne sais pas l’expliquer mais restons pragmatiques. Aujourd’hui, il y a des tensions dans la société sur ce sujet. Il faut rester sobre. Une idée de seuil à trouver. Pour parler chiffons, il faut s’habiller selon ses goûts et en adéquation avec les situations que l’ont va trouver dans sa journée.

Pour être franc, je donnerai bien des explications de savoir-vivre à ces gens qui agressent des personnes transgenres uniquement à cause de ça ».

ML : Pour revenir à ce projet de rencontre entre vous et moi, aviez-vous de l’appréhension ?

RB : « C’est la première fois qu’un ami comme vous me parle de ce sujet dans ces circonstances. Il me parle de garçons qui s’habillent en filles et inversement. J’avais peur de moi-même, dans les réponses et les réactions que je pouvais vous apporter ».

ML : Pour revenir au fil conducteur, qui pourrait fixer le seuil ?

RB: « Je pense que cela doit venir des personnes concernées, certainement pas de l’Etat ou de la société. Il faut en appeler au bon sens. Si la personne a envie de s’habiller différemment, tant mieux pour elle, si elle est heureuse comme ça.

Je prends exemple de la Manga mania de Valence. J’y suis allé et j’ai vu, étant donné le contexte, des personnes qui s’habillaient d’une manière décalée. Certaines personnes autour n’hésitaient pas à rire. Il n’y a pas de côté bizarre à choisir un vêtement comparé à un autre. Au moins, dans ces endroits, il n’y a pas ou rarement des critiques sur les personnes, toutes considérations vestimentaires mis à part ».

ML : Faudrait-il des lieux pour les personnes LGBTi+ leur permettant de s’exprimer en toute liberté ?

RB: « Il ne faut pas que ce soit un refuge, il ne faut pas isoler ces personnes. Pour être trash, je pense que c’est plus facile pour une personne LGBTi+ de draguer dans une boite de nuit LGBTi+ (rires) ! Soyons réalistes. Que chacun fasse comme il le souhaite, ce sera déjà pas mal !

Il ne faut pas que cela tourne à la ségrégation de ces personnes. Ce sont des personnes qui ont des intérêts en commun et qui décident de se rejoindre le temps d’une soirée. Avoir des boites de nuit spécialisées avec ses goûts, c’est un peu être un privilégié, c’est un endroit à soi.

Après, rien n’empêche que j’aille dans une boite de nuit LGBTi+. J’y vais pour m’amuser, pas pour chasser (rires) ! Il ne me semble pas que ces endroits là s’affichent ostensiblement dans le paysage des sorties à faire le week-end, peut être pour la sécurité ».

ML : Oui. C’est vrai malheureusement.

RB: « Pour continuer là-dessus, je ne trouve pas normal que les personnes LGBTi+ se fassent accompagner pour entrer ou sortir des boites par des personnes chargées de veiller sur elles. D’accord c’est pour la sécurité mais il faut laisser faire aux personnes ce qu’elles ont envie de faire.

Si un homme se sent femme et qu’il met une robe ou des talons pour sortir, il faut le laisser et non le brider. Au Moyen-âge, on brulait bien les personnes rousses mais heureusement la société a évolué. Elle évoluera pour les personnes LGBTi+, ça prendra du temps mais je suis confiant pour l’avenir ».

ML : Est-ce serait pour quand ?

RB: « Beaucoup de personnes, sur des grands sujets de société, préfèrent jouer la stabilité ou la continuité. Certaines sont prêtes mais d’autres non, à accepter une différence ».

ML : Comme vouloir changer de sexe ?

RB : « Oui. Tout à fait. J’aimerai bien voir la tête de certains Député(e)s face à des personnes transgenres. Ce serait le royaume de la langue de bois, une fois de plus ! ».

ML : À votre avis, quelles sont les principales discriminations que rencontrent les personnes transgenres ?

RB: « C’est le harcèlement de rue qui me vient à l’esprit en premier ».

ML : C’est plus difficile pour un homme de s’habiller en femme ou une femme de s’habiller en homme ?

RB: « C’est difficile pour un homme de vouloir mettre des ballerines ou une robe par exemple. J’ai l’impression que les habits des hommes peuvent être portés par tout le monde, y compris par des femmes.

On est clairement dans une société patriarcale, encore aujourd’hui. On le voit encore au sein des familles hétérosexuelles. Il est vrai que cela s’atténue avec les générations qui passent, notamment dans les rôles au sein du foyer. Après, le plus souvent, cela reste la femme qui fait le ménage et de temps en temps l’homme. Il y a un décloisement sur l’attribution sexuée des rôles, c’est une question de génération encore une fois ».

ML : Est-ce qu’un homme peut avoir une part de féminité ?

RB: « Oui, on peut dire ça. Après, ce n’est pas parce qu’un homme se met de la crème sur le visage le matin qu’il va devenir une femme. On se regarde tous dans le miroir le matin.

C’est un rapport entre la biologie et la psychologie. Un homme peut très bien être un homme d’un point de vue biologique mais se sentir femme psychologiquement ».

ML : Y-a-t-il une évolution dans le domaine du sport ?

RB: « Je l’observe dans la pratique de la boxe française. Il y a pas mal de femmes qui sont inscrites et qui n’ont rien à envier aux hommes vis-à-vis du niveau sportif ».

ML : À votre avis, les vêtements ont-ils un sexe ?

RB : « Si on prend des jeans, on dit qu’ils sont unisexes. Après pour certains très typiques, une jupe par exemple, c’est clairement associée aux femmes malgré qu’il existe des jupes écossaises pour les hommes.

Ce sont les mœurs qui font évoluer l’identité des vêtements. Quant on porte un vêtement, j’ai l’impression qu’il nous oblige un certain savoir-être, qui à défaut d’être respecté, peut susciter de la gène ou de l’interrogation ».

ML : Que pensez-vous de Bilal Hassani ?

RB: « Mis à part que sa prestation ne nous a pas permis de remporter l’Eurovision (rires), il permet de mettre en avant la communauté LGBTi+ sous un beau jour, de montrer que ces personnes sont comme les autres ».

ML : Pour ou contre un changement libre d’état civil pour les personnes transgenres ?

RB: « Pour moi, l’état civil n’est qu’un bout de papier. Je comprends que ce soit important pour les personnes se sentant femme ou homme de voir correspondre leur ressentiment d’une manière légale. Après, la binarité des sexes a des défauts. Pourquoi ne pas envisager une réforme qui autorise la personne à demander le changement de la mention du sexe à partir de 18 ans.

Je peux comprendre qu’une personne puisse se sentir ni homme ni femme mais dans la société actuelle, il est difficile d’être entre les deux. Une transition serait alors possible pour que la personne puisse vivre en harmonie ».

ML : Demain, vous êtes nommé par le Président de la République en tant que ministre de l’Egalité entre les femmes et les hommes, votre première mesure ?

RB: « Je ne saurai même pas par où commencer (rires) ! Si j’ai les moyens et le champ libre, je mettrai les pleins feux sur l’éducation à propos du respect des autres. Tout va se jouer là-dessus.

Ce serait l’idée que les jeunes d’aujourd’hui, je pense dès le lycée, prennent conscience car ils sont à peu près matures, qu’il y a des personnes qui ne s’habillent pas pareil, qui préfèrent les garçons ou les filles, mais  qui restent des être humains, des personnes normales.

Il faut se servir de ces différences pour créer une sorte de mouvement, de force, qui rendrait intolérable le harcèlement de rue, les agressions homophobes ou transphobes ».

ML : Des derniers mots ?

RB: « J’espère que la société changera dans le bon sens. Je fais confiance à la part d’humanité que nous avons en nous. La société devra forcément évoluer, ce sera dur mais on va y arriver. Ce serait bien quand même un monde où chacun puisse vivre heureux ».

 

Annexe 6 : L’entretien de Soline LAURENT

A : Les éléments de contexte

L’entretien de Soline LAURENT a été réalisé à Saint-Martin-d’Hères (Isère, CP 38 400). Il est à noter qu’elle est membre tout comme de la promotion 2019-2020 du Master 1 de Droit public de la Faculté de Droit de Grenoble.

L’objectif de l’interview était de recueillir l’avis et les positions d’une jeune femme très attentive sur les questions liées à la communauté LGBTi+ et à la perception des différences liées à l’identité de genre dans la société.

B : L’entretien

Maxime Loiry : Présentez-vous ? Pourquoi avez-vous une sensibilité vis-à-vis du milieu LGBTi+ ?

Soline Laurent : « Je m’appelle Soline, j’ai 22 ans, je suis Verseau. Je suis née à Colmar mais j’ai passé toute mon enfance et adolescence en Savoie dans un petit village de moins de trois-cent-cinquante habitants. Je viens d’un milieu très cisgenre et hétéronormé, que ce soit au niveau familial ou dans un cercle social plus élargi.

J’ai grandi avec très peu de connaissances sur le milieu LGBTi+ et donc nécessairement des tonnes de clichés en tête. Pour moi, l’existence des personnes de ce milieu relevait seulement de l’ordre du théorique : ils existaient mais sûrement dans un monde parallèle au nôtre, comme les célébrités, puisque je n’en avais jamais vu. Je simplifie évidemment un peu les choses, mais globalement c’était comme ça que je le vivais.

Pour être honnête, je n’ai découvert le milieu LGBTi+ que très tardivement, quelque chose comme le milieu de mes années lycée il me semble. J’y ai été très sensible rapidement puisque c’est à cette période là également que j’ai pleinement réalisé que je faisais en réalité partie de ce milieu. À cette époque, je n’osais pas vraiment en parler aux gens autour de moi, et donc j’ai fait toute ma culture par internet. Tumblr et Twitter ont été mes grands guides spirituels.

À la sortie du lycée, j’ai finalement rencontré plus de personnes qui étaient dans ce milieu, même des gens que je connaissais d’avant mais avec qui je n’avais jamais vraiment parlé de ça. Discuter avec d’autres personnes m’a permis de réaliser à quel point j’étais une débutante sur le sujet. J’ai découvert beaucoup de choses dans un très court laps de temps.

Avec le recul aujourd’hui, je trouve ça fou d’avoir été ignorante aussi longtemps sur les fondements mêmes du sujet, surtout quand j’étais directement concernée par le-dit sujet. J’aurais aimé être renseignée plus tôt et c’est pour ça que maintenant, je n’hésite pas à en parler autour de moi. Quand j’ai l’occasion d’informer des personnes, je le vis toujours comme une petite victoire ».

ML : Selon vous, quelles sont les principales difficultés que peuvent rencontrer les personnes LGBTi+ ?

SL : « Je pense qu’aujourd’hui une des difficultés principale pour les personnes du milieu LGBTi+ concerne tout ce qui est discriminations ordinaires.

Avec les grandes évolutions qu’on a eu ces dernières années, j’ai la sensation qu’il y a une tendance à invisibiliser d’autres problèmes parce qu’ils sont moins importants. Ce sont des choses toutes bêtes en apparence, comme par exemple le vocabulaire que l’on va utiliser, le fait que si l’on cherche le mot couple sur Google, des couples hétérosexuels sont les premiers (et seuls, sur plusieurs pages) résultats à apparaître ou encore la question du coming-out.

Le fait est qu’on est dans un système hétéro-normatif et cis-centré. Les personnes cis et hétéro possèdent un certain pouvoir de normativité, normativité qui a tendance à marginaliser toutes les personnes, qui de part leur genre et/ou leur sexualité, n’entrent pas dans ce cadre. Il n’y a pas longtemps, j’ai assisté à une table ronde à l’Institut d’études politiques de Grenoble, dans le cadre de la semaine sur les discriminations, qui discutait de l’homophobie au travail. A été abordé le sujet des pressions sociales que doivent supporter les personnes LGBTi+ dans le cadre professionnel. Une des intervenantes parlait du stigmate invisible des LGBTi+. Par exemple, au cours d’une conversation entre collègues, la personne LGBTi+ ne va pas pouvoir s’exprimer aussi librement que les autres personnes (neutraliser le sexe du conjoint/de la conjointe ou éviter le sujet pour éviter la stigmatisation). Et ce n’est là qu’une seule face de ces discriminations ordinaires.

Les personnes LGBTi+ sont aussi souvent accusées de crier leur sexualité sur tous les toits, comme une sorte de prosélytisme. Mais paradoxalement la personne LGBTi+ qui ne fait pas son coming-out manipule la confiance de son cercle social. Il y a une sorte de double standard qui met les concernés dans une position inconfortable. Le fait de toujours faire attention à ses mots est socialement et mentalement coûteux. Enfin, il y a encore un phénomène d’hypertrophie de la sexualité : la personne est réduite à sa sexualité.

Du point de vue culturel, on assiste ces dernières années à une représentation plus élevée des personnes LGBTi+ dans les films et séries. Malheureusement, il s’agit souvent de personnages secondaires, voir tertiaires et quand ce n’est pas le cas, leur sexualité/identité de genre est tragiquement mise en scène : l’histoire est centrée et réduite à cette part d’eux-mêmes.

Cette intégration est donc très souvent maladroite et mal amenée, et conduit à donner une image du milieu LGBTi+ qui n’est pas en adéquation avec les réalités. Là encore, ce n’est qu’une facette parmi tant d’autres.

Une autre difficulté pour les personnes LGBTi+, c’est le manque d’informations. Si on ne s’intéresse pas au sujet, les connaissances ne seront que très superficielles. Aujourd’hui, c’est un peu moins le cas qu’auparavant, comme c’est un sujet beaucoup plus médiatisé que par le passé. Mais ça reste encore limité, maladroit et pas suffisant pour normaliser le sujet. Les personnes LGBTi+ vont sans cesse se trouver dans des situations dans lesquelles elles doivent expliquer, se justifier, éduquer les autres alors que ça ne devrait pas être le cas.

Enfin, il y a également la difficulté liée à tout ce qui a trait aux agressions verbales et physiques. Je parle bien entendu des agressions que l’on peut lire dans les faits divers qui se passent dans la rue, mais également des agressions plus insidieuses, comme les thérapies de conversion (encore autorisées en France), les violences médicales (sur les personnes intersexes notamment), les violences administratives… ».

ML : Est-ce que vous pensez que les personnes transgenres ont une place particulière dans le mouvement LGBTi+ ?

SL : « Je sais que certaine personnes s’interrogent sur la place des personnes transgenres dans le mouvement LGBT, du fait qu’à la différence des LGB, on ne parle pas ici de sexualité, mais de genre.

Pour ma part, il me semblerait incohérent et injurieux de dire que les personnes transgenres n’ont pas leur place dans le mouvement LGBT.

Déjà, il est important de prendre en compte le rapprochement entre les discriminations subies par les personnes LGB et les personnes trans. Elles sont du même acabit, s’expriment de la même manière et sont liées à l’identité de genre et à l’identité sexuelle. Or, dans la tête du public, il y a un fort lien entre sexualité et genre. Par exemple, il est assez courant pour les personnes non renseignées sur le sujet de confondre et/ou d’associer les deux. De plus, d’un point de vue législatif les textes incriminant l’homophobie sont aussi ceux qui incriminent la transphobie (exemple de l’article 132-77 du Code pénal qui fait de l’homophobie et de la transphobie un critère aggravant un crime ou un délit).

D’autre part, la place des personnes transgenres dans le combat militant est essentielle du point de vue historique. Sylvia Rivera et Marsha P. Johnson, deux femmes transgenres et activistes, ont été en première ligne des émeutes de Stonewall, émeutes qui peuvent être considérées comme le moment symbolique de la naissance (américaine, puis mondiale) du militantisme LGBTi+. Pas mal de droits ont été acquis pour les personnes de la communauté grâce aux mouvements, à la bataille pour la visibilité et la reconnaissance des personnes transgenres.

Aujourd’hui, c’est assez évident que le combat des personnes transgenre a été placé au centre des préoccupations LGBTi+. Lesbiennes, gays, bisexuels… continuent leur combat mais ne sont plus en première ligne. Cette place est celle des personnes transgenres. Ce sont sûrement les personnes qui font face au plus de discriminations aujourd’hui, d’autant plus que si la médiatisation des personnes transgenres permet l’information, elle a aussi l’effet pervers d’augmenter certaines agressions (notamment par l’intermédiaire du harcèlement sur les réseaux sociaux) ».

ML : À quoi sert une transition pour une personne transgenre ? Quelle est votre définition ?

SL : « La transition, c’est un processus sur le long terme. Je dirais que ce processus commence à partir du moment où la personne transgenre, intersexe ou queer décide d’agir en suivant un certain rôle de genre (ou en sortant justement de ces rôles) qui ne serait originellement et socialement pas celui adapté à son sexe biologique. C’est un processus qui peut être social, physique et/ou médical.

Sur la question de l’utilité pour une personne transgenre de la transition, je pense que ça dépend énormément du vécu de chaque personne.

Il y a une pression sociale sur le fait que l’on doive répondre à certains critères (physiques mais aussi sociaux) lorsque l’on est associé à un genre. Une personne transgenre qui a un bon passing, par exemple, sera souvent plus facilement acceptée par la société parce qu’elle correspond physiquement au genre auquel elle s’associe elle-même. Se faire correctement genrer, être traité en fonction de son genre par les gens autour de soi me paraît être essentiel dans un parcours de transition. Or, dans une société où tout (ou presque) passe par les apparences et où les gens ont une notion accrue de la binarité des rôles, il semble difficile de passer outre tout processus de transition.

Mais est-ce qu’il est pour autant nécessaire de passer par une transition totale (j’entends par là physique et surtout médicale) ? Encore une fois, je trouve que c’est une question très personnelle, intrinsèquement liée au parcours et vécu de chacun. Certaines personnes trans vont être dysphoriques, d’autres non. Pour certaines, les opérations de réassignation seront nécessaires pour qu’elles se sentent bien avec elles-mêmes, dans leurs corps. Pour d’autres non. Certaines personnes vont agir de manière très prononcée selon les cadres sociaux du genre auquel elles appartiennent. D’autres non. Il n’y a pas un comportement universel que les personnes transgenres devraient suivre.

Très personnellement, je pense que chacun devrait être libre de gérer sa transition comme il le souhaite. Une personne transgenre ne se définit ni par son apparence, ni par ses organes : elle est légitime, du moment qu’elle se considère et se présente de telle ou telle manière. Chacun devrait respecter ça ».

ML : Y-a-t-il des difficultés dans notre société à propos des personnes transgenres ?

SL : « Je renvoie d’abord à la question numéro deux sur les principales difficultés rencontrées par les personnes LGBTi+ : les personnes transgenres sont directement concernées par ces difficultés, notamment tout ce qui concerne le manque d’information.

J’ai le sentiment qu’il y a chez la plupart des personnes cisgenres un sentiment d’incompréhension face aux personnes transgenres. Cette incompréhension de base conduit à des comportements de transphobie ordinaires : les gens posent des questions transphobes sans vraiment s’en rendre compte. C’est parfois même très innocent et sans mauvaises intentions, mais ce sont des choses qui conduisent à des relations déséquilibrées : l’identité de la personne disparaît totalement derrière sa part trans. On ne considère plus la personne, on considère le-a trans. Socialement, c’est quelque chose de terrible. Ce sont des personnes qui ont toujours besoin de se battre, de se justifier pour voir leur identité respectée et acceptée.

Parallèlement, il y a un véritable manque de sensibilisation face à la transphobie. Ce n’est qu’assez récemment que le sujet est abordé dans des campagnes plus officielles, et encore, c’est de manière limitée. La société française actuelle n’est pas faite pour accueillir les personnes trans. C’est une divergence à la norme binaire qu’elle est incapable d’accepter, et cela se traduit par exemple par l’absence de toilettes publiques neutres, par le fait, par exemple, qu’il n’y ait pas un système officiel permettant aux élèves de préciser un prénom d’usage en classe… Dernièrement, l’adoption de l’ouverture à la Procréation Médicalement Assistée pour tous par le Parlement, illustre clairement cette incapacité française à se défaire des normes. Le Parlement a refusé l’ouverture de la PMA aux personnes transgenres ayant effectué un changement d’état civil. Ainsi, ces personnes, même si elles en ont la capacité biologique, ne seront légalement pas autorisées à utiliser leurs gamètes pour avoir un enfant, ou à porter un enfant.

Or, les personnes transgenres sont plus ou moins obligées de procéder à un changement d’état civil pour éviter des situations dangereuses, ou des explications à réitérer à chaque rendez-vous avec des services administratifs, des médecins… Certains parlent ici de transphobie d’État : ce rejet de la PMA pour les personnes transgenres ayant changé d’état civil se fonde sur le fait qu’une personne identifiée civilement comme femme ne peut pas être le père d’un enfant, tout comme une personne identifiée civilement comme homme ne peut pas être la mère d’un enfant. Biologiquement, il est possible pour les personnes transgenres de passer par la PMA. La difficulté ne résulte en réalité que d’une construction sociétale et sociale en France : un homme ne peut pas être enceint, une femme ne peut pas en inséminer une autre par l’intervention d’une PMA.

Les personnes transgenres sont donc écartées d’un moyen d’avoir des enfants (à moins de ne pas changer d’état civil, ce qui n’est pas toujours une option, d’aller à l’étranger ou de tenter l’adoption ce qui n’aboutit que très rarement et après de longues procédures).

Les personnes transgenres font également face à des difficultés au regard de leur transition. Socialement, cela peut mettre toute leur vie en danger. Il y a aussi une véritable problématique liée au parcours de transition. Déjà, la transition médicale (prise d’hormones…) suppose souvent l’intervention d’un psychiatre (bien que la transidentité ne soit plus considérée comme un trouble mental ou une affection psychiatrique). Quelque part, cela constitue une violence que de maintenir, malgré tout, dans le domaine psychiatrique, le phénomène de  transidentité. C’est le psychiatre qui a, lui seul (ou presque, il me semble les endocrinologues peuvent prescrire des hormones sans l’avis d’un psychiatre, mais dans la pratique ce n’est pas quelque chose qui se fait facilement pour les personnes transgenre), le pouvoir de permettre aux personnes trans d’accéder à la possibilité de soins. De plus, les médecins chargés de s’occuper en groupe des personnes transgenres (psychiatres, endocrinologues, chirurgiens) sont parfois insuffisamment formés sur la question, résultant à des violences médicales. Il y a également ce côté qui pousse la personne transgenre à devoir sans cesse se justifier, une fois encore, pour que son cas soit pris en considération (passage devant des commissions pluridisciplinaires, passage devant le tribunal…).

Enfin, il y a aussi le prix que coûte une transition physique : prix des traitements hormonaux, des opérations, des consultations médicales, des rééducations vocales… Si ces dépenses sont souvent remboursées par la sécurité sociale et les mutuelles, il arrive que les médecins dépassent leurs honoraires et alors ce sont parfois quelques milliers d’euros qui doivent venir de la poche des personnes traitées.

Sur un autre domaine, je parlais dans la question deux de la culture cinématographique et des personnes LGBTi+. Il y a dans ce milieu également un autre problème, du fait que c’est quasi systématiquement que des personnes cis-genres qui sont appelées à jouer des rôles de personnages transgenres (par exemples le personnage de Lili Elbe dans The Danish Girl (joué par Eddie Redmayne), le personnage de Lara dans Girl (joué par Victor Polster), le personnage de Ray dans About Ray (joué par Elle Faning)…).

Je suis certaine que derrière ces choix, il y a des explications (visibilité, acteur-rices connu-e-s…). Mais c’est quelque chose d’assez  regrettable, car ces films sont réalisés par des personnes cisgenres et donc non directement concernées par ces problématiques. Ça peut conduire, entre autres, à des dialogues, des mises en scène offensantes, un manque de représentation réelle. Il y a des acteurs-rices transgenres, il est temps de leur donner la place qui leur est due dans l’industrie cinématographique.

Il y a évidemment tout ce qui touche à la transphobie que les personnes peuvent subir dans la rue : regards insistants, insultes, violences physiques. Les personnes qui sortent de la norme binaire de genre sont automatiquement exposées à ces expériences. La transphobie se fonde sur l’apparence des personnes : une personne transgenre sera plus susceptible de subir des délits de faciès du fait de son androgynie ou de sa transidentité. Cela crée de véritables conséquences physiques comme psychologiques chez les victimes.

Enfin, il y a toutes les difficultés liées à l’identification des rôles considérés comme féminin/masculin dans la société. Les personnes transgenres doivent souvent se conformer à des clichés de genre pour être socialement acceptées et reconnues dans leur identité de genre. Un homme transgenre ne peut pas se maquiller, porter une robe. Une femme transgenre ne peut pas avoir les cheveux courts ou de la barbe. Ces discriminations sont d’autant plus difficiles qu’elles viennent non seulement des personnes cisgenres, mais parfois aussi ont lieu au sein de la communauté transgenre même. J’ai cette sensation, parfois, qu’il y a une sorte d’opposition entre vrais et faux transgenres : la vraie personne transgenre sait qu’elle l’est depuis toujours, elle s’est toujours considérée du genre dans lequel elle s’identifie aujourd’hui.

C’est ce que montre la médiatisation des personnes transgenres. Pourtant, dans les témoignages, il y a des centaines de parcours différents, de ressentis différents, de personnes qui se découvrent transgenres alors qu’elles sont adultes…  En plus de ça, il y a comme une injonction à ne pas douter de son genre, alors que les questions d’identité sont incroyablement complexes et liées à une évolution sociale et personnelle.

Au final, les principaux problèmes rencontrés par les personnes transgenres sont pour la grande majorité des problèmes causés non pas par leur transidentité, mais par les personnes qui les entourent et leur regard ».

ML : Y-a-t-il un « effet de mode» à propos des personnes transgenres ?

SL : « On ne peut pas ignorer le fait que depuis quelques temps, le nombre de personnes transgenres semble avoir particulièrement augmenté, surtout parmi les jeunes (adolescents et jeunes adultes).

Déjà, il est certain que l’augmentation de l’acceptation sociale de ce phénomène, la médiatisation et donc la démocratisation de l’identité transgenre, ont joué un rôle fondamental dans cette augmentation. Par exemple, la représentation de personnes transgenres au cinéma, dans les séries (dans des rôles autres que du dramatisme pur ou tertiaire rigolo et excentrique, comme avec le personnage de Nomi Marks dans Sense 8), dans les livres (comme Appelez-moi Nathan de Quentin Zuttion), dans l’art en général permet à des gens de s’identifier et à d’autres de se trouver.

Cela a conduit certaines personnes à comprendre, à se découvrir et à d’autres de s’assumer. La représentation a cette conséquence qui fait que les gens ne se sentent plus seuls et ont moins peur d’être et de revendiquer qui ils sont. Je suis certaine que beaucoup de personnes transgenres auraient aimé avoir ce genre de représentation dans leur jeunesse pour comprendre de quoi il s’agissait, pour se sentir accompagnées dans leurs réflexions.

Le fait est que cette visibilité s’est faite très rapidement dans l’actualité ces dernières années. Il est beaucoup plus facile de se renseigner aujourd’hui qu’auparavant. Il y a une augmentation de personnes transgenres et surtout chez les adolescents. Le fait est que les questions d’identité font partie de l’adolescence. La visibilité transgenre a conduit beaucoup de nombreux jeunes, qui ne se reconnaissaient pas nécessairement dans les attentes de la société conformément à leur genre, à se poser cette question. Il y a ce besoin chez l’homme d’appartenir à un groupe, d’autant plus fort quand on est jeune et qu’on se sent seul. Quelque part, pour certains, c’est peut être une manière de se protéger parce qu’ils ne se connaissent pas encore bien, ou cela fait tout simplement partie de leur développement personnel. Ces personnes découvrent qui elles sont.

À titre personnel, je ne pense pas qu’on puisse à proprement parler d’un phénomène de mode transgenre. Je pense qu’on devrait plus parler d’un phénomène de libération. De plus en plus de personnes trouvent une raison à leur mal-être et surtout trouvent le courage de s’affirmer du fait de cette émancipation des personnes transgenres. Parallèlement, ce n’est pas une mauvaise chose de s’interroger sur qui on est et de se remettre en question.

Le fait de s’identifier comme personne transgenre, même pour un temps seulement et à défaut d’autres mots (liés à des identités de genre en dehors de la division binaire qui prévaut encore aujourd’hui par exemple), peut aider dans la construction de certaines personnes. On est au début d’une nouvelle approche de l’identité de genre par les gens, une évolution des pensées et des consciences. On ne peut pas encore être certain de ce que cela va apporter et surtout comment cela va évoluer dans les années à venir.

Je trouve qu’il est assez difficile de répondre à cette question car peut-on réellement accuser certaines personnes de faire semblant (pas volontairement) d’être transgenres juste pour faire partie d’un groupe social ? La transidentité est avant tout une question de ressenti et je sais que je ne suis pas la mieux placée pour me prononcer plus que ça là-dessus ».

ML : Que pensez-vous du traitement des personnes « trans » par les associations LGBTi+ ? Y a t-il des carences ? Des difficultés ?

SL : « C’est une question sur laquelle je dois avouer être assez peu renseignée, comme je ne fais partie d’aucune association.

Une des rares choses que j’ai suivie par rapport aux associations LGBTi+, c’est la vidéo sortie par l’association Inter-LGBT pour « soutenir » les personnes transgenres et qui a fait scandale dans le sens où, de manière sous-jacente, est presque passé le message selon lequel on peut maltraiter son enfant « pour son bien », en attendant d’autres solutions. Il y a aussi cette idée qu’être trans se fait forcément dans la tristesse et la douleur.

J’ai aussi appris en regardant la websérie Les engagés que les associations LGBT ont parfois des comportements très limites envers les personnes transgenres. Il est fait référence par exemple dans un épisode à une association qui souhaite faire intervenir la SOFECT pour parler et informer sur les personnes transgenres. Or, cette société n’est pas connue pour son caractère trans-friendly, au contraire. Elle est décriée par plusieurs association trans comme la transphobie médicale organisée (notamment de part ses méthodes ouvertement transphobes).

En me renseignant, j’avais vu qu’il s’agissait d’une situation réelle, dans laquelle l’association LGB de Montpellier avait invité, entre autres, des membres de la SOFECT pour informer sur la transidentité (en 2017). Il est aussi fait référence à l’invisibilisation des personnes trans (entre autres) dans la Marche des Fiertés, notamment par le biais du Pink Washing (les commerçants sont près à dépenser leur argent pour soutenir la cause LGBT mais dès qu’il s’agit de mettre les T à l’honneur, et non pas les G, ils sont plus frileux). Le G dans LGBTi+ a une place massive et vient cacher les autres combats.

C’est une base fragile pour fonder un avis complet sur la question du traitement des personnes transgenres dans les associations LGBT mais il me semble ressortir l’idée assez claire qu’elles sont encore trop laissées de côté au profit des autres lettres au sein des associations. Les associations LGBT sont composées en grande partie de personnes cisgenres, et même avec une éducation sur les questions de sexualité, elles font toujours preuve de transphobie ».

ML : Faut-il remettre en cause la binarité des sexes ? Pourquoi ?

SL : « Je pense qu’il est nécessaire de remettre en cause la binarité des sexes.

En France, l’assignation à l’un ou l’autre des deux sexes est obligatoire. On le voit au travers les papiers administratifs (carte d’identité, permis…), où cette détermination semble s’imposer comme une vérité naturelle inflexible et donc, comme nécessité juridique au même titre que l’âge par exemple. La catégorisation binaire des sexes entraîne des conséquences juridiques importantes (mention dans l’état civil). Or, les personnes intersexes viennent démontrer que cette vérité naturelle d’une dualité des sexes n’en est pas une.

Il n’y a pas deux sexes, masculin et féminin, mais tout un tas de nuance qu’on ne peut pas nécessairement définir au travers de petites cases. Dès lors, il s’agit d’une question qui relève en réalité de la vie privée des personnes et non pas à une nécessité d’ordre public. Certains pays ont déjà pris en compte ce fait, comme l’Allemagne, en permettant l’enregistrement du sexe des enfants nés comme neutre. Il y a un profond enracinement de la binarité des sexes en France et ça conduit à des comportements terribles, notamment des violences médicales injustifiables sur des personnes intersexes dès l’enfance.

Enfin, la binarité des sexes peut aussi poser des problèmes au niveau de l’identité de genre. Il y a une multiplicité des identités de genre (genderfluid, agenre…) qui ne s’inscrivent pas dans une logique de binarité. Les personnes genderqueer au sens large s’inscrivent ainsi parfois dans une non binarité de genre limitée par leur état civil masculin ou féminin.

La remise en cause de la binarité des sexes est selon moi une chose sur laquelle il faut discuter dans les évolutions sociétales ».

ML : Pour vous, dans notre société, c’est plus facile qu’un homme devienne une femme ou qu’une femme devienne un homme ?

SL : « Je trouve la question un peu maladroite, on ne devrait pas avoir à mesurer les différents degrés de souffrance. Et surtout, on ne devrait pas séparer un groupe social qui fait déjà l’objet de trop de débats qui tente de les séparer. Chacune des transitions a son lot d’avantages et de désavantages. De plus, mon opinion est biaisée par le fait que je ne suis pas transgenre et je n’ai donc pas vécu toutes les discriminations que ces personnes ont pu vivre.

Sur la transition sociale, la société française est sexiste. Les femmes sont toujours aujourd’hui victimes du mépris et malgré des évolutions, la société reste dans sa globalité très patriarcale. Les femmes transgenres subissent alors une double discrimination : en tant que femme mais également en tant que personne transgenre. Ainsi, les femmes transgenres perdent l’avantage qu’apporte le fait d’être un homme en société.

Parallèlement à ce phénomène, il y a aussi le problème de la masculinité toxique qui encourage des comportements misogynes et le rejet de comportements/apparences efféminées chez les hommes. Les femmes transgenres sont susceptibles d’être victimes de plus de violences du fait de n’être considérées parfois que comme des « hommes déguisés ». Les hommes transgenres peuvent aussi être touchés par cette masculinité toxique dans le sens où il peut s’agir de valeurs qu’on tente de leur inculquer.

Sur la transition physique, la transition hormonale chez les femmes transgenres, si elle commence après l’adolescence, est assez incomplète. Le fait est que la testostérone a des effets irrémédiables (squelette, musculature, pilosité) auxquels le traitement hormonal ne peut rien.

Sur les opérations de réassignation, il me semble que tout ce qui touche à la vaginoplastie et augmentation mammaire sont des opérations maîtrisées et qui mènent à de très bons résultats. Les opérations pour les personnes transgenre FtM cependant sont plus nombreuses et délicates. La mastectomie laisse des cicatrices. L’hystérotomie est une opération très invasive dont la guérison est longe. Enfin, la phalloplastie n’a pas encore des résultats très satisfaisants ».

ML : Les personnes queer ont-elles une légitimité suffisante pour intégrer les mouvements LGBTi + ?

SL : « Les problématiques rencontrées par les personnes queer correspondent à celles rencontrées par les personnes LGBTi+. Il y a en effet parfois des questions de transition pour les personnes queer, afin que l’image qu’elles renvoient soit plus en adéquation avec ce à quoi elles s’identifient. De plus, les personnes queer sont aussi victimes de discrimination, au même titre que les personnes LGBTi+. Insultes, moqueries, agressions, difficultés professionnelles, exclusions de sphères sociales… découlent du fait que les personnes queer ne s’insèrent pas dans une logique binaire ou normative du monde.

Une autre violence plus insidieuse subie par les personnes queer est celle de leur invisibilité. Les personnes queer ne sont pas reconnues comme un groupe réel. Encore une fois, on peut prendre l’exemple de l’étiquetage homme/femme sur les papiers d’identité, ce qui peut être le générateur d’énormément de dysphorie et une invalidation de l’identité et du vécu de certaines personnes. Ces personnes se trouvent marginalisées et leur identité reléguées au rang de lubie. Il y a donc pour elles une plus grande difficulté à accéder à des traitements hormonaux…

Les revendications des personnes queer sont donc dans un certain sens les mêmes que celles des personnes LGBTi+ au sens plus large (combat pour la visibilité et la sensibilisation, mise en place de vrais dispositifs pour lutter contre les discriminations, accès égal aux soins, respect des différents genres et sexualités).

Pour moi, les personnes queer ont dès lors toute leur place dans la communauté LGBTi+ ».

ML : Que pensez-vous de la fluidité du genre ?

SL : « Nous sommes dans un monde en évolution. Il y a un certain rejet des normes et codes hiérarchiques établis par une société patriarcale, un désir de se libérer d’une masculinité toxique et omniprésente. C’est une véritable transformation de la culture, une libération au regard des usages sociaux.

L’identité de genre est une identité sociale qui peut être, ou non, alignée sur l’identité sexuelle. Elle est profondément liée cependant à ce que la société attend d’une personne. Une personne genrée fille aimera le maquillage, sera douce et souriante. Une personne genrée garçon aimera le sport, sera fort et insensible. Ce sont des exemples totalement clichés, mais c’est sur cette idée globale que se fonde le genre. D’une société à une autre donc, les rôles attendus d’une personne peuvent être différents au regard des cultures, mœurs, éducations prodigués.

Je pense qu’aujourd’hui le genre a perdu de son importance. Il y a une volonté de plus en plus forte de s’affirmer en tant que personne avant de s’affirmer en tant qu’homme ou femme. Les codes s’échangent et ça se voit particulièrement au travers du monde de la mode (qui a par ailleurs toujours joué avec les codes) : vestiaires hommes et femmes s’échangent, Nicolas Ghesquière fait défiler Jaden Smith en jupe Louis Vuitton, des collections a-genres sont lancées, les présentations de maquillage ne s’adressent plus seulement aux femmes, les tenues et maquillages qui tordent le cou aux principes de genre portées lors des Met Gala (par Billy Porter, Michael Urie, Ezra Miller…)…

La fluidité de genre est de plus en plus présente dans nos sociétés, démocratisée par des célébrités (Ezra Miller, Ruby Rose, Rebecca Sugar…) et portée par les combats LGBTi+.

Pour moi, la fluidité de genre permet à chacun de construire son identité de manière très libre. C’est une nouvelle manière de vivre qui s’impose presque nécessairement comme un mouvement social militant. Féminité et masculinité ne sont en fait que les multiples reflets d’une expérience humaine globale. Chacun porte en soi une expérience unique que sa manière de vivre va refléter. La fluidité du genre permet une expression plus réelle, libre, moins contrite par des attentes sociales et sociétales, de la personne en tant que telle. C’est une nouvelle manière de se définir.

J’ai conscience après que c’est une vision très utopique. La question de la fluidité du genre conduit nécessairement à la création d’un genre neutre ou mieux, à la disparition de la notion de genre. Néanmoins il est certain que la société n’est pas prête à vivre des changements aussi radicaux (langage et société genrés entre autres) ».

ML : Avez-vous un avis sur Bilal Hassani et Conchita Wurst ? Ces personnes peuvent-elles apporter quelque chose à la communauté LGBTi+ ?

SL : « J’ai décidé de réunir ces deux questions car je ne connais pas plus que ça ces deux personnalités. Je n’ai pas d’avis sur eux à proprement parler, si ce n’est que j’aime et admire leur assurance.

Entre Conchita qui apparaît en Drag Queen barbue et Bilal Hassani qui se présente sur scène maquillé et portant fièrement une perruque, les deux viennent catapulter les représentations stéréotypées liées à la représentation que l’on attend d’eux. Ils se sont imposés comme des icônes de la communauté queer.

Ces dernières années, la scène de l’Eurovision s’est trouvée être un lieu d’expression pour les personnes LGBTi+. Les critiques soulevées sur l’accueil de candidats LGBT a conduit à en faire une sorte de tribune au nom de leurs droits. Des personnages tels que Bilal Hassani et Conchita portent des valeurs de tolérance et bienveillance des uns envers les autres, d’ouverture d’esprit. Leur médiatisation à une échelle européenne, sur un concours qui est toujours assez suivi en France permet de faire passer ce message à un public large, généraliste (et non pas forcément que LGBTi+). Ils permettent une visibilité de cette évolution des rôles de genre, aident à normaliser ces sorties du système aux yeux du grand public.

Je pense sincèrement que c’est ce genre de représentation qui peut aider, encourager des personnes à se trouver et à s’affirmer réellement ».

ML : Pourquoi n’avoir pas indiqué votre parcours universitaire à la première question ?

SL : « Ce n’est pas un parcours qui me plaît, qui me représente. Je ne me sens pas étudiante en droit, d’ailleurs je ne suis pas douée. J’ai eu juste de la chance.

Je ne parle jamais de mes études, sauf si on me pose la question. Je ne trouve pas cela intéressant. C’est lié à ma famille ».

ML : Pourquoi avoir marqué que vous étiez Verseau ?

SL : « Je n’accorde pas d’importance astrologique mais je me sens proche du mien. C’est assez psychologique. Je voulais le caser ».

ML : Pourquoi un intérêt pour la communauté LGBTi+ ?

SL : « Je suis pansexuelle, je l’ai su très tard lors d’une conversation téléphonique avec une amie qui me racontait qu’elle connaissait quelqu’un qui aimait les filles et les garçons.

Plus tard, vers mes 15 ans, j’ai rencontré un homme homosexuel et j’ai su qu’il était normal, tout comme moi et non comme une représentation de ce qu’on voit à la télé ».

ML : Quelle est la différence avec la bisexualité ?

SL: « La pansexualité, c’est un terme moderne qui est apparu au départ pour inclure les personnes transgenres mais je trouve que c’est faux. J’aime tous les genres, c’est une question de personnalité.

C’est quelque chose de militant. C’est l’ouverture envers les personnes qui sont non binaires. C’est l’approche qui est différente ».

ML : Pourquoi alors ne pas faire une définition mixte entre la pansexualité et la bisexualité ?

SL : « C’est une bonne idée mais cela va rajouter encore une définition, une catégorie. Les grandes lettres du mouvement LBGT sont faites pour accueillir tout le monde et à toutes les époques. Chacun doit se définir comme il l’entend ».

ML : Le rapport avec la lettre B est donc compliqué ?

SL : « Pas vraiment. C’est beaucoup de débats pour rien. C’est une sous-catégorie, rien de plus ».

ML : On peut rattacher le pansexualisme au mouvement queer ?

SL: « Globalement oui. C’est en dehors de la notion de binarité »

ML : Est-ce une connerie la binarité ?

SL : « Totalement. Chacun se définit comme il peut. Quand on regarde les signes astrologiques par exemple, beaucoup de personnes se retrouvent dans des signes opposés aux leurs ».

On a tous un peu de caractère des deux côtés. Il faut sortir des gros clichés, de la femme qui doit aimer ça ou ça et l’homme telle ou telle chose. C’est faux ».

ML : Cela justifie une approche par la personnalité ?

SL: « Pour moi, oui. Je pars du principe qu’il ne faudrait pas d’un système binaire, il ne faudrait pas de catégorie ».

ML : On mettrait quoi à la place ?

SL : « La neutralité. C’est ça la solution. Le sexe mentionné sur la carte d’identité ne définit pas la personne.

C’est restrictif de mettre des cases, qui ne servent à rien. Cela atteint le langage qui est genré, empêchant la neutralité dans toute la vie publique ».

ML : La neutralité serait donc une solution ?

SL: « Je pense que oui ».

ML : Bien. On la met en place comment ?

SL: « C’est l’enjeu de l’éducation. Cela doit se faire tout petit. Il ne faut pas apprendre la binarité aux enfants, il faut les laisser faire ce qu’ils veulent.

Si les adultes mettent une pression binaire, les enfants ne pourront pas évoluer dans un monde neutre. Ce sera ultra compliqué. Il faut dire qu’il n’y a pas de rôle attitré ».

ML : Les discriminations sont-elles toutes les mêmes pour les LGBTi+ ?

SL : « Non, il y a des spécificités malheureusement. L’exemple des personnes lesbiennes qui vont moins faire l’objet de réflexions physiques mais davantage de réflexions verbales. L’exemple des personnes gaies qui vont subir des critiques sur le côté féminin, car il faut le dire, être une femme dans ce monde, ce n’est pas très bien accepté. On préfère toujours le masculin ou le viril ».

ML : Pourquoi ce serait mal accepté ?

SL: « Car on est dans une société machiste avec un patriarcat lourd ».

ML : Après dans l’histoire de France, il y a eu de grandes femmes dirigeantes comme Anne d’Autriche ou Marie de Médicis.

SL : « Oui, historiquement c’est bien vrai. Mais aujourd’hui, dans le discours politique, il y a des commentaires sexistes. Ne parlons pas du harcèlement de rue, qui est malheureusement intégré dans la culture populaire. Les femmes ne peuvent pas rentrer seules le soir chez elles de peur de se faire agresser, ce que les hommes ne comprennent pas.

Ce qui me dérange, c’est qu’il y a encore des hommes qui ne comprennent pas que ces réflexions puissent blesser les femmes. À cause du sexisme, c’est plus compliqué pour les femmes transgenres pour une totale intégration.

C’est toujours les mêmes faits qui reviennent mais cela dépend du lieu et du moment ».

ML : Les personnes transgenres ont-elles vraiment leur place dans le mouvement LGBTi+ ?

SL: « Absolument. C’est fou de penser le contraire, de dire que ce n’est pas un problème de sexualité mais d’identité de genre. C’est une aberration de vouloir les sortir.

Elles ont leur place, ce sont des initiateurs ».

ML : C’est peut être un problème d’image. Beaucoup de personnes considèrent que les personnes transgenres sont toutes des prostituées.

SL : « L’image est un souci pour tout le monde. Imaginons un gay qui débarque à la Pride avec un tee-shirt ultra court et des bas-résilles, c’est trash mais il a sa place.

Depuis le vote de la loi sur le mariage gay, les revendications des personnes homosexuelles ont été entendues, pas toutes mais en partie. On a laissé à l’écart les personnes transgenres, d’où l’intérêt de les mettre en première ligne pour faire valoir leurs droits (contexte de refus de la PMA pour ces dernières).

Le milieu LGBTi+ doit être fort et uni car on est tous dans la même merde, il faut pousser tout le monde, y compris les trans dans les revendications. Il ne faut oublier personne ».

ML : Trouvez-vous normal qu’une personne transgenre se fasse accompagner dans la rue pour éviter les risques d’agression ?

SL: « Elle peut se faire accompagner mais c’est justifier l’injustifiable. C’est honteux qu’on ne puisse pas sortir dans la rue et s’y promener sans se faire agresser.

C’est aussi le degré d’insécurité que la personne transgenre peut supporter. Une femme transgenre peut très bien sortir dans la rue dans une robe tout à fait normale mais elle devra affronter des regards ou pire, subir une agression verbale ou physique. C’est lié aux personnes qui sont en face de la personne transgenre, qui ne sont éduqués.

On est dans une société de fous, ce n’est pas normal de se faire accompagner mais c’est pour limiter les risques. C’est un point de vue réaliste, mais ce n’est pas normal que ce soit encore le cas en 2019. Personne ne devrait se faire accompagner ou avoir peur dans l’espace public, il y a une vraie pression sociale sur la personne qu’on souhaite être ».

ML : Et vous ? Vous auriez peur de marcher dans la rue avec une personne transgenre ?

SL: « Franchement ? Oui. J’aurai aimé dire non mais j’aurai peur quand même. Je pense que je le ferai, mais je ne serai pas tranquille.

Par contre, je ne demanderai jamais à une personne transgenre de se changer car j’ai peur de sortir avec elle dans la rue. La personne s’habille comme elle veut. J’ai toujours accepté ces personnes, essayé de comprendre leur histoire. Je n’ai pas de jugement à avoir.

Le risque d’agression envers les personnes trans est élevé, ce n’est pas de leur faute, c’est celle des autres. Il n’y a aucune justification à apporter. C’est dangereux d’assumer qui on est vraiment ».

ML : Les personnes transgenres auront-elles une chance un jour de se balader dans la rue, seules ou accompagnées, de s’habiller sans avoir peur des réactions des autres ?

SL: « J’ai de l’espoir dans l’humanité. Cela va prendre trop de temps, mais cela va y arriver. C’est pareil pour les personnes LGBT qui ne se tiennent pas la main dans la rue, qui ne s’embrassent pas ».

ML : Vous tiendriez la main à une personne transgenre ?

SL: « Bien sûr. Je serai même capable de l’embrasser devant tout le monde. Après, je préférerai honnêtement qu’on le fasse chez nous plutôt que dans la rue. Je préfère ne pas être désolé de ne pas pouvoir le faire. Je ne vais pas vivre au travers du regard des gens, et me conformer à leurs exigences ».

ML : Y-a-t-il un profil de personne transgenre ?

SL: « J’aurai tendance à dire non. Les personnes transgenres, lorsqu’elles se rendent compte qu’elles sont trans, ont tendance à le dissimuler au maximum. Par exemple, une femme trans va porter des ballerines noires, se mettre du vernis à ongles ou se maquiller.

Il y a une différence entre la représentation de genre et d’identité de genre. Un homme peut porter une robe, porter des perruques, un peu comme Bilal Hassani, il a une image très féminine mais il se définit comme un homme ».

ML : Un homme fluide.

SL: « Oui, c’est ça. A cause de ce côté anti-binaire. Il se défait des codes de la société.

De toute façon, il y a des choses qui sont considérées comme féminines et d’autres comme masculines. Les femmes aujourd’hui portent des robes mais dans les autres cultures, les hommes peuvent porter des robes.

Les réponses varient d’un endroit à un autre, c’est en fonction des pensées aussi. La réponse ne sera jamais universelle ou fixe. Le monde ne cesse de bouger ».

ML : Oui. Les lignes ne cessent de bouger au sein des transidentités.

SL: « Lorsqu’une personne découvre sa véritable personnalité ou genre et décide de l’assumer en public, elle a fait un changement radical. Et c’est ça qui est compliqué, mais il faut respecter le choix fait par la personne ».

ML : Les gens ne comprennent pas.

SL: « Oui tout à fait. Les gens peuvent être très ouverts théoriquement mais tout aussi fermés concrètement. Les premières réactions sont souvent dévastatrices face à l’inconnu, notamment dans la critique, être dans le rejet au lieu de l’acceptation ».

ML : Les personnes transgenres font-elles peur ?

SL: « Elles font peur aux personnes qui ne les connaissent pas, qui ne sont pas prêtes à accepter quelqu’un de différent ».

ML : Quelle serait la solution alors ? Une personne trans devra donc faire un communiqué de presse avant chaque rencontre avec une personne cisgenre ?

SL: « Non, quand même pas (rires) ! Mais, il faudrait poser les choses ».

ML : À cause de cela, une personne transgenre peut se voir fermer des opportunités ?

SL: « Oui, même s’il faudrait répondre non. Je pense que les gens sont prêts à accepter, mais pas brusquement. Il faut une explication progressive, pour éviter de choquer ».

ML : Demander l’avis des autres ?

SL: « Non, mais les prévenir ».

ML : Qu’est ce qu’on en a faire de leurs avis ? Ces personnes ne sont pas concernées !

SL : « Si cela ne tenait qu’à moi je serai d’accord. La personne trans est libre mais elle est dans un monde en pleine évolution, les gens ne sont pas encore au courant car ils n’ont pas de culture LGBTi+.

Le problème c’est que ces personnes ont acquis des préjugés avec le temps. Elles n’ont pas été éduquées tout au long de leur parcours. On n’a pas besoin de leurs avis, mais pour moins subir les questions, avertir les personnes est une première étape. On ne peut pas changer l’image d’une personne du jour au lendemain ».

ML : Si on souhaite démarrer une transition en douceur, pourquoi pas passer par une fluidité de genre ?

SL: « C’est socialement moins dangereux, ce ne sera pas un ouragan pour les autres. Je pense que je le ferai par ce moyen là si jamais je devais le faire ».

ML : Et pourquoi ne pas conserver un genre fluide et non pas entamer une réelle transition ?

SL: « Je ne pense pas que la personne soit heureuse. Il faut qu’elle fasse selon son souhait ».

ML : Peut-on être heureux en se voilant la face sur sa transidentité ?

SL: « C’est personnel. Certaines personnes vont être heureuses mais d’autres vont péter les plombs un jour ou l’autre. C’est une question d’acceptation, vis-à-vis de la gestion de la dysphorie du genre. Ce sont des questions personnelles, face à la société qui ne les accepte pas toujours ».

ML : Faut-il écarter les psychiatres et les psychologues au sein du processus de transition ?

SL: « C’est une question compliquée. Les personnes ont peur si on autorise les opérations à tout le monde, qu’ils regrettent et que les chirurgiens soient poursuivis en justice. La transidentité n’est pas une maladie psychiatrique. Une femme transgenre n’est pas un homme qui se déguise.

C’est terrifiant d’attendre l’accord d’un tiers, encore plus celui d’un psychiatre, pour lancer une transition. La présence d’un psychologue peut être intéressante pour accompagner la personne, notamment si elle est fragile ou encore dans l’adolescence, pour éviter les regrets car ces personnes sont peut être non binaires et pas transgenres.

Il faut un suivi, ça c’est sûr mais pas violent et encore moins intrusif dans certaines questions ».

ML : C’est violent pour les personnes intersexes.

SL: « Oui, tout ça pour rentrer dans des normes qui ne valent rien. On impose des réassignations de sexe à des enfants alors qu’on sait qu’elles vont échouer et les détruire psychologiquement.

Heureusement qu’il y a des scandales pour alerter l’opinion sur ce sujet. C’est inhumain comme manière de faire. Cela renforce encore plus leur légitimité dans le mouvement LGBTi +.

La fluidité est sans doute la meilleure solution pour ces personnes ».

ML : Est-ce que des grandes sociétés du monde de la mode ont de la légitimité pour s’emparer des sujets touchant la communauté transgenre ?

SL: « La mode a toujours joué un rôle dans la fluidité des genres. Ce n’est pas nouveau. C’est une manière de rendre ça normal ».

ML : En se faisant de l’argent…

SL: « Oui, c’est critiquable et montre bien le fait que nous sommes dans une société capitaliste. Il faut faire attention aux faux soutiens que ces entreprises peuvent apporter à la communauté LGBTi + ».

ML : Ce sont des allié(e)s ?

SL: « Oui en quelque sorte. Un allié spirituel, si l’entreprise s’intéresse vraiment au milieu LGBTi + ».

ML : Est-ce qu’une personne transgenre peut jouer dans un film un rôle ultra féminin ou ultra masculin ?

SL: « Oui, bien sûr. On peut, mais est-ce que cela va se faire ? Non.

Tout le monde peut jouer tout le monde dans un film ou dans une pièce de théâtre. L’exemple de la série SKAM France, les deux acteurs qui jouent les rôles de deux homosexuels qui vont s’assumer ensemble, ils ne sont pas gays dans la vraie vie.

Aujourd’hui, il faut des personnes pour représenter la communauté LGBTi + mais encore faut-il que ces personnes soient de véritables représentants. C’est compliqué de faire passer un message, surtout sur ce sujet là. C’est juste un rôle à jouer.

C’est un positionnement honteux aujourd’hui de ne pas prendre des personnes transgenres pour jouer des rôles dans les films. C’est de la frilosité, de la peur du scandale.

Une femme transgenre peut très bien jouer Wonder Woman ou celui du gars qui l’accompagne. C’est la question de l’abord du personnage qu’il faudra étudier ».

ML : Pourquoi le terme de communauté ?

SL : « C’est un ensemble. Une attaque contre une des lettres, est une atteinte à tous les autres. C’est ultra complexe car c’est de la revendication communautaire. Elle disparaîtra si on obtient les mêmes droits que les personnes cisgenres. Avant de disparaître, il faut s’unir ».

ML : Est-ce que les personnes qui côtoient une personne transgenre doivent le savoir ?

SL: « Non mais à la fois oui. C’est une question à double tranchant, à la fois le cacher mais l’évoquer pour éviter de tromper les personnes qui sont en face et qui pourraient être mal à l’aise. Ce n’est pas leur problème, cela ne changera pas les capacités de la personne ».

ML : Est-ce que les institutions politiques en France sont transphobes ?

SL: « J’ai tendance à dire oui, mais pas forcément volontairement. C’est l’image de dire que nous sommes un pays tolérant mais les personnes transgenres se font agresser et très peu de personnes en parlent ».

ML : La communauté ne serait donc qu’un réservoir électoral ?

SL: « Non pas vraiment. La communauté LGBTi + alerte sur des situations, demande des changements. Par contre, c’est une politique de l’autruche lorsque les personnes LGB rejettent les trans, malgré que ce soit les mêmes problématiques. Il y a de la transphobie à l’intérieur même de la communauté, c’est vraiment malheureux ».

ML : Pourquoi ne pas avoir un véritable rôle politique ?

SL: « Oui, ce serait bien pour rendre visible les personnes qui sont dans la communauté ».

ML : Et l’image ?

SL: « C’est encore la connerie de l’image qui doit être lisse sinon ce n’est pas bien ! Il faut insister auprès des associations LGBTi + pour donner des définitions larges et éviter l’émergence des clichés qui vont faire peur ou dégouter les gens, par exemple en évitant d’inviter des personnes transphobes ».

ML : Informer oui ! Avec une Pride ?

SL: « Pourquoi pas, c’est une jolie fête avec de la bonne musique. Cela permet de faire entendre les combats, de mettre en avant les problèmes, qui sont toujours là et qui sont encore plus violents aujourd’hui ».

ML : Revenons sur les effets de modes du mouvement transgenre…

SL: « On ne peut pas appeler ça un effet de mode. C’est une libéralisation de la parole, une démocratisation d’un sujet. Ce n’est pas une mode d’être comme ça, d’être dans une catégorie sociale qui se fait discriminer.

Chacun doit se créer sa propre personnalité, l’adolescence est un moment de construction de soi. La transidentité n’est pas une lubie ».

ML : Peut-on être transgenre sans le dire à sa famille, à ses amis, juste le garder pour soi ?

SL: « Oui. Cela ne regarde que la personne. C’est une question d’identité personnelle. Cela rejoint la non-binarité ou la dysphorie de genre, avec tous les clichés. L’identité de genre rejoint le mental, l’intelligence de la personne.

Si c’était normal dans la société qu’un homme mette du maquillage, il n’y aurait pas de préjugés (achète pour quelqu’un d’autre). Cela ne fera pas de lui un sous-homme. Après, c’est plus facile pour un homme trans d’acheter des vêtements d’homme. C’est discriminant à force, il n’y a rien à justifier ».

ML : Le Président de la République va vous appeler pour vous proposer d’être sa nouvelle ministre de l’Egalité entre les femmes et les hommes. Votre première mesure ?

SL: « D’abord je ne réponds pas (rires) ! Je n’ai pas les épaules pour accepter ».

ML : Vous êtes bien la première à refuser !

SL: « C’est vrai (rires) ? Je préfère être une de ses conseillères, l’ombre me suffit. Je ne suis pas une politicienne. Je ne suis pas la seule concernée sur ces sujets là ».

ML : Ce serait possible à Place Beauvau (siège du ministère de l’Intérieur) ? À l’hôtel de Brienne (siège du ministère de la Défense) ?

SL: « Ce serait un grand symbole, mais cela va foutre le feu aux institutions. Ce sera des guerres internes, des railleries. Cela pourrait faire avancer les mentalités.

Aucun Président de la République ne le fera, certainement pas dans ce monde en tout cas. A une échelle peut être et encore, des postes de Préfets par exemple ».

ML : Des derniers mots en guise de conclusion?

SL: « Laissez les gens vivre comme ils veulent. Soyez plus respectueux, tolérants et polis. Il faut arrêter de mettre des personnes dans des catégories sociales car on est tous des êtres humains ».

Table des matières

Remerciements (page 4)

Sommaire (page 5)

Table des sigles et des abréviations (page 6)

Introduction (page 7)

Chapitre 1 : Le sexe et le genre pour les personnes transgenres, révélateurs d’une situation sémantique complexe (page 13)

Section 1 : Le sexe, une notion obstacle au mouvement transgenre (page 14)

Section 2 : Le genre, une notion perturbée par le mouvement transgenre (page 16)

Chapitre 2 : Le changement de sexe pour les personnes transgenres, le renouveau juridique (page 23)

Section 1 : D’une jurisprudence conservatrice à des dispositions législatives réformatrices (page 25)

  • 1 : L’ancienne nécessité d’une preuve d’un syndrome de transsexualisme démontrée par l’irréversibilité de l’apparence pour la jurisprudence (page 25)
  • 2 : La loi du 18 novembre 2016 relative à la Modernisation de la Justice du XXIème siècle : la fin salvatrice du silence législatif (page 31)

Section 2 : La libéralisation procédurale du changement de sexe, le basculement incomplet de la référence sexuelle à celle de genre (page 36)

  • 1 : Les conditions limitées à la démonstration du comportement social (page 37)

A : Une revendication publique assumée au sexe désiré (page 38)

B : L’obligation de porter à la connaissance des tiers son identité sexuelle (page 39)

C : L’obtention d’un changement de prénom correspondant au sexe désiré (page 41)

  • 2 : Une grande place accordée à l’appréciation du juge (page 43)

A : L’appréciation du consentement libre et éclairé du demandeur (page 44)

B : La compétence du Tribunal judiciaire (page 47)

C : La décision de modification de la mention du sexe dans les actes de l’état civil (page 50)

  • 3 : Un changement d’état civil aux lourdes conséquences juridiques (page 51)

A : La préservation du passé familial (page 53)

1 : Le mariage conclu avant le changement de sexe (page 53)

2 : Les liens de filiation établis avant le changement de sexe (page 54)

B : L’incertitude de l’avenir familial (page 56)

1 : Le mariage (page 56)

2 : Les liens de filiation établis après le changement de sexe (page 57)

Section 3 : Une procédure suscitant de larges inquiétudes (page 59)

  • 1 : Une atteinte consentie au principe d’indisponibilité de l’état civil (page 59)
  • 2 : Une instrumentalisation des questions médicales (page 62)
  • 3 : Une préservation contestable de la binarité des sexes : le refus de la création d’un sexe neutre (page 65)
  • 4 : La prise en compte insuffisante de l’accompagnement psychologique lors du parcours de changement de sexe (page 69)

Conclusion (page 73)

Bibliographie (page 76)

Annexes (page 85)

Sommaire des annexes (page 86)

Remarques générales (page 87)

Annexe 1 : L’entretien de Camille Prins (page 88)

Annexe 2 : L’entretien de Laurent B et Sophie A (page 96)

Annexe 3 : L’entretien d’Anastasia X (page 97)

Annexe 4 : L’entretien de Paul R (page 109)

Annexe 5 : L’entretien de Romain Bancel (page 110)

Annexe 6 : L’entretient de Soline Laurent (page 115)

[1] THOMAS Maud-Yeuse, « La controverse trans’ », Mouvements d’infos, 5 octobre 2007.

[2] Idem.

[3] Idem.

[4] Idem.

[5] Idem.

[6] Cf. Annexe 3, L’entretien d’Anastisia.

[7] BEAUBATIE Emmanuelle, RENNES Juliette (dir.), Encyclopédie critique du genre, éditions La Découverte, 2016, pp. 640 à 648.

[8] AGUADO Ali, ZDANOWICZ Ian, « L’usage du Droit dans le mouvement d’émancipation Trans », Cahiers du Genre, 2014, n° 57 pp. 77 à 94.

[9] AGUADO Ali, ZDANOWICZ Ian, « L’usage du Droit dans le mouvement d’émancipation Trans », Cahiers du Genre, 2014, n° 57 pp. 77 à 94.

[10] Idem.

[11] SIRONI Françoise, Psychologie(s) des transsexuels et des transgenres, éditions Odile Jacob, 2011, p. 84.

[12] AGUADO Ali, ZDANOWICZ Ian, « L’usage du Droit dans le mouvement d’émancipation Trans », Cahiers du Genre, 2014, n° 57 pp. 77 à 94.

[13] Idem.

[14] Cf. Annexe 6, L’entretien de Soline LAURENT.

[15] Acronyme désignant les personnes Lesbiennes, Gays, Bisexuelles, Transgenres, Queers, Intersexes, Asexuelles. Le « + » désigne les personnes alliées au mouvement.

[16] AGUADO Ali, ZDANOWICZ Ian, « L’usage du Droit dans le mouvement d’émancipation Trans », Cahiers du Genre, 2014, n° 57 pp. 77 à 94.

[17] Cf. Annexe 6, L’entretien de Soline LAURENT.

[18] Loi n° 2016-1547, 18 novembre 2016, Modernisation de la justice du XXIème siècle, NOR : JUSX1515639L.

[19] BERENI Laure (dir.), CHAUVIN Sébastien, JAUNAIT Alexandre, REVILLARD Anne, Introduction aux études sur le genre, éditions de Boeck, 2ème édition, 2015, pp. 43 à 49.

[20] Idem.

[21] BERENI Laure (dir.), CHAUVIN Sébastien, JAUNAIT Alexandre, REVILLARD Anne, Introduction aux études sur le genre, éditions de Boeck, 2ème édition, 2015, pp. 43 à 49.

[22] Idem.

[23] Idem.

[24] Idem.

[25] Idem.

[26] SIRONI Françoise, Psychologie(s) des transsexuels et des transgenres, éditions Odile Jacob, 2011, p. 12.

[27] Idem.

[28] MARCHAND Jean-Baptiste, « La transparentalité : une nouvelle façon d’être parent », Dialogue, 2017, n° 216, pp. 105-117.

[29] BENJAMIN Harry, The Transsexual Phenomenon, éditions Julian Press, 1966, 286 p.

[30] BERENI Laure (dir.), CHAUVIN Sébastien, JAUNAIT Alexandre, REVILLARD Anne, Introduction aux études sur le genre, éditions de Boeck, 2ème édition, 2015, pp. 43 à 49.

[31] Idem.

[32] BENJAMIN Harry, The Transsexual Phenomenon, éditions Julian Press, 1966, 286 p.

[33] SIRONI Françoise, Psychologie(s) des transsexuels et des transgenres, éditions Odile Jacob, 2011, p. 15.

[34] Idem.

[35] BERENI Laure (dir.), CHAUVIN Sébastien, JAUNAIT Alexandre, REVILLARD Anne, Introduction aux études sur le genre, éditions de Boeck, 2ème édition, 2015, pp. 43 à 49.

[36] Idem.

[37] SIRONI Françoise, Psychologie(s) des transsexuels et des transgenres, éditions Odile Jacob, 2011, p. 16.

[38] Idem.

[39] SIRONI Françoise, Psychologie(s) des transsexuels et des transgenres, éditions Odile Jacob, 2011, p. 20.

[40] BEAUBATIE Emmanuelle, RENNES Juliette (dir.), Encyclopédie critique du genre, éditions La Découverte, 2016, pp. 640 à 648.

[41] CHILAND Colette, Changer de sexe : illusion et réalité, éditions Odile Jacob, 2011, p. 24.

[42] CHILAND Colette, Changer de sexe : illusion et réalité, éditions Odile Jacob, 2011, p. 24.

[43] Idem.

[44] Idem.

[45] CHILAND Colette, Changer de sexe : illusion et réalité, éditions Odile Jacob, 2011, p. 25.

[46] Idem.

[47] Idem.

[48] Idem.

[49] Idem.

[50] Cf. Annexe 1, L’entretien de Camille PRINS.

[51] SIRONI Françoise, Psychologie(s) des transsexuels et des transgenres, éditions Odile Jacob, 2011, p. 45.

[52] SIRONI Françoise, Psychologie(s) des transsexuels et des transgenres, éditions Odile Jacob, 2011, p. 49.

[53] SIRONI Françoise, Psychologie(s) des transsexuels et des transgenres, éditions Odile Jacob, 2011, p. 51.

[54] Idem.

[55] SIRONI Françoise, Psychologie(s) des transsexuels et des transgenres, éditions Odile Jacob, 2011, p. 72.

[56] Idem.

[57] Idem.

[58] SIRONI Françoise, Psychologie(s) des transsexuels et des transgenres, éditions Odile Jacob, 2011, 269 p.

[59] HENNETTE-VAUCHEZ Stéphanie (dir.), PICHARD Marc, ROMAN Diane, La loi et le genre : études critiques de droit français, éditions du CNRS, coordination du comité scientifique REGINE, 2014, 799 p.

[60] SIRONI Françoise, Psychologie(s) des transsexuels et des transgenres, éditions Odile Jacob, 2011, p. 72.

[61] Idem.

[62] Idem.

[63] THOMAS Maud-Yeuse, « La controverse trans’ », Mouvements d’infos, 5 octobre 2007.

[64] Idem.

[65] Idem.

[66] Idem.

[67] Idem.

[68] BERENI Laure (dir.), CHAUVIN Sébastien, JAUNAIT Alexandre, REVILLARD Anne, Introduction aux études sur le genre, éditions de Boeck, 2ème édition, 2015, pp. 43 à 49.

[69] Idem.

[70] BORNSTEIN Kate, Gender Outlaw : One men, Women, and the Rest of Us, éditions Routledge, 1994, 224 p.

[71] BERENI Laure (dir.), CHAUVIN Sébastien, JAUNAIT Alexandre, REVILLARD Anne, Introduction aux études sur le genre, éditions de Boeck, 2ème édition, 2015, pp. 43 à 49.

[72] Idem.

[73] Cf. Annexe 6, L’entretien de Soline LAURENT.

[74] C. civ., art. 57.

[75] BERENI Laure (dir.), CHAUVIN Sébastien, JAUNAIT Alexandre, REVILLARD Anne, Introduction aux études sur le genre, éditions de Boeck, 2ème édition, 2015, pp. 43 à 49.

[76] Idem.

[77] Idem.

[78] DE BEAUVOIR Simone, Le deuxième sexe, éditions Gallimard, 1949, 285 p.

[79] Idem.

[80] CA Paris, 18 janvier 1974, D., 1974, 196, concl. Granjon.

[81] Cass. 1er. civ., n° 16-17.189, 4 mai 2017.     

[82] TGI Tours, 2ème ch. civ., 20 août 2015.

[83] MORON-PUECH Benjamin, « Rejet du sexe neutre : une mutilation juridique ? », Recueil Dalloz, 2017, p. 1404.

[84] HENNETTE-VAUCHEZ Stéphanie (dir.), PICHARD Marc, ROMAN Diane, La loi et le genre : études critiques de droit français, éditions du CNRS, coordination du comité scientifique REGINE, 2014, 799 p.

[85] CHILAND Colette, Changer de sexe : illusion et réalité, éditions Odile Jacob, 2011, p. 35.

[86] Idem.

[87] Idem.

[88] BERENI Laure (dir.), CHAUVIN Sébastien, JAUNAIT Alexandre, REVILLARD Anne, Introduction aux études sur le genre, éditions de Boeck, 2ème édition, 2015, pp. 43 à 49.

[89] DORLIN Elsa, Sexe, genre et sexualités, éditions PUF, 2019, p. 43.

[90] DELPHY Christine, L’ennemi principal, éditions Syllepse, 1998, 272 p.

[91] DORLIN Elsa, Sexe, genre et sexualités, éditions PUF, 2019, p. 55.

[92] CNCDH, Avis sur l’identité de genre et sur le changement de la mention du sexe à l’état civil, 27 juin 2013, disponible au JORF au n° 0176 du 31 juillet 2013.

[93] Idem.

[94] Idem.

[95] Idem.

[96] CNCDH, Avis sur l’identité de genre et sur le changement de la mention du sexe à l’état civil, 27 juin 2013, disponible au JORF au n° 0176 du 31 juillet 2013.

[97] Idem.

[98] Loi n° 2014-476, 14 mai 2014, Autorisation de la ratification de la Convention du Conseil de l’Europe sur la prévention et la lutte contre les violences à l’égard des femmes et la violence domestique, JO n° 0112, 15 mai 2014, p. 8033.

[99] CE, Ass., 11 avril 2012, n° 322326, GISTI, Fédération des associations pour la promotion et l’insertion par le logement.

[100] CNCDH, Avis sur l’identité de genre et sur le changement de la mention du sexe à l’état civil, 27 juin 2013, disponible au JORF au n° 0176 du 31 juillet 2013.

[101] Idem.

[102] Idem.

[103] CHARRUAU Jimmy, « L’introduction de la notion de genre en droit français », RFDA, 2015, p. 127.

[104] CNCDH, Avis sur l’identité de genre et sur le changement de la mention du sexe à l’état civil, 27 juin 2013, disponible au JORF au n° 0176 du 31 juillet 2013.

[105] CHARRUAU Jimmy, « L’introduction de la notion de genre en droit français », RFDA, 2015, p. 127.

[106] Idem.

[107] Idem.

[108] Idem.

[109] CHARRUAU Jimmy, « L’introduction de la notion de genre en droit français », RFDA, 2015, p. 127.

[110] Idem.

[111] Idem.

[112] AGUADO Ali, ZDANOWICZ Ian, « L’usage du Droit dans le mouvement d’émancipation Trans », Cahiers du Genre, 2014, n° 57 pp. 77 à 94.

[113] Idem.

[114] Idem.

[115] Idem.

[116] AGUADO Ali, ZDANOWICZ Ian, « L’usage du Droit dans le mouvement d’émancipation Trans », Cahiers du Genre, 2014, n° 57 pp. 77 à 94.

[117] Idem.

[118] Cf. Annexe 3, L’entretien d’Anastasia.

[119] Idem.

[120] Laura Badler a été interviewée pour témoigner sur son parcours : BALDER Laura, Transgenre : ma participation à Zone Interdite, 1er novembre 2017, consulté le 27/02/2020.

[121] EHRHARDT Anke, MONEY John, Man and Women, Boy and Girl : The differentiation and dimorphism of gender identity from conception to maturity, éditions Johns Hopkins University Press, 1972, 311 p.

[122] MONEY John, « The concept of gender identity disorder in childhood and adolescence after 37 years » in GenderIdentity and Development in Childhood and Adolescence, A two days International Conference at St George’s Hospital of London, Conferences Proceedings, 1992, p. 13-31.

[123] Idem.

[124] Idem.

[125] CHILAND Colette, Changer de sexe : illusion et réalité, éditions Odile Jacob, 2011, p. 39.

[126] Idem.

[127] CHILAND Colette, Changer de sexe : illusion et réalité, éditions Odile Jacob, 2011, p. 89.

[128] SIRONI Françoise, Psychologie(s) des transsexuels et des transgenres, éditions Odile Jacob, 2011, p. 241.

[129] CHILAND Colette, Changer de sexe : illusion et réalité, éditions Odile Jacob, 2011, p. 108.

[130] CHILAND Colette, Changer de sexe : illusion et réalité, éditions Odile Jacob, 2011, p. 109.

[131] CHILAND Colette, Changer de sexe : illusion et réalité, éditions Odile Jacob, 2011, p. 108.

[132] CHILAND Colette, Changer de sexe : illusion et réalité, éditions Odile Jacob, 2011, p. 109.

[133] STOLLER Robert, Sex and Gender : On the Development of Masculinity and Feminity, éditions House, 1968, 383 p.

[134] CHARRUAU Jimmy, « L’introduction de la notion de genre en droit français », RFDA, 2015, p. 127.

[135] Idem.

[136] BERENI Laure (dir.), CHAUVIN Sébastien, JAUNAIT Alexandre, REVILLARD Anne, Introduction aux études sur le genre, éditions de Boeck, 2ème édition, 2015, pp. 43 à 49.

[137] SIRONI Françoise, Psychologie(s) des transsexuels et des transgenres, éditions Odile Jacob, 2011, p. 36.

[138] Idem.

[139] SIRONI Françoise, Psychologie(s) des transsexuels et des transgenres, éditions Odile Jacob, 2011, p. 88.

[140] PARICARD Sophie, « Une libéralisation du changement de sexe qui suscite des interrogations majeures », AJ Famille, 2016, p. 585.

[141] Loi n° 2016-1547, 18 novembre 2016, Modernisation de la justice du XXIème siècle, NOR : JUSX1515639L.

[142] PARICARD Sophie, « Une libéralisation du changement de sexe qui suscite des interrogations majeures », AJ Famille, 2016, p. 585.

[143] Cass., 1er, Civ., n° 11-14.515, n° 12-11.949,  13 février 2013, Bull. civ. I., n° 13 et n° 14.

[144] PARICARD Sophie, « Une libéralisation du changement de sexe qui suscite des interrogations majeures », AJ Famille, 2016, p. 585.

[145] Idem.

[146] Cf. Annexe 6, L’entretien de Soline LAURENT.

[147] Idem.

[148] Idem.

[149] Idem.

[150] Idem.

[151] Idem.

[152] Cf. Annexe 5, L’entretien de Romain BANCEL.

[153] Idem.

[154] Idem.

[155] Idem.

[156] SIRONI Françoise, Psychologie(s) des transsexuels et des transgenres, éditions Odile Jacob, 2011, p. 14.

[157] Idem.

[158] SIRONI Françoise, Psychologie(s) des transsexuels et des transgenres, éditions Odile Jacob, 2011, p. 15.

[159] Cf. Annexe 6, L’entretien de Soline LAURENT.

[160] Idem.

[161] Idem.

[162] SIRONI Françoise, Psychologie(s) des transsexuels et des transgenres, éditions Odile Jacob, 2011, p. 15.

[163] Idem.

[164] Idem.

[165] SIRONI Françoise, Psychologie(s) des transsexuels et des transgenres, éditions Odile Jacob, 2011, p. 176.

[166] Idem.

[167] Idem.

[168] SIRONI Françoise, Psychologie(s) des transsexuels et des transgenres, éditions Odile Jacob, 2011, p. 177.

[169] Cf. Annexe 3, L’entretien d’Anastasia.

[170] Idem.

[171] Idem.

[172] BUTLER Judith, Trouble dans le genre : le féminisme et la subversion de l’identité, éditions La Découverte, 2006, p. 272.

[173] BUTLER Judith, Trouble dans le genre : le féminisme et la subversion de l’identité, éditions La Découverte, 2006, p. 276.

[174] BALDER Laura, Transidentité et préjugés, 11 août 2019, consulté le 27/02/2020.

[175] Idem.

[176] Idem.

[177] Idem.

[178] Idem.

[179] MAUVE Guy, Pas assez trans ?, 18 mars 2018, consulté le 28/02/2020.

[180] MAUVE Guy, Pas assez trans ?, 18 mars 2018, consulté le 28/02/2020.

[181] Idem.

[182] Idem.

[183] Idem.

[184] Idem.

[185] Idem.

[186] Cf. Annexe 5, L’entretien de Romain BANCEL.

[187] SIRONI Françoise, Psychologie(s) des transsexuels et des transgenres, éditions Odile Jacob, 2011, p. 99.

[188] Idem.

[189] SIRONI Françoise, Psychologie(s) des transsexuels et des transgenres, éditions Odile Jacob, 2011, p. 100.

[190] Idem.

[191] Idem.

[192] Idem.

[193] Circulaire de la DACS, relative aux demandes de changement de sexe à l’état civil, 14 mai 2010, n°JUSC1012994C.

[194] CNCDH, Avis sur l’identité de genre et sur le changement de la mention du sexe à l’état civil, 27 juin 2013, disponible au JORF au n° 0176 du 31 juillet 2013.

[195] AUFIERE Pierrette, BAROUSSE Chantal, « Des prémices de la jurisprudence aux permissions de la loi : 40 ans de pratique du transsexualisme », AJ Famille, 2016, p. 580.

[196] BENJAMIN Harry, The Transsexual Phenomenon, éditions Julian Press, 1966, 286 p.

[197] BERENI Laure (dir.), CHAUVIN Sébastien, JAUNAIT Alexandre, REVILLARD Anne, Introduction aux études sur le genre, éditions de Boeck, 2ème édition, 2015, pp. 43 à 49.

[198] Idem.

[199] BERENI Laure (dir.), CHAUVIN Sébastien, JAUNAIT Alexandre, REVILLARD Anne, Introduction aux études sur le genre, éditions de Boeck, 2ème édition, 2015, pp. 43 à 49.

[200] Idem.

[201] THOMAS Maud-Yeuse, « La controverse trans’ », Mouvements d’infos, 5 octobre 2007.

[202] Idem.

[203] THOMAS Maud-Yeuse, « La controverse trans’ », Mouvements d’infos, 5 octobre 2007.

[204] BERENI Laure (dir.), CHAUVIN Sébastien, JAUNAIT Alexandre, REVILLARD Anne, Introduction aux études sur le genre, éditions de Boeck, 2ème édition, 2015, pp. 43 à 49.

[205] Idem.

[206] Idem.

[207] PARICARD Sophie, « Une libéralisation du changement de sexe qui suscite des interrogations majeures », AJ Famille, 2016, p. 585.

[208] Idem.

[209] CEDH, 25 mars 1992, n° 13343/87, B. c/ France.

[210] AGUADO Ali, ZDANOWICZ Ian, « L’usage du Droit dans le mouvement d’émancipation Trans », Cahiers du Genre, 2014, n° 57 pp. 77 à 94.

[211] Cass, Ass., plèn., 11 décembre 1992, n° 91-11.900 et n° 91-12.373.

[212] PARICARD Sophie, « Une libéralisation du changement de sexe qui suscite des interrogations majeures », AJ Famille, 2016, p. 585.

[213] Idem.

[214] Idem.

[215] Cass, 1er, Civ., 13 février 2013,  n° 12-11.949.

[216] VIALLA François, « Loi de modernisation de la justice du XXIème siècle : changement de la mention de sexe à l’état civil », Recueil Dalloz, 2016, p. 2351.

[217] Idem.

[218] VIALLA François, « Loi de modernisation de la justice du XXIème siècle : changement de la mention de sexe à l’état civil », Recueil Dalloz, 2016, p. 2351.

[219] Idem.

[220] Décret n° 2010-125, 8 février 2010, Modification de l’annexe figurant à l’article D. 322-1 du Code de la sécurité sociale relative aux critères médicaux utilisés pour la définition de l’affection de longue durée « affectations psychiatriques de longue durée », JORF n° 0034, 10 février 2010, p. 2398.

[221] AGUADO Ali, ZDANOWICZ Ian, « L’usage du Droit dans le mouvement d’émancipation Trans », Cahiers du Genre, 2014, n° 57 pp. 77 à 94.

[222] Idem.

[223] Idem.

[224] Idem.

[225] Idem.

[226] Idem.

[227] Idem.

[228] AGUADO Ali, ZDANOWICZ Ian, « L’usage du Droit dans le mouvement d’émancipation Trans », Cahiers du Genre, 2014, n° 57 pp. 77 à 94.

[229] Idem.

[230] Idem.

[231] Idem.

[232] Circulaire de la DACS, relative aux demandes de changement de sexe à l’état civil, 14 mai 2010, n°JUSC1012994C.

[233] Idem.

[234] Idem.

[235] Idem.

[236] Idem.

[237] PARICARD Sophie, « Une libéralisation du changement de sexe qui suscite des interrogations majeures », AJ Famille, 2016, p. 585.

[238] Idem.

[239] Cass, 1er, Civ., 7 juin 2012,  n° 11-22.490 et n° 10-26.947.

[240] AGUADO Ali, ZDANOWICZ Ian, « L’usage du Droit dans le mouvement d’émancipation Trans », Cahiers du Genre, 2014, n° 57 pp. 77 à 94.

[241] Idem.

[242] AGUADO Ali, ZDANOWICZ Ian, « L’usage du Droit dans le mouvement d’émancipation Trans », Cahiers du Genre, 2014, n° 57 pp. 77 à 94.

[243] Idem.

[244] Idem.

[245] Idem.

[246] Idem.

[247] Idem.

[248] Idem.

[249] Idem.

[250] Idem.

[251] Idem.

[252] CNCDH, Avis sur l’identité de genre et sur le changement de la mention du sexe à l’état civil, 27 juin 2013, disponible au JORF au n° 0176 du 31 juillet 2013.

[253] CATTO Marie-Xavière, « Avis de la CNCDH sur l’identité de genre et sur le changement de la mention du sexe à l’état civil », Actualités droits-libertés, CREDOF, 8 juillet 2013 (consulté le 01/11/2019).

[254] Idem.

[255] CEDH, 10 mars 2015, n° 14793/08, Y. Y c/ Turquie.

[256] MARGUENAUD Jean-Pierre, « La reconnaissance du droit à l’identité sexuelle des personnes transgenres », RTD Civ., 2017, p. 825.

[257] Idem.

[258] Idem.

[259] PARICARD Sophie, « Une libéralisation du changement de sexe qui suscite des interrogations majeures », AJ Famille, 2016, p. 585.

[260] Idem.

[261] En ce sens : PARICARD Sophie, « Faut-il maintenir ou assouplir les conditions du changement de sexe ? », in La Revue des droits de l’Homme (en ligne), 8., 2015, mis en ligne le 21 novembre 2015.

[262] CEDH, 10 mars 2015, n° 14793/08, Y. Y c/ Turquie.

[263] PARICARD Sophie, « Une libéralisation du changement de sexe qui suscite des interrogations majeures », AJ Famille, 2016, p. 585.

[264] Loi n° 2016-1547, 18 novembre 2016, Modernisation de la justice du XXIème siècle, NOR : JUSX1515639L.

[265] Soit journée du souvenir des personnes transgenres, plus généralement connu sous le sigle T-DOR.

[266] Loi n° 2016-1547, 18 novembre 2016, Modernisation de la justice du XXIème siècle, NOR : JUSX1515639L.

[267] Cette nouvelle section regroupe les articles 61-5 à 61-8.

[268] C. civ., art. 61-5 al. 1er.

[269] Décret n° 2017-450, 29 mars 2017, Procédures de changement de prénom et de modification de la mention du sexe dans les actes de l’état civil, NOR : JUSC1703390D.

[270] Décret n° 74-449, 15 mai 1974, Livret de famille et à l’information des futurs époux sur le droit de la famille.

[271] AUFIERE Pierrette, SCHELLINO Elisabeth, « Etat civil : demande de changement de sexe et/ou de prénom », AJ Famille, 2017, p. 389.

[272] PARICARD Sophie, « Une libéralisation du changement de sexe qui suscite des interrogations majeures », AJ Famille, 2016, p. 585.

[273] PARICARD Sophie, « Une libéralisation du changement de sexe qui suscite des interrogations majeures », AJ Famille, 2016, p. 585.

[274] VIALLA François, « Loi de modernisation de la justice du XXIème siècle : changement de la mention de sexe à l’état civil », Recueil Dalloz, 2016, p. 2351.

[275] Idem.

[276] Idem.

[277] Idem.

[278] Idem.

[279] Idem.

[280] Idem.

[281] FORTIER Corinne, in NICOLAS Guylène (dir.), « Corps et Patrimoine », LEH 2014, Cahier de droit de la santé, n°18, avril 2014, p. 278 s.

[282] VIALLA François, « Loi de modernisation de la justice du XXIème siècle : changement de la mention de sexe à l’état civil », Recueil Dalloz, 2016, p. 2351.

[283] CC, n° 2016-739 DC, Loi de modernisation de la justice du XXIème siècle.

[284] VIALLA François, « Loi de modernisation de la justice du XXIème siècle : changement de la mention de sexe à l’état civil », Recueil Dalloz, 2016, p. 2351.

[285] Loi n° 2016-1547, 18 novembre 2016, Modernisation de la justice du XXIème siècle, NOR : JUSX1515639L.

[286] FERRIE Scarlett-May, « Quel fondement pour le changement de sexe à l’état civil ? », AJ Famille, 2016, p. 587.

[287] CEDH, 10 mars 1988, n° 11680/85, F. c/ Suisse.

[288] CC, n° 2016-739 DC, Loi de modernisation de la justice du XXIème siècle.

[289] FERRIE Scarlett-May, « Quel fondement pour le changement de sexe à l’état civil ? », AJ Famille, 2016, p. 587.

[290] Idem.

[291] Idem.

[292] Idem.

[293] Loi n° 2016-1547, 18 novembre 2016, Modernisation de la justice du XXIème siècle, NOR : JUSX1515639L.

[294] AUFIERE Pierrette, BAROUSSE Chantal, « Des prémices de la jurisprudence aux permissions de la loi : 40 ans de pratique du transsexualisme », AJ Famille, 2016, p. 580.

[295] AUFIERE Pierrette, BAROUSSE Chantal, « Des prémices de la jurisprudence aux permissions de la loi : 40 ans de pratique du transsexualisme », AJ Famille, 2016, p. 580.

[296] Idem.

[297] Idem.

[298] Loi n° 2016-1547, 18 novembre 2016, Modernisation de la justice du XXIème siècle, NOR : JUSX1515639L.

[299] MARGUENAUD Jean-Pierre, « La reconnaissance du droit à l’identité sexuelle des personnes transgenres », RTD Civ., 2017, p. 825.

[300] CEDH. Sect., 12 juin 2003, n° 35968/97, Van Kück c/ Allemagne.

[301] MARGUENAUD Jean-Pierre, « La reconnaissance du droit à l’identité sexuelle des personnes transgenres », RTD Civ., 2017, p. 825.

[302] Idem.

[303] C. civ., art. 61-6 al. 2.   

[304] CEDH, 5ème sect., 6 avril 2017, nos 79885/12, 52471/13 et 52596/13, A. P., Garçon et Nicot c/ France.

[305] MARGUENAUD Jean-Pierre, « La reconnaissance du droit à l’identité sexuelle des personnes transgenres », RTD Civ., 2017, p. 825.

[306] MARGUENAUD Jean-Pierre, « La reconnaissance du droit à l’identité sexuelle des personnes transgenres », RTD Civ., 2017, p. 825.

[307] Loi n° 2016-1547, 18 novembre 2016, Modernisation de la justice du XXIème siècle, NOR : JUSX1515639L.

[308] SIRONI Françoise, Psychologie(s) des transsexuels et des transgenres, éditions Odile Jacob, 2011, p. 33.

[309] SIRONI Françoise, Psychologie(s) des transsexuels et des transgenres, éditions Odile Jacob, 2011, p. 27.

[310] Idem.

[311] Idem.

[312] C. civ., art. 61-5.

[313] PARICARD Sophie, « Une libéralisation du changement de sexe qui suscite des interrogations majeures », AJ Famille, 2016, p. 585.

[314] Idem.

[315] C. civ., art. 61-5.

[316] CHILAND Colette, Changer de sexe : illusion et réalité, éditions Odile Jacob, 2011, p. 242.

[317] Idem.

[318] PARICARD Sophie, « Une libéralisation du changement de sexe qui suscite des interrogations majeures », AJ Famille, 2016, p. 585.

[319] AGUADO Ali, ZDANOWICZ Ian, « L’usage du Droit dans le mouvement d’émancipation Trans », Cahiers du Genre, 2014, n° 57 pp. 77 à 94.

[320] Idem.

[321] SIRONI Françoise, Psychologie(s) des transsexuels et des transgenres, éditions Odile Jacob, 2011, p. 221.

[322] SIRONI Françoise, Psychologie(s) des transsexuels et des transgenres, éditions Odile Jacob, 2011, p. 223.

[323] MAUVE Guy, Le passing, 18 octobre 2017, consulté le 15/03/2020.

[324] Idem.

[325] Idem.

[326] Idem.

[327] MAUVE Guy, Le passing, 18 octobre 2017, consulté le 15/03/2020.

[328] C. civ., art. 61-5.

[329] PARICARD Sophie, « Une libéralisation du changement de sexe qui suscite des interrogations majeures », AJ Famille, 2016, p. 585.

[330] Idem.

[331] Idem.

[332] Idem.

[333] Idem.

[334] Idem.

[335] AUFIERE Pierrette, BAROUSSE Chantal, « Des prémices de la jurisprudence aux permissions de la loi : 40 ans de pratique du transsexualisme », AJ Famille, 2016, p. 580.

[336] Idem.

[337] Idem.

[338] C. civ., art. 61-5.

[339] PARICARD Sophie, « Une libéralisation du changement de sexe qui suscite des interrogations majeures », AJ Famille, 2016, p. 585.

[340] Idem.

[341] Idem.

[342] Idem.

[343] Entendu spécialement ici pour les personnes transgenres comme l’annonce volontaire d’une identité de genre ou sexuelle qui n’est pas en adéquation avec leur identité de genre ou sexuelle assignée à la naissance auprès de leur entourage familial, amical et professionnel.   

[344] FERRIE Scarlett-May, « Quel fondement pour le changement de sexe à l’état civil ? », AJ Famille, 2016, p. 587.

[345] MAUVE Guy, Le passing, 18 octobre 2017, consulté le 15/03/2020.

[346] Idem.

[347] AUFIERE Pierrette, BAROUSSE Chantal, « Des prémices de la jurisprudence aux permissions de la loi : 40 ans de pratique du transsexualisme », AJ Famille, 2016, p. 580.

[348] Idem.

[349] Cf. Annexe 1, L’entretien de Camille PRINS.

[350] AUFIERE Pierrette, BAROUSSE Chantal, « Des prémices de la jurisprudence aux permissions de la loi : 40 ans de pratique du transsexualisme », AJ Famille, 2016, p. 580.

[351] Idem.

[352] AUFIERE Pierrette, BAROUSSE Chantal, « Des prémices de la jurisprudence aux permissions de la loi : 40 ans de pratique du transsexualisme », AJ Famille, 2016, p. 580.

[353] Idem.

[354] Idem.

[355] Idem.

[356] PARICARD Sophie, « Une libéralisation du changement de sexe qui suscite des interrogations majeures », AJ Famille, 2016, p. 585.

[357] C. civ., art. 61-5.

[358] Loi n° 2016-1547, 18 novembre 2016, Modernisation de la justice du XXIème siècle, NOR : JUSX1515639L.

[359] Circulaire de la DACS, présentation des dispositions de l’article 56 de la loi n° 2016-1547 du 18 novembre 2016 de modernisation de la justice du XXIème siècle concernant les procédures judiciaires de changement de prénom et de modification de la mention du sexe à l’état civil, 10 mai 2017, n° JUSC1709389C.  

[360] CA Montpellier, 15 mars 2017, n° 16/02691.

[361] Idem.

[362] C. civ., art. 60.

[363] CNCDH, Avis sur l’identité de genre et sur le changement de la mention du sexe à l’état civil, 27 juin 2013, disponible au JORF au n° 0176 du 31 juillet 2013.

[364] Idem.

[365] Loi n° 2016-1547, 18 novembre 2016, Modernisation de la justice du XXIème siècle, NOR : JUSX1515639L.

[366] CNCDH, Avis sur l’identité de genre et sur le changement de la mention du sexe à l’état civil, 27 juin 2013, disponible au JORF au n° 0176 du 31 juillet 2013.

[367] Loi n° 2016-1547, 18 novembre 2016, Modernisation de la justice du XXIème siècle, NOR : JUSX1515639L.

[368] CNCDH, Avis sur l’identité de genre et sur le changement de la mention du sexe à l’état civil, 27 juin 2013, disponible au JORF au n° 0176 du 31 juillet 2013.

[369] Idem.

[370] Loi n° 2016-1547, 18 novembre 2016, Modernisation de la justice du XXIème siècle, NOR : JUSX1515639L.

[371] AGUADO Ali, ZDANOWICZ Ian, « L’usage du Droit dans le mouvement d’émancipation Trans », Cahiers du Genre, 2014, n° 57 pp. 77 à 94.

[372] C. civ., art. 61-6.

[373] AUFIERE Pierrette, BAROUSSE Chantal, « Des prémices de la jurisprudence aux permissions de la loi : 40 ans de pratique du transsexualisme », AJ Famille, 2016, p. 580.

[374] Idem.

[375] Loi n° 2016-1547, 18 novembre 2016, Modernisation de la justice du XXIème siècle, NOR : JUSX1515639L.

[376] CC, 17 novembre 2016, n° 2016-739 DC, Loi de modernisation de la justice du XXIème siècle.

[377] FERRIE Scarlett-May, « Quel fondement pour le changement de sexe à l’état civil ? », AJ Famille, 2016, p. 587.

[378] Idem.

[379] Idem.

[380] CNCDH, Avis sur l’identité de genre et sur le changement de la mention du sexe à l’état civil, 27 juin 2013, disponible au JORF au n° 0176 du 31 juillet 2013.

[381] Idem.

[382] CHILAND Colette, Changer de sexe : illusion et réalité, éditions Odile Jacob, 2011, p. 156.

[383] CHILAND Colette, Changer de sexe : illusion et réalité, éditions Odile Jacob, 2011, p. 158.

[384] Voir en ce sens l’émission américaine RuPaul’s Drag Race diffusée régulièrement en France.

[385] CHILAND Colette, Changer de sexe : illusion et réalité, éditions Odile Jacob, 2011, p. 157.

[386] Idem.

[387] GESTE Minima, PINE O’NOIR Catherine, « L’univers du drag expliqué par les Queens Minima et Catherine », site Le Monde.fr, 18 octobre 2019, (consulté le 22/03/2020).

[388] CHILAND Colette, Changer de sexe : illusion et réalité, éditions Odile Jacob, 2011, p. 158.

[389] CNCDH, Avis sur l’identité de genre et sur le changement de la mention du sexe à l’état civil, 27 juin 2013, disponible au JORF au n° 0176 du 31 juillet 2013.

[390] Idem.

[391] Idem.

[392] Idem.

[393] Idem.

[394] Idem.

[395] Idem.

[396] Idem.

[397] CNCDH, Avis sur l’identité de genre et sur le changement de la mention du sexe à l’état civil, 27 juin 2013, disponible au JORF au n° 0176 du 31 juillet 2013.

[398] Idem.

[399] Idem.

[400] Idem.

[401] Idem.

[402] Idem.

[403] Idem.

[404] Idem.

[405] Loi n° 2016-1547, 18 novembre 2016, Modernisation de la justice du XXIème siècle, NOR : JUSX1515639L.

[406] Cf. Annexe 1, L’entretien de Camille PRINS.

[407] Décret, n° 2019-966, 18 septembre 2019, Portant substitution du tribunal judiciaire au tribunal de grande instance et au tribunal d’instance en application de l’article 95 de la loi n° 2019-222 du 23 mars 2019 de programmation 2018-2022 et de réforme pour la justice et diverses dispositions relatives à l’organisation judiciaire et modifiant l’annexe du décret n° 2019-913 du 30 août 2019 pris en application de l’article 95 de la loi n° 2019-222 du 23 mars 2019 de programmation 2018-2022 et de réforme pour la justice, NOR : JUSB1925944D.

[408] C. pr., civ., art 1055-5.

[409] Idem.

[410] C. pr., civ., art 1055-9.

[411] C. civ., art 61-6.

[412] C. civ., art 61-7.

[413] Cf. Annexe 3, L’entretien d’Anastasia.

[414] CHILAND Colette, Changer de sexe : illusion et réalité, éditions Odile Jacob, 2011, p. 194.

[415] SIRONI Françoise, Psychologie(s) des transsexuels et des transgenres, éditions Odile Jacob, 2011, p. 192.

[416] Idem.

[417] Idem.

[418] Cf. Annexe 6, L’entretien de Soline LAURENT.

[419] Loi n° 2016-1547, 18 novembre 2016, Modernisation de la justice du XXIème siècle, NOR : JUSX1515639L.

[420] MARCHAND Jean-Baptiste, « La transparentalité : une nouvelle façon d’être parent », Dialogue, 2017, n° 216, pp. 105-117.

[421] Idem.

[422] MARCHAND Jean-Baptiste, « La transparentalité : une nouvelle façon d’être parent », Dialogue, 2017, n° 216, pp. 105-117.

[423] Idem.

[424] Idem.

[425] Idem.

[426] Loi n° 2013-404, 17 mai 2013, ouvrant le mariage aux couples de personnes de même sexe, NOR : JUSC1236338L.

[427] Idem.

[428] Voir en ce sens la chanson répondant à ce mouvement : HOSCHI, « Amour censure (vidéo sincère) », Youtube, 2 décembre 2019.

[429] Idem.

[430] CEDH, 30 novembre 2010, n° 35159/09, P. V. c/ Espagne.

[431] Idem.

[432] Idem.

[433] Idem.

[434] MARCHAND Jean-Baptiste, « La transparentalité : une nouvelle façon d’être parent », Dialogue, 2017, n° 216, pp. 105-117.

[435] Loi n° 2016-1547, 18 novembre 2016, Modernisation de la justice du XXIème siècle, NOR : JUSX1515639L.

[436] Loi n° 2013-404, 17 mai 2013, ouvrant le mariage aux couples de personnes de même sexe, NOR : JUSC1236338L.

[437] C. civ., art 143.

[438] Loi n° 2013-404, 17 mai 2013, ouvrant le mariage aux couples de personnes de même sexe, NOR : JUSC1236338L.

[439] TGI Brest, 15 décembre 2011, n° 11/00975.

[440] Idem.

[441] CA Nîmes, 7 juin 2000, n° 99/2516.

[442] CA Orléans, 24 février 2009, n° 08/00134.

[443] Loi n° 2013-404, 17 mai 2013, ouvrant le mariage aux couples de personnes de même sexe, NOR : JUSC1236338L.

[444] C. civ., art 61-8.

[445] CA Paris, 2 juillet 1998, JCP, 1999, II. 10005, note Garé.

[446] L’emploi des sigles MtF ou FtM peuvent paraître inopportun après la procédure de changement de la mention du sexe à l’état civil car les personnes sont considérées désormais comme appartenant au sexe revendiqué et non dans leur sexe attribué à la naissance aux yeux de l’Etat.

[447] CHILAND Colette, Changer de sexe : illusion et réalité, éditions Odile Jacob, 2011, p. 205.

[448] Idem.

[449] CHILAND Colette, Changer de sexe : illusion et réalité, éditions Odile Jacob, 2011, p. 207.

[450] GREEN Richard, « Transexual’s children », International Journal of transgenderism, 2 (4) in CHILAND Colette, Changer de sexe : illusion et réalité, éditions Odile Jacob, 2011, p. 302.

[451] Idem.

[452] MARCHAND Jean-Baptiste, « La transparentalité : une nouvelle façon d’être parent », Dialogue, 2017, n° 216, pp. 105-117.

[453] Loi n° 2013-404, 17 mai 2013, ouvrant le mariage aux couples de personnes de même sexe, NOR : JUSC1236338L.

[454] CC, n° 2003-484 DC, 20 novembre 2003, loi relative à la maitrise de l’immigration, au séjour des étrangers en France et à la nationalité.

[455] Idem.

[456] Loi n° 2013-404, 17 mai 2013, ouvrant le mariage aux couples de personnes de même sexe, NOR : JUSC1236338L.

[457] CEDH, 11 juillet 2002, n° 28957/95, Goodwin. c/ Royaume-Uni.

[458] Idem.

[459] Idem.

[460] CJCE, 7 janvier 2004, n° C-117/01, K. B. c/ National Health Service Pensions Agency.

[461] Idem.

[462] CA Aix-en-Provence, 12 mars 2002, D., 2003, 1528, note Cadou.

[463] Loi n° 2013-404, 17 mai 2013, ouvrant le mariage aux couples de personnes de même sexe, NOR : JUSC1236338L.

[464] MARCHAND Jean-Baptiste, « La transparentalité : une nouvelle façon d’être parent », Dialogue, 2017, n° 216, pp. 105-117.

[465] Idem.

[466] Idem.

[467] MARCHAND Jean-Baptiste, « La transparentalité : une nouvelle façon d’être parent », Dialogue, 2017, n° 216, pp. 105-117.

[468] Idem.

[469] Idem.

[470] Idem.

[471] Idem.

[472] GROSS Martine, « L’homoparentalité et la transparentalité au prisme des sciences sociales : révolution ou pluralisation des formes de parenté ? », Enfances familles génération, 2015, n° 23, pp. 1-37.

[473] MARCHAND Jean-Baptiste, « La transparentalité : une nouvelle façon d’être parent », Dialogue, 2017, n° 216, pp. 105-117.

[474] Loi n° 2016-1547, 18 novembre 2016, Modernisation de la justice du XXIème siècle, NOR : JUSX1515639L.

[475] Loi n° 2016-1547, 18 novembre 2016, Modernisation de la justice du XXIème siècle, NOR : JUSX1515639L.

[476] Idem.

[477] CNCDH, Avis sur l’identité de genre et sur le changement de la mention du sexe à l’état civil, 27 juin 2013, disponible au JORF au n° 0176 du 31 juillet 2013.

[478] Idem.

[479] Idem.

[480] Loi n° 2016-1547, 18 novembre 2016, Modernisation de la justice du XXIème siècle, NOR : JUSX1515639L.

[481] CNCDH, Avis sur l’identité de genre et sur le changement de la mention du sexe à l’état civil, 27 juin 2013, disponible au JORF au n° 0176 du 31 juillet 2013.

[482] CNCDH, Avis sur l’identité de genre et sur le changement de la mention du sexe à l’état civil, 27 juin 2013, disponible au JORF au n° 0176 du 31 juillet 2013.

[483] Loi n° 2016-1547, 18 novembre 2016, Modernisation de la justice du XXIème siècle, NOR : JUSX1515639L.

[484] Idem.

[485] PARICARD Sophie, « Une libéralisation du changement de sexe qui suscite des interrogations majeures », AJ Famille, 2016, p. 585.

[486] Idem.

[487] Loi n° 2016-1547, 18 novembre 2016, Modernisation de la justice du XXIème siècle, NOR : JUSX1515639L.

[488] PARICARD Sophie, « Une libéralisation du changement de sexe qui suscite des interrogations majeures », AJ Famille, 2016, p. 585.

[489] Loi n° 2016-1547, 18 novembre 2016, Modernisation de la justice du XXIème siècle, NOR : JUSX1515639L.

[490] AUFIERE Pierrette, BAROUSSE Chantal, « Des prémices de la jurisprudence aux permissions de la loi : 40 ans de pratique du transsexualisme », AJ Famille, 2016, p. 580.

[491] PARICARD Sophie, « Une libéralisation du changement de sexe qui suscite des interrogations majeures », AJ Famille, 2016, p. 585.

[492] Idem.

[493] PARICARD Sophie, « Une libéralisation du changement de sexe qui suscite des interrogations majeures », AJ Famille, 2016, p. 585.

[494] Anglicisme désignant littéralement des personnes étranges ou bizarres se plaçant en dehors des codes liés à l’hétérosexualité et à la binarité du genre.

[495] THOMAS Maud-Yeuse, « La controverse trans’ », Mouvements d’infos, 5 octobre 2007.

[496] Idem.

[497] Idem.

[498] Idem.

[499] Cf. Annexe 1, L’entretien de Camille PRINS.

[500] Idem.

[501] Loi n° 2016-1547, 18 novembre 2016, Modernisation de la justice du XXIème siècle, NOR : JUSX1515639L.

[502] Cf. Annexe 1, L’entretien de Camille PRINS.

[503] CHILAND Colette, Changer de sexe : illusion et réalité, éditions Odile Jacob, 2011, p. 218.

[504] Idem.

[505] BEAUBATIE Emmanuelle, RENNES Juliette (dir.), Encyclopédie critique du genre, éditions La Découverte, 2016, pp. 640 à 648.

[506] Idem.

[507] BUTLER Judith, Trouble dans le genre : le féminisme et la subversion de l’identité, éditions La Découverte, 2006, 277 p.

[508] BUTLER Judith in BEAUBATIE Emmanuelle, RENNES Juliette (dir.), Encyclopédie critique du genre, éditions La Découverte, 2016, pp. 640 à 648.

[509] Idem.

[510] Idem.

[511] Idem.

[512] Idem.

[513] CHILAND Colette, Changer de sexe : illusion et réalité, éditions Odile Jacob, 2011, p. 140.

[514] SIRONI Françoise, Psychologie(s) des transsexuels et des transgenres, éditions Odile Jacob, 2011, p. 42.

[515] SIRONI Françoise, Psychologie(s) des transsexuels et des transgenres, éditions Odile Jacob, 2011, p. 38.

[516] Idem.

[517] Idem.

[518] Idem.

[519] SIRONI Françoise, Psychologie(s) des transsexuels et des transgenres, éditions Odile Jacob, 2011, p. 39.

[520] BALDER Laura, La vérité sur la SOFECT : l’usine à transphobie, 18 décembre 2018, consulté le 27/02/2020.

[521] Idem.

[522] BALDER Laura, La vérité sur la SOFECT : l’usine à transphobie, 18 décembre 2018, consulté le 27/02/2020.

[523] Idem.

[524] Idem.

[525] Idem.

[526] Idem.

[527] Loi n° 2016-1547, 18 novembre 2016, Modernisation de la justice du XXIème siècle, NOR : JUSX1515639L.

[528] BERENI Laure (dir.), CHAUVIN Sébastien, JAUNAIT Alexandre, REVILLARD Anne, Introduction aux études sur le genre, éditions de Boeck, 2ème édition, 2015, pp. 43 à 49.

[529] BERENI Laure (dir.), CHAUVIN Sébastien, JAUNAIT Alexandre, REVILLARD Anne, Introduction aux études sur le genre, éditions de Boeck, 2ème édition, 2015, pp. 43 à 49.

[530] Idem.

[531] Loi n° 2016-1547, 18 novembre 2016, Modernisation de la justice du XXIème siècle, NOR : JUSX1515639L.

[532] Cass. 1er. Civ., n° 16-17.189, 4 mai 2017.   

[533] MORON-PUECH Benjamin, « Rejet du sexe neutre : une mutilation juridique ? », Recueil Dalloz, 2017, p. 1404.

[534] Cass. 1er. Civ., n° 16-17.189, 4 mai 2017.

[535] MORON-PUECH Benjamin, « Rejet du sexe neutre : une mutilation juridique ? », Recueil Dalloz, 2017, p. 1404.

[536] Idem.

[537] Idem.

[538] MORON-PUECH Benjamin, « Rejet du sexe neutre : une mutilation juridique ? », Recueil Dalloz, 2017, p. 1404.

[539] Cass. 1er. Civ., n° 16-17.189, 4 mai 2017.

[540] MORON-PUECH Benjamin, « Rejet du sexe neutre : une mutilation juridique ? », Recueil Dalloz, 2017, p. 1404.

[541] VAUTHIER Jean-Philippe, VIALLA François, « Hermès ou Aphrodite : puisqu’il faut choisir », Recueil Dalloz, 2017, p. 1399.

[542] Idem.

[543] AGUADO Ali, ZDANOWICZ Ian, « L’usage du Droit dans le mouvement d’émancipation Trans », Cahiers du Genre, 2014, n° 57 pp. 77 à 94.

[544] Idem.

[545] VAUTHIER Jean-Philippe, VIALLA François, « Hermès ou Aphrodite : puisqu’il faut choisir », Recueil Dalloz, 2017, p. 1399.

[546] THOMAS Maud-Yeuse, « La controverse trans’ », Mouvements d’infos, 5 octobre 2007.

[547] Idem.

[548] Idem.

[549] Idem.

[550] Idem.

[551] Idem.

[552] Cf. Annexe 6, L’entretien de Soline LAURENT.

[553] Cf. Annexe 1, L’entretien de Camille PRINS.

[554] Idem.

[555] Idem.

[556] FAUSTO-STERLING Anne, Les cinq sexes : pourquoi mâle et femelle ne sont pas suffisants, éditions Payot, 2018, 92 p.

[557] FAUSTO-STERLING Anne, Les cinq sexes : pourquoi mâle et femelle ne sont pas suffisants, éditions Payot, 2018, p. 73.

[558] FAUSTO-STERLING Anne, Les cinq sexes : pourquoi mâle et femelle ne sont pas suffisants, éditions Payot, 2018, p. 85.

[559] FAUSTO-STERLING Anne, Les cinq sexes : pourquoi mâle et femelle ne sont pas suffisants, éditions Payot, 2018, p. 92.

[560] Idem.

[561] Loi n° 2016-1547, 18 novembre 2016, Modernisation de la justice du XXIème siècle, NOR : JUSX1515639L.

[562] CHILAND Colette, Changer de sexe : illusion et réalité, éditions Odile Jacob, 2011, p. 247.

[563] Idem.

[564] CHILAND Colette, Changer de sexe : illusion et réalité, éditions Odile Jacob, 2011, p. 275.

[565] CHILAND Colette, Changer de sexe : illusion et réalité, éditions Odile Jacob, 2011, p. 248.

[566] SIRONI Françoise, Psychologie(s) des transsexuels et des transgenres, éditions Odile Jacob, 2011, p. 32.

[567] SIRONI Françoise, Psychologie(s) des transsexuels et des transgenres, éditions Odile Jacob, 2011, p. 32.

[568] SIRONI Françoise, Psychologie(s) des transsexuels et des transgenres, éditions Odile Jacob, 2011, 269 p.

[569] SIRONI Françoise, Psychologie(s) des transsexuels et des transgenres, éditions Odile Jacob, 2011, p. 32.

[570] SIRONI Françoise, Psychologie(s) des transsexuels et des transgenres, éditions Odile Jacob, 2011, p. 33.

[571] SIRONI Françoise, Psychologie(s) des transsexuels et des transgenres, éditions Odile Jacob, 2011, p. 171.

[572] SIRONI Françoise, Psychologie(s) des transsexuels et des transgenres, éditions Odile Jacob, 2011, p. 32.

[573] SIRONI Françoise, Psychologie(s) des transsexuels et des transgenres, éditions Odile Jacob, 2011, p. 33.

[574] Idem.

[575] SIRONI Françoise, Psychologie(s) des transsexuels et des transgenres, éditions Odile Jacob, 2011, pp. 83-84.

[576] SIRONI Françoise, Psychologie(s) des transsexuels et des transgenres, éditions Odile Jacob, 2011, p. 174.

[577] Idem.

[578] Idem.

[579] SIRONI Françoise, Psychologie(s) des transsexuels et des transgenres, éditions Odile Jacob, 2011, p. 175.

[580] PROKHORIS Sabine, Le Sexe prescrit : la différence sexuelle en question, éditions Aubier, 2000, p. 41.

[581] SIRONI Françoise, Psychologie(s) des transsexuels et des transgenres, éditions Odile Jacob, 2011, p. 176.

[582] SIRONI Françoise, Psychologie(s) des transsexuels et des transgenres, éditions Odile Jacob, 2011, p. 177.

[583] SIRONI Françoise, Psychologie(s) des transsexuels et des transgenres, éditions Odile Jacob, 2011, p. 183.

[584] SIRONI Françoise, Psychologie(s) des transsexuels et des transgenres, éditions Odile Jacob, 2011, p. 184.

[585] Idem.

[586] SIRONI Françoise, Psychologie(s) des transsexuels et des transgenres, éditions Odile Jacob, 2011, p. 203.

[587] Idem.

[588] Idem.

[589] Loi n° 2016-1547, 18 novembre 2016, Modernisation de la justice du XXIème siècle, NOR : JUSX1515639L.

[590] Voir en ce sens le travail de l’association Acceptess Transgenres qui lutte contre l’exclusion et les discriminations de tous types, à l’encontre des personnes dont l’identité de genre est jugée non conforme. Elle oriente son action particulièrement auprès des personnes transgenres prostituées en région parisienne.

[591] SIRONI Françoise, Psychologie(s) des transsexuels et des transgenres, éditions Odile Jacob, 2011, p. 11.

[592] PESTIEL Sébastien (dir.), SANGIN Anne-Marie, THOMAS Evelyne, Fille ou garçon : ils cachent bien leur jeu !, émission « C’est mon choix », production Réservoir Prod, 30 novembre 2016.

[593] Idem.

[594] Voir en ce sens dans le monde de la mode avec MISE AU POINT, Rencontre avec Valentina, Top-modèle transgenre, 3 avril 2017, consulté le 12/11/2019 et au cinéma avec le film de BOLLAERS Mya, MAGINEL Laurent, MICHELI Laurent (dir.), Lola vers la mer , Production Les Films du Losange, 11 décembre 2019.

[595] SIRONI Françoise, Psychologie(s) des transsexuels et des transgenres, éditions Odile Jacob, 2011, p. 19.

[596] Idem.

[597] Idem.

[598] TIPOUI YUFFY, Hyperféminisation et hypersexualisation des femmes trans, 24 avril 2020.

[599] Idem.

[600] Idem.

[601] Voir en ce sens le travail de l’association Stop Homophobie qui mène des actions concrètes pour aider et accompagner les personnes victimes d’actes LGBTphobes.